25 - Jay
Deux heures avant le concert que nous aurions dû donner à Lisbonne, notre manager a exigé une réunion d'urgence. En partie par ma faute, mais surtout par celle de Black, elle s'est déroulée dans un climat d'extrême tension, Notre leader a menacé de se barrer si je ne quittais pas le groupe. Leo et Dan ont donné du poing sur la table pour lui faire entendre raison. Le groupe, c'est nous trois, même si lui et moi sommes en froid. Leo nous a laissé une semaine de relâche, afin de nous soigner et de tenter d'apaiser le climat entre nous. Je n'imagine même pas la déception de nos fans lorsqu'ils ont appris que nous ne donnerions pas les trois concerts programmés à Lisbonne, Madrid et Rome. Les autres dates européennes n'ont pas été modifiées, seules celles qu'on doit encore donner aux États-unis ont été repoussés. Du coup, on est bon pour rester une semaine supplémentaire en Europe, ce qui m'arrange pas mal au final, vu que je vais pouvoir rester un peu plus de temps avec ma belle ensorceleuse.
Plus j'apprends à connaître Jen et moins je me sens capable de m'en passer. Le retour à la maison risque d'être un véritable enfer, si elle ne me suit pas. Surtout maintenant que j'ai goûté à la joie de partager ma vie avec elle. Depuis cinq jours, nous louons une villa dans le Var, près de Fréjus et je dois dire que je n'ai jamais été aussi heureux de toute ma vie. Sentir son parfum le matin avant même d'ouvrir les yeux me met de bonne humeur pour le reste de la journée. Et que dire de la chaleur de sa peau tout contre la mienne la nuit ? Sans compter tous les moments de complicité que nous partageons autour de la préparation des repas ou en regardant un film, tendrement lovés l'un contre l'autre.
Pour la réconciliation avec le chanteur du groupe, bien que ce soit les desiderata de Leo, on repassera. Je ne sais même pas où il se trouve en ce moment et je m'en tape comme de ma première chemise. Il pourrait très bien se situer au fin fond de l'Amazonie que ça n'y changerait pas grand chose. Tout ce qui compte pour moi, c'est la sublime femme qui dort encore paisiblement à mes côtés. Elle ressemble tant à un ange que je n'ose même pas l'effleurer pour éviter de la réveiller, malgré mon envie irrépressible de lui faire l'amour. Son corps est devenue ma dose quotidienne d'héroïne depuis qu'on a pu reprendre nos câlins sous la couette. Soit le soir même où on a débarqué ici. Les anti-inflammatoires m'ont aidé à lui prouver, à ma manière, à quel point elle me plaît. Quant à ses sourires, ils remplacent toute l'ecstasy du monde. Je comprends pourquoi Black a cessé de se shooter lorsqu'il l'a rencontré. À elle seule, elle fournit tout ce dont un mec a besoin. Mon père avait tort, vivre avec une femme ne ressemble en rien à l'enfer. Bien au contraire, elle nous a créé un petit coin de paradis dans lequel j'adore me réfugier.
Je dépose tendrement un baiser dans ses cheveux, avant de me lever, le plus silencieux possible pour ne pas la déranger. Nous sommes rentrés très tard hier soir, après être sortis dans un club branchés de Saint-Raphaël. La voir si heureuse en dansant avec sensualité contre moi m'a donné une putain d'idées que j'ai bien envie de mettre en place. C'est la raison pour laquelle je suis déjà debout au lieu d'attendre son réveil tout contre elle.
