Chapitre 5 :
La journée avait été riche en information et en rebondissement pour tout le monde. Ils étaient tous fatigués. Les surdoués remontèrent par l’escalier principal, les garçons prirent le couloir de droite, les filles celui de gauche. Arrivée dans sa chambre, Iris décida de ranger ses vêtements et les objets qu’elle avait emmenés. C’était dimanche, seuls les petits avaient cours demain. La jeune fille allait devoir se réveiller très tôt mardi et mercredi matin, le bon côté, c’était qu’elle allait pouvoir faire ce qu’elle voulait à part enfreindre les règles, même si elle en avait très envie. Après avoir rangé, la jeune fille sortit son portable. Elle ne pouvait pas envoyer de message. Elle ne pouvait pas communiquer avec Kilian. C’était comme si on lui arrachait son cœur. La jeune fille se rendit compte qu’être séparée de Marin et Cassandra l’affectait beaucoup, mais être séparée de Kilian était bien pire que cela, c’était comme lui arracher un membre. Iris s’en voulait de penser, de s’inquiéter et de ressentir un manque pour Kilian alors que c’était loin d’être aussi fort pour ses deux autres amis. Mais son amitié avec Kilian était tellement forte. Elle se sentait déjà mal de ne pas le voir pendant plusieurs heures tous en sachant qu’elle ne le reverrait pas avant deux ans. Deux ans… Deux ans, cela allait être tellement long pour elle. Loin de ses parents et de ses amis. Certes, elle appréciait et s’entendait super-bien avec les autres surdoués, ils allaient sûrement devenir une seconde famille. Mais rien ne valait ses parents et sa bande habituelle ainsi que Mme. Keys.
Quand elle eut fini de ranger ses affaires, la jeune fille se posta devant la porte d’entrée pour examiner sa chambre dans les moindres détails. Ce qu’elle n’avait pas pu faire à cause de Nicolas. Le lit double en métal ne lui plaisait pas du tout, le matelas n’avait même pas de housse, une grosse couette était mal pliée dessus et seul l’oreiller en possédait une. Cette dernière était blanche. La jeune surdouée prévoyait de mettre le lit debout contre le mur au côté où il n’y avait rien, pour ne dormir que sur le matelas à même le sol avec l’oreiller et la couette. L’armoire était sur le côté gauche du mur de la porte, le bureau de l’autre côté du même mur au côté de la bibliothèque. Le sol était dans une matière qui lui était inconnue, mais elle était grise foncée, les murs étaient colorés de blanc cassé. Il n’y avait qu’une seule et unique fenêtre qui ornait le mur gauche. La jeune fille s’y approcha et ouvrit. Même si le sable ne passait plus, l’air de la tempête si. Un courant d’air violent projeta les deux parties de la fenêtre contre le mur. Ses cheveux volèrent. Iris referma difficilement la fenêtre. Les conseillers n’avaient pas choisi la meilleure période météo pour les envoyer ici.
La jeune fille ressortit les lettres et les relut une dizaine de fois. Iris ne savait pas ce qu’elle avait à les relire, mais elle ressentait le besoin de les relire indéfiniment comme si cela allait lui permettre de supporter la distance entre elle et ces êtres les plus chers. Elle expédia sa douche et se coucha. Le lendemain matin, elle se leva vers neuf heures. Les petits devaient être en cours. Elle enfila des vêtements et alla à la cafétéria un stylo et un bloc-notes à la main et la jeune fille ne voulait pas attendre de retourner dans sa chambre pour le faire. Elle devait définir ce qu’elle allait faire, et aussi découvrir la véritable raison du pourquoi ils les avaient emmenés ici. Iris avait beaucoup réfléchi la nuit dernière, et elle avait tiré comme conclusion : que le fait de séparer les enfants en groupes par rapport à leur âge et leur intelligence montrait bien qu’ils n’étaient pas ici que pour éviter la guerre. Le fait que certains endroits soient interdits ou que les adultes n’en parlent pas était tout aussi louche. Il y avait forcément autre chose, la surdouée en était persuadée et elle allait découvrir quoi. Et rien ni personne n’allait pouvoir sortir son idée de la tête. Ni l’empêcher de l’accomplir. Elle devait préparer un plan. La jeune fille hésitait à en parler aux autres. Elle pouvait très bien en parler aux grands, mais pas aux petits pour ne pas les effrayer. La surdouée n’avait juste pas envie qu’ils la prennent pour une tarée parano. Parano, elle l’était, mais tarée, pas encore.
