Chapitre 47 : “Scumbag Blues” - Them Crooked Vultures

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Ari pivota sur elle-même et vit avec horreur une silhouette sombre tenir Jake par derrière. L’homme avait saisi les cheveux de Turner et tenait sa lame sous sa gorge, prêt à trancher. Johnson pointa son arme en essayant de viser la tête de l’attaquant. Mais impossible de faire quoi que ce soit. Elle risquait de blesser Jake. L’ombre se mit à rire, d’un rire de fou.

- Allons, allons, inspecteur Johnson. Pas de bêtise.

- Lâchez-le !

- Et risquer de me prendre une balle ? T-t-t, non, non… Je ne suis pas aussi stupide que j’en ai l’air…

- Vous êtes foutu ! Les renforts arrivent !

- Je sais. Mais foutu pour foutu, autant disparaître en beauté, hein ?

Jake essaya de se débattre pour se libérer de l’emprise de l’homme mais celui-ci enfonça la lame sur sa gorge. Turner sentit le métal entrer dans sa peau, faisant couler une larme de sang sous l’angle de sa mâchoire vers sa clavicule. Jake leva les mains en signe de reddition et cessa de bouger. Profitant que sa victime se soit calmée, il lâcha brièvement ses cheveux et retira son masque. Ari pu enfin voir clairement le visage du tueur. Il souriait de toutes ses dents. Elle le regarda, ne le reconnaissant pas.

- C’est mon frère qui ne va pas être content, ricana-il. Il va encore dire que je fais n’importe quoi. Je parie qu’il est venu pleurnicher quand j’ai disparu…

Ari ouvrit grand les yeux.

- Victor ? Vous êtes Victor Aguilar ?

- Ding ! Ding ! Bonne réponse ! Vous êtes plus futée que je le croyais !

- Si vous êtes vivant, qui est la victime décapitée qu’on a trouvé ?

- Lui ? Oh, juste un mec… Un nouveau venu dans le gang. Il suivait Cruz et Villaposa comme un petit chien. J’ai pris soin de laisser mon ADN sur son t-shirt.

A ces mots, il montra son avant-bras, entouré d’un pansement ensanglanté.

- Victor… Mais pourquoi !? Pourquoi tous ces morts !?

- Ah… C’est le moment où le méchant explique ses motivations, c’est ça ?

Ari ne répondit pas, continuant de pointer son arme sur Victor. Sa main tremblait. Elle sentait son coeur battre furieusement dans ses tempes. Elle regarda Jake, l’homme qu’elle aimait, menacé par un tueur psychopathe et tenta de repousser le désespoir qui s'immisçait en elle.

- Quand nous sommes arrivés dans ce pays, mes parents espéraient que nous aurions une belle vie. Le rêve américain, ce genre de conneries. Mais on s’est vite rendu compte qu’on serait toujours des étrangers ici. Ça a empiré quand mon père est mort. Mon frère s’est mis à travailler pour aider maman. Mais la misère s’accrochait quand-même à nous, comme une maladie honteuse. Personne ne s'intéresse vraiment aux gens comme nous. Et puis, j’ai rencontré Alejandro Vidal. Il avait une belle voiture, et les hommes qui travaillaient pour lui étaient bien sapés. Je les admirais. Pour moi, ils représentaient le pouvoir. Personne n’ose s’opposer à Los Machetes. Alors je les ai rejoints. Au début, je faisais des petites livraisons, des trucs faciles… J’ai commencé à avoir de l’argent. Et puis, j’ai vu l’envers du décor.

Victor regarda dans le vide, son sourire s’effaçant peu à peu, resserrant son emprise autour de la gorge de Jake dont le sang commençait lentement à envahir le haut du t-shirt..

