Pinpin 2

6 minutes de lecture

CONTEXTE : L'histoire de Pinpin s'inscrit dans les breloques (Lulu et Riri), mais y'a un chapitre avant qui est pas encore écrit.
En gros, Pinpin est un détective pingouin qui enquête avec son pote Muscat (un vieux loup) sur un terrible braqueur de casino à bonbons. On n'a jamais vu le voleur, mais tous ceux qui étaient présents dans les salles de jeu au moment du larcin sont retrouvés complètement tétanisés de peur pour plusieurs jours. Un affaire bien bizarre qui traîne en longueur.
À la fin du chapitre 1, Pinpin reçoit une lettre de Féline, sa meilleure amie (et collègue détective partie en vacances), qui dit des trucs intéressants.

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LECTURE !





Salut Pinpin, c’est Féline !
Je vais vraiment super bien aujourd’hui ! J’espère que toi aussi, et que les mystérieux braquages des casinos à bonbons ne te fatiguent pas trop… Peut-être que tu as besoin de vacances ? Hé, d’ailleurs ! Tu sais quoi ? Il se trouve que je connais des trucs qui peuvent t’aider sur cette affaire ! Alors rejoins-moi à la vieille gare dès que tu peux. Et vite, hein ! Car le voleur risque de bientôt partir très loin.


Allez, à tout à l’heure ! :)


Bisous,


Féline La Fêlée.


PS : (Je me cache dans une boîte à lettres pour éviter d’être repérée).


Le souffle chaud des locomotives bousculait les imperméables au bleu grave. Que de visages sinistres sur ces quais… Que de regards terrés dans l’ombre des képis ! Les cris des trains joignaient ceux des usines lointaines ; aucun policier n’osait de mot. Des pions laissés en échec sur le marbre, éparpillés, telle une horde d'épouvantails plantée dans la houle des vapeurs. Même Pinpin avait perdu son sourire. Son bec entrouvert d’effroi ; les bras abandonnés, pendus au-dessus d’une sucette à demi déballée dans un caniveau : Goût cerise du grand nord.


Qu’avaient-ils mal fait ?


Où était l’erreur ? Où, bon sang ? Où avaient-ils échoué ? Pinpin frissonna. Le vent tiède agitait sa cravate, fouettait ses petites jambes à coups de papiers envolés. Une silhouette au chapeau blanc, solitaire, vacillante entre vapeurs et pensées :


Le plan avait pourtant semblé parfait... La lettre de Féline reçue, tous les commissariats de Ferblanc avaient vomi leurs hordes de fourgons noirs ; à toute allure vers la vieille gare aux toits d'ardoise ! Matraques fendant l’air, et cœurs battant poitrine ; revolvers brillant sous l'aube et bottines claquant flaques ; l’armée des capes s'était engouffrée avide dans le hall, sur les traces du terrible voleur de bonbons ! Le secteur avait été bouclé. Les toits, surveillés. Le ciel, balayé de projecteurs ! La nuit étendait ses doigts sous l’œil somnolent de la grande horloge ; personne n’avait osé fermer une paupière. Ils n’avaient qu’à avancer. Menottes prêtes à mordre, tintantes au fur des faufilades entre piliers, de case en case, contre le vent de lettres froissées ; ça craquetait sous les pas, toutes ces enveloppes coincées entre les semelles et la pluie. Oui ! Cette fois-ci aurait dû être la bonne. C’était ici, sur ces quais endormis, qu’aurait dû se conclure la mystérieuse affaire des braquages de casinos ! Et pourtant…


Hé, Féline. T’es là ?


Quelque chose d’inconcevable était arrivé.


Féline ?


Quelque chose, esquissé par des murmures glissant sans réponse sur le marbre désert du hall.


Et Pinpin perdit son sourire, oui… Lâchant ce qu’il dégainait : goût cerise du grand n… mais la pluie avait arraché à l’emballage ses lettres. De joyeuses calligraphies fondues en spirales dans la bave d’un caniveau. L'eau en était bleue d’encre, comme la plupart des flaques qui léchaient les timbres et les papiers.

La plupart...


Féline…


Car, celle-ci. Cette flaque. Elle était totalement rouge.

Rouge et noyée d'enveloppes échappées.


— Pas un train ne partira, inspecteur Muscat.


— Az a été appelé, inspecteur.


— Bien, bien…


Le vieux loup sortit une cigarette, évitant du regard les lettres entachées de violence. Les paupières lourdes ; le pelage, gris de temps, de peur, aussi : ce ruban rose gisant sur le sol n’était qu’une énième péripétie pour ses yeux et ces rues crevées de plombs…

Vivement la fin de service.