La jeune fille prit un bol de chocolat chaud fumant, une cuillère, du sucre, deux croissants, un pain au chocolat ainsi qu’une petite bouteille de jus d’orange. Les viennoiseries semblaient bonnes et elle l’espérait. La jeune fille se demandait où passaient les adultes qui préparaient tout cela, elle ne les avait encore jamais vues. Étaient-ils aussi cruels que les autres qu’elle avait déjà rencontrés ? Quand elle entra dans la cafétéria, Iris repéra Samuel et Maryline qui avaient entamé leur petit-déjeuner. La jeune fille vint se poser à leur table.
— Salut Iris.
— Dis donc, tu as faim le matin toi, se moqua gentiment Samuel.
La jeune fille laissa échapper un rire en sortant son bloc-notes.
— Je n’ai juste rien avalé hier. Il y a tellement eu de changement que cela m’a coupé l’appétit.
— Comme tout le monde, conclut Maryline.
Iris laissa tomber le sucre du sachet dans le chocolat et tourna avec sa cuillère. Elle avala quelques gorgées du liquide brûlant et sucré. Puis elle but du jus d’orange et mangea un bout de croissant qu’elle avait fait tremper dans le chocolat et un morceau de pain au chocolat. La jeune fille alternat les deux aliments tout en griffonnant ses taches sur son bloc-notes. Un silence régnait, tout le monde se laissait manger en paix. Et ce n’était pas plus mal. De toute façon, Iris n’était pas très bavarde le matin, elle n’aimait pas parler aux gens.
— Que marques-tu sur ton carnet ? demanda Samuel.
— C’est un bloc-notes, rectifia Iris qui était très pointilleuse sur les choses de ce genre.
Elle leur tendit le bloc-notes après avoir fini de tout marquer. Les deux autres purent lire en même temps puisqu’ils étaient à côté.
Ce que tu as intérêt à faire pendant ses deux ans :
1 – Déplacer le matelas du lit, mettre le lit à horizontale contre le mur pour ne pouvoir dormir que sur le matelas. (mettra sûrement un jour sans problème)
2 – Trouver par où commencer pour trouver la raison de notre débarquement dans le désert loin de nos familles dans ce bâtiment horriblement laid et sans joie. (mettra sûrement un moment indéfini)
3 – Trouver quelque chose pour communiquer avec Kilian (idem au 2).
Un sourire moqueur se dessina sur le visage de Samuel. Maryline la regarda surprise.
— Tu n’arriveras pas à communiquer avec ton cher Kilian. Ils ont dû nous séparer exprès, diviser pour mieux régner.
Iris soupira, elle n’y avait pas pensé, il avait raison. La jeune fille raya la troisième tâche. Maryline continuait toujours à la regarder bizarrement. Iris ne le remarqua qu’à la fin du repas, elle s’était contentée de manger.
— Qu’est-ce qu’il ne va pas Maryline ?
— Qu’est-ce que tu voulais dire quand tu parlais de trouver la raison de notre débarquement ici ? Tout le monde sait pourquoi nous sommes là, nous sommes là pour ne pas mourir canarder de bombe.
Iris n’avait pas vraiment prévu que la jeune fille eut l’idée de lui poser la question. Après tout ce n’était pas étonnant, eux aussi étaient des surdoués, mais Iris n’avait pas l’habitude de côtoyer d’autres surdoués. La surdouée regarda autour d’elle. Ils n’étaient pas seuls, Nicolas était là, accompagné d’un autre adulte homme, grand mais impossible de le voir. Il était caché par un long manteau noir et un chapeau qui cachait sa tête.
— Suivez-moi, invita Iris, il ne faudrait pas qu’ils nous entendent, ajouta-t-elle à voix basse en montrant du regard les deux adultes qui discutaient.
Iris mena les deux autres à sa chambre. Ils s’installèrent sur le lit.
— Bien voilà. J’ai beaucoup réfléchi. Je ne sais pas le pourquoi, mais je suis sûre que les bombardements ne sont pas les seules raisons de notre venue, avoua Iris.
— Qu’est-ce qu’il te fait penser cela ? s’étonna Samuel.