Une fois dans le salon, j'allume mon Ipad et pars à la recherche d'une salle de danse dans les environs. Je suis prêt à dépenser un paquet de blé pour en louer une le temps de quelques heures. Rien ne sera jamais trop beau pour ma princesse. Si Black l'a détruite, je veux être celui qui l'aidera à se reconstruire. Son dernier mec en date ne semble pas avoir vraiment prêté attention à elle, sinon il l'aurait aidé à se relever. En tout cas, je ne regrette pas de l'avoir cogné ce petit con et je suis bien content de savoir que monsieur Hollister l'a viré de sa société sans ménagement. Jen m'a dit que son père lui avait même collé un procès au cul pour diffamation. Il n'a eu que ce qu'il méritait. Et maintenant que je suis officiellement avec elle, il vaut mieux pour lui que je ne le croise jamais. Bien que je dois admettre que s'il n'avait pas foutu la merde ce soir là, je ne serais certainement pas avec elle.
Je glisse une main dans mes cheveux pour tenter de me concentrer sur ma tâche. Je ne me suis pas levé pour ne rien foutre, je dois trouver cette salle avant qu'elle ne se lève. Après quelques recherches, je finis par tomber sur ce que je cherche exactement. Situé à, à peine, dix minutes a pieds d'ici, il semblerait qu'elle soit assez réputée dans la région. J'attrape mon smartphone et compose le numéro indiqué. Au bout de quelques tonalités, une standardiste finit par décrocher. Je lui expose mon souhait, avant qu'elle ne me passe le directeur de la salle. Ce con pense d'abord à une sale blague, mais quand je lui promets de lui verser dans la journée même la somme qu'il désire, il se met à me tenir un tout autre discours.
— Il y a plusieurs cours à compter de dix-sept heures. Si vous me promettez d'être partis avant, je veux bien vous la louer pour trois mille euros.
J'effectue un rapide calcul mental pour convertir la somme en dollars. Avec le taux de change en cours, ça devrait me revenir à trois mille quatre cents ou trois mille cinq cents. Il doit sûrement me rouler dans la farine, mais je suis prêt à lui envoyer le fric à condition qu'il m'adresse un contrat en bonne et due forme. Hors de question de me faire arnaquer plus que nécessaire.
— Je vous l'envoie dans la matinée, me promet-il.
L'accord conclu, je raccroche. À présent, il faut que je sache sur quelle musique elle aimait bouger son petit cul, lorsqu'elle s'adonnait à sa passion. Je pense que ma meilleure alliée va être Haley, puisqu'elle se connaissait à cette époque. Je lui envoie aussitôt un texto.
Lorsque mon téléphone sonne, je m'attends à ce que ce soit elle qui m'appelle et certainement pas son mari.
— Ouais, mec ? lancé-je en décrochant.
— Haley est sous la douche. J'ai vu ton message et je lui ai posé la question. Elle adorait danser sur My Immortal de Evanescence. Par contre, un conseil, mon gars, si tu ne veux pas te retrouver à l'étroit, tu ferais mieux de foutre un truc de large si tu vois ce que je veux dire. Ma femme a ajouté que c'était terriblement sensuel et qu'elle aurait pu faire bander même un gay. Alors, toi, mon gars, je n'imagine même pas.
J'éclate de rire.
— Tu sais, elle n'a pas besoin de ça pour que je me retrouve en train de bander comme un puceau.
Un simple effleurement de sa part suffit à m'envoyer des ondes de choc dans tout le corps. Ça se traduit bien souvent par un jeans qui devient un peu trop serré au niveau de l'entrejambe et une folle envie de me fondre en elle. J'ai besoin de la redécouvrir encore et encore à chaque instant.
— Vu comme t'es atteint, je n'en doute pas une seule seconde.
Même s'il ne peut pas le voir, je souris. Il a totalement raison, je suis gravement atteint et pour rien au monde, je ne voudrais trouver un antidote. Elle guide chacun de mes pas désormais et sans elle, je suis presque sûr de me perdre. Si elle disparaissait, je me retrouverai tel un marin largué au milieu de l'océan Pacifique sans boussole. Aveugle.
— T'es vraiment amoureux, n'est-ce pas ? me questionne Dan.
— T'en doutes encore ?
— Non, mais ça me fait tout drôle de te voir à genou devant une femme. Toi qui ne voulait aucune attache, te voilà mouillé jusqu'au cou. Par contre, ne fais pas le con avec elle, je pense qu'Haley te ferait vivre la misère si elle apprenait que tu joues avec elle. Jen a déjà bien trop souffert à cause de Shawn.
