- Elizabeth Masson! C'est elle qui l'a tué! avait crié Françoise Géniole,  à Franco Bernardi, procureur général de la république de Genève.

Il était le premier arrivé sur le lieu du crime. Tout simplement parce qu'il s'était trouvé tout-à-fait fortuitement juste à côté, à la gare de Cornavin, pour acheter des billets de train. Il avait prévu un tour de Suisse en chemin de fer pour lui et sa femme. Cela faisait des années que cette perspective de vacances lui trottait dans la tête. Et vu qu'il vouait à l'internet et aux ordinateurs une forte répulsion (par son boulot il y était évidemment quelque soumis), il avait fait le déplacement en tram depuis le ministère publique, jusqu'à la gare. Et il avait, en plein milieu de la discussion avec la dame du guichet des CFF, été alerté sur son natel qu'à deux pas de là, le directeur de l'office cantonal de l'emploi venait d'être assassiné.

- Je m'excuse madame, fit-il alors plein de bonhomie dans la voix (l'hôtesse était très charmante), mais le devoir m'appelle.

Puis il était sorti du bureau des CFF et avait marché d'un pas soutenu. Il était arrivé quelque peu essoufflé, puisqu'il n'avait rien d'une personne sportive et accusait une quinzaine de kilos en trop.

Il fit amener madame Géniole, à l'écart dans un bureau. Il ne voulait pas qu'elle crée des remous chez les employés.

- Madame Géniole, dès que l'inspecteur arrivera, et que nous aurons un moment, nous vous poserons les questions qu'il faut. Mais d'ici là, ne dites rien à personne. Cela crée juste des perturbations contre-productives.

- Mais c'est Elizabeth qui l'a tué, réitéra l'employée, totalement sûre d'avoir résolu le mystère autour de la mort de Jérôme Bonnetière.

- S'il vous plaît, attendez que l'inspecteur soit là. Voulez-vous boire quelque chose ? Un café, un thé ?

- Non merci. J'aimerais que vous arrêtiez immédiatement Elizabeth Masson. Elle est encore là ?! Non ?! Dans l'immeuble ?!

- Écoutez. Ne bougez pas d'ici, fit alors le procureur en sortant.

Il donna l'ordre à un agent en uniforme de surveiller la porte. Que Françoise Géniole ne sorte sous aucun prétexte.
Il rejoignit ensuite le hall d'entrée où tout les employés avait été rassemblé.

- S'il vous plaît !, fit-il en haussant la voix. Est-ce que une certaine Elizabeth Masson est parmi vous ?

Tout le monde se regardèrent. Surpris. Qu'est-ce que cela voulait encore dire ? Puis une jeune femme sorti du nombre. Chevelure blonde et longue, un chemisier rose, des chaussures à talon. Impeccablement maquillée. Serait-ce donc elle, cette jeune femme très belle, plutôt menue, qui aurait empoisonné le grand chef de l'Office Cantonal de l'Emploi ?

- C'est moi, fit-elle, l'air effrayée.

Elle avait appris par un bouche-à-oreille effréné la mort de son amant de l'été. Été qui en s'achevant avait également mis fin à leur relation. Elle ne voyait plus Jérôme depuis fin août. Depuis le 27 août très exactement. La journée de la rentrée scolaire. Ce jour-là, en passant devant la réception, il lui avait donné un mot, griffonné sur un bout de papier : « Nous devons en resté là, Elizabeth. Ça vaut mieux pour tout le monde... ». Rideau.