Chapitre 10, partie 2 :

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Will Marx :

Un grincement provenant de l'intérieur de la maison attire mon attention. Je me retourne et aperçois la silhouette tremblante de mon trésor au pas de sa chambre. Il semble perdu et effrayé, ses cheveux ébouriffés et ses paupières gonflées dues à ses larmes le rendent encore plus malheureux. Je me précipite dans sa direction sans prendre la peine de fermer la porte derrière moi. Je constate qu'il pleure encore lorsque je m'immobilise face à lui. Je l'attire dans mes bras – plus encore parce que ce n'est pas assez – je plaque mes paumes sur l'arrière de ses cuisses et le hisse dans mes bras. Ses jambes s'enroulent naturellement autour de mes hanches et ses yeux se soudent aux miens. Sa peau brûlante rencontre la mienne glacée et mon corps frémit.

— J'ai cru que... je pensais que tu étais parti, sanglote-t-il.

Mon pauvre cœur se brise davantage. Il est décidément malmené ce soir.

— Jamais. Je suis là. Je serai toujours là.

— J'allais faire une connerie, Will. Elle était dans ma main, la lame. J'allais... j'allais le faire puis j'ai entendu ta voix.

Bon sang...

Je ferme les yeux en apposant mon front contre le sien. Bien que ma détresse m'oppresse et que l'angoisse obstrue ma gorge, je me fais violence pour ne pas laisser quelques perles salées m'échapper.

— J'avais simplement besoin de respirer, le rassuré-je près de ses lèvres.

— C'est ma faute ? Je t'étouffe ? panique-t-il.

— Pas du tout. Si je pouvais, je ne passerais plus une seule seconde loin de toi. Ça n'a rien à voir, crois-moi. J'avais seulement très chaud et... je n'arrivais pas à dormir.

— Mais tu es gelé maintenant.

— Et toi, fiévreux.

— C'était qui au téléphone ? détourne-t-il en fuyant mon regard.

— Ma mère s'est aperçue que je n'étais pas à la maison.

— Tu vas avoir des problèmes à cause de moi ?

— Ne t'inquiète pas, si je rentre avant mon père tout se passera bien.

Angelo resserre ses cuisses autour de mes hanches et plaque son torse contre ma poitrine. Son regard dévie par-dessus mon épaule et son visage s'adoucit.

— Merci, souffle-t-il, j'allais le...

Je pose ma bouche sur la sienne pour le faire taire.

— Je sais, mais ce n'est plus la peine maintenant. Je n'ai fait que ranger le salon, ce n'est pas grand-chose.

— Merci, répète-t-il en mordillant sa lèvre inférieure.

— Pas pour si peu, je ne suis pas là uniquement pour les câlins.

— Je n'ai besoin de rien d'autre. Je les aime et ils m'aident à respirer.

— Hum... moi aussi.

Ses yeux restent humides, ses cils brillent sous la lumière tamisée du séjour. J'embrasse chacune de ses larmes tandis qu'il frissonne et gigote dans mes bras, chatouillé par mes assauts. Je souris contre sa peau.

— Tu sais, je n'aurais pas résisté si tu étais parti. Je n'aurais pas supporté que tu t'en ailles, couine-t-il en cachant sa tête dans le creux de mon cou.

Je reste silencieux mais part fermer la porte d'entrée qui a rafraîchi la pièce. Sans perdre une seconde de plus, je me rends dans sa chambre alors qu'il s'accroche à mes épaules. Une plainte gutturale passe mes lèvres quand je constate qu'effectivement une lame de rasoir est posée sur la couverture en cuir de son carnet. Je retiens Angelo d'un bras pour me débarrasser de son arme en la balançant à travers la pièce. Une fois hors de ma vue, je m'installe sur le matelas en gardant son corps contre le mien. Le dos contre la tête de lit, ma bouche retrouve la sienne dans un geste désespéré. Je ressens le besoin de son contact, l'envie de lui rappeler pour la énième fois que je ne compte pas m'en aller.

Ce revirement de situation est étrange et légèrement dépaysant. Il y a quelques semaines, j'étais près à m'agenouiller face à lui pour qu'il ne me rejette pas. Désormais, je dois faire mon possible pour qu'il assimile que je n'ai pas pour but de m'éloigner et qu'il me rend heureux malgré ses craintes et ses faiblesses.