- J’ai vu des choses… horribles, continua Aguilar. Vous n’avez pas idée. Au début, j’ai voulu partir, je ne voulais plus faire partie… de tout ça. Mais Vidal l’a remarqué. Et puis, je lui devais de l’argent, pas question de me lâcher comme ça. Alors il m’a obligé à faire… ce genre de choses. Il m’a emmené chez une famille… Le père lui devait de l’argent. Il m’a dit “c’est lui ou ton frère. Tu choisis.”. Alors je l’ai fait. J’ai tué cet homme. Devant sa famille.

Une larme coula de l’oeil de Victor. Il retroussa le nez, dans une grimace de défi.

- Ce jour-là, je crois que j’ai… basculé. Je me suis juré de faire s’écrouler l’empire de Vidal. Petit à petit.

- Mais Kasinski ? Qu’avait-il à voir avec tout ça ?

- Kasinski ? Oh… Vous devez parler du vieux qui a essayé de s'interposer quand on a enlevé la chica ?

Jake tressailli en entendant ça. Victor tira de plus belle sur ses cheveux pour le calmer.

- Javier et Pablo l’avaient embarqué aussi, continua-t-il, parce qu’il nous avait vus. Ils l’ont roué de coups dans la camionnette pendant que je conduisais. Puis ils m’ont dit de m’arrêter près d’une ruelle. Ils l’y ont jeté comme un vulgaire sac d’ordures. Le pauvre vieux n’était pas mort, mais il souffrait énormément. J’ai dit que je ne me sentais pas bien, que j’allais être malade. Ils se sont moqués de moi et ils sont repartis en me laissant là. Je savais que le vieux n’allait pas survivre. Alors j’ai fait ce qu’il fallait. Mais le gang n’allait pas s’en sortir à bon compte. J’ai laissé leur “signature”. C’est là que j’ai décidé que j’allais me les faire les uns après les autres.

Ari regarda Victor avec dégoût. Pensait-il réellement qu’il avait rendu un service à ce pauvre vieux Kasinski ?

- Vous n’avez aucun mérite, rétorqua-t-elle. Si vous aviez appelé une ambulance, il aurait peut-être pu être sauvé… Et pour les autres ? Diego Lopez ? Tito Herredia ?

- Au début, je ne voulais pas tuer Diego. Il avait réussi à quitter le gang. Je lui ai parlé de mon plan, je voulais qu’il m’aide. Mais il a refusé. Il m’a traité de fou. Je savais qu’il allait me vendre aux flics. J’ai juste pris mes précautions. Les autres meurtres faisaient partie de mon travail de sape pour détruire le gang. J’ai pris un plaisir particulier à buter Javier et Pablo. C’étaient des porcs. L’avocat aussi. Il travaillait pour Vidal et c’était un sombre connard.

- Vous auriez pu agir autrement, objecta Ari. Nous vous aurions aidé, protégé même. Nous aurions pu vous aider à faire tomber le gang !

Victor éclata de rire.

- Ne soyez pas si naïve, inspecteur... Si vous saviez… Certains de vous sont comme les Machetes. Certains sont des Machetes.

Ari hésita un moment.

- De quoi parlez-vous ?

- Qu’est-ce que vous croyez ? Comment croyez-vous que Vidal a été mis au courant de votre petite visite surprise ? (Il tourna la tête) Oh tiens ! Justement insp…

BLAM ! BLAM !

Deux déflagrations qui explosèrent dans la pièce. Ari se replia sur elle-même, protégeant sa tête dans ses mains. Sous le choc, elle ouvrit lentement les yeux. Ses oreilles sifflaient, et il lui fallut un moment pour reprendre ses esprits. Victor et Jake gisaient sur le sol, inanimés. Aguilar avait un trou béant au niveau du front. Elle se releva lentement et vit Robbie, debout, immobile. Il pointait toujours son arme fumante en direction de Victor. Il remarqua Ari et pivota, pointant son Glock sur elle.

- Robbie !

- Je suis désolé Ari. Depuis le début, j'espérais qu'on n'en arriverait jamais là.

