Présence
La vie reprit son cours rapidement, l’appréhension et la colère s’étaient estompées lorsque les habitants réalisèrent que ces soldats, loin de l’image redoutable qu’on leur avait décrite, faisaient preuve de politesse et de courtoisie.
Certains se révélaient même chaleureux, dotés d’un humour surprenant, et parfois très appréciés. Ils cherchaient à s’intégrer, échangeant quelques mots en français avec les commerçants, saluant les passants d’un sourire mesuré. On les voyait parfois aider les vieillards à porter leurs paniers, ou jouer distraitement avec un enfant qui s’attardait près d’eux.
Dans certaines maisons réquisitionnées, ils prenaient part aux tâches quotidiennes. Les plus robustes coupaient du bois ou réparaient une charrette branlante, remplaçant les hommes du village partis à la guerre ou envoyés au travail forcé. D’autres s’appliquaient à nettoyer les écuries ou à puiser de l’eau, soulevant parfois les regards intrigués des habitants, partagés entre la reconnaissance et un malaise diffus.
Ces gestes, loin d’être calculés, s’intégraient peu à peu dans la routine du village, créant parfois, malgré eux, des instants de complicité inattendus.
Comme ce jour où Johann l’aidait à s’occuper des chevaux dans la cour. Il s’affairait à transporter un seau d’eau lorsqu’il heurta une barre en fer dépassant du mur. Le choc le fit jurer à mi-voix, un mélange de frustration et de douleur étouffée dans sa langue natale.
Louise, qui peinait déjà à contenir son amusement en le voyant sautiller sur place en se massant la tête, éclata d’un rire clair et spontané.
— Vous vous moquez de moi ? s’exclama Johann en se redressant, une lueur faussement vexée dans le regard.
Elle tenta de retrouver son sérieux, en vain.
— Non, je vous assure ! répondit-elle, les épaules encore secouées de rires. Excusez-moi, Johann, ce n’est pas méchant, mais… vous me faites rire !
Il finit par rire à son tour, haussant les épaules dans un geste de capitulation.
— Tant mieux, alors. Ce n’est pas si souvent que j’ai l’occasion de vous entendre rire.
Louise baissa légèrement les yeux, un peu prise au dépourvu par sa remarque. C’est vrai qu’elle riait peu, ces derniers temps.
Puis son regard accrocha une silhouette dans l’encadrement de la porte.
C'était Müller.
Il se tenait là, immobile, son dos droit, son visage impassible, ses yeux d’un bleu tranchant figés sur elle. Il ne cillait pas, ne parlait pas.
Juste ce regard.
Froid. Insondable comme toujours.
Louise sentit un frisson lui parcourir la nuque. Ce n’était pas seulement la surprise de le voir là. C’était autre chose. Quelque chose d’indéfinissable dans son expression.
Comme s’il analysait chaque détail de la scène.
Comme s’il disséquait leur complicité.
Elle détourna rapidement les yeux, son rire déjà éteint, une étrange tension s’infiltrant sous sa peau.
Johann, lui, ne semblait pas l’avoir remarqué. Il continuait de masser sa tête endolorie en marmonnant quelques mots en allemand.
Quand elle osa jeter un coup d’œil furtif vers la porte, Müller n’était plus là.
Comme s’il n’avait jamais été là.
Mais Louise, elle, savait qu’il l’avait vu. Qu’il les avait vus. Et ce simple fait suffisait à lui nouer l’estomac.
Ce lieutenant Müller exaspérait Louise. Jamais un mot gentil, toujours cette froideur distante.
Un soir, alors qu’elle brossait sa longue chevelure dans sa chambre, un bruit léger interrompit son geste. Le parquet venait de craquer de l’autre côté de la porte qui communiquait avec le bureau.
Elle s’arrêta net, sa brosse suspendue en l’air. Son regard fixé vers la porte.
Un instant, elle se demanda si elle avait rêvé.
Elle retint sa respiration, tendant l’oreille..
Lentement, elle se remit à brosser ses cheveux, feignant l’indifférence. Mais son regard restait fixé sur la porte dans le miroir, guettant le moindre mouvement. Plus rien ....
Le lendemain, elle glissa un petit papier dans le trou de la serrure.
Certains se révélaient même chaleureux, dotés d’un humour surprenant, et parfois très appréciés. Ils cherchaient à s’intégrer, échangeant quelques mots en français avec les commerçants, saluant les passants d’un sourire mesuré. On les voyait parfois aider les vieillards à porter leurs paniers, ou jouer distraitement avec un enfant qui s’attardait près d’eux.
