- Je ne m’attendais à vous recevoir si tôt, dit Déianara.

- Nous ne voulions nous égarer dans un endroit que nous ne connaissons, dit Alfirin. Je me nomme Katarina Etrya, je suis le scribe du conseiller.

- Vous êtes sans aucun doute le conseiller,dit Déianara à Naranwe.

- En effet, dit l’àlfar. Mon nom est Hyacinthe Magganon.

- Je suis Déianara, la fille du roi de la cité de Calydon, dit la jeune femme. Je serais l’un de vos hôtes durant ces quelques jours. Je vous accompagne dès à présent dans la salle de séjour pour le banquet.

Lorsqu’ils furent dans la pièce moyenne, ils virent des tables aménagées ainsi que plusieurs chaises en velours. Des plats consistants étaient prêts tels que de grandes assiettes de viande recouvertes d’une sauce rosée avec des légumes, du poisson, des coupoles de fruits et des galettes de miel. En remarquant le breuvage qui n’était qu’autre que du vin, Argos pensa à ses compagnons de voyage qui ne se désaltéraient seulement avec de l’eau.

- Je vais informer mon époux de votre présence ainsi qu'à Kyril Edéis, dit Déianara. Vous pouvez vous assoir à la table centrale.

- Nous avons été suivis par une femme , dit Naranwe en voyant l’hôte s’éloigner.

- Une femme dis tu ? demande Argos.

- En effet, dit Naranwe. Le plus étrange, c’est qu’elle en capacité de dissimuler son apparence. Nous savons tous que seuls les àlfars et les drows ont cette faculté.

- Que cela signifie-t-il ? demande Argos.

- Nous ne pouvons faire de supposition, dit Alfirin. Mais d’après ce que nous savons, il n’y a à ce jour qu’une divinité qui aurait pu interagir avec ce peuple pour pouvoir créer la toxine. Nous devons trouver l’antidote avec prudence.

À la suite de ses paroles, le jeune dieu ne sut que penser. Il décida de rester muet, baissa les yeux. Voyant les hoplites arriver à la suite des frères de Déianara, il demanda à Alfirin et Naranwe s’ils souhaitaient s’assoir. Ils acceptèrent sa proposition, s’avancèrent en direction de la table centrale. Lorsqu’ils furent attablés, les soldats prirent place puis ce fut au tour des deux commandants. Quand aux hôtes, ils entrèrent dans la salle avec Zéus, s’approchèrent des convives. Au moment où les conversations cessèrent, l’hôte se leva.

- Chers soldats, dit Déianara. En ce banquet organisé en votre honneur, la gloire revient à vous. Vous qui avez failli périr dans les flammes de la guerre, vous qui avez accordé votre âme à la Grèce, vous êtes les héros de la cité de Calydon.

- Fierté, distinction et gloire ! dirent les hoplites.

À l’instant où ils prononcèrent ces mots, Argos aperçut les hoplites mettre leur main droite sur le côté gauche et put percevoir la force et le courage.

- Le moment est venu de vous rassasier afin de revenir victorieux de vos prochaines victoires, reprit Déianara.

En signe de réponse, les soldats acquiescèrent d’une voix semblable puis la jeune femme s’assit de nouveau, commença une conversation avec Héraklès.

- D’après ce que je vois, nous avons d’autres convives, dit alors Méléagre à sa sœur.

- Permets-moi de te présenter le conseiller de Kyril Edéis et le scribe, dit Déianara en montrant Naranwe et Alfirin. Hyacinthe Magganon et Katarina Etrya.

-Vous avez une couleur de cheveux bien étonnante, dit Méléagre à Hyacinthe.

- Ils se sont déteints au fur et à mesure de mon cycle de vie, dit Hyacinthe.

- Vous pourriez demander au guérisseur d’Étolie de vous administrer un soin, dit Méléagre. Je pense que votre brun naturel vous ira à ravir.

- Que de nobles paroles, aimable hôte, intervient Katarina avec un léger sourire. Cependant si vous persistez à vous adresser ainsi au conseiller, je me dois de relater cet incident.

- Écoute donc cette jeune demoiselle, dit Tydéus. Des excuses seront de rigueur à la suite de ce repas, n’est-ce pas Méléagre ?

L’aîné observa son frère qui lui lança un regard courroucé, sut qu’il n’allait s’exécuter. Il prit des fruits dans la coupole sous les mots condescendants de Méléagre et se disait qu’à un moment il allait se rasséréner, ce que fit son interlocuteur. Écoutant cette scène avec attention, Argos ne pouvait s’empêcher d’avoir un sourire narquois à leur encontre. Il regarda son demi-frère qui avait au contraire la mâchoire crispée et sa main renfermée sur la table. Il reporta son attention sur son assiette à moitié terminée, sentit tout à coup la manche de son épée pencher sur sa hanche. Il baissa la tête, se rendit compte qu’elle était invisible. Il décida d’attacher la ceinture autour de sa taille en prenant soin de n’effleurer le fil de la lame, souhaita bonne nuit à son paternel ainsi qu’aux hôtes. Il traversa la salle et lorsqu’il arriva au seuil, une domestique l’emmena en direction de sa chambrée. Ils montèrent les escaliers, firent quelques pas dans le couloir puis la domestique lui tendit la clef de la chambre à coucher. Il se retourna en la voyant repartir en sens inverse, tourna la poignée.

Il entra dans la chambrée, referma la porte à clef, avança vers l’alcôve. Il enleva la ceinture, se dévêtit puis enfila le khiton blanc en lin. Il s’assit au bord du lit afin de retirer ses sandales, se releva, s’allongea à l’intérieur de la couverture. Il pensa à la longue journée qu’il venait de vivre et à ses changements prématurés. Il s’aperçut que dissimuler une quelconque vérité paraissait efficace mais lorsqu'il faisait face à Héraklès ou au Chasseur de Surnaturel, la situation était tout autre. Il ferma ses lourdes paupières, exténué par cette nouvelle quête.

Ses yeux s'ouvrirent brusquement, ressentit soudainement son corps courir à vive allure sous la forme de la bête à travers la cité. Il fut pris d’effroi quand il prit conscience du développement de sa vue, de son ouïe et de son odorat. Il perçut au milieu de son chemin un enfant qui traversait la rue, le désir de verser le sang l’emporta. Sa proie se détourna devant le monstre, éprit de stupeur avant de sortir un cri d’angoisse et d’horreur résonnant à travers les murs des habitations.