— Eh bien… Plusieurs raisons à vrai dire. Encore… Que l’on nous regroupe par âge, d’accord, mais vous trouvez cela normal qu’ils regroupent les surdouées tous ensemble ?
— C’est vrai que c’est un peu bizarre, concéda Maryline.
— Et vous ne trouvez pas cela encore plus bizarre qu’ils ne nous donnent pas d’informations sur les salles d’en bas ?
— Oui, je trouvais, cela louche aussi. Tu viens de confirmer mes doutes. Tu as raison. Il faut trouver la vraie raison de notre débarquement. Si cela se trouve, c’est une raison complètement folle qui n’est pas du tout bonne pour nous, s'inquiéta Samuel.
— Oui. Bon, ce n’est pas tout, mais moi j’ai du boulot à faire ! s’exclama Iris.
En fin de compte, Samuel l’aida à déplacer son lit. Maryline était retournée dans sa chambre. Puis, le garçon repartit dans la sienne. Iris raya la tâche numéro une. Elle n’avait qu’une seule tâche : trouver pourquoi on les avait envoyés ici. La jeune fille ne savait pas trop par où commencer. Elle se décida à commencer ses recherches demain après-midi, elle avait cours le matin. Elle ressortit les lettres et les relit inlassablement. Puis, elle regarda longuement les photos de ses amis. Deux ans à ce rythme-là allaient lui sembler interminables. En plein milieu d’après-midi Maryline et Samuel débarquèrent, ils avaient l’air effrayés, ou bien effarés. Dans tous les cas, quelques choses d’étranges avaient dû se passer.
— Qu’avez-vous ? Que se passe-t-il ? questionna Iris.
— Un truc trop étrange, toi aussi tu vas bientôt y être confronté. On ne peut rien, te dire, on n’a pas le droit. M. Past va venir te chercher. Il faut juste que tu te fasses confiance et que tu ne te poses pas trop de questions, intima Maryline.
Iris était perdue, mais qu’est-ce qu’elle racontait ? Elle ne comprenait pas. Que voulait-elle lui dire ? Alors que Samuel allait prendre la parole pour essayer d’éclaircir les propos très flous de l'adolescente, la porte s’ouvrit. Nicolas apparut, et posa sur Iris, un regard de rage comme si elle avait fait quelque chose. Sauf qu’elle n’avait rien fait. Bien sûr, la jeune fille avait toujours envie de lui donner un bon gros coup dans la mâchoire sauf qu’elle savait contrôler cette pulsion-là. La surdouée se demandait aussi comment se passaient les punitions, si c’était aussi sévère que cela. Elle n’en était pas convaincue, mais elle ne l’avait pas encore vécu.
— Mlle. Smarta, venez avec moi, déclara Nicolas.
Iris reconnut son nom de famille bien évidemment. Et même si elle ne voulait pas bouger, elle se leva quand même. Rechigner ne servait à rien, pas pour le moment. Alors qu’elle abandonnait les deux plus vieux dans sa chambre, elle emboîta le pas pour suivre M. Past qui descendait les escaliers.
— Où m’emmenez-vous ? demanda-t-elle.
Elle ne reçut aucune réponse, la jeune fille répéta donc sa question jusqu’à ce qu’elle obtienne une réponse. Nicolas, agacé s’arrêta net et se retourna vers la jeune fille.
— Bon, il y en a marre ! Tu arrêtes de parler, tu verras bien, ce n’est pas très loin.
Iris n’avait qu’une envie, lui en donner un coup de poing en pleine tête. Bien sûr, elle se contrôla. Elle ne devait pas se laisser influencer par sa colère. Pas trop tôt dans tous les cas. Elle décida de rester muette et de répondre que quand il le fallait. Voilà, elle avait trouvé sa solution : rester muette face aux adultes. C’était peut-être stupide, mais Iris préférait comme cela. Ils atteignirent une salle du bâtiment au rez-de-chaussée. Il ouvrit la porte et alluma l’interrupteur, la lumière de la pièce était quand même faible. Il faisait très froid dans la pièce. Si froid que l’on aurait pu mettre deux doudounes l’une au-dessus de l’autre. Et avec son t-shirt, Iris grelottait et frissonnait de tout son corps. Ce n’était pas franchement génial pour la jeune fille. Le carrelage de la salle était très froid, il y avait un bureau, des chaises, et un grand appareil bizarre. Une sorte de scanner.
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