Ari comprit de quoi il retournait. Elle dut admettre que cette crainte qui avait pris forme dans son esprit auparavant était maintenant confirmée. Elle n’avait pas voulu l’admettre, elle avait rejeté cette idée. Elle pourtant, elle savait.

- Robbie… Le fiasco à l’hacienda de Vidal. C’était toi. Tu l’as prévenu. Ta mission sous couverture… tu t’es laissé corrompre, c’est ça ?

- Ils menacent ma famille, Ari. Ça fait longtemps que Vidal a compris que j’étais sous couverture. Mais il ne m’a pas tué. J’étais bien trop utile pour lui. Je devais travailler pour lui, ou il s’en prendrait à Jodie et aux enfants. Je n’avais pas le choix.

Son visage était ravagé par la culpabilité. C’était un homme détruit que Johnson avait devant elle.

- Mais il fallait nous en parler, répondit-elle. On aurait pu t’aider !

- Ari… Je ne suis pas le seul que Vidal tient sous sa coupe. Le Juge Maxwell, Whitechurch…

- Al Whitechurch !? C’est… C’est lui qui a ordonné qu’on arrête de chercher Liv Turner !?

- Ouais. Il voulait qu’on laisse tranquille Vidal. Le pire, c’est qu’aucune menace ne pèse sur lui. Il fait des affaires plutôt juteuses avec le gang. Si tu savais le pognon qu’ils se font…

- Robbie… On peut les arrêter ! Il faut que tu nous aides, que tu témoignes contre eux !

- Désolé, Ari. Je ne prendrais aucun risque. Je dois protéger ma famille. Je regrette, mais tu en sais beaucoup trop.

Il ajusta son arme, visa Ari et tira. Au même moment, il fut renversé par Jake qui, s’étant relevé d’un coup, s’était jeté sur lui. La balle siffla au-dessus de la tête de Johnson, qui roula sur le sol. Jake décocha un coup de poing furieux qui atteint Robbie au menton. Celui-ci s’écroula avant de se relever d’un coup en agrippant son adversaire à la taille. Ils roulèrent sur le sol. Turner était plus grand et plus fort, mais l’inspecteur avait fait de la lutte à l’université et connaissait les prises pour maîtriser un assaillant. Des coups de poings fusèrent de part et d’autre. Robbie avait le dessus, assis à califourchon sur le torse de Jake. Soudain, le flic récupéra son arme et tenta de la pointer sur l’autre, qui retenait son poing de toutes ses forces. Jake commençait à fatiguer, perdant du sang de sa blessure infligée par Victor. Robbie allait réussir à le viser pour lui tirer dessus. Ari se releva, sonnée du coup de feu tiré plus tôt. Elle vit le Glock se rapprocher inéluctablement du visage de l’homme qu’elle aimait. Plus que quelques secondes… Et un choc sourd retentit dans la pièce, avant que O’Brien s’écroule, inconscient. Vince se tenait derrière lui. Il venait de l’assommer avec une brique trouvée plus loin.

- Je savais que je ne pouvais pas le sentir, ce mec, déclara-t-il en le regardant de haut. Mais qu’est ce qui s’est passé ici ? On se croirait dans un film d’horreur !

- Il y a qu’on a chopé ce tueur à la machette, répondit Jake en se relevant. Merci, mec. Tu viens de me sauver la vie.

Ari passa les menottes à Robbie qui était en train de se réveiller. Au loin, on entendait les sirènes de police hurler.

- Bon, ça suffit, Robbie, déclara Jake. Où est ma sœur ?

- Je ne sais pas où ils l’ont emmenée, répondit le flic. Je le jure.

- Il va falloir qu’on fasse sortir Vidal de son trou, dit Ari.

- Il est temps de mettre mon plan à exécution. Ari, tu me fais confiance ?

- Oui, répondit-elle.

Jake prit son téléphone portable et appela Jay.

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