Angelo accepte mon baiser et gémit doucement lorsque ma langue titille ses lèvres. J'ignore où poser mes mains. Je souhaite parcourir sa peau qui frissonne sous mes doigts, jusqu'à connaître par cœur chacune de ses cicatrices, si toutefois ce n'est pas déjà le cas. Alors, mes paumes glissent sur son corps, caressent son dos, ses épaules et viennent se frayer un chemin sur son torse. Puis, elles redescendent sur ses cuisses qu'il serre davantage autour de mes hanches.

Lentement, presque timidement, il se met à onduler sur mon bassin. Son érection effleure la mienne et recouvre mon épidermes d'agréables picotements. Si j'avais froid il y a encore quelques minutes, je suis maintenant brûlant, près à surchauffer. Il tire mes cheveux alors que j'empoigne sa taille pour guider son mouvement de balancier. Je suis à deux doigts de la rupture, bordel, je vais succomber suite à une combustion spontanée. Malgré son désir, je sans toujours l'humidité de ses larmes se déverser sur mon visage.

Que dois-je faire pour qu'elles cessent ? Bon sang ! C'est insoutenable.

Je recule de quelques centimètres pour croiser son regard. Lorsqu'il pleure, ses yeux semblent plus clairs. Le brun de ses iris devient mordoré. C'est à couper le souffle, absolument magnifique et tout autant déstabilisant.

— Pourquoi ça ne s'arrête pas ? m'enquiers-je en un murmure.

— Je ne sais pas, j'aimerais pourtant...

— C'est encore de la tristesse ?

— Je... non, je crois que j'ai peur.

— Dis-moi, qu'est-ce qui t'effraie ?

— Toi...

Je fronce les sourcils en éloignant mon visage du sien. Je refuse de lui faire peur, ce n'est pas ce que je cherche. Peut-être ai-je mal agi ? Ce n'était probablement pas le moment pour un tel rapprochement, pourtant je le sens, son désir qui se dresse contre le mien.

Je tente de le faire basculer sur le matelas mais il s'accroche à moi, l'air paniqué.

— Putain, qu'est-ce que tu fais ? se plaint-il.

— Je te fais peur, alors je mets de la distance.

Il incline la tête et semble réfléchir, jusqu'à ce qu'une faible lueur illumine ses yeux durant une seconde à peine.

— On s'est mal compris, chuchote-t-il, ce n'est pas ce que j'ai voulu sous-entendre. J'ai peur, oui, mais seulement de te perdre et puis aussi parce que j'ai affreusement envie de toi.

Ses joues qui rougissent délicatement font battre mon cœur. Il est si différent quand il s'égare dans l'ombre de son esprit que j'ai parfois l'impression de faire face à plusieurs personnes. J'aime chacune de ses facettes avec la même intensité.

Rassuré, je laisse glisser mes doigts sous l'élastique de son caleçon. J'analyse ses réactions, me délectant de ses lèvres qui s'entrouvrent lorsqu'il soupire. Je referme ma paume autour de son plaisir. Enhardi par les frissons qui recouvrent sa peau, j'entame un lent va-et-vient qui le fait trembler.

— Je te désire aussi, susurré-je en le caressant avec légèrement plus d'ardeur.

Il pose son front contre mes lèvres en gémissant. Sa voix quand il prend du plaisir me rend fébrile. Je pourrais passer des heures à l'écouter, le même temps à le caresser. Ma seconde main libère mon membre tendu et douloureux qui s'érige entre nous. Une idée subite et un peu folle me traverse l'esprit. Je le délaisse un instant et enserre nos membres en une poigne calculée.

Il relève brusquement la tête, un éclair surgit dans ses yeux puis son regard ne quitte pas ma main qui nous donne du plaisir. Je retiens ma respiration, le cœur battant. Sentir son sexe palpiter contre le mien me fait tourner la tête. Je l'enlace de mon bras libre alors que nos gémissement s'élèvent et se mêlent. La lèvres coincée entre ses dents, Angelo referment ses doigts autour des miens et suit chacun de mes mouvements du poignet.

— Pourquoi tu m'aimes ? murmure-t-il alors que nos membres coulissent avec ardeur dans ma paume.

Pris de court, je fronce les sourcils quand il croise mon regard.

— Quoi ? haleté-je.

— Réponds-moi. Trois bonnes raisons, souffle-t-il, les paupières mi-closes.

