Chapitre 4  - Aloïs

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Après une longue soirée passée à travailler comme serveur dans ce restaurant, Aloïs n’avait qu’une seule envie : rentrer chez lui. Enfin, non… aller dans sa chambre plutôt. Éviter ses parents. Pour cela, il s’était acheté un petit encas sur le chemin, ou plutôt un minuscule paquet de tomates cerises… Ce qui, il fallait l’avouer, n’était pas exactement un repas nourrissant.

Malgré la musique qui résonnait dans ses oreilles, Aloïs ne pouvait s’empêcher de penser. À sa vie. À ce vide qu’il ressentait à chaque instant. À cette envie persistante de disparaître. Machinalement, il porta sa main à son visage, cherchant l’endroit où se trouvait le bleu qu’il avait camouflé ce matin même. Une grimace se forma sur ses lèvres en sentant la douleur sur sa mâchoire. Il tenta de se convaincre que tout allait bien en esquissant un sourire. Un sourire qui, bien que forcé, commençait à paraître réel, avant qu'une moue dégoûtée ne prenne sa place. Puis, soudain, un gémissement échappa à sa gorge, et des larmes commencèrent à couler sur ses joues.

Je me hais, je me déteste, je veux mourir. Aidez-moi...

À force de pleurer, sa vision devint floue. Sa tête tourna. Il aurait voulu s’effondrer là, sur le sol, et ne plus jamais se relever. Son ventre grogna. La faim le saisit, mais cette sensation le dégoûtait. Il n’avait pas faim. Il ne voulait pas avoir faim.

Le temps semblait s’étirer à l’infini. Chaque seconde frappait son esprit comme un marteau contre du métal. Chaque seconde le brisait davantage. Le simple fait de vivre ces secondes le torturait. Vivre. C’était son cauchemar.

Peu à peu, sans même y penser, ses pieds l'amenèrent vers sa maison. Les lumières n’étaient allumées qu’au rez-de-chaussée. Il s’approcha lentement, sans énergie, et tourna la poignée de la porte d’entrée. La chaleur qui s’en échappa le fit frissonner, et, pour ne pas perdre cette sensation réconfortante, il referma précipitamment la porte derrière lui.

Au seuil de l’entrée, il aperçut sa mère, sortant de la douche, simplement vêtue d’un peignoir beige.

— Te voilà enfin, constata-t-elle froidement. Ton père et moi avons terminé le repas. Trouve-toi quelque chose à manger dans le frigo, t’es un grand garçon.

Aloïs resta sans voix. Ce n’était pas la première fois que ses parents mangeaient sans rien lui laisser.

— Euh… Ça tombe bien, je me suis pris quelque chose sur la route, murmura-t-il.

Sa mère, Vanessa, lui fit un simple signe de tête, puis tourna les talons sans lui accorder un autre regard.

***

Plus tard, dans sa chambre, Aloïs se força à sortir son cahier de mathématiques. Il avait une tonne de devoirs à faire. Ce soir-là, il se concentra sur un exercice qu’il avait du mal à comprendre. Il n'arrivait pas à se débarrasser de ses pensées sombres, mais il se força à se concentrer.

Exercice 1 : Soit une fonction dont l'expression est le cube d'une variable, moins six fois le carré de cette même variable, plus neuf fois cette variable, et enfin moins quatre. Trouvez la dérivée de cette fonction par rapport à cette variable.

Exercice 2 : Trouvez les valeurs de la variable pour lesquelles la dérivée de cette fonction est égale à zéro.

Il se donna un quart d’heure pour résoudre ces exercices, se répétant qu'il devait se concentrer, que ces maths étaient plus simples qu’il ne le pensait. Après un moment, il réussit enfin à les terminer, bien que le sentiment d’échec ne le quittait pas.

En soupirant, il fourra ses cahiers dans son sac, le même sac qu’il traînait depuis la 6ème, et, épuisé, il se dirigea vers son lit.

Assis mollement, il releva ses manches, le regard porté sur ses avant-bras couverts de cicatrices. Il observa l’intérieur de son coude, où des coupures récentes marquaient sa peau. Il passa un doigt dessus, effleurant les marques, avant de commencer à gratter nerveusement. Le geste était devenu automatique, une manière de faire face à la douleur intérieure qu’il ne pouvait plus ignorer, sans se soucier de la douleur physique qui l’accompagnait.

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