Neavia - 1.4

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La bête était combative et les chasseurs qui s’étaient répartis dans toute la zone après avoir mis pied à terre firent pleuvoir leurs projectiles. Mais le griffeur, de par la peau épaisse de son dos, réussit à parer une bonne partie des traits assassins qui lui étaient lancés.

Les carreaux volèrent et se brisèrent au contact du cuir. Tandis que les traqueurs se déployaient et tentaient d’encercler le griffeur, ce dernier ne se laissa pas faire. Bien que blessé à l’une de ses pattes arrière, il bougea avec rapidité.

Les plus inconscients ou téméraires du groupe, ceux qui s’étaient le plus rapprochés de la créature, furent les premiers à être attaqués. S’aidant des moindres protections qu’offrait le terrain, les humains entreprirent de harceler la bête de leur arme et quand le griffeur se faisait trop proche, les armes de jet en tout genre furent utilisées pour l'attaquer.

Se mouvant avec l’énergie du désespoir, le griffeur combattait sans retenue. Employant ses griffes acérées pour déchirer les habits et chairs des traqueurs. Les cris des blessés commencèrent à se faire entendre dans la fosse tandis que les javelots et carreaux arrivèrent à toucher leur cible.

Neavia en rejoignant le sol n’avait pas perdu un seul instant. Actionnant son arme, elle plaça un nouveau trait en pleine course. Dérapant légèrement pour s’arrêter à cause de ses mains prises, elle entra en collision avec un arbre mort en laissant s’échapper un petit souffle à l’impact quand elle rebondit.

Elle se mit alors en position de tir.

Refrénant son cœur qui battait à tout rompre, elle retint sa respiration et tenta de se calmer en visant le monstre. La bête véloce et en pleine frénésie meurtrière avait déjà le corps teinté de rouge. Couvert de son sang mêlé à celui des camarades de Neavia. Des chasseurs qu’elle repoussait ou faisait voler par la puissante force de ses coups.

Alors que le griffeur se tenait sur un promontoire pour se jeter sur l’un des adversaires qu’elle avait terrassés, Neavia saisit sa chance. Observant la partie plus souple de la peau du griffeur, celle de son ventre, elle actionna la détente de son arme. Le carreau fit trembler l’arbalète lorsque les poulies grincèrent en libérant le puissant projectile.

Filant droit dans la direction visée par Neavia, le trait se logea profondément dans la créature.

Le hurlement du griffeur fut alors plus strident que jamais et lâchant sa proie du regard, il ne vit pas le traqueur au sol prendre avantage de la situation auparavant bien critique pour lui. Ce dernier qui reprenait confiance, qui reprenait ses esprits, saisit son javelot qui gisait au sol et le planta en se relevant dans la bête qui elle, bien au contraire, s’effondra lourdement.

Les plus proches chasseurs prêtèrent de suite main-forte à l’homme et rapidement, le griffeur fut mis à terre sans défense.

Soufflant de répits, Neavia sentit l’excitation et le stress qui l’assaillit retomber d’un coup. Comme une chute presque comparable à un vide d’énergie. Rangeant son arbalète, elle s'accorda une courte pause pour clarifier ses idées. La jeune chasseresse se dirigea vers la créature en observant aux alentours si quelque personne avait besoin de son aide. Mais voyant les autres traqueurs prendre déjà soin des blessés, elle continua jusqu’à la bête.

Ainsi meurtrie et maintenue au sol par les longues armes des chasseurs, elle semblait bien moi dangereuse. Presque inoffensive. Neavia fixait la grande tête de l’animal,elle percevait malgré tout la tristesse et la douleur du monstre.

Kïron, le chef du groupe, fut l’homme honoré de la mise à mort. C’était un acte sacré chez les traqueurs des clans et il s’attela à la chose avec rigueur et respect.

Tirant son couteau bien blanc, il s’approcha doucement du monstre qui l’observait de ses yeux noir profond, semblait le défier une dernière fois en se débattant. Mais les traqueurs qui avaient leurs longs javelots encore plantés dans la créature la firent abdiquer bien vite.

S’accroupissant vers la tête de la bête, Kïron émit un petit « chut» presque réconfortant en posant la main sur de l'animal blessé et en avançant sa lame, le fit glisser sur le cou pour mettre fin à ses souffrances.

— Que la mère Nature, ta créatrice, t’accueille à nouveau fit Kïron en ajoutant à sa phrase en un signe venue de son cœur.