Comme si je ne le savais pas ! Elle a tellement perdu dans leur histoire que j'en ai mal pour elle. Hors de question que je lui fasse vivre la même chose, je lui ai raconté ma vie dans les moindres détails, je lui ai dit comment s'était terminé réellement mon histoire avec Shanya. J'ai peut-être zappé de lui dire que par ma faute, elle s'est retrouvée dans un fauteuil roulant, mais ce n'est qu'un détail. Je n'y suis pour rien, ou presque, si elle a pris cette putain de bécane pour se foutre en l'air. Même si au fond de moi, je garde une partie de culpabilité. Cette fille était super cool et j'appréciais les moments que nous partagions. Ça n'a rien à voir avec ce que je vis avec ma belle Britannique, mais c'était agréable. Ma première vraie histoire. Malheureusement, poussé par les idées de mon père, j'ai fini par prendre la fuite d'une sale manière. Pour chasser ce souvenir, je vais jeter un coup d'oeil à la baie vitrée. Le temps maussade pourrait me déprimer si ma relation avec Jen ne me rendait pas aussi heureux. Là, il pourrait y avoir un déluge, ça ne m'atteindrait même pas.
Quelques minutes plus tard, je rejoins la cuisine afin d'y préparer ma deuxième surprise. Si jusque-là, nous nous sommes toujours attablés pour manger, ce matin je rêve d'apporter à ma princesse son petit-déjeuner au lit. Je ne suis pas vraiment expert en la matière, toutefois, je sais me débrouiller un peu. Il a bien fallu que j'apprenne lorsque ma mère s'est barrée. Même si aujourd'hui je laisse, volontiers, Anita, ma femme à tout faire, s'occuper de mon estomac quand il grogne un peu trop fort, je sais encore préparer deux ou trois trucs. Je n'imagine même pas la tête des gars s'il me voyait derrière les fourneaux. Ils se foutraient bien de ma gueule. Aux côtés de Jen, je suis en train de devenir un putain de lover. Dire que je me marrais lorsque Dan et Black me racontaient à quel point la femme qu'ils aimaient les rendaient niais. De véritable guimauve. Je suis loin d'être mieux désormais.
Du métal dans les oreilles, je sors les œufs du réfrigérateur. J'attrape un saladier dans un placard en-dessous du plan de travail que je pose sur le comptoir. Puis, tout en fredonnant les paroles de Fear of the Dark d'Iron Maiden, je prépare des œufs brouillés. Ma main mélange en rythme les ingrédients tandis que mon pied bat la mesure frénétique du morceau. Je me laisse emporter sur une autre planète par Steve Harris, le meilleur joueur de basse de tous les temps. Une véritable légende, celui qui m'a donné envie d'apprendre cet instrument lorsque j'étais plus jeune. Jamais je ne pourrais l'égaler, mais j'espère un jour pouvoir frôler son niveau. Déconnecté de la réalité, je laisse tomber mon fouet pour jouer les notes sur une basse imaginaire. Transporté par cette chanson, je ne vois même pas Jen me rejoindre. Ce n'est qu'au moment où je sens son corps suivre les mouvements du mien que je réalise qu'elle s'est réveillée. Ma surprise tombe à l'eau, mais je m'en tape. Tout ce qui compte à cet instant, c'est ce qu'elle me fait ressentir. Putain qu'elle m'excite grave ! Jamais aucune femme ne m'aura fait autant bander, ni même dévier de ce que je suis en train d'écouter. Quand je suis plongé dans un morceau, rien ne peut surpasser ma passion. Sauf elle. Je suis presque certain qu'elle pourrait interrompre mes entraînements sans que je lui grogne après. Ou presque.
