Chapitre 43 : “In the Stars” - Benson Boone
Gloria raccrocha son téléphone. Elle resta silencieuse un long moment. Elle se tenait dans le petit salon attenant à sa chambre, à l’étage, garni de petits fauteuils rouges. Rouges comme le sang qui avait dû couler des blessures de Jason. Elle n’arrivait pas à y croire. Quelqu’un s’en était pris à son avocat. Á son ami. Elle savait qu’un tueur s’en prenait aux Machetes en se faisant passer pour l’un d’eux. Alejandro lui en avait parlé, et il commençait à s’en inquiéter. Elle avait gardé une certaine distance avec ces évènements, pensant que cela regardait le gang. Le plus important, pour elle, avait été de garder Liv Turner en cage, histoire de faire souffrir Jake encore un peu de temps. Mais là, elle était directement concernée. Personne ne pouvait toucher à ses amis sans s’en mordre les doigts. Qui avait fait ça ? Qui avait osé ? Il lui fallait un coupable.
Elle pensa subitement à Vidal. Il était clair que tous ces meurtres faisaient l’objet d’une vengeance à son encontre. Toute sa vie, il s’était montré cruel et sans vergogne. Tous ces actes lui explosaient maintenant au visage. Son empire était en train de s’effondrer. Tout cela, c’était de sa faute. Son plan pour s’en débarrasser avait pris forme dans son esprit depuis un moment déjà. Mais là, elle avait trouvé une motivation de plus pour passer à l’acte. Elle allait venger Jason.
Elle vit passer Pedro dans le jardin. Elle frappa à la fenêtre et lui fit signe de venir la rejoindre. Elle avait besoin de se confier, de pleurer sur une épaule solide. Il arriva peu après, un air interrogateur sur le visage. Sans rien dire, elle s’approcha de lui, le prit dans ses bras et se mit à pleurer.
- Madame Gloria, s’inquiéta-t-il. Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi pleurez-vous ?
- C’est Jason… Il a été tué.
- Maître Finnley !? Comment ?
- On l'a retrouvé à son bureau. C’est un meurtre.
Pedro sentit son cœur battre à tout rompre. Il se rappela soudain que la dernière fois qu’il avait vu l’avocat, il s’en était pris à lui. Il avait même voulu sa mort. Il garda le silence et resserra son étreinte.
- Tu peux garder un secret, Pedro ? demanda-t-elle.
- Oui…
- Je sais que d’une façon ou d’une autre, c’est Vidal qui est responsable. Je vais veiller à ce qu’il paye.
Au ton de sa voix, Pedro ressentit la haine de sa patronne pour le chef de gang. Une haine qu’ils partageaient tous les deux.
- Si vous voulez, déclara-t-il d’une voix profonde, je peux m’en occuper.
Elle fut surprise par le changement de ton, plus sombre, du jeune homme. Elle qui le prenait pour un garçon gentil et honnête, elle constatait maintenant qu’il pouvait aussi avoir une part d’ombre. Mais elle refusa qu’il soit corrompu.
- Non, trésor. Tu n’es pas un tueur. Ne prends pas cette voie. Je l’ai empruntée il y a longtemps, et je recommencerai avec Vidal. Mais toi, reste éloigné de tout ça.
Pedro garda le silence, se demandant ce qu’elle avait bien pu vouloir dire. Son téléphone vibra, ce qui le fit tressaillir.
- Un problème ? demanda Gloria.
- C’est sûrement encore la police… à propos de Victor.
- Et bien décroche ! Ils l’ont peut-être retrouvé !
- Non. C’est une bande de menteurs. Ils se fichent complètement des gens comme nous.
Elle s’écarta de lui, fronçant les sourcils.
- Pedro Juan Santos Aguilar ! Tu vas arrêter de te conduire comme un gamin et me décrocher ce téléphone !
Le jeune homme s'exécuta, de mauvaise grâce. Il répondit, écouta un instant, puis écarquilla les yeux avant de raccrocher.
- Alors ? demanda sa patronne.
- Ils ont des nouvelles à propos de Victor. Ils me demandent de me rendre au poste.