Ce signe fut repris en cascade par les chasseurs non loin en signe de respect envers Céresse, face au monstre qui s’était défendu avec force et bravoure.

Amiş, les yeux clos, marmonnait des prières tandis que Kïron, quittant le griffeur, s’approcha de Neavia.

— Les adultes sont toujours plus durs à tuer…

— Mais ils sont bien plus utiles au clan et la Keşic nous enjoint d’épargner les jeunes même si ce sont des mutants.

Acquiesçant Kïron vit Druïg se rapprocher d’eux.

— Quel fut le coût de la chasse mon ami ?

— Léger, quatre grands blessés et sinon de nombreuses coupures pour les autres.

Soufflant de répits, Kïron ne répondit pas à cette nouvelle. Son regard semblait happé par Amiş.

Malgré le monstre mort, ce dernier paraissait se concentrer, non pas qu’il psalmodiait des prières, mais il avait l’esprit occupé.

— Un problème Magïuş ? demanda Kïron.

Mais il n’eut pas d’explications claires. Amiş, qui d'une main se tenait la tête, dit faiblement :

Je sens des intentions, des pensées… Des désirs barbares et imminents… Des…

Kïron, qui s’approcha du Magïuş n’eut cependant pas le temps de poser plus de questions qu’un vrombissement résonna dans la fosse. Un bruit soudain, annonciateur de malheurs.

Un engin d’acier survolait l’endroit et prenant au dépourvu les chasseurs, il largua des objets bien sombres avant même que les chasseurs ne bougent. La rapidité de la manœuvre fut seulement observée par les traqueurs qui dans des regards mélangeant surprise et stupeur virent l’appareil lâcher des barils.

Ces derniers, ces taches obscures, qui chutèrent, explosèrent au contact du sol et les nuages de feu orangé fleurirent dans la fosse de végétations brûlant hommes et plantes sans distinction.

Le souffle de la déflagration fit voler Kïron qui se tenait non loin de Neavia avant de l'emporter elle aussi sous la puissance du vent incandescent.

Pendant un instant, seul le brasier fut visible, uniquement le bruit de ses crépitements audible tandis que certains chasseurs se relevaient de la traîtresse attaque. Mais les membres de l’appareil, les prospecteurs de la ville d’acier, descendirent à leur tour dans la fosse par le biais de longues cordes.

S'ensuivit un échange de tir qui résonna dans la place. Emplissant le lieu des échos des armes à feu à chaque projectile qui fauchait les chasseurs qui tentaient de reprendre leurs esprits.

L’esprit de Neavia était embrumé, l’explosion qui l’avait soufflée l’avait presque rendue sourde. Se débattant avec le peu de force qui lui restait, elle essaya de gagner le contrôle de son corps sans grand succès.

Échouant à retrouver une vue claire et calmer l’acouphène de ses oreilles, elle assistait ainsi sans pouvoir réagir au massacre de son groupe de chasse, de ses amis.

Les quelques traqueurs qui s'étaient remis debout non loin d’elle étaient recroquevillés derrière le moindre couvert. Elle les observait entre chaque battement d’yeux. Entre chacune des visions cauchemardesques qu’elle luttait à garder.

Et la peur se mêla à sa douleur, à son incompréhension.

Ses amis !? Étaient-ils là ? Étaient-ils morts ? Arriverait-elle à se lever pour agir ?

Mais nul ne lui répondit, car nul son ne sortait de sa bouche malgré sa lutte sourde avec elle-même.

Seules les armes s’exprimaient à présent. Les armes et les cris.

Alors qu’elle reposait à nouveau la tête sur le sol, qu’elle rendait les armes face à sa douleur, elle vit un visage se pencher devant la sienne. Il s’agissait de Druïg, il semblait hurler, mais il n’eut pas de réaction de la jeune chasseresse. Son regard, ses expressions de colère se muèrent en peur tandis qu’il faisait signe à des traqueurs proches de l’aider.

Échangeant des tirs avec les prospecteurs, les chasseurs traînèrent Neavia pour fuir ce combat, ce massacre. Tout ce que Neavia vit avant de perdre conscience, ainsi baladé au sol, fut une forme au loin. Un homme de noir vêtu qui, devant un arbre en feu, posa son pied sur un chasseur gisant au sol, sur Amiş.

Regardant Neavia et ses camarades se sauver, l'impérial semblait se délecter de la situation alors qu’il actionnait son arme de poing pour mettre un terme à la vie du Magius en un simple flash de lumière.

Le faciès animal du prospecteur fut la dernière chose que Neavia vit avant de perdre connaissance.

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