Je la laisse faire quelques secondes en m'imprégnant de chacune des sensations qu'elle me procure. Quand la brûlure dans mes veines atteint son paroxysme, de plus en plus insoutenable, je me retourne avec vivacité. Ma bouche ne met pas trois plombes à trouver la sienne tandis que mon bras s'enroule autour de sa taille. Dans un baiser des plus passionné, je lui laisse comprendre combien ce qu'elle vient de faire m'a plu. Ma langue trouve rapidement un passage jusqu'à la sienne au moment où elle pose ses mains entrecroisées sur ma nuque. Son haleine mentholée me laisse supposer qu'elle s'est brossée les dents juste avant de me rejoindre. Tout ce qu'elle fait pour me séduire me rend dingue, au même titre que le gémissement qui quitte ses lèvres à cet instant. Une de mes main glisse sous le t-shirt qu'elle a revêtu, un des miens, et remonte jusqu'à ses fesses. Le tissu en soie dont elles sont recouvertes me grise. J'ai envie de plus. Beaucoup plus. Ce n'est pas parce que je me contente d'un seul plat que mon addiction au sexe s'est atténué. Au contraire. Si avant je me contentais d'une fois par jour, mon désir pour elle n'a fait qu'accroître mon appétit. Je suis devenu un putain de boulimique, affamé de son corps, de ses gémissements et de son splendide regard lorsqu'elle part dans le cosmos.
Essoufflé par notre échange, je dois, à regret, m'éloigner d'elle pour reprendre ma respiration. Mon front contre le sien, je souris comme un con, alors que tout mon être continue de s'enflammer. Si j'avais su qu'être amoureux était aussi attrayant, j'aurais combattu les idées de mon père bien avant. Bien que sans ses convictions, je n'aurais sûrement pas rencontrer la perle rare qui se trouve dans mes bras. Je suis vraiment chanceux d'avoir pu trouver ce trésor sur ma route.
— Pourquoi tu me regardes comme ça ? me questionne-t-elle en rougissant.
Je ne sais pas trop ce qu'elle voit dans mon regard, mais vu la couleur de ses joues, ça lui fait un sacré effet. Je m'éloigne un peu et caresse avec tendresse sa pommette, avant de lui répondre.
— Je me disais juste que j'étais un sacré veinard.
À travers l'expression de son regard, je peux voir qu'elle s'interroge sur ce que je viens de lui dire. J'adore pouvoir lire en elle comme dans un livre ouvert. Toutes ses émotions passent sur son visage et j'en raffole. Il m'arrive quelque fois de me planter sur ses pensées, mais plus le temps passe et plus c'est rare.
— Que tu sois là avec moi, ajouté-je. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis bien depuis qu'on est ensemble. J'ai l'impression que la vie est devenue encore plus facile.
Un sourire satisfait s'esquisse sur ses lèvres.
— Moi aussi, je suis bien avec vous, monsieur le dieu du sexe.
Chaque fois qu'elle m'appelle ainsi, je ne peux m'empêcher d'éclater de rire et ce matin n'échappe pas à la règle.
— C'est la stricte vérité, poursuit-elle, outrée que je puisse rire de sa déclaration, alors que ça n'a rien à voir. Je ne pensais pas pouvoir me sentir aussi bien avec un homme depuis...
Comprenant qu'elle aborde un sujet épineux, elle laisse tomber sa phrase en suspens. Sa grimace me prouve qu'elle a peur de prononcer son nom devant moi. Je ne veux pas qu'elle le pense. C'est son ex et rien ne pourra changer cet état de fait. Même moi, je ne pourrais jamais effacer leur passé. La seule chose que je peux lui proposer est de construire un futur commun. Un avenir où je repousserait ses démons loin d'elle. Je sais ce qui la ronge, elle me l'a avoué. Son histoire avec Shawn n'est pas la seule à la tourmenter. La perte de sa fille et surtout le fait de ne plus pouvoir avoir d'enfants la hantent beaucoup trop. Lorsqu'elle m'a parlé de la deuxième conséquence de son accident, j'ai lu à quel point ne plus jamais pouvoir porter la vie la tue. Je suis triste pour elle. Malgré le masque qu'elle porte chaque jour pour ne pas montrer ses failles, je sais qu'elle est brisée. Le moindre souffle de vent sur son âme pourrait l'anéantir.
