Chapitre 49 : “Goodbye” - Cage The Elephant
Pedro marchait, hébété, en direction de la maison de Gloria. La police l’avait relâché quelques heures plus tôt. Depuis, il avait dû annoncer à sa mère la mort de Victor. Sous le choc, elle s’était évanouie. Sa tante et son oncle, habitant l’appartement du dessus, avaient entendu sa clameur et étaient arrivés, suivi bientôt du reste de la famille, et très vite leur petit appartement avait été envahi de pleurs et de murmures. C’en était trop pour le jeune homme. Il devait sortir de là, bouger. En fait, il voulait aller voir Gloria. Il avait le sentiment qu’elle seule le comprenait vraiment.
Quand il arriva, la nuit était tombée et la villa de sa patronne était plongée dans l’obscurité, à part une petite lueur à la fenêtre du salon. Bizarre. Il en fit le tour et entra par la porte de derrière, qu’il savait ouverte à cette heure. Il parcourut la maison en appelant Gloria et se dirigea vers le salon. Soudain, il la vit. Elle était étendue sur le sol, inanimée. Il fonça sur elle et la prit dans ses bras, essayant de la réveiller. La panique le gagna quand il se rendit compte que son cœur battait très lentement. Finalement elle ouvrit faiblement les yeux. En voyant Pedro, elle essaya de dire quelque chose. Il pencha la tête et l’écouta. Elle arriva à prononcer les mots “Vidal… Ne reste pas… Fuis ! “. Puis son corps se détendit et ses yeux se fermèrent. Gloria Rockwell rendit son dernier souffle dans les bras de Pedro, qui n’arrivait pas à croire ce qui était en train de se passer. Une boule de tristesse et de colère explosa dans sa poitrine et il poussa un cri de désespoir. Il serra la femme contre lui et fondit en larme. Il resta ainsi un bon moment, ne sachant pas quoi faire.
Il se remémora leur première rencontre. Il faisait du porte à porte pour offrir ses services de jardinier. Alors qu’il venait d’essuyer plusieurs refus, Gloria l’avait invité à entrer. Elle lui avait offert un rafraîchissement et l’avait encouragé à lui parler de ce qu’il proposait. Quand elle avait entendu son offre, elle avait accepté de suite et s’était montrée très contente de l’avoir engagé. Dès les premiers instants, elle avait été gentille et accueillante avec lui. En fait, à bien y réfléchir, elle l’avait traité comme un membre de la famille. Oui, il travaillait chez elle. mais pas une seconde elle ne lui avait fait sentir leur différence de classe sociale. Gloria était comme ça. Elle pouvait avoir un sale caractère, se montrer même capricieuse, mais elle faisait tout pour ceux qu’elle considérait comme ses proches.
Les rayons de lune vinrent frapper le mur de grandes lignes blanches. Pedro caressait les cheveux de Gloria, comme pour lui dire qu’elle pouvait se reposer. Silencieusement, il lui fit ses adieux.
Après un moment, il entendit faiblement une voiture s’arrêter dans l’allée. Pedro releva la tête, se demandant qui cela pouvait être. La porte d’entrée s’ouvrit et Vidal, accompagné d’un homme de main, entra et remarqua directement le jeune homme. Pedro le reconnut de suite. Il sentit la rage s’emparer de lui. L’homme qui avait tué Gloria se tenait là. C’était lui aussi qu’il tenait pour responsable de la chute et la mort de son frère. Il se leva et se prépara à affronter cet homme qu’il détestait plus que tout. Ses mains tremblaient, tant sa haine brûlait en lui.
Alejandro le regarda de haut en bas, se demandant ce qu’un domestique pouvait bien faire là. Le chef de gang soupira.
- Ma soirée a déjà assez été merdique comme ça… Qu’est-ce que tu fais ici, toi ?
- Merdique ? Votre soirée à été merdique ? éructa Pedro. Oh, c’est pas fini. Vous avez assez fait de mal autour de vous !
Le jeune homme se dirigea vers Vidal, prêt à en découdre.
- Vous avez détruit ma famille, continue-t-il. Vous ne ferez plus de mal à personne.
Alejandro pouffa d’un rire méprisant et sortit une arme de sa veste. Il visa le jeune homme et tira, sans même hésiter une seconde. Pedro fut touché à l’abdomen. Une brûlure insupportable lui tordit les boyaux et il tomba sur le sol. Vidal s’approcha lentement et visa la tête.
- Tu aurais dû rester à ta place, susurra-t-il.
Son doigt se resserra doucement sur la détente, mais soudain des sirènes de police retentirent devant la maison. Vidal et son acolyte prirent la fuite par la porte de derrière.
Pedro entendit vaguement les agents tambouriner à la porte. Couché sur le sol, il regardait le plafond et avait l’impression d’être coupé en deux. Il sentait son corps se vider de son sang. Les moulures au plafond lui rappelèrent les branches d’un arbre. L’Arbre des Secrets. Il se remémora ces heures passées sous cet arbre, avec Victor. Cette pensée le fit sourire. La douleur disparaissait peu à peu. Un voile noire recouvrit son regard. Il sombra dans un sommeil sans rêves.
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