Dans certaines maisons réquisitionnées, ils prenaient part aux tâches quotidiennes. Les plus robustes coupaient du bois ou réparaient une charrette branlante, remplaçant les hommes du village partis à la guerre ou envoyés au travail forcé. D’autres s’appliquaient à nettoyer les écuries ou à puiser de l’eau, soulevant parfois les regards intrigués des habitants, partagés entre la reconnaissance et un malaise diffus.
Ces gestes, loin d’être calculés, s’intégraient peu à peu dans la routine du village, créant parfois, malgré eux, des instants de complicité inattendus.
Comme ce jour où Johann l’aidait à s’occuper des chevaux dans la cour. Il s’affairait à transporter un seau d’eau lorsqu’il heurta une barre en fer dépassant du mur. Le choc le fit jurer à mi-voix, un mélange de frustration et de douleur étouffée dans sa langue natale.
Louise, qui peinait déjà à contenir son amusement en le voyant sautiller sur place en se massant la tête, éclata d’un rire clair et spontané.
— Vous vous moquez de moi ? s’exclama Johann en se redressant, une lueur faussement vexée dans le regard.
Elle tenta de retrouver son sérieux, en vain.
— Non, je vous assure ! répondit-elle, les épaules encore secouées de rires. Excusez-moi, Johann, ce n’est pas méchant, mais… vous me faites rire !
Il finit par rire à son tour, haussant les épaules dans un geste de capitulation.
— Tant mieux, alors. Ce n’est pas si souvent que j’ai l’occasion de vous entendre rire.
Louise baissa légèrement les yeux, un peu prise au dépourvu par sa remarque. C’est vrai qu’elle riait peu, ces derniers temps.
Puis son regard accrocha une silhouette dans l’encadrement de la porte.
C'était Müller.
Il se tenait là, immobile, son dos droit, son visage impassible, ses yeux d’un bleu tranchant figés sur elle. Il ne cillait pas, ne parlait pas.
Juste ce regard.
Froid. Insondable comme toujours.
Louise sentit un frisson lui parcourir la nuque. Ce n’était pas seulement la surprise de le voir là. C’était autre chose. Quelque chose d’indéfinissable dans son expression.
Comme s’il analysait chaque détail de la scène.
Comme s’il disséquait leur complicité.
Elle détourna rapidement les yeux, son rire déjà éteint, une étrange tension s’infiltrant sous sa peau.
Johann, lui, ne semblait pas l’avoir remarqué. Il continuait de masser sa tête endolorie en marmonnant quelques mots en allemand.
Quand elle osa jeter un coup d’œil furtif vers la porte, Müller n’était plus là.
Comme s’il n’avait jamais été là.
Mais Louise, elle, savait qu’il l’avait vu. Qu’il les avait vus. Et ce simple fait suffisait à lui nouer l’estomac.
Ce lieutenant Müller exaspérait Louise. Jamais un mot gentil, toujours cette froideur distante.
Un soir, alors qu’elle brossait sa longue chevelure dans sa chambre, un bruit léger interrompit son geste. Le parquet venait de craquer de l’autre côté de la porte qui communiquait avec le bureau.
Elle s’arrêta net, sa brosse suspendue en l’air. Son regard fixé vers la porte.
Un instant, elle se demanda si elle avait rêvé.
Elle retint sa respiration, tendant l’oreille..
Lentement, elle se remit à brosser ses cheveux, feignant l’indifférence. Mais son regard restait fixé sur la porte dans le miroir, guettant le moindre mouvement. Plus rien ....
Le lendemain, elle glissa un petit papier dans le trou de la serrure.
La vie reprit son cours rapidement, l’appréhension et la colère s’étaient estompées lorsque les habitants réalisèrent que ces soldats, loin de l’image redoutable qu’on leur avait décrite, faisaient preuve de politesse et de courtoisie.
Certains se révélaient même chaleureux, dotés d’un humour surprenant, et parfois très appréciés. Ils cherchaient à s’intégrer, échangeant quelques mots en français avec les commerçants, saluant les passants d’un sourire mesuré. On les voyait parfois aider les vieillards à porter leurs paniers, ou jouer distraitement avec un enfant qui s’attardait près d’eux.
Dans certaines maisons réquisitionnées, ils prenaient part aux tâches quotidiennes. Les plus robustes coupaient du bois ou réparaient une charrette branlante, remplaçant les hommes du village partis à la guerre ou envoyés au travail forcé. D’autres s’appliquaient à nettoyer les écuries ou à puiser de l’eau, soulevant parfois les regards intrigués des habitants, partagés entre la reconnaissance et un malaise diffus.
Ces gestes, loin d’être calculés, s’intégraient peu à peu dans la routine du village, créant parfois, malgré eux, des instants de complicité inattendus.
