Chapitre 30 :
Je n'étais pas morte. Si je l'avais été, je n'aurais pas mal à la tête. Puis, si je l'avais été, je n'aurais pas ouvert les yeux. Je me souvenais juste qu'on m'avait fait respirer je ne sais quel produit, puis trou noir. Cela m'avait endormi. Et cela, c'était une très, très mauvaise chose.
Je ne connaissais pas l'endroit dans lequel je me trouvais : une sorte de petite pièce plongée dans le noir. Heureusement que j'étais plus agoraphobe que claustrophobe. Le gang des Deadly Devil avait réussi à m’attraper apparemment… est-ce que Nathan était au courant ? Est-ce que quelqu'un de mon entourage était au courant ? Ils avaient dû pirater mon téléphone, ou quelque chose dans le genre, mais ce qui était sûr, c'est qu'ils m'avaient piégé, et j'étais bêtement tombée dans le panneau. Cela m'énervait. J'avais la mauvaise impression d'être shootée, comme si j'ai pris de la drogue alors que je n'en avais jamais ingurgité de ma vie. Au final, c'était sans aucun doute ce type de substance qu'ils avaient choisi pour m'endormir.
Je n'arrivais pas à réfléchir plus. Mon cerveau tournait au ralenti, voir plus du tout. Mes yeux avaient envie de se refermer à nouveau et je luttais pour les garder ouvert. J'avais froid, j'avais mal partout et je me sentais faible. Très faible, beaucoup trop faible. Je ne percevais aucunes ombres dans le noir complet de la salle. En sortirais-je un jour ? Heureusement que j'avais fait des lettres pour mes amis, ma famille et Nathan. Je n'étais vraiment plus certaine que j'allais les revoir un jour. Le mal de tête persistait de plus en plus comme un objet pointu qui rentre dedans alors que la douleur se répand un peu partout et que cela se répète pour bien te mettre chaos. Je devais peut-être avoir un traumatisme crânien en plus de la surdose de substance absorbée. C'était la totale ! J'avais vraiment dû mal à réfléchir.
Je ne savais ni depuis combien de temps je me trouvais là, ni combien de temps je m’étais endormie, ni qui m'avait enlevé. J'avais l'impression d'être une de ses victimes qui se faisaient emprisonner, violer, tuer puis débarrasser de son corps pour se séparer des preuves. Je ne savais pas ce que le gang comptait me faire. Mon gang ne m'avait pas expliquée clairement ce qu'ils voulaient réellement me faire. Alors je ne savais pas ce que j'allais advenir.
Lucas avait raison et même si je le croyais totalement j'aurais dû plus me méfier. Lui aussi était-il au courant de ce qu'il s'était passé ? Je n'avais aucun point de repère et je cessais de réfléchir car je ne comprenais rien. J'entendis des voix mais je ne percevais pas les mots exactement mais les pas s'approchaient de plus en plus de ma prison. Puis je clignotai des yeux alors qu'un filet de lumière passa légèrement lorsque la porte s'ouvrit avant qu'elle se referme. Je me rendis compte que j'étais assise, attachée à une chaise par les chevilles et les mains derrières le dos. La lampe s'alluma d'un coup et la personne qui était rentré fut aussi aveuglée que moi par cette apparition soudaine de lumières. C'était impossible pour moi de me cacher les yeux alors je clignai avant de regarder tout autour de moi, le regard hagard et peureux. Je ne fixai pas immédiatement la personne qui venait d'entrer.
La salle était grise, tout était gris : mur, porte, sol, plafond et même la chaise et les autres meubles qui comblaient le peu de vide. Je finis par regarder l'homme qui était de dos et qui cherchait quelque chose dans les tiroirs. Un blond, et malgré mon état à moitié comateux, je le reconnus : Lucas. J'ouvris la bouche pour parler mais aucun son ne sortit de ma voix. Je n'avais pas de bâillon sur la bouche, mais en réalité, c'est que je ne savais même pas quoi lui dire tellement que la situation me semblait si improbable. Donc lui aussi il était au courant de mon kidnapping... ce n'était quand même pas lui qui m'avait enlevé au moins ? Non, non, ce n'était pas possible, Lucas n'aurait pas fait cela sinon il ne m'aurait pas prévenu de ce qu'il tramait tout autour de moi. Il avait pris des risques pour pouvoir me parler, et pour tenter de me protéger. Il n'avait pas fait cela quand même ? Mes cordes vocales ou ma bouche ne voulaient définitivement pas fonctionner pour le moment. Je me sentais encore dans le flou total. Il finit par se retourner et s'approcher de moi avec un verre à la main et des cachets de l'autre. Je ne savais pas si c'était de l'angoisse ou de la peur qui m'emparaient à cet instant mais je ne prononçai toujours pas un mot.
