Je me dirige vers Adler et me sers de ma maitrise de l'air pour monter sur son dos, lorsque la voix de ma mère m'interpelle :

- Attendez, Harmonia ! Que faites-vous ?

- Je vais à la rencontre de l'empereur du feu. Nous devons discuter. C'est le seul moyen que nous avons de trouver un terrain d'entente et négocier la paix.

- Vous ne connaissez pas votre grand-père, dit-elle en secouant la tête. Il est arrogant et hautain, je doute qu'il accepte de vous écouter.

- Je n'ai pas d'autre choix. Il faut que j'essaye.

- Je trouve aussi que cela en vaut la peine, déclare Éoline, mais laisse-nous venir avec toi. Il n'est pas prudent d'aller seule à la rencontre de l'ennemi.

Je hoche la tête. Ils grimpent tous sur le dos de l'aigle géant et ce dernier déploie ses ailes pour prendre son envol. Nous survolons les montagnes et le champ de bataille, cherchant du regard l'empereur du feu Apollon, mais ne voyons que les soldats des deux camps qui continuent à s'affronter férocement.

- Où peut-il bien être ? demandé-je.

- Il est sûrement dans le campement militaire, en train d'établir une stratégie, me répond ma mère. Cette bataille dure depuis si longtemps . . . Lui aussi doit en être lassé et cherche certainement un moyen d'en finir au plus vite.

Nous passons au-dessus des lignes ennemies, espérant trouver au bout de ces dernières leur campement, mais nos adversaires nous remarquent et leurs archers se mettent aussitôt à nous envoyer des flèches enflammées ! Heureusement, Adler est un bon acrobate aérien et il parvient à esquiver ces attaques. Nous nous cramponnons à son plumage de toutes nos forces pour éviter de tomber au cours de l'un de ses brusques, mais agiles mouvements.

Nous dépassons bientôt les soldats de l'empire du feu et aperçevons leur campement, situé quelques mètres plus loin. Notre aigle s'en approche, mais est aussitôt accueilli par deux gardes qui le menaçent de leurs lances en criant :

- Halte !

- Attendez ! leur adressé-je en levant les mains pour leur montrer que je n'ai aucune intention hostile à leur égard. Nous ne venons pas nous battre. Nous voulons seulement parler à l'empereur du feu.

- Et peux-tu nous dire pourquoi notre empereur accepterait de discuter de vous ?

- Dites-lui que sa petite-fille aimerait le rencontrer et qu'elle l'attend ici.

Les deux hommes échangent un regard, puis l'un d'eux se précipite en direction des tentes, tandis que l'autre reste là pour nous surveiller. Quelques minutes plus tard, il revient et annonce :

- Sa Majesté impériale n'accepte de recevoir que la demoiselle. Les autres doivent attendre ici.

- J'y vais ! dis-je en m'apprêtant à descendre.

- Attendez ! s'exclame le roi de l'eau en me retenant par le bras. Vous ne pouvez y aller seule. Et si c'était un piège ?

- Je ne pense pas que c'en soit un. Et puis, s'il m'arrive quoi que ce soit, vous m'entendrez crier et viendrez aussitôt à ma ressecousse. Sans compter que j'ai déjà affronté des choses bien plus redoutables qu'un homme.

- Oui, mais jamais seule, ajoute Zéphyr.

Je lui lance un regard de reproche. Il détourne aussitôt les yeux.

- Faites-moi confiance, père, lui dis-je d'une voix douce en posant une main sur la sienne. Je sais ce que je fais.

Il plonge ses yeux bleus dans les miens et me fixe intensément pendant quelques secondes. Je le sens hésitant, mais il finit par lâcher mon bras en soupirant :

- Allez-y, mais soyez prudente.

Je lui souris et descends du dos d'Adler. Le garde qui est déjà allé à la rencontre de l'empereur du feu me guide jusqu'à la plus grande des tentes, qui est d'un beau tissu pourpre. Nous y entrons et il annonce :

- La voilà, Votre Majesté.

L'endroit est meublé d'un tapis rouge, de chaises et d'une table en or, sur laquelle reposent des cartes et autres documents. Un coffre, posé sur le côté, contient bon nombre d'armes différentes. Dans la tente se trouvent quelques hommes, parmi lesquels l'empereur du feu Apollon. Il s'agit d'un grand homme roux aux yeux dorés. Il est à la fois beau, charismatique et . . . effrayant . . .

Il s'avance vers moi en disant :

- Alors, c'est vous . . . L'enfant de la princesse Oriane . . . Celle dont on dit qu'elle mettra fin à cette guerre grâce à la maitrise des éléments.

- Oui, c'est moi, lui répondé-je en prenant mon courage à deux mains.

- Il semblerait que vous avez quelque chose à me dire . . .

- Oui, je . . .

- Un instant !

Je me fige, surprise. Il poursuit :

- Je ne vous écouterai qu'une fois que vous m'aurez affronté.

- Comment ? !

- Vous m'avez bien entendu.

- Je vous en prie, ce n'est pas le moment et je ne suis pas venue pour cela . . .

- Peu importe. Je ne vous écouterai pas avant que vous ne m'ayez affronté.

Je le fixe avec des yeux écarquillés par l'incrédulité. Il ne pense donc qu'à se battre ? Que dois-je faire ? Si je l'affronte, les choses risquent de mal tourner, sans compter qu'il s'agit d'un adversaire redoutable, mais si je refuse, il ne m'écoutera jamais et je pourrai dire adieu à la paix . . .

Je prends une grande inspiration et déclare :

- C'est d'accord. J'accepte de vous affronter, mais vous devez me promettre que vous mécouterez ensuite.

- Je déciderai selon ce qui se passera . . . Suivez-moi.

Nous quittons la tente pour nous rendre sur un terrain désert. Là, nous nous faisons face. Le vent souffle, agitant nos cheveux et nos vêtements. Nous nous fixons du regard. Je sens l'appréhension et l'inquiétude monter en moi à chaque seconde. Je dois avouer avoir peur d'affronter cet homme réputé si puissant ! Seulement, le courage est justement le fait de surmonter ses peurs et je dois en faire preuve, comme le font mes parents chaque jour. Je suis la princesse du royaume de l'eau, je dois être digne de ce titre et de ma famille !

Je prends une grande inspiration et déclare :

- Je suis prête !

- Bien, dit-il simplement.

Il m'envoie ensuite une flamme que je pare avec un mur en terre. Je lui lance une pierre qu'il esquive d'un bond. Il prend une grande inspiration pendant qu'il est encore en l'air et me crache du feu ! Je me jette sur le côté et lui envoie à mon tour des flammes qu'il évite sans difficulté. Je réalise que je ne suis pas dans une posture idéale : je ne peux pas me servir de ma maitrise de l'eau puisqu'il n'y en a pas à proximité, mais en plus, je ne peux pas user de la maitrise de l'air face à l'empereur du feu. Enfin, quoiqu'il en soit, je ne dois pas me décourager. Je reste avantagée, comparée à lui car je peux encore maitriser deux éléments, contrairement à lui.

Mon adversaire créer un long fouet de feu et s'en sert pour m'attaquer ! Je dresse un mur de terre devant moi pour me protéger. Le souverain de cet empire est si rapide et puissant ! On voit qu'il a beaucoup d'expérience, contrairement à moi. Je commence à me dire que les choses vont finir par mal tourner pour moi, lorsqu'une idée me vient en tête . . .