Il enjamba d’un pas las une porte de boîte à lettres ; un parapluie hanté de tabac abrita Pinpin :


— Bon… Le voleur de bonbons l’a repérée. Elle a dû faire un bruit, ou il l’a vue dès le début, ou… autre chose, je sais pas quoi. Bref, il a défoncé sa cachette ; un Quatre de Cœur a trouvé un pied de biche bien amoché pas loin, il est en train de l'enregistrer dans l'affaire, mais ça donne pas d’indice particulier, à part le fait que le voleur y est allé très fort sur la porte.


Une bouffée de tabac, et d’autres mots jaillirent enfumés hors de la gueule en gris :


— Notre gars a donc pulvérisé la boîte à lettres et… Bon… On a découvert des impacts de tir. Trois. Deux à l’intérieur et un dernier sur ce mur, là ; il y en trouvera peut-être d’autres plus tard. À chaque fois on a du 8mm, plomb, fabrication ancienne, guerre du Midi, certainement un modèle Arlequine des tranchées ; c’est pas à nous, ça…


Pas à nous…


Plus d’excuse avec ce parapluie ; le pingouin cacha son regard dans son chapeau.

Muscat poursuivit :


— Elle a été touchée, vu les taches. On sait pas où, mais c’était pas assez pour l’empêcher de se défendre. Elle a dû le désarmer car il y a des traces de lutte, ici, là, là et là-bas, près du quai numéro cinq. On n'a pas encore retrouvé l’arme. Vous l’avez pas retrouvée, hein ?


— Non, inspecteur !


— Regardez sous les wagons ! Bon… Après tout ce foutoir, quelqu’un à rampé jusqu’ici ; sûrement elle (le ruban laisse penser ça), et… Voilà. C’est tout ce qu’on sait. La pluie a effacé la suite de l’histoire.


La suite de l’histoire.


Puis les mots s’effacèrent, écho par écho dans le hall. Place aux hurlées des usines. Place aux tics-tacs des rails ! Que cause la ville en soufflant ses papiers sur le marbre humide. L'aria de l'acier, le frisson des vitraux ; les râles des pistons épuisés. Un soupir. Le vieux loup jeta un regard aiguisé au pingouin :


Mais on connaît tous la suite de l’histoire.


… avant de refaire crépiter sa cigarette.


— Non, je suis pas d’accord, rouspéta Pinpin, relevant son chapeau blanc, on connaît pas la suite, car on a pas retrouvé Féline. Et si on l’a pas retrouvée, c’est que le voleur n’a pas réussi à lui faire du mal. Ou… Ou alors ça veut dire qu'elle a fabriqué une nouvelle cachette !


— Ou il a planqué la fin de son travail.


Fin de mégot. Le vétéran s’éloigna, voûté sous son parapluie ruisselant :


— Je rentre voir Az au bercail. Y'a pas mal de pain sur la planche. Tu fais attention à toi, d'accord ?


— C'est une détective maline. Elle a dû prévoir son coup en préparant de super astuces ! Oui. C’est ça ! Un plan de secours au cas où le braqueur des casinos à bonbons la repérerait. Comme… Comme un sac de poudre d’escampette ! Ou… Un déguisement d’hyper-camouflage !


— Pinpin…


— Une botte secrète ? Elle a tapé le braqueur des casinos, alors il a détalé et elle s'est lancée à sa poursuite sur les rails ! Partie sur des sentiers bizarres...


— Pinpin !


Un hoquet. Le pingouin plongea ses ailes dans ses poches trempées ; ses yeux, brillant sous l’éclat orange des réverbères.


— Un sac de poudre d’escampette, tu dis ? murmura le loup par-dessus son épaule, un déguisement d’hyper-camouflage ? Une botte secrète pour casser les genoux des andouilles… Oui, c’est vrai… Cette coquine aurait pu faire tout ça. Elle l’a déjà fait. Alors pourquoi pas maintenant, hein ? Pourquoi pas une ruse comme les autres fois ? Il ne s’agit pas des Polissons Rouges, après tout. Ni de Guizmo ou du Gang des 4, non ! Là, c’est juste un braqueur de casino qui fait peur. Très peur… À des salles entières… … Un voile de soie anti-terreur. Voici, Pinpin, sa combine pour cette fois. Notre copine avait un plan de secours bien à elle, en vérité. Encore une sorte de trafic au cas où notre gars la pincerait ; mais…


Mais qu’est-ce que l’astuce face aux balles ?


Les yeux chutèrent dans l’eau bleue. Goût cer

Puis décollèrent ! Écarquillés d’espoirs fous !


— Eh bah, elle a apporté un boucl…


— Pinpin.


Une bourrasque, aiguë entre les fêlures des vitraux.


« Je sais pas si Féline a su s’en sortir, cette fois-ci. »


L’ombre grise s'effaça dans la brume ferroviaire.

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