— Shawn, complété-je pour elle.
Elle hoche la tête, en détournant son regard pour ne pas avoir à m'affronter. Ça m'emmerde de la voir réagir ainsi. Je déteste quand elle me fuie. D'une main, je ramène, avec délicatesse, son visage face au mien. Jamais, je ne me serais cru capable d'autant de douceur. Soit elle me change littéralement, soit tout était déjà ancré en moi et n'attendait qu'à être éveillé par une femme aussi merveilleuse qu'elle.
— Tu n'as pas à m'éviter lorsque tu parles de lui. Je sais ce que vous avez vécu et je ne pourrais rien y changer. Je sais qu'il t'aime toujours et c'est pour cette raison que nous sommes en froid. Mais c'est ton ex, tout comme l'autre enfoiré.
Rassurée, semble-t-il, elle dépose une bise sur ma joue, avant de partir voir ce que j'ai mélangé dans le saladier.
— Une omelette ? me questionne-t-elle en posant ses yeux sur moi.
Je m'approche d'elle, glisse mes mains sur son ventre et pose ma tête contre son épaule, avant de lui répondre.
— J'avais plutôt penser à des œufs brouillés.
— Excellente idée, monsieur le cuistot. Je meurs de faim.
— Ouais, moi aussi, mais de toi, lui glissé-je d'une voix rauque à l'oreille.
Elle se retourne vers moi, une lueur espiègle dans le regard. Je la sens venir de très loin. Je ne sais pas ce qu'elle a prévu, mais je suis certain de me retrouver la queue entre les jambes et la langue pendante. Son sourire coquin accroît cet étrange pressentiment. Je l'oublie très vite lorsqu'elle se met à déposer de doux baiser sur ma clavicule et laisse glisser sa main avec sensualité le long de mon torse. Après tout, je me suis peut-être gouré sur mon interprétation, elle est peut-être aussi affamé de mon corps que moi du sien. Au moment où ses doigts se faufilent dans mon boxer, je pousse un grognement guttural. Elle me masturbe quelques secondes, avant de s'enfuir en courant. Putain, l'atterrissage est horrible ! Frustré, je gronde des mots incompréhensibles sous ses éclats de rire.
— Tu ne perds rien pour attendre, Jenny Hollister !
Son hilarité augmente face à mes mots.
— J'ai faim, monsieur le cuistot. Alors aux fourneaux !
Dépité, je secoue la tête, avant de retourner à la préparation du repas, un large sourire niais sur les lèvres. Elle va m'en faire voir de toutes les couleurs, j'en suis persuadé, mais je m'en fous parce que j'adore la voir si insouciante malgré tout ce qu'elle a perdu. Si je pouvais l'aider à retrouver un peu d'innocence, j'en serais le mec le plus heureux de la planète.
Lorsqu'elle revient, vêtue cette fois d'une petite robe à fleurs, un peu trop affriolante à mon goût, le petit-déjeuner est déjà servi. Je la regarde s'avancer vers moi dans une démarche digne d'une panthère. Après ce qu'elle m'a fait, je ne bouge pas d'un millimètre afin de connaître ses intentions. Plus elle s'approche et plus son parfum vient titiller agréablement mes narines. Même son odeur me fait perdre la tête. Comme chaque fois qu'elle se trouve un peu trop près, son aura m'absorbe totalement et je suis incapable d'avoir les idées claires. Lorsqu'elle pose ses mains sur mes épaules, pour y prendre appui, je me fais violence pour lutter contre mon désir. Faut que je reste de marbre devant elle, même si c'est atrocement difficile.
— Le repas est-il prêt, monsieur le cuistot ? me glisse-t-elle à l'oreille d'une manière terriblement sensuelle
Putain, rien que sa voix fait réagir ma queue !
