Chapitre 28 : “Some Unholly War” - Amy Winehouse

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Robbie n’arrivait pas à croire ce qu’Ari venait de lui dire. Il faisait les cent pas, on aurait dit un lion en cage. Il était furieux. Furieux car il n’aimait pas la façon dont cette affaire tournait. De plus, il détestait être réveillé à presque une heure du matin pour revenir à son bureau, au QG du LAPD, dans le centre. Le bâtiment de métal et de verre était presque désert à cette heure, à l’exception des bureaux occupés par les équipes de nuit. Ari et Robbie se trouvaient dans une des salles de réunion, avec le chef Williams.

- Tu es en train de me dire que ces deux clowns se sont introduits par effraction sur la propriété de l’un des plus dangereux gang de Californie ? s’emporta Robbie, les mains sur les hanches. Mais ils sont malades ou quoi !?

- Je t’accorde que leur idée était plutôt… stupide, répondit Ari en passant ses doigts dans ses cheveux. Mais ils reviennent apparemment avec des infos concrètes… Mme Turner serait bel et bien là.

- Et tu le crois !? s’exclama son coéquipier, sa voix montant dans les aigus. Il aura entendu l’un des colombien qui écoutait une radio, ou quelque chose comme ça ! Ça n'a rien de concret !

- Mais c’est tout ce qu’on a pour le moment ! explosa Ari en se levant de sa chaise. Et je te rappelle que plus les heures passent, moins on a de chances de retrouver cette femme !

Elle se massa les tempes. Elle sentait un bon mal de tête arriver lentement. Le chef Williams, qui avait observé la scène silencieusement, prit la parole.

- Robbie a raison. Ils ont pris un risque inconsidéré. On n’ a rien. On peut se brosser pour introduire une demande de mandat de perquisition sur base de leur témoignage. Ils ont pénétré sur une propriété sans autorisation. Vidal pourrait même porter plainte !

- Il y a bien une solution, chef…?

Robbie observa Ari en plissant les yeux.

- C’est qui ce type…? Tu couches avec ou quoi ?

- T’es malade !? répondit la jeune inspectrice, piquée au vif. Pourquoi tu dis ça ?

- Je ne sais pas… tu as l’air bien trop investie… D’habitude, tu prends plus de distance…

- Arrête tes conneries, Rob… Je te rappelle que la vie d’une femme est peut-être en jeu.

- Bon, ça suffit, intervint Williams. Johnson, vous allez dire à ces gugusses qu’ils ont intérêt à rester tranquilles s' ils ne veulent pas finir en taule pour obstruction. Avec O’Brien, vous me trouvez quelque chose, un moyen légal, pour qu’on puisse perquisitionner chez Vidal. Et vite. Si madame Turner est bien là où vous le dites, elle risque des soucis, grâce à son frère. Cherchez peut-être du côté des meurtres. Si on a une preuve évidente que ce sont les Machetes qui ont tué ces hommes, on aura quelque chose.

Ils quittèrent la salle de réunion. Robbie prit la direction du parking. Il en avait fini pour ce soir et décida qu’il rentrerait chez lui. Il remarqua qu’Ari traînait à son bureau.

- Tu restes encore ?

- Je… Oui… je serai incapable de dormir… Autant revérifier les éléments qu’on a déjà…

- Écoute, dit-il en se grattant la tête, je suis désolé de m’être emporté… Mais cette affaire est déjà assez stressante comme ça sans que deux abrutis viennent tout gâcher.

- Monsieur Turner cherche juste à retrouver sa sœur, répondit-elle sans le regarder. Vivante, si possible.

- Ouais… Je crois aussi que la perspective de cramer ma couverture m’a fait légèrement péter un plomb. Ça fait des années que je me rapproche du gang. Et s’il faut tout gâcher en débarquant chez eux pour une perquiz… Bref, tu comprends.

- Ouais, Robbie, répondit-elle, affairée à trier ses dossiers. Je comprends.

- Bon… Ben… Bonne nuit ?

- Ouais, dit-elle froidement. A tout à l’heure.

