Chapitre 19, partie 1 :
Will Marx :
Je revis.
Enfin, je respire.
Je me démène, donne tout ce que j'ai sur ce terrain qui m'a énormément manqué.
J'ai raté un tas d'entraînements suite aux derniers évènements mais Murray à tout de même accepté de me laisser jouer ce soir. J'étais si heureux que j'aurais pu l'embrasser pour le remercier. J'avais besoin de me recentrer, d'être emporté par l'élan d'un match, ressentir l'euphorie d'une victoire, en supposant que l'on gagne mais j'ai bon espoir. Judas est le nouveau capitaine des Lions et j'ai bien l'impression qu'il excelle dans ce rôle. Mes coéquipiers sont en formes et nous jouons collectivement. C'est l'atout premier pour atteindre nos objectifs. Carter est absent et je dois bien admettre que ça m'arrange. Je ne l'ai pas croisé depuis qu'Angelo m'a confié la vérité sur ce fameux jour sanglant. En réalité, je ne l'ai pas vu depuis des semaines, en y repensant la dernière fois était avant la tentative de suicide de mon trésor. J'ignore s'il me fuit mais je finirai par le trouver et ensuite, il devra ramper pour se déplacer.
La mi-temps ne va pas tarder à être sonnée, pourtant je pourrais continuer de jouer jusqu'à la fin sans avoir besoin de m'arrêter. Je me sens à ma place, dans mon élément et c'est foutrement revigorant.
Dans les haut-parleurs, ce sont les voix de Rose et Angelo qui résonnent pour commenter l'avancée du match. C'est probablement ce qui me motive le plus, de savoir que mon copain m'observe et détaille mes moindres faits et gestes avec intérêt. Je me sens puissant lorsqu'il est là. C'est la deuxième fois qu'il assiste à un match des Lions depuis que nous sommes ensemble, mais la première qu'il est ici de son plein gré. La fois précédente, il avait été contraint d'être présent pour un article à rédiger avec un type de sa classe qu'il n'apprécie absolument pas. C'était peu de temps après notre retour en ville, la semaine qui a suivie la soirée désastreuse que nous avions passé chez Pietro et durant laquelle la vérité sur notre relation a éclatée. Ce soir, bien qu'il ne soit pas retourné au lycée, son professeur l'a autorisé à commenter ce match. Il connait la situation pour être venu lui rendre visite à l'hôpital et il faut l'admettre, même si Angelo déteste ce qu'il fait, il est très doué dans le domaine. Noël n'a donc pas hésité à lui donner le micro.
Je fixe le ballon, tout en écoutant les commentaires qui résonnent dans les haut-parleurs. Ça me fait sourire, Angelo est déchaîné. J'évalue la distance qu'il y a entre la cage et moi, le nombre d'adversaires qu'il y a autour et les ouvertures qui se présentent afin que je puisse tirer. Je constate que Pietro et Jordan font barrage alors je ne réfléchis pas plus longtemps avant de m'élancer. Je prends l'élan qu'il me faut et shoote le ballon avec force.
" Marx se rue, l'air déterminé et... il marque ! Oui ! Bravo, mon amour ! Oh... pardon... c'est l'émotion. "
Les hurlements des supporters m'animent, mais le petit rire gêné d'Angelo m'amuse. C'est un réel plaisir de l'entendre lorsque je joue. Mes coéquipiers me sautent dessus en me félicitant. C'est le deuxième but que l'on marque depuis le début du match, le premier étant mis par Valentin Corben. L'équipe adverse a du mal à suivre le rythme, ça nous galvanise davantage.
Roselyne annonce la pause et avant de rejoindre les vestiaires avec mon équipe, je me précipite vers le pupitre qu'occupent les deux animateurs. J'attrape la main de mon trésor qui me regarde avec des yeux brillants de fierté. Je l'attire à l'écart pour le serrer dans mes bras, heureux de respirer son odeur qui m'enivre immédiatement.
— Tu es transpirant, se plaint-il en riant.
— Ne me fais pas croire que ça te gêne.
— C'est vrai, t'es sexy avec tes cheveux humides et ta peau luisante.
Je ris alors qu'il se dresse sur la pointe des pieds pour trouver mes lèvres. Je l'embrasse rapidement mais avec avidité. Lorsqu'il s'éloigne, je le trouve plus beau que jamais.
— Ce but était incroyable. Tu es incroyable.
— Hum, c'est ce que j'ai cru comprendre, chuchoté-je contre sa joue.
— Ouais... c'est sorti tout seul.
