Mission

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En ville, la rumeur d’une attaque de Skaagh dans le palais avait déjà circulé. De nombreux vahnae se réfugiaient dans leurs maisons ou dans les temples dédiés aux divinités de la nature. Ils étaient tous stupéfaits et abasourdis de savoir qu’une créature du Chaos avait pu infiltrer le cœur de leur capitale malgré les puissantes anti-runes.

Sur le chemin de Tol et Ludwig, des vahnae apeurés demandaient s’ils savaient quelque chose ou si la fin du monde était proche. Les deux guerriers répondaient inlassablement qu’ils étaient pressés et n’avaient pas le temps de répondre à leurs questions. Cependant, au fond de son cœur, Tol se demandait ce pouvait faire le roi pour calmer le peuple.

En arrivant devant la tour du magicien, une foule agitée ordonnait de le voir instamment. Jouant des coudes et de leur autorité, Ludwig et Tol atteignirent la porte. Ce dernier connaissait la rune qui autorisait l’accès à la demeure du mage. En traversant les boucliers magiques, ils ressentirent un léger picotement. La clameur de la foule se tut brusquement, et ils se retrouvèrent devant un bric-à-brac de babioles magiques. Des armes couvertes de runes étaient déposées en tas sur la droite, tandis qu'à gauche des armoires débordaient d’amulettes. Un énorme squelette de dragon était suspendu au plafond, qu’un géant figé à jamais soutenait péniblement. Un fatras de parchemins magiques jonchait le sol. Tol allait appeler Fol, lorsqu’un juron retentit depuis l’arrière-salle. Les deux guerriers se rapprochèrent, et le sorcier sortit de son atelier en injuriant tous les objets qui lui tombaient sous la main. Il portait une longue robe rouge, recouverte de symboles de protection. On aurait pu croire qu'il sortait d'une étrange expérience : il avait les cheveux en bataille, de petites lunettes et des mains couvertes de runes gravées au fer rouge.

Apercevant Ludwig et Tol, il se tut brusquement. Il reposa doucement le crâne de drak sur lequel il criait. Il scruta d’un air suspicieux le premier, puis se tourna vers le second :

 - Tol-Khan, comment vas-tu?

 - Ça pourrait aller mieux. Nous avons un problème.

- Je suppose que tu viens pour les anti-runes. Elles sont parfaitement fonctionnelles. Il était impossible que ce Skaagh puisse passer. La seule possibilité est que Mirnan ait modifié la nature même du monstre, puis lui ait rendu sa forme initiale. Cela signifierait qu’il fraye avec des puissances chaotiques incroyablement puissantes. Il faut absolument l’arrêter avant qu’il n’ait assez de pouvoir pour changer notre réalité. De plus, s’il fait assez de sacrifices humains, il obtiendra un pouvoir incommensurable.

- Des sacrifices humains? demanda Ludwig.

- En effet. La magie chaotique est puissante, mais elle est dangereuse, et elle altère notre réalité. En l’utilisant trop, notre monde tel que nous le connaissons changera à jamais. Tol, vous avez été envoyé l’espionner pour déterminer à quel point Mirnan était dangereux n’est-ce pas ?

L’intéressé eut un mouvement de recul. Comment connaissait-il le motif de sa mission ? Avant le discours de la princesse, seuls le roi et cette dernière connaissaient son objectif.

Le mage reprit :

- Eh bien, quelles que soient ces fameuses informations, vous ne savez pas à quel point il est dangereux. Son passé est sombre, mais si j’en crois mes connaissances, son avenir l’est bien davantage, ainsi que le nôtre. Bref vous devez l'arrêter à tout prix.

Tol acquiesça, s’apprêta à partir, mais, se retournant vers Fol, lui dit :

- Protégez la cité.

- Ne vous inquiétez pas, tel est et sera mon rôle, à jamais. A vous de nous sauver.

Tol hocha la tête et sortit suivi par Ludwig. La foule tenta une nouvelle fois de leur tirer les vers du nez, mais ils restèrent tout aussi indifférents que la première fois.

De retour au palais, ils eurent la surprise de voir deux mérones discuter avec le roi et la princesse. Tol reconnut avec joie Fildran et Mordran, ses amis ayant forgé ses dagues. Ils portaient des tuniques vertes cousues de fil d’or. Arrivants à la taille de Tol, leur barbe était typique de leur peuple, longue et bien lisse. Des haches de lancer étaient glissées dans leur ceinture, et Fildran en avait une à double tranchant en travers de son dos. Mordran, lui, avait un marteau de guerre, à la poignée savamment forgée en filigrane d’or. Enfin, pour compléter leur panoplie, ils avaient des pistolets à poudre. Ces armes, longues à recharger, étaient cependant connues pour leur fiabilité et leur puissance destructrice. Alors qu’ils semblaient en pleine conversation avec le roi, Tol vit un drak appuyé sur un pilier.

Sa peau verte et sa grande taille étaient caractéristiques de ce peuple nomade, mais sa tenue dénotait. Il portait une légère armure de cuir, et un pantalon bouffant. De nombreux couteaux étaient enfilés dans des gaines, et un sabre dans son fourreau à la taille du drak. Habituellement, ces maîtres des plateaux de l’Est préfèrent des armes plus lourdes et contondantes. Le roi aperçut Tol et s’exclama :

- Enfin, vous voilà. Les éthérés sont déjà repartis, très inquiets. Une urgence les a rappelé à leur cité. Ils vous ont demandé de les rejoindre.

 - Ils ne nous ont pas attendu?

 - Non.

 - Et donc, nous allons devoir emprunter la route pour les rejoindre? Plusieurs jours de trajet, dans des zones dangereuses, sur une demande d'un peuple dont nous ne savons presque rien...

 - Vous semblez oublier que les éthérés n'ont pas la même notion du temps que nous. Ils ont la clé pour vaincre Mirnan, et vous connaissez la route jusqu'à leur cité.

Tol se renfrogna. Certes il connaissait ce chemin, mais c'était encore flou dans sa mémoire. Il hésita. Le trajet n'allait pas être de tout repos, mais Mirnan était une menace sur Hirgalia. Laisser une chance de s'en débarrasser définitivement n'était pas dans l'esprit de Tol. Il répondit :

 - C'est d'accord.

Le roi hocha la tête :

 - Vous n'irez bien sûr pas seul. Vous connaissez déjà vos amis mérones. Ils se sont portés volontaires pour vous accompagner. Voici Karrorogar, il s'est réfugié au château lorsque vous étiez parti, et a accepté de vous rejoindre.

Le drak hocha la tête. Tol lui répondit.

 - Et enfin Mia. Non, dit le roi, voyant Tol faire mine de protester, vous n'avez pas le choix. Vous savez comme moi qu'elle vous ouvrira de nombreuses portes. De plus, même si je lui demandais de rester ici, elle trouverait un moyen de vous suivre.

Tol se ravisa. Le roi avait raison, bien que le maître d'armes avait ses réserves.

 - Et vous m'oubliez, lâcha Ludwig. Une telle mission ne saurait se passer d'un héros!

Le roi haussa discrètement les yeux au ciel. Il soupira :

 - Je suppose que rien ne vous fera changer d'avis. Tol, une objection?

Tol secoua la tête. Un menae de la stature de Ludwig pourrait être très utile. Il s'inclina, et se dirigea vers la sortie. Il repartait déjà en mission.

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