Chapitre 27
*** un peu plus loin
Il croise la petite Amy. Elle a un panier à la main et marche d'un pas vif en léchant un sucre d'orge.
« Bonsoir Monsieur le shérif.
- Oh bonsoir ma petite Amy. Où vas-tu comme ça ?
- Je vais voir ma grand-mère. Maman m'a dit d'aller l'aider à ramasser les oeufs.
- Oh c'est bien, tu es une brave petite. Ne t'attardes pas; promis ?
- Oui monsieur le shérif. »
La petite poursuit son chemin et Roy reprend sa ronde. Il marche en direction du saloon, s'assure que tout est calme. Le procès de Marchildon a attiré pas mal de monde en ville et nombreux sont ceux qui s'entassent dans les chambres d'hôtel où qui se sont placés chez des habitants. Septembre est un mois qui fournit du travail et les bras sont toujours les bienvenus. Les fermiers croulent sous les pommes de terre qu'il faut mettre à l'abri , elles permettront de passer l'hiver. Roy n'aime pas trop quand des procès se déroulent dans sa juridiction. Ce n'est pas chose aisée quand même; personne n'aime à voir sa ville être le théâtre d'une pendaison. Ce n'est pas bon pour la réputation et l'image de la ville. Mais en même temps; il faut rassurer la population et en particulier les riches propriétaires; Tanner, Berts et Menilson, qui seraient bien tentés de financer la campagne de Roy Bean, tueur à gage qui veut à tout prix se faire élire shérif. Roy a eu maille à partie avec lui y a pas longtemps. Non décidément, ce procès l'enquiquine beaucoup. Il lui faut veiller sur ce Marchildon de malheur, lui filer à manger et dont la surveillance l'empêche de vaquer à son travail habituel. En en attendant, les paperasses s'entassent sur son bureau. Et ça l'ennuie prodigieusement. Consciencieux comme il est, il ne peut pas être satisfait d'une situation pareille.. Et puis avec un assistant en moins, il est encore plus pris à la gorge. Larson Clark n'est pas réapparu depuis le jour où il lui a fait prendre la porte. Mais c'était un bon associé et son absence pèse.
« MONSIEUR MONSIEUR.... VITE.... »
La petite Amy arrive vers lui ventre à terre; à bout de souffle.
- Vite vite, Grand-mère ne répond pas.
Roy prend la petite par la main et l'entraîne un peu plus loin, pour l'éloigner du saloon.
- Calme-toi; respire un bon coup et explique-moi.
- Et ben, et ben, OUF OUF, je suis arrivée chez grand-mère et elle était même pas là. La porte est ouverte, mais elle répond pas. J'ai regardé partout elle.
- Je viens avec toi. On va la trouver. »
Roy Coffee suit la petite fille. Il ne leur faut pas longtemps pour arriver à la ferme où habite la vieille dame. Elle y vit seule avec quelques poules , des porcs et deux vaches. Elle garde aussi un boeuf dont la vente des meilleures pièces de viande lui rapporte quelques billets qui lui permettre de subsister.
"Mme Cunnighan, Mme Cunninghan, répondez, c'est Roy Coffee... Où êtes-vous.
Pas de réponse. Roy Coffee et la petite fille font le tour de la grange. Et ils finissent par découvrir Mme Cunningham , allongée par terre, les jambes coincées sous un fagôt de bois, le visage en sang et les bras sanguinolents de même.
- Grand-mère... Oh Grand-mère ».
Amy se jette contre sa grand-mère et lui offre le réconfort de ses petits bras.
- Mme Cunningham, m'entendez-vous ?
- Oui, je vous entends.
- Que vous est-il arrivé ?
- Je voulais faucher un peu d'herbe pour les vaches. Je pense que la tête m'aura tournée.
- Avez-vous mal quelque part ?
- Non. »
Amy a sorti son mouchoir et commence à taponner doucement la joue de sa grand-mère, de laquelle s'échappe un filet de sang qui rougit aussitôt le tissu blanc.
Roy Coffee passe ses bras autour du corps de la vieille dame et l'aide à se relever.
- Je vais vous conduire chez le docteur Martin. Il me semble à moi qu'il vaut mieux recoudre cette vilaine coupure.
- Ce sera une branche qui m'aura gratigné. Rien de grave.
***Nouvelle nuit à Virginia City. Ben et Joan sont assis dans la salle de restaurant, dans une petite alcôve éclairée , à l'écart des autres clients. Joan est plongée dans la contemplation de sa tisane tandis que Ben sirote un dernier verre de brandy.
« buvez, Joan, ça va être froid.
- Rien, rien, je n'ai rien appris aujourd'hui. Ce procès, j'en attends peut-être trop.
- C'est seulement le premier jour, Joan. Demain, on en saura plus.
- Je l'espère Ben, je l'espère. A quoi ça sert sinon.
- Espérance et confiance. Ayez confiance en la justice, Joan.
- Tant que vous êtes là; j'ai confiance.
- La justice ne ramènera ni Henry, ni sa mère. Mais votre douleur aura été entendue. Et puis vous saurez, j'en suis intimement persuadé.
- Oui, Ben, voudriez-vous m'emmenez faire un tour dehors ? J'ai un peu chaud.
- Mais avec plaisir, chère amie. Venez. »
Ben se lève et va vers Joan. Il lui recule la chaise et lui tend son bras.
- N'oubliez pas votre châle.
- Oh merci; Mais où avais-je la tête ? »
Joan tend la main vers sa capeline et s'en saisit; avant de la déposer sur ses épaules. Ben arrange le bord de dentelle sur les bras de la jeune femme et tous deux se dirigent vers la sortie.
« Atchoum; pardonnez-moi Joan. Atchoum.
- A vos souhaits, cher Benjamin. Êtes-vous en train de vous enrhumer ?
- Oh non, pensez-donc. Tout une plus une petite poussière qui vient me chatouiller le nez.
- Bah bah , regardez-vous, vous êtes sorti sans veste. Cela ne me semble pas très raisonnable.
- Sans doute, mais je n'ai pas froid. »
Tout en parlant, il porte sa main à sa gorge et entreprend de dénouer le noeud de sa cravate et déboutonne son col de chemise.
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