Un cerf-volant sous l'averse
Il pleut à verse depuis des jours. Sale temps pour des vacances. Sa môme râle et rouspète tant elle peut de ne pas pouvoir aller à la plage. Et la tente, si petite tente de rando n’autorise que le sommeil. Difficile d’y faire autre chose. Même pour la popotte. Alors ils se réfugient dans la petite bagnole et il essaye de trouver des idées pour faire sourire cette gosse si difficile à dérider. Surtout quand elle est contrariée. Et là, elle l’est contrariée. Et pas qu’un peu. Tout est gris de pluie, on ne distingue même pas la mer, grise elle aussi. Que l’incessant bruit de cette flotte, sur la toile de tente, sur les feuilles, sur la tôle de la bagnole, dans les flaques, partout, partout ce bruit, jour et nuit depuis des jours. Avec son appareil photo, à l’abri, il a pris une photo de la jetée, trait blanc éclairé par un des rares rayons de soleil et écrasé par des nuages de toutes les couleurs du gris dégueulant sans fin leur déluge sur une mince langue vert émeraude de l'océan. Quand la nature s'amuse à faire du Rothko. Sa fille s’en contrefoutait comme de sa première peluche, et elle en a eu, des peluches, d’animaux, toujours. Il finit par trouver, avant de partir du camping dont il avait dû donner congé, les yeux sombres de frustration contenue de sa fille, pétillants un peu à l’idée de retrouver la maison, le chat, il avait fini par trouver de quoi passer les quelques heures qui restaient dans une sorte de château, avec son parc. Ou comment perdre son temps en essayant de l’occuper au mieux. Et là, en repartant déçus tous les deux, au pied d’un arbre mouillé, d’un noir luisant irisé de vert et de bleu, une lucarne. Sa fille s’arrête franchement intriguée. Il la ramasse prudemment et lui explique cet insecte, en tout cas ce qu’il en connaît, le plus grand coléoptère d’Europe. Et elle de boire ses paroles. Enfin quelque chose qui la captive ! De lui expliquer comment les enfants jouaient avec en les attachants à une ficelle. Leur nom, cerf-volant pour le mâle et grande biche pour la femelle. Quel rôle aussi joue cet insecte saproxylophage dans la vie des forêts. Et d’accepter, enfant si farouche d’ordinaire, de prendre la grosse bête, qui elle le sait, ne va pas la manger. Des sourires, enfin des sourires, il aura un mal fou à lui demander de monter dans la voiture, peut-être en évoquant les retrouvailles avec le chat.
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