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Lundi 12 novembre 2018, commissariat Bld Carl-Vogt
- Ça va bientôt faire deux mois que « E » a tué pour la première fois ! Et qu'avons nous, messieurs dames ?
Séverine Mélisse regardait Hans Pfäfi.
Elle l 'avait dans le collimateur.
Lui, veillait à se montrer le plus serein possible.
Puis elle observa un court instant Alice Noît. Elle semblait suivre les yeux fermés l'inspecteur suisse-allemand. Et Nicolas Vidon qu'elle trouvait d'une arrogance détestable, d'un machisme répugnant. Abdel Chentali dont elle ne savait pas quoi penser, tellement elle le trouvait transparent. François Champs, le plus détendu de tous et le seul à effectuer un travail correct. Selon elle. Et Franco Bernardi. Lui, mise-à-part son « addiction » pour l'inspecteur Pfäfi, qu'elle ne s'expliquait pas, trouvait aussi grâce à ses yeux. Elle éprouvait même de la tendresse pour le bonhomme.
- Oui. Qu'avons-nous ?
Hans se mordait les doigts intérieurement de ne pas pouvoir répondre à cette question.
Et pour ne pas subir une humiliation supplémentaire, il s'empressa de répondre:
- Rien.
Elle paru satisfaite :
- Merci. Nous avons au moins de l'honnêteté et de la lucidité. Une sorte de minimum syndicale... Franco Bernardi intervint :
- Nous pouvons dire cependant, et j'estime que cet aspect peut-être intéressant, que cela fait plus d'un mois que nous n'avons plus de nouvelles de « E ».
- Oui, c'est exact, confirma Hans. La dernière fois que « E » s'est manifesté c'était le onze octobre. Pour rappeler à quel point Jean Walder serait un bon président du Conseil d'État.
- Et depuis c'est le silence, ajouta Alice.
Séverine Mélisse était dubitative.
- En quoi ce « silence » d'un mois est « intéressant » ?
- Il est intéressant, madame, expliquait Hans, parce que depuis le début des actions de « E », le vingt-sept septembre, « E » s'est montré extrêmement actif. Tous les trois jours, il ou elle ajoutait une pierre à son édifice. Alors peut-être que « E », devant la non-réaction du conseil d'État face à ses revendications est en train de douter. « E » a demandé que Jean Walder remplace George Pendal, on ne lui a pas donné satisfaction, c'est d'ailleurs le dernier message qu'il nous a envoyé, réitérant ce souhait. Peut-être qu'il ou elle ne sait plus comment opérer, et peut-être qu'il va abandonner sa démarche...
- Alors laissez-moi vous dire, monsieur Pfäfi, que si « E » stoppe ses activités criminelles maintenant, on va pas être dans la merde pour le coffrer. Avec le peu de matière, de pistes, que nous avons en notre possession à l'heure actuelle.
- Oui, vous avez raison.
Séverine Mélisse soupira. On sentait bien à quel point elle se posait des questions sur les compétences de Hans.
- Mais nous sommes bien d'accord, « E » est un ou une psychopathe ? demanda-t-elle.
- Oui, sans aucun doute, répondit Hans.
- Et un psychopathe se mettrait à douter de la justesse de ses propres actions ?
- Euh...effectivement, c'est peu probable, fit Hans, l'expression légèrement contrite.
- Donc, on peut en déduire que nous allons bientôt avoir des nouvelles de lui.
- Oui.
- Et que ce silence dont vous parlez vous et Franco pourrait tout simplement être un sorte de calme avant la tempête ?
Hans et monsieur Bernardi acquiescèrent par un hochement de tête. Alice regardait ses bottines en cuir noir. Non, ce n'est pas le meilleur moment que j'ai passé dans la police, celui de maintenant donc, pensait-elle. Elle leva les yeux et fût surprise de voir sa grande cheffe regarder le procureur avec un sourire qui semblait signifier que tout allait parfaitement dans le meilleur des mondes.
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