Mener la danse

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— Quelle belle surprise Adeline. Tu as bien changé !

— Toi aussi.

Je m’assois en face en jouant mon plus beau rôle, la femme fatale. Il me relooke avec un peu d’envie et moi je le trouve métamorphoser. Une barbe plus fournis et quelques laisser aller dans ses cheveux plus long. Il a même maigri et cela m’inquiète soudainement…

Non ! Je dois être heureuse qu’il soit loin de moi ! Il doit continuer à payer pour ses crimes ! Je décide de rester naturel et bien qu’il montre que je lui manque, son œil est moins pétillant…

— Comment tu vas ? Tu manges bien ?

— Tu t’inquiètes de ton ex-mari violent ?

Oui, il ne va pas bien…Il montre un autre état, plus triste, plus fatigué et je le sais sincère.

— Pourquoi tu es là ?

— En vrai ? Aucune putain d’idée…une envie de savoir ce que tu deviens, je sais que normalement je n’aurais pas dû être là…et toi ? Tu aurais pu refuser et comme tu as voulu pas avoir d’avocat.

— Envie aussi de savoir ce que tu deviens…tu sais, tu ne vas évidemment pas me croire mais j’ai changé…

— Tu as perdu du poids, tu te laisses aller…

— La prison fait des ravages. Tu es magnifique comme toujours enfin non, encore plus qu’avant. Tu rayonnes.

— Merci mais n’en fais pas des caisses, je connais ton jeu.

— Je ne joue plus et je ne t’ai jamais menti sur ta beauté. Je vois que tu es mariée, toujours avec lui ?

— Oui et mon fils, sept ans, Noa. C’est ma famille.

Je sors la photo et il pleure. Je ne l’ai jamais vu comme ça et pourtant, il est trop tôt pour le pardonner….

— Pardon…tiens.

— Tiens.

— Merci.

Il prend mon mouchoir et j’attends qu’il dise quelque chose :

— Pardon, je…

— Tu aurais voulu être père ?

— Oui mais je repense surtout à mon enfance…

— J’ai jamais compris ce qu’il y a dans ton crâne. Qui est tu Alex ? Un homme violent ? Quelqu’un de manipulateur pour réussir à briser tes victimes ou bien réussir tes projets irréalistes en vue d’exister ? Pourquoi tu ris ?

— Sept ans de thérapie et même si je ne sortirais jamais, sept ans que je me décortique pour comprendre comment moi est tant dériver à la place de mon frère…pourquoi j’ai tant détruit de vies y compris la mienne…

— Je ne sais pas si je peux te pardonner….

— Tu as raison, je me hais. Je ne cherche pas la pitié et si tu me laisses crever seul, je comprendrais, j’ai l’habitude.

— Tu as trouver une réponse à tes comportements ?

— Le père.

— Ton père ?

— Oui…il voyait en moi le parfait jouet. Le parfait apprentis capable de réussir ce qu’il a échoué en partit. Il était alcoolique, violent et ma mère était soumise, tellement qu’elle me disais d’écouter mon père. Tu sais mon intention d’un gouvernement mondial, je pensais le garder pour moi mais un jour, il m’a forcé à tout lui dire. Il m’a aussi convaincu de diriger tes parents alors que je voulais pas. Et donc dominer, écraser et ne se jamais laisser faire. Je voulais le rendre fier et j’ai continué cette voix…

Il reprend ses larmes et je pose ma main par réflexe sur son bras gauche. On a déjà un point commun…je doute à nouveau. Me dit-il vraiment la vérité ? Mes yeux restent humides et je décide de continuer à l’écouter avant de partir pour prendre du recul.

— Tu as eu un peu le même père…tu sais, j’aimais tout contrôler, rien laisser passer pour pas paraître faible…mon amour pour toi est un poison qui continue à me tuer à petit feu….je mérite entièrement la taule.

— Pourquoi me mentir ? Tu aurais pu me dire la vérité, tes sentiments…

— Je sais ! J’avais réellement commencé mais ma peau de Diable et sa voix étaient si puissantes que je me suis ravisé…La peur d’être un homme faible…

— Et aujourd’hui ? Après ces années de thérapies ?

— Je pense aider en cuisine mais pour le moment, je suis trop dans le trou, ayant besoin de médocs pour m’aider…Tout manière j’ai encore au moins vingt ans pour m’occuper. T’occupes moi, prend soin de toi, de ta famille. C’est le plus important.

— Je ne sais pas si je peux te pardonner, je te le répètes…

— Merci de m’écouter, d’être venu. Je suis sincère dans tout ce que je te racontes.

— Je te comprends un peu. Rendre fier ses parents quitte à s’effacer, on les écoutent pour se détruire…

— Tu sais, tu es la seule dernière personne qui peut venir me voir…si tu décides de revenir, c’est le plus beau geste d’amour, de soutient pour moi. Après tout ce que j’ai fait subir surtout ce dernier soir…

— Je dois réfléchir

— Prend l’air, passe du temps avec ta famille. Ton ex salaud de mari est bien au chaud entre quatre mur. Je l’étais déjà dans ma tête…

Je lui serre encore le bras et je me lève pour m’en aller. Il se lève aussi et je reviens lui faire un baiser sur la joue.

— Je…je te crois. C’est surréaliste j’en ai conscience mais si tu n’avais pas changé, tu aurais une meilleure gueule, tu m’aurais menacé et aucunement parlé un peu de ta vie.

— Adeline…

— Je te promet de revenir avec de quoi reprendre ta vie en main. Tu es en taule oui, mais pas seul, plus seul. Je ne sais quand je reviens mais je reviendrais avec tes idées. En fait, je te pardonne uniquement pour couper le fils du passé sanglant. On repart sur de bonnes bases, ça te vas ?

— Adeline…j’ai pas besoin de tout ça…c’est gentil évidemment mais…

— On inverse les rôles. Je mène la danse, j’étais en prison, c’est ton tour. Je suis aujourd’hui libéré, heureuse et forte.

— Merci.

Il se laisse aller dans mes bras et je pleure aussi. Puis, je lui caresse sa barbe et sèche ses larmes avant de repartir. Je refume une deuxième cigarette avant de reprendre la route pour aller chercher Noa à l’école pour son cours de foot.

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