Comme ce jour où Johann l’aidait à s’occuper des chevaux dans la cour. Il s’affairait à transporter un seau d’eau lorsqu’il heurta une barre en fer dépassant du mur. Le choc le fit jurer à mi-voix, un mélange de frustration et de douleur étouffée dans sa langue natale.
Louise, qui peinait déjà à contenir son amusement en le voyant sautiller sur place en se massant la tête, éclata d’un rire clair et spontané.
— Vous vous moquez de moi ? s’exclama Johann en se redressant, une lueur faussement vexée dans le regard.
Elle tenta de retrouver son sérieux, en vain.
— Non, je vous assure ! répondit-elle, les épaules encore secouées de rires. Excusez-moi, Johann, ce n’est pas méchant, mais… vous me faites rire !
Il finit par rire à son tour, haussant les épaules dans un geste de capitulation.
— Tant mieux, alors. Ce n’est pas si souvent que j’ai l’occasion de vous entendre rire.
Louise baissa légèrement les yeux, un peu prise au dépourvu par sa remarque. C’est vrai qu’elle riait peu, ces derniers temps.
Puis son regard accrocha une silhouette dans l’encadrement de la porte.
C'était Müller.
Il se tenait là, immobile, son dos droit, son visage impassible, ses yeux d’un bleu tranchant figés sur elle. Il ne cillait pas, ne parlait pas.
Juste ce regard.
Froid. Insondable comme toujours.
Louise sentit un frisson lui parcourir la nuque. Ce n’était pas seulement la surprise de le voir là. C’était autre chose. Quelque chose d’indéfinissable dans son expression.
Comme s’il analysait chaque détail de la scène.
Comme s’il disséquait leur complicité.
Elle détourna rapidement les yeux, son rire déjà éteint, une étrange tension s’infiltrant sous sa peau.
Johann, lui, ne semblait pas l’avoir remarqué. Il continuait de masser sa tête endolorie en marmonnant quelques mots en allemand.
Quand elle osa jeter un coup d’œil furtif vers la porte, Müller n’était plus là.
Comme s’il n’avait jamais été là.
Mais Louise, elle, savait qu’il l’avait vu. Qu’il les avait vus. Et ce simple fait suffisait à lui nouer l’estomac.
Ce lieutenant Müller exaspérait Louise. Jamais un mot gentil, toujours cette froideur distante.
Un soir, alors qu’elle brossait sa longue chevelure dans sa chambre, un bruit léger interrompit son geste. Le parquet venait de craquer de l’autre côté de la porte qui communiquait avec le bureau.
Elle s’arrêta net, sa brosse suspendue en l’air. Son regard fixé vers la porte.
Un instant, elle se demanda si elle avait rêvé.
Elle retint sa respiration, tendant l’oreille..
Lentement, elle se remit à brosser ses cheveux, feignant l’indifférence. Mais son regard restait fixé sur la porte dans le miroir, guettant le moindre mouvement. Plus rien ....
Le lendemain, elle glissa un petit papier dans le trou de la serrure.
La vie reprit son cours rapidement, l’appréhension et la colère s’étaient estompées lorsque les habitants réalisèrent que ces soldats, loin de l’image redoutable qu’on leur avait décrite, faisaient preuve de politesse et de courtoisie.
Certains se révélaient même chaleureux, dotés d’un humour surprenant, et parfois très appréciés. Ils cherchaient à s’intégrer, échangeant quelques mots en français avec les commerçants, saluant les passants d’un sourire mesuré. On les voyait parfois aider les vieillards à porter leurs paniers, ou jouer distraitement avec un enfant qui s’attardait près d’eux.
Dans certaines maisons réquisitionnées, ils prenaient part aux tâches quotidiennes. Les plus robustes coupaient du bois ou réparaient une charrette branlante, remplaçant les hommes du village partis à la guerre ou envoyés au travail forcé. D’autres s’appliquaient à nettoyer les écuries ou à puiser de l’eau, soulevant parfois les regards intrigués des habitants, partagés entre la reconnaissance et un malaise diffus.
Un soir, Louise rentrait du potager, longeant le sentier bordé de vignes encore nues. Le printemps approchait, mais l’air restait frais une fois le soleil couché. Elle remonta son châle sur ses épaules, accélérant légèrement le pas. Avec le couvre-feu qui approchait, mieux valait ne pas trop traîner.
Un grondement de moteur résonna au loin, brisant le calme du chemin. Une colonne de véhicules allemands roulait à allure modérée. Louise, par réflexe, baissa les yeux et continua d’avancer. Mais l’une des voitures ralentit et s’arrêta juste à côté d’elle.