Elle pense pouvoir me rendre fou encore longtemps ?
Au moment où elle part vers la table, je décide d'inverser la tendance de ce jeu. À moi de prendre les rênes.
Dos à moi, elle ne me voit pas arriver. Je l'attrape par le coude, la force en douceur à me faire face, puis la hisse sur mon épaule, tel un sac à gravats. Elle va voir ce que c'est que de vouloir me rendre barge. Tandis que je l'emmène dans la chambre, elle se débat en m'ordonnant de la relâcher. Je n'en fais rien, au contraire, je profite de sa position pour malaxer son petit cul de ma main libre.
Moi aussi je suis capable de te chauffer, ma belle, sans aller jusqu'au bout et tu vas vite le comprendre.
Une fois dans la chambre, je la pose sur le lit, puis entreprends de retirer sa culotte.
— J'ai faim, Jayden !
Je lui lance un regard malicieux qui en dit long sur mes intentions. Quoi qu'elle fasse, elle ne pourra pas s'en sortir comme ça.
Mon corps au-dessus du sien, je mordille son lobe, avant de lui souffler à l'oreille :
— Ton estomac attendra quelques minutes. J'ai une petite vengeance à orchestrer.
Le résultat ne se fait pas attendre, elle se tend, dans l'attente de ce que je lui ai préparé. Son regard s'assombrit et elle se mordille la lèvre.
Détrompe-toi, babe, je ne te ferais pas jouir ce matin.
Je laisse mes doigts glisser lentement le long de son cou, de son corps, avant de remonter sa cuisse en direction de son sexe. Lorsque j'atteins son intimité, elle est déjà brûlante de désir. Quand j'enfonce un doigt dans sa moiteur, elle ne peut contenir son gémissement. Putain, elle est déjà tellement prête pour moi, que je ne suis même plus certain de pouvoir me retenir d'aller jusqu'au bout. Pour éviter de bander trop fort, je tente d'imaginer une toute autre fille à sa place. Malheureusement, l'idée n'est pas des meilleurs puisque ma belle ensorceleuse ne veut pas être chassé de mes pensées. Je me mets alors à songer à la fois où je me suis retrouvé coincé dans un ascenseur avec un fan qui avait des vues sur moi. La trouille de ma vie ce jour-là. Surtout que le gars n'avait pas l'air d'un enfant de chœur. Tatoué de partout, les cheveux longs, une barbe à la ZZ Top, il m'a grave filé les jetons. Rien que d'y repenser, j'ai envie de filer aux chiottes rendre mon repas d'hier soir.
Je garde cette image dans mon esprit tandis que je m'occupe de celle qui a un effet indéniable à la fois sur mon cœur et mon corps. Quand je pense qu'elle en a assez eu, je me redresse et, sans un mot, sors de la chambre. À peine ai-je franchi la porte que je l'entends grogner de frustration. Mort de rire, je pars l'attendre assis derrière la table. Lorsqu'elle arrive, elle me fusille du regard. Une main sur mon cœur, je fais semblant d'avoir été atteint par une balle invisible. Pour rajouter à la scène, je m'écroule sur ma chaise, les bras ballants de chaque côté. Un vrai gamin.
Jen se fend la poire en me voyant faire le con. En entendant ce son si mélodieux, une douce chaleur envahit mon organisme. Son fou rire finit par me contaminer et nous rions ensemble pendant plusieurs secondes.
— T'es con, me lance-t-elle, hilare.
Je me lève, afin de venir me placer devant elle, pour effectuer une révérence.
— À votre service.
Nos rires redoublent d'intensité à ce moment. Bordel, que c'est bon de rigoler autant avec la femme de ses rêves ! J'en ai les larmes aux yeux. Depuis quand ne me suis-je pas tapé une telle barre ? Même si avec les gars, on se marrait bien avant notre arrivée en Europe, ça fait des mois que je ne me suis pas autant gondolé. Mon cœur est en train d'exploser de joie tant je me sens bien et détendu. Si la journée se poursuit ainsi, ce soir je n'aurais même pas besoin de lui faire l'amour pour me trouver perché sur un petit nuage. Après, je ne suis pas certain de pouvoir m'en passer. J'en ai bien trop envie.