— Laurianne, écoute, je ne peux pas rester longtemps mais promis je vais t'aider.
Il remarqua que je ne lui répondais pas et que je le regardais sûrement avec un regard qui devait faire peur. Il en déduisait que je devais être encore shootée par ce que ses compatriotes m'avaient fait respirer. Or, cela était sans aucun doute le cas. Sinon je serais en pleine possession de mes moyens. Je ne les avais clairement pas à ce moment-là.
— Je sais que tu n'avales pas les cachets mais il va falloir de forcer. Ce n’est pas de la drogue, justement ils sont censés faire effet pour dissiper au mieux l'effet de celle que l’on t'a fait respirer. Pas d'inquiétude, cela n'endommagera pas ton organisme avec le peu qu'ils t'ont donné.
Il me tendit le verre et les cachets. Je comprenais ce qu'il venait de dire, mais d'un autre côté, il y avait une partie de moi qui ne se trouvait pas ici et qui ne revenait pas encore. Je m'exécutais malgré tout avec l'aide de Lucas qui me tint le verre pour que je puisse avaler. Cela n'allait pas faire effet dans l'immédiat, mais je me sentais déjà mieux.
— Je vais te faire évader, murmura Lucas en me regardant droit dans les yeux. Nathan et tes amis vont m'aider. Sauf que je ne peux pas exécuter cela tout de suite. Ils te surveillent trop et j'ai dû batailler pour faire croire que je voulais te voir juste pour te dire que tu ferais mieux de leur répondre.
Je crois bien qu'à partir de cette dernière phrase, il m'avait définitivement perdue. Je ne comprenais plus grand-chose et je n'avais plus assez de force pour tenter de saisir ou de le lui signaler. Il connaissait les méthodes de son gang et il savait que je ne devais pas me trouver dans le meilleur des états pour, mais sans doute n'avait-il pas le temps pour repasser me l'expliquer une nouvelle fois. Est-ce que mon temps était compté à moi ?
— Mon chef va venir t'interroger quand tu iras mieux, sûrement d'ici quelques heures. On est en début d'après-midi et on va bientôt passer te donner le déjeuner. Je ne pense pas réussir à chiper ce rôle mais ce n'est pas le plus important. Ce qui compte, c'est que l'on va réussir te faire échapper. Pendant l'interrogatoire, dit toute la vérité et tout ce que tu sais, même si cela ne plaît pas à mon chef. Si tu mens, il le saura, et tu auras encore plus de problèmes que maintenant.
Je ne répondais toujours pas. Les cachets que Lucas m'avait donnés faisaient peut-être déjà effet et ils devaient être sacrément coriaces car même si cela devait m'aider à aller mieux, pour le moment, cela me mettait chaos. Lucas sentait que les ''médicaments'' faisaient effet. Avant de sombrer une nouvelle fois dans les bras de Morphée, je le sentis déposer un baiser sur mon front avant que je m'endorme pour de bons.
+++
Je ne savais pas ce que m'avait donnée Lucas lors de sa venue dont je me souvenais un peu malgré mon état déplorable, mais je me sentais vraiment bien maintenant. Je n'avais pas ma montre et je ne savais pas combien de temps j'avais encore dormis mais j'étais en forme. Mon esprit était rassemblé et je pouvais à nouveau parler. Malheureusement, cela n'empêcha pas encore plus le fait que la peur et l'angoisse montaient encore plus en moi. J'essayais de me calmer en respirant bien fort. Je tentais de récolter quelques souvenirs de ce qu'avait dit Lucas, et mon cerveau n'avait imprimé qu'une seule chose : son chef allait m'interroger. Je ne me souvenais pas s'il m'avait précisé à quel sujet exactement, mais c'était la seule phrase dont je me souvenais : « Mon chef va venir t'interroger quand tu iras mieux ». Ou alors peut-être que j'avais rêvé, il ne m'avait pas parlé mais juste donné des cachets... Que devais-je penser ?
Habituellement, j'étais loin d'être claustrophobe contrairement à Vanessa, mais être prisonnière dans un endroit aussi petit mettait tout de même mes nerfs à rude épreuve. Pas que je pouvais sentir les murs les plus proches comme s'ils allaient se rapprocher de moi, cela non, mais j'avais l'impression que j'allais finir asphyxier dans cette salle. En plus il faisait chaud, je me demandais si c’était fait exprès ou non.