La portière s’ouvrit, et le sous-officier Johann Hoffman en descendit, un sourire tranquille aux lèvres.
— Bonsoir, Madame.
Louise s’arrêta, surprise, et leva le regard vers lui.
— Oh… bonsoir, Monsieur Hoffman.
— Puis-je vous raccompagner chez vous ?
Elle hésita brièvement. Il ne l’intimidait pas, bien au contraire, mais elle savait que les regards dans le village étaient parfois lourds de sous-entendus.
— D’accord.
Ils reprirent la marche côte à côte. Leurs pas candencés sur le sol encore humide, ponctués du cri lointain d’un oiseau de nuit.
— Et s’il vous plaît, appelez-moi Johann, ajouta-t-il avec une pointe d’espièglerie. Comme deux amis. Nous sommes amis, n’est-ce pas ?
Louise haussa un sourcil amusé.
— Je suppose…
— Puis-je vous appeler Louise en retour ?
— Bien sûr.
Un léger silence s’installa, mais il n’était pas gênant. Johann finit par évoquer sa ville natale en Bavière, les forêts de sapins et la neige qui recouvrait tout l’hiver. Il parla de sa mère, qui lui écrivait chaque semaine, et de son petit frère à qui il avait promis un souvenir de France.
Louise l’écoutait malgré elle, touchée par la douceur qui perçait sous ses mots.
Mais soudain, une autre voiture approcha et s’arrêta juste à côté d’eux.
Müller.
Il ne descendit pas, se contentant d’ouvrir sa vitre pour échanger quelques mots en allemand avec Johann.
Il parlait vite, d’une voix égale mais ferme. Johann lui répondit calmement, un sourire en coin, comme s’il cherchait à désamorcer quelque chose.
Louise sentit son regard glisser sur elle.
Elle se raidit légèrement en croisant les yeux clairs du lieutenant, qui se posèrent brièvement sur elle avant de revenir sur Johann. Il finit par hocher la tête et déclara d’une voix mesurée :
— Montez Madame. Je vous raccompagne.
Ce n’était pas une demande.
Johann ouvrit la portière passager pour elle, sans protester, avant de prendre place à l’arrière.
Le trajet se fit en silence. Louise regardait droit devant elle, mais elle sentait la présence du lieutenant à ses côtés.
Lorsqu’ils arrivèrent devant la maison, Müller coupa le moteur et sortit le premier.
Ils rentrèrent tous ensemble, comme c’était l’usage depuis l’installation des soldats dans sa maison.
Ce lieutenant Müller exaspérait Louise. Jamais un mot gentil, toujours cette froideur distante.
Plusieurs fois, elle s'était sentie mal à l'aise sous ses regards insistants. Comme ce jour où Johann l'aidait à s'occuper des chevaux dans la cour. En voulant déplacer un seau, il s'était cogné contre une barre en fer dépassant du mur et avait lâché un juron étouffé. Louise n'avait pas pu s'empêcher de pouffer de rire.
— Vous vous moquez de moi ? s'était exclamé Johann, faussement vexé.
Elle éclata de rire pour de bon.
— Non, je vous assure ! répondit-elle entre deux éclats de rire. Excusez-moi, Johann, ce n'est pas méchant, mais vous me faites rire !
Il rit à son tour, un instant de légèreté dans ce quotidien pesant. Mais en se retournant, Louise l’aperçut Müller.
Dans l’encadrement de la porte,il se tenait immobile, ses yeux d’un bleu tranchant figés sur elle. Il ne cillait pas, ne parlait pas. Juste ce regard, froid, insondable.
Louise sentit un frisson lui parcourir la nuque. Ce n’était pas seulement la surprise de le voir là, c’était quelque chose d’indéfinissable dans son expression. Comme s’il analysait chaque détail de la scène, disséquait leur complicité.
Elle détourna rapidement les yeux, mais son rire s'était déjà éteint. Johann, lui, ne semblait pas l’avoir remarqué, trop occupé à masser sa tête endolori.
Quand elle se retourna à nouveau Müller n’était plus là.
Un soir, alors qu’elle brossait sa longue chevelure dans sa chambre, un bruit léger interrompit son geste. Le parquet venait de craquer de l’autre côté de la porte qui communiquait avec le bureau.
Elle s’arrêta net, sa brosse suspendue en l’air. Son regard fixé vers la porte.
Un instant, elle se demanda si elle avait rêvé.
Elle retint sa respiration, tendant l’oreille..
Lentement, elle se remit à brosser ses cheveux, feignant l’indifférence. Mais son regard restait fixé sur la porte dans le miroir, guettant le moindre mouvement. Plus rien ....
serrure.
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