Lorsque nous finissons par retrouver un peu de sérieux, nous passons à table. Jen sourit après chacune des fourchettes qu'elle porte à sa bouche. Même si je lis de mieux en mieux en elle, pour le coup, elle reste un parfait mystère. J'hésite entre me dire qu'elle apprécie ma bouffe ou le contraire.
— C'est bon ? finis-je par la questionner pour savoir de quel côté mes idées doivent s'arrêter.
Elle hoche la tête, tout en me faisant comprendre d'un signe de la main qu'elle ne peut pas me répondre dans l'immédiat, puisque sa bouche est pleine. Au moins sa réponse non-verbale a le don de m'apaiser.
— Excellent, tu veux dire. Je n'ai jamais mangé des œufs brouillés aussi bon. Tu pourrais peut-être donner des cours à nos cuisiniers.
Putain, elle se fout littéralement de ma gueule.
— T'as l'intention de te moquer de moi encore longtemps ?
— Hmmm, hmmm, répond-elle avant de se mettre à rire à nouveau.
Atterré par son attitude, je secoue la tête. Elle n'a pourtant rien pris qui aurait pu la mettre dans ce genre d'état. Si un enfoiré avait mis une merde dans son verre hier soir je m'en serais rendu compte lorsque nous sommes rentrés ou même avant. Est-ce à cause de moi ? Si c'est le cas, je veux bien donner encore plus de ma personne pour la voir ainsi tous les jours.
Sans plus un mot, je la contemple manger. Elle est si belle que jamais je ne pourrais me lasser de la regarder, quels que soient les circonstances dans lesquels nous nous trouvons.
À la fin du repas, elle se lève et vient jusqu'à moi.
— Merci, c'était vraiment très bon, me déclare-t-elle pleine de sincérité.
Le baiser qu'elle dépose sur ma joue, avec toute la douceur dont elle sait faire preuve, me fait frémir. Quand elle agit ainsi, j'ai l'impression de replonger en enfance lorsque ma mère me réconfortait après une chute. Je pose ma tête contre son ventre et me laisse porter par sa tendresse durant plusieurs secondes.
— Quel est le programme aujourd'hui ?
Sa question brise la bulle de bien-être qui m'enveloppait. Je la regarde en pinçant les lèvres. Ma réponse, concernant la matinée, ne va certainement pas lui plaire. Si je ne veux pas me faire assommer par mon manager, je dois m'exercer sur ma basse. Ça va prendre des plombes durant lesquelles je vais devoir mettre son existence de côté. Pas le choix. Quant à ce que j'ai prévu pour cet après-midi, je ne peux rien lui dire.
— Ce matin, il va falloir que je me délie les doigts et rejoue quelques morceaux, sinon Leo va me tuer.
— C'est juste pour ça que tu fais cette tête ?
— Ouais, j'ai peur que tu le prennes mal.
Ses yeux deviennent aussi rond qu'un ballon de soccer. Qu'est-ce que j'ai dit encore ?
— Je ne vois pas pour quelles raisons, je le prendrais mal. N'oublie pas que j'ai vécu avec...
Encore une fois, elle s'arrête avant de prononcer son prénom. À croire que depuis qu'on s'est battu, il est devenu un sujet tabou. Mécontent qu'elle ne puisse pas aller jusqu'au bout de sa phrase, je fronce les sourcils. Elle doit vraiment comprendre qu'elle n'a aucune honte à avoir de me parler de lui.
— Shawn, finit-elle par dire en voyant ma mine renfrognée.
— Et je suppose que lorsqu'il n'était pas à Chicago avec nous, il répétait devant toi.