Je tournai la tête dans tous les sens pour étirer mon cou pendant que j’attendais que quelqu’un vienne enfin me voir. J’essayais de bouger un peu mes doigts sans vraiment réussir à le faire à cause du lien qui gardait mes mains étroitement liées entre elles. Je ne tentais rien du côté de mes jambes qui se trouvaient beaucoup trop solidement attachées au pied de la chaise. Finalement, j’aurais peut-être dû dormir encore un peu pour ne pas mourir d’ennui lentement. Est-ce que quelqu’un allait enfin se décider à venir m’apporter à manger ? Je réfléchissais à l’optique de hurler pour rappeler mon existence mais je compris bien vite que cela pourrait me causer du tort. Ils n’allaient pas être sympathiques avec moi : ils voulaient clairement ma peau. Lucas m’avait prévenue. Ils ne seraient pas cléments avec moi.
Soudain, j’aperçus un filet de lumières et la porte s’ouvrit sur Lucas qui ramenait un plateau de nourriture. Cela ferait sans doute l’affaire. Il refermait la porte derrière lui, à clé et posa le plateau sur un plan de travail. Il s’occupa de me détacher des liens pour me laisser l’autonomie de manger. Je ne comptais rien faire, je ne savais même pas où je me situais exactement dans leur bâtiment, alors le risque était beaucoup trop élevé. Je me dégourdis les jambes avant de m’asseoir pour manger. Lucas me rejoint et s’assit à mes côtés.
— Tu ne te souviens pas de ce que j’ai dis tout à l’heure, constata Lucas doucement.
— Non, fis-je en secouant la tête. Juste que je ne sais pas qui dois m’interroger… qu’est-ce qu’on m’a donné ?
— Je ne sais pas exactement, je ne travaille pas dans le secteur de la drogue dans mon gang. Mais c’est sûrement cela qu’ils t’ont donné. Cela t’a bien assommé je l’ai vu. Cela va mieux ?
— Oui, je n’ai pas beaucoup de souvenirs de tous à l’heure, mais je me sens en forme maintenant. Comme après une bonne nuit de sommeil, méditai-je avant de lui lancer un regard.
— C’est vrai que tu as beaucoup dormis, rigola Lucas qui se détendait un peu plus même si je pouvais toujours le sentir tendu.
— Comment ça ? m’inquiétai-je en fronçant les sourcils.
— Tout doux, je sais que cela doit être horrible pour toi mais cela va aller. Les membres de mon gang t’ont enlevé après midi voir treize heures, tu t’es réveillée vers onze heures du lendemain et ce que je t’ai donné pour contrer l’effet de la drogue t’a rendormis sec jusqu’à maintenant.
— Attends… commençai-je en débutant mes calculs dans ma tête. Actuellement il est quelle heure ?
Je redoutais la réponse. Mon moral remontait un peu. Lucas y était pour quelque chose, mais cette nouvelle m’inquiétait plus qu’autre chose. J’avais beau savoir pertinemment, que les produits aspirés et ingurgités avait eu des effets sur mon organisme, je me demandais si je n’avais pas du souci à me faire pour mon état de santé malgré tout. Dormir autant était très mauvais, Raoul me le répétait souvent.
— Il est quinze heures.
Je restais sans voix alors que de la nourriture pendait de ma fourchette. Je sentais les larmes me monter aux yeux. Autant de temps écoulé… combien de choses aurais-je pu faire à la place de dormir ? Sûrement une infinité. Lucas poussa ma main pour porter ma fourchette à ma bouche et me forcer à continuer à manger. Je pouvais quand même avouer que même si j’avais eu très faim jusque-là, mon appétit fut coupé d’un coup. Lucas me regarda compatissant et appuya sa main sur mon épaule.
— Écoute, il faut que tu manges et il faut que tu tiennes.
— Pourquoi ? Pour pouvoir répondre aux questions de ton chef ?
— Pour supporter l’interrogatoire, surtout ne mens pas, il le remarquera, et le laps de temps que tu vas rester ici. Tu dois être forte. Je vais t’aider à t’évader. Avec Nathan et certains de tes potes, on va te faire sortir de là. OK ? Pour le moment ce n’est pas possible, mais quand cela sera l’heure, tu comprendras bien vite.
— Je croyais que vous ne pouviez pas vous saquez toi et Nathan…
— Ne t’inquiète pas, on est toujours capable de s’étriper. Sauf que l’on a un but commun : ton bien. Alors même si cela nous coûte, on organise ton évasion ensemble.
— Lucas… dit lui que je l’aime.
C’était la stricte vérité, mais en même temps j’hésitais à le dire face à Lucas, et finalement il me fendait le cœur lorsque je remarquais son visage se crisper et son regard se voiler un peu même s’il acquiesça. Il avait toujours des sentiments pour moi, et je comprenais que cela soit douloureux pour lui, et je m’en voulais. J’avais comme l’envie de le réconforter. Mais est-ce que c’était lui donner de faux espoir ? Ou alors il resterait persuadé que j’étais encore dans le déni ? Non, c’était faux, je n’étais pas dans le dénie… non ?