- Viens ! Je vais t’y conduire. Mais je n’entrerai pas, je t'attendrai devant.
Ils montèrent dans l’Audi A8 de Gloria et partirent en trombe. Pedro avait un mauvais pressentiment. Son cœur lui hurlait qu’il allait apprendre une mauvaise nouvelle. Était-ce le ton que le policier avait employé au téléphone, ou les mots qu’il avait utilisés ? Pedro n’arrivait pas à le définir. Mais c’est comme s’il savait déjà. Sa jambe tremblait furieusement pendant tout le trajet. Arrivés à destination, il sortit en courant, laissant Gloria qui s’éloigna un peu pour se garer dans un endroit plus discret.
Le jeune homme déboula dans les bureaux du L.A.P.D. Il fonça tout droit sur les ascenseurs, en direction du bureau de l’inspecteur Johnson. Elle le vit arriver de loin.
- Pedro ! Venez, allons dans un bureau là-bas, nous serons plus tranquilles.
Il la suivit, à la fois inquiet et nerveux. Ses mains tremblaient et son cœur pompait furieusement. Qu’allait-elle lui annoncer ?
Ils prirent place autour de la table et furent rejoints par un inspecteur roux avec une moustache. Johnson le présenta comme étant l’inspecteur O’Brien, son coéquipier.
- Ecoutez, je dois vous annoncer quelque chose de… compliqué. Nous… Nous avons retrouvé un corps dans une ruelle. Il semblerait qu’il appartienne à votre frère.
- Comment ça “il semblerait” ? s’étrangla le jeune homme.
- Et bien… Il portait les mêmes vêtements que ceux que vous nous avez décrits et nous avons retrouvé son portefeuille dans une de ses poches.
Pedro sentit une chape de plomb lui tomber dessus. Il n’avait plus de force. Sa respiration était courte et il n’arrivait plus à penser. Une douleur lui vrilla les tempes. Une seule idée s’imposait à lui : son petit frère était mort.
- Est-ce que… est-ce que je peux le voir ?
L’inspecteur Johnson le regarda avec compassion.
- Je… Il ne vaut mieux pas. Le corps est dans un très mauvais état. Il faut que vous gardiez une belle image de lui.
En entendant cela, une colère sourde commença à s’immiscer dans les entrailles de Pedro. Elle lui avait promis que tout irait bien. Elle lui avait dit qu’elle le retrouverait. Qu’il ne devait pas s'inquiéter ! Et maintenant elle lui conseillait de “garder une bonne image de lui” !?
Il serra les poings et laissa éclater sa colère.
- Vous m’aviez promis que tout irait bien ! hurla-t-il. Menteuse ! Vous êtes une menteuse ! Depuis le début vous me mentez !
Il explosa comme un volcan. Furieux, il se leva et voulut renverser la table, mais le flic roux, derrière lui, le saisit par les épaules pour le retenir. Pedro se retourna et lui décocha un crochet dans la mâchoire. O’Brien s’effondra, sonné, pendant que Ari lui criait de se calmer. Il l'empoigna par la chemise, prêt à frapper de nouveau, mais des policiers surgirent dans la pièce et maîtrisèrent le jeune homme, qui hurlait, fou de rage et de tristesse, à s’en arracher la gorge. Ils l’emmenèrent de force vers une cellule de dégrisement, criant et pleurant la mort de son frère.
Ari aida Robbie à se relever.
- Ça va ? lui demanda-t-elle.
- Ouais… Il a une sacré détente…
- Je me sens tellement mal pour lui… On va le garder pour la nuit. Je préfère le savoir ici, en sécurité, que dehors. Dieu seul sait ce qui pourrait lui arriver.
Dehors, Gloria attendit un moment. Puis elle entendit une discussion entre deux flics qui traversaient devant sa voiture. L’un d’eux se moquait du fait que “O’Brien s’était fait retourner comme une crêpe par le jeune”. L’autre répondit, sérieux, que ce n’était pas marrant. Le petit venait de perdre son frère.
Gloria compris qu’elle perdait son temps à rester là. Elle décida qu’il fallait passer à l’action.
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