Il cherche à m'achever. Tout chez lui me déstabilise, entre les larmes qui roulent sur ses joues, sa peau rougie par le plaisir, les tremblements de son corps et le son de sa voix ; puis, ses soupirs et son assurance soudaine en opposition avec la peur qu'il a ressenti plus tôt. Il va causer ma perte et j'en ai parfaitement conscience.

— Je peux t'en citer des dizaines.

— Ça fonctionne toujours par trois entre nous.

J'essaie de sourire, mais c'est une grimace qui déforme mon visage quand un mouvement brusque de son bassin me surprend.

— Parce que... avec toi je n'ai pas besoin de faire semblant d'être quelqu'un d'autre.

Il m'embrasse lentement, puis s'écarte pour écouter mes propos.

— Ton sourire, bien que trop rare, suffit à faire battre mon cœur d'un rythme effréné.

Il opine, le visage empreint de désir.

— Lorsque tu me touches, j'ai la sensation de planer sans quitter le sol.

Son membre pulse contre le mien et son plaisir jaillit à l'instant où je termine ma phrase. Ses yeux se révulsent, sa tête bascule vers l'arrière et ses ongles s'enfoncent dans mes bras. Son râle s'élève dans la pièce et me fait perdre pied. Il est si beau que la jouissance me transperce en quelques secondes. Ma semence se mêle à la sienne et s'étalent toutes deux sur nos peaux moites. Mes membres se contractent alors que je gémis bruyamment.

Lorsque la tempête passe, son corps se relâche. Je le stabilise en le ramenant contre mon torse. Il tremble, secoué par un déferlement de larmes et merde, quelques-unes m'échappent également, perturbé par l'intensité de mon orgasme qui a absolument tout dévasté dans ma tête et mon cœur. Nous prenons le temps de nous calmer, de retrouver une respiration modérée alors que je câline son dos nu de la pulpe de mes doigts.

— Nous devons avoir l'air de deux fous, souffle-t-il après un temps.

— L'un de nous l'est réellement, le souci c'est que je ne sais plus qui est qui.

Il pouffe de rire et ce son me donne envie de mourir de bonheur. Ses sanglots se sont enfin taris, laissant place à une expression plus calme et moins torturée.

— Je pourrais immoler le monde entier pour un seul de tes éclats de rire, lui avoué-je avec une sincérité dévorante.

— Et je pourrais en faire autant pour que tu ne cesses jamais d'être avec moi.

— Je mourrai de chagrin le jour où tu m'abandonneras.

— Pourquoi sembles-tu si sûr que ce jour arrivera ?

— Tu m'as déjà quitté.

— C'était la pire et pourtant la plus raisonnable erreur de ma vie.

— J'aime la déraison quand il s'agit de toi.

— Alors reste, ne pars pas même si je t'oblige encore à le faire, mais n'oublies jamais la promesse que tu m'as faite. Protège-toi de moi à chaque instant.

— Entendu, trésor.

Nous scellons nos paroles par un lent baiser dégoulinant d'amour.

Jamais je ne te quitterai. Mon éternel. Fais de moi un damné, martyrise-moi, bats-moi, achève-moi si c'est ce que tu désires mais, mon cœur, jamais je ne partirai. Tu as ancré tes griffes au plus profond de mon âme et, si ton obscurité efface ma lumière, je resterai parce que je t'aime comme le malade mental que tu crois être.

— Quand j'étais enfant et que je me sentais triste, dis-je après un long silence, ma mère me rejoignait dans mon lit et fredonnait une chanson, toujours la même, jusqu'à ce que sa voix me calme et m'aide à oublier la cause de mon malaise.

— Ça fonctionnait à chaque fois ? m'interroge Angelo en dissimulant son visage dans mon cou.

— Toujours, mais parfois, elle devait la répéter dix fois avant que je trouve un minimum de sérénité.

— Tu crois que tu as hérité du même pouvoir qu'elle ?

— Je ne sais pas. Je n'ai jamais essayé avec personne.

— Je veux l'entendre, cette fameuse chanson. J'adore t'écouter parler, plus encore que de me déchirer la peau.

J'expire lentement pour effacer l'image horrible de ses blessures qui est apparue sous mes yeux, puis ouvre la bouche en priant pour que la rengaine de ma mère puisse l'apaiser comme elle le faisait pour moi dans le passé.

À la claire fontaine m'en allant promener, j'ai trouvé l'eau si belle...

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