— Comment vous allez faire pour m’évader sans que personne ne le remarque ?
— Cela, ce n’est pas ton problème. Je te promets juste que dans quelque temps tu seras libre.
J’avais envie de le croire, alors je décidais de lui faire confiance. Lucas tenait à moi manifestement et il m’avait promis de tout faire pour m’aider à sortir de cette galère, alors peut-être que j’avais le droit encore d’avoir de l’espoir. Peut-être que cela serait le futur de m’enfuir grâce à lui. Je finis le repas et il dut me rattacher, et juste avant de partir il déposa un baiser sur mon front avant de m’offrir un sourire et de s’éclipser.
+++
On me signala qu’il était dix-sept heures quand une fille qui n’était pas commode me fit transférer dans une autre salle. Cela ressemblait à une salle basique, avec une table et deux chaises. On me fit asseoir sur le siège vide, en face de mon interlocuteur : le chef des Deadly Devil. Je sentais la personne dans mon dos, me surveillant, sûrement prête à me faire du mal au premier signal. Est-ce que je stressais ? Étrangement pas, je restais calme, comme si je n’en avais rien à faire. Le chef du gang n’était pas aussi charismatique que Billy ou aussi impressionnant que d’autres chefs que j’avais pu rencontrer. Sa particularité à lui : c’est de paraître menaçant. Il avec une coupe militaire et un regard noir brillant s’accordant parfaitement avec ses yeux de la même couleur. J’avais déjà envie que cela se finisse avant même que cela ait commencé.
— C’était qui Nathan pour toi ? commença-t-il d’une voix grave. Avant qu’il rentre dans son gang.
— C’était mon copain. Mon tout premier copain, déclarai-je.
— Et lorsqu’il est rentré dans le gang ?
— C’est devenu mon ex, il est parti sans aucune explication et je n’ai plus eu de nouvelles de lui.
— Triste fin pour un premier amour, commenta-t-il sans émotion. Et maintenant ?
— C’est mon petit-ami.
Il me regarda sans laisser apparaître une quelconque émotion ou satisfaction sur son visage. Je ne savais pas si j’avais fait une erreur en lui disant la vérité, mais Lucas m’avait conseillée de ne pas mentir, alors c’est ce que je faisais. Peut-être que cela pouvait me porter préjudice… il fallait que je fasse complètement confiance à Lucas sur ce coup-là. C’était son territoire, alors je n’avais pas d’autre choix que te le laisser maître de mon destin. Il connaissait tout le monde ici, il pouvait facilement les manipuler s’il le souhaitait.
— Et pendant le temps que vous n’étiez plus ensemble, tu avais des nouvelles de lui ?
— Non, aucune.
— Et as-tu eu un copain pendant vos ruptures ?
— Non, je suis restée célibataire tout du long.
Je me demandais vers où il voulait tourner l’interrogatoire, car cela m’étonnait fortement qu’il ait envie d’en savoir plus sur ma vie amoureuse. Ce n’était manifestement pas son but mais je ne voyais pas où il voulait en venir.
— T’a-t-il parlé du braquage qui a mal tourné ?
Voilà le sujet qui fâche pour tout le monde.
— Très peu.
— Que sais-tu sur cela ?
— Je sais juste que c’était une mission avec des membres de votre gang et le mien. Je sais juste que Nathan était le seul survivant mais qu’il a faillis mourir.
— Oh le pauvre… c’est vrai qu’il a faillis mourir ! Mais ce n’est pas comme s’il avait abandonné d’autres personnes qui elles sont belles et bien mortes ! hurla le chef en tapant du poing juste devant moi alors que je sursautais.
— Qu’est-ce que vous vouliez qu’il fasse ? Par la suite il a eu des problèmes avec la justice ! le défendai-je d’une voix calme.
— Mais bien-sûr, mademoiselle la princesse défend son prince charmant ! On s’en fiche que ce soit la justice qui lui tombe dessus. Nous voulons juste notre part de ce qui a été promis.
— Il m’a dit qu’il n’avait pris aucun argent.
— C’est ce qu’il t’a dit, et tu le crois et même s’il ne te l’avait pas dit c’est peut-être ce que tu penserais. Mais ce n’est pas ce que nous, nous pensons.
Il vit que je restais muette et que je ne comprenais pas grand-chose.
— Ton cher prince charmant aux yeux bleus et à la tête d’ange. Nous pensons qu’il a pris un gros du pactole qu’il cache je ne sais où pour lui tout seul. Et nous avons de bonnes raisons de croire qu’il avait fait cela. Et s’il s’avère vraiment que c’est le cas, tu peux me croire que tu seras tellement amochée que tu n’arriveras plus à parler et qu’il ne sera plus de ce monde pour tenir ta main à ton chevet.
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