Robbie la quitta avec un signe de main. Le silence s’installa dans les bureaux. Williams était retourné chez lui aussi. Ari était seule à cet étage. Elle essaya de se concentrer et reprit tous les éléments de l’enquête. Paul Kasinski, retrouvé mort, les mains coupées, aucun lien évident avec les Machetes. Diego Lopez, ancien membre du gang, retrouvé mort chez lui, égorgé, les mains coupées. Aucune empreinte sur les deux lieux du crime. Pas d’effraction chez Lopez, ce qui donnait comme idée que la victime avait ouvert à son agresseur. Il y avait une bouteille de bière sur le sol près du cadavre, et une petite flaque de bière plus loin, près du second canapé. Ce qui confortait Ari sur le fait que l’assassin connaissait Lopez. Donc les preuves pouvaient indiquer la direction des Machetes. Mais Robbie affirmait que non. Est-ce que ses contacts étaient si fiables que ça…?

Son téléphone vibra. C’était Jake et Vince. Ils venaient d’arriver et l'attendaient dans le hall d’entrée. Elle se dirigea vers les ascenseurs, nerveuse de revoir cet homme avec qui elle avait, une heure plus tôt, brûlé d’une passion qu’elle n’avait jamais connue. Elle n’arrivait pas à clairement définir ce qu’elle ressentait pour lui. Était-ce juste le résultat de la pression de cette enquête, ajoutée à l’explosion d'adrénaline qu’il avait connu plus tôt ? Ou bien était-ce quelque chose de plus profond, plus intense ?

Elle sortit de l’ascenseur et le vit de suite. Sa haute stature et sa silhouette puissante lui donnèrent des papillons dans l’estomac. Elle se reprit vigoureusement. Elle devait rester professionnelle.

- Suivez-moi, leur dit-elle, sans s’arrêter. Elle les conduisit à l’un des bureaux du rez-de-chaussée, prévus pour les plaintes et les dépositions. Le néon au dessus de leurs têtes grésilla en diffusant sa lumière blafarde.

- Je suis désolée, commença Ari, mais votre petite aventure ne va pas nous faire avancer.

- Quoi ? s’exclama Jake. Mais… Ma soeur est là ! je l’ai entendue !

- Je sais… Je vous crois. Mais le fait que vous vous soyez introduit sur une propriété privée de façon illégale ne joue pas en votre faveur. Au contraire.

- Ecoutez, intervint Vince. C’est de ma faute si on en est arrivés là. C’est moi qui ai incité Jake à dépasser les limites. Il ne faut pas laisser cette fille là-bas.

- Et bien alors, il ne fallait justement pas jouer avec la loi, répondit sèchement l’enquêtrice.

Le silence s’installa dans la pièce. Jake se prit la tête dans les mains, apparemment désespéré par la situation. Ari ressentit une pointe de tristesse en le voyant.

- Bon, continua-t-elle. Il faut à tout prix ne plus faire ce genre de choses. Je suis sérieuse. Vous êtes à deux doigts de vous faire arrêter pour obstruction dans le cadre d’une enquête. Je… Je vais faire tout mon possible pour trouver une solution. Il faut que je trouve une bonne raison de demander un mandat de perquisition au juge.

Jake ne répondit rien, apparemment abattu.

- Je ferai tout pour retrouver votre sœur, déclara Ari. Même si je…

Jake leva les yeux sur elle.

- Même si…? demanda-t-il.

- Je… Je trouverai. Mais laissez-nous enquêter. S’il vous plaît.

Vince se leva. Il avait le regard déterminé.

- Ok, inspecteur. je comprends. On va se tenir à carreau. Mais je n’abandonnerai pas. Je vais aider Jake à retrouver sa sœur. On s’y prendra… d’une façon plus subtile, à l’avenir.

Jake voulut se lever à son tour, mais Vince le fit se rasseoir, d’une main sur l’épaule.

- Je t’attends dehors. Mais je crois que vous avez des choses à régler, dit-il en regardant Ari.

Il sortit, refermant la porte derrière lui.

Le silence reprit ses droits dans cette petite pièce.

- Je… je suis désolé, pour tout à l’heure, commença Jake. C’est moi qui… ai initié cette… situation.

- Je vous présente mes excuses aussi. Je n’ai pas été professionnelle. Je crois qu’on est sous pression tous les deux. Je… Je dois rester concentrée.

- Ouais… Bon allez…

Il se leva et se dirigea vers la sortie. Il se retourna, regarda la jeune inspectrice et lui adressa un petit signe de tête.

Ari le regarda. Elle eut envie de le rattraper. Mais elle le laissa partir.

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