“Bienvenue à Los Angeles ! Ici, le soleil brille 284 jours par an et le surf est une façon de vivre !”. C’était le slogan qui avait attiré mon attention sur un site de voyages. Je cherchais juste à m’évader un peu, car Helen, celle que je pensais être la femme de ma vie avait brisé mon cœur, me laissant seul, trahi et plein de rancœur. En voyant ce slogan, je me suis rappelé le plaisir que je ressentais en surfant à Cayton, là où je suis né. Cela faisait des années que je n’avais plus touché à une planche et, mon Dieu, que ça me manquait ! Quitter la grisaille de Londres pour profiter de la chaleur du soleil californien était plus que tentant.

J’ai donc pris le premier billet d’avion disponible et passé deux semaines incroyables à Los Angeles. Tellement incroyables que j’ai décidé de m’y installer. Ce qui est plutôt surprenant de ma part, car je ne suis pas d’un naturel aventurier. Le plus gros changement dans ma vie, hormis la mort accidentelle de mes parents, a été mon déménagement à Londres, à seulement cinq heures de route de ma ville natale.

La société pour laquelle je travaille (vous savez, la grosse boîte à l'origine du moteur de recherche que vous utilisez tous les jours) a des bureaux près de Venice Beach. J’ai demandé mon transfert et obtenu un poste dans le département “Intelligence artificielle”. J’ai trouvé un endroit où vivre, une ancienne fabrique transformée en loft dans le quartier des canaux à Venice, un véritable coup de cœur. Ça fait quatre ans maintenant que je vis ici et ma vie est extraordinaire. Mon seul regret est que j’ai dû laisser derrière moi ma sœur, Liv, et ma grand-mère.

Comme je vous le disais, je travaille dans l'intelligence artificielle comme ingénieur en machine learning, un titre pompeux pour dire que je développe, conçois, entraîne et améliore l'IA de notre boîte. Avec mon équipe d'une dizaine de personnes, nous travaillons sur un projet de chatbot conversationnel. En gros, il s’agit d’un robot informatique avec qui vous pouvez communiquer. Il peut vous donner des informations d’ordre général, parler d'événements historiques, de géographie, résoudre des problèmes mathématiques, vous donner une recette de cuisine… ou simplement papoter avec vous. Notre rôle est de développer et d’entraîner ce robot, que nous avons appelé “Penelope”, pour que son langage soit le plus naturel possible. Nous devons aussi veiller à prévenir d’éventuelles dérives et plaintes suite à des propos malveillants, racistes ou obscènes qui pourraient sortir de la “bouche” de Penelope.

Évidemment, mon boulot n’est pas la seule raison pour laquelle je me suis installé à L.A. Ce qui m’a attiré ici, en plus du climat ensoleillé et chaud presque toute l’année, c’est la culture du surf omniprésente, surtout à Venice. Il y a toujours de bonnes vagues à surfer. Depuis que je suis ici, j’ai pu chevaucher ma planche presque tous les jours. De plus, Venice est un vivier d'artistes en tous genres. Exhibitions, art de rue, galeries, concerts… Si vous aimez l’art, vous serez servi. Évidemment, rien n’est parfait en ce bas monde. Los Angeles a aussi ses parts d’ombre. Entre la toxicomanie qui fait des ravages et les gangs qui noircissent tous les jours les pages du journal, il faut évidemment faire attention aux lieux qu’on fréquente. Mais à part ça, la vie ici me confirme que parfois, l’herbe est plus verte ailleurs.

Mais ne croyez pas que j’ai renié l'Angleterre pour autant. Elle sera toujours ma terre natale. Ce qu’il y a, c’est que tout à Londres et Cayton me rappelait Helen. C’était trop douloureux. Vivre ici me permet de panser mes plaies, même s'il est hors de question de m’engager à nouveau dans une relation. J’ai assez souffert. Ici, à L.A., j’essaye de renaître. Ici, mon cœur ne saigne plus.