— Vous êtes choupinets tous les deux, mais Marx, bouge-toi le cul dans les vestiaires. Maintenant ! gronde la voix ferme de Murray.
Angelo se racle la gorge et recule de quelques pas.
— Bien, coach. À plus, trésor, lâché-je avant de courir rejoindre les autres.
Après un débriefing rapide, Murray nous offre des propos encourageants et le match reprend. La victoire nous revient et avec elle s'élèvent des cris de satisfaction. Un large sourire sur les lèvres, je rejoins mon petit-ami et mes parents qui attendent dans les gradins. Une discussion semble aller bon train mais le visage d'Angelo m'interpelle. Ses traits sont tirés, ses sourcils froncés et la bonne humeur qui l'habitait paraît s'être volatilisée. Je l'enlace afin de coller son dos contre mon torse.
— Qu'est-ce qui ne va pas, trésor ? m'enquiers-je à son oreille.
Il se tend légèrement, son corps frissonne quand un courant d'air frais nous surprend.
— Tu as parfaitement jouer, fils ! me félicite mon père.
Je le remercie en souriant alors que mes coéquipiers nous rejoignent.
— On va fêter la victoire chez Rivierra, nous informe Judas, vous venez ?
Angelo se crispe davantage, je comprends ainsi qu'il est temps pour nous de rentrer.
— Allez, Faucon, on va picoler ça va être cool.
Ma mère dévisage mon meilleur ami qui s'empresse de rectifier :
— Pas de panique, m'dame Marx ! Vous nous connaissez, on est raisonnable.
— C'est bien le fait de vous connaître qui m'inquiète, lâche-t-elle en fronçant les sourcils.
— Ne l'écoutez pas madame. Pietro dit toujours n'importe quoi, peste Bloom en lui assénant une tape violente derrière la tête.
— Tu vas te prendre mon pied au cul, toi !
— Je vais te massacrer, mon pote.
Je lève les yeux au ciel en ricanant. Ils sont hilarants quand ils s'y mettent.
— Alors, vous venez ? insiste mon meilleur ami. DeNil, t'es d'accord ? Pas d'alcool pour toi, ne t'inquiète pas, on le sait.
Angelo ne répond pas mais lève le menton dans ma direction. Il m'interroge silencieusement, me demande en un regard si je souhaite participer à leur petite fête improvisée.
— Ce n'est pas un problème si tu veux rentrer, le rassuré-je en posant un baiser sur sa joue.
— Tu peux y aller. Je vais partir avec tes parents et je t'attendrai dans ta chambre.
Mes mains sur ses hanches l'obligent à me faire face. Son teint est blafard et ses sourcils ne se sont pas défroncés une seule seconde depuis que je l'ai rejoint.
— Non, soufflé-je près de ses lèvres. Soit on y va ensemble, soit on rentre à la maison, mais je n'irai nulle part sans toi.
— Je n'ai pas vraiment envie, avoue-t-il en baissant la tête.
J'aquiesce, satisfait qu'il ait été honnête et pivote vers mes amis.
— Une prochaine fois, les gars, dis-je surffisament fort pour qu'ils m'entendent par-dessus leur dispute puérile.
— Oh non ! se lamente Pietro. Ça fait des siècles que nous n'avons pas passé une soirée ensemble.
— Je serai là la prochaine fois, promis.
— Ouais, on en reparlera, râle Judas.
Je hausse les épaules, un sourire penaud sur les lèvres.
— L'amour, mon faucon, c'est la meilleure et la pire chose qui peut arriver à un homme.
Angelo reste immobile, la tête cachée dans le creux de mon cou. Il me serre si puissamment que ses ongles s'enfoncent dans mon dos.
— On se voit plus tard, concède Pietro en posant un baiser bruyant sur ma joue. Je t'aime, même si tu me casses les burnes à toujours te défiler.
Il s'approche finalement d'Angelo puis l'incite à relever la tête. Il se laisse faire, non sans émettre des râles de mécontentement alors que mon meilleur ami embrasse son front et ébouriffe ses cheveux.
— T'es responsable de ça, gueule d'ange. C'est de ta faute si je ne peux plus me bourrer la gueule avec mon frère. Petit con !
Angelo continue de protester mais Rivierra ricane en déposant un second baiser sur son nez.
— Allez, cassez-vous bande de crétins.
— Je vais dire à Gabriel de refaire ton éducation ! gronde mon père en roulant des yeux.
— Mon paternel n'est jamais là, si vous pouvez faire en sorte qu'il rentre de temps en temps ce serait top.
Mon ami enlace mes parents puis rebrousse chemin en beuglant comme un abruti.
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