— Tout à fait. Donc, tu vois, tu peux très bien le faire sans que je le prenne mal. Au contraire, j'adorerais te voir jouer loin de la scène.
Je ne comprends pas trop pourquoi, mais mon cœur se met à manquer quelques battements. En fait, je crois que j'ai le tract. Malgré mes nombreuses années de pratique, je n'ai jamais joué pour un public composé d'une seule personne. La dernière fois, même si je ne voyais qu'elle, j'étais entouré par mon groupe et les nombreux fans dans la salle. Là, il n'y aura qu'elle pour me juger. Je ne veux pas la décevoir.
— D'accord. Je vais prendre une douche et chercher ma basse.
Sur ce, je m'éclipse dans la chambre pour y récupérer mes fringues, avant de filer dans la salle de bain en vitesse. Plus vite je serais prêt et plus vite, je pourrais la retrouver.
Lorsque je reviens, Jen est assise sur un des deux tabourets du comptoir, son smartphone vissé à l'oreille. Le sourire dessiné sur ses lèvres ne m'est pas destiné cette fois. Pire, elle est tellement plongé dans sa conversation qu'elle ne capte même pas mon retour. Malgré mon fort désir de me faire remarquer, je m'écrase pour ne pas la déranger. Ce n'est pas parce qu'on est ensemble, qu'elle ne peut pas avoir une vie en dehors de moi. Je ne la détournerais pas de ses amis ni de sa famille. Néanmoins, poussé par la curiosité, je laisse une oreille discrète traîner tandis que j'installe mon matos.
— Oui, ne t'inquiète pas. On se voit bientôt de toute façon.
Qui donc ? Ces mots titillent un peu plus mon intérêt. Je me fige au-dessus de mon ampli, dans l'attente de la suite.
— Je te laisse, Jay est revenu.
Bon, vu qu'elle a remarqué ma présence, il vaut mieux que je continue à brancher ma basse comme si de rien était. Toutefois, je suis de plus en plus curieux. J'aimerais vraiment savoir avec qui elle parle. La seule chose dont je peux être certain c'est que son interlocuteur me connaît, sinon elle ne m'aurait pas appelé par mon surnom. Haley ? Y a de fortes chances.
— Moi, aussi, je t'aime, beau gosse.
Ces trois putains de mots qu'elle n'a jamais prononcé devant moi viennent d'anéantir mon monde. À qui vient-elle de faire une telle déclaration ? Je suis certain que ce n'est pas à la femme de Dan.
Shawn ? Vu le mal qu'elle a eu à sortir son nom devant moi, ça se pourrait bien. Une lame empoisonnée se plante au fin fond de mes tripes en imaginant que le gars à l'autre bout de la ligne puisse être lui. Je n'arrive pas à saisir ce qui se passe au fond de moi, c'est étrange, mais ça fait un mal de chien. Si bien que commandé par ce sentiment des plus bizarres, mes neurones se déconnectent les unes après les autres. Je n'arrive même plus à associer une pensée cohérente. Jen est MA copine, pas la sienne !
Mon sang tambourine contre mes tempes, tant je suis furax. Elle pensait que je n'apprendrais jamais qu'elle joue sur deux tableaux à la fois, c'est ça ? Comment a-t-elle pu oser l'appeler alors que je me trouve sous le même toit qu'elle ? Qu'elle ait pu me prendre pour un idiot me sort par les yeux. Je suis peut-être musicien, je n'ai peut-être pas fréquenté la fac, mais je suis loin d'être un imbécile ! Dans un accès de rage, exacerbé par mon cœur meurtri, je me tourne avec vivacité vers elle. Mes sourcils froncés et ma mâchoire contractée ne peuvent lui laisser aucun doute sur la colère qui gronde en moi.
— Qu'est-ce qu'il y a ? me questionne-t-elle, perplexe.
Et en plus, elle joue l'innocente. De mieux en mieux ! Prends-moi pour un con, Jen. Mon père a raison sur toute la ligne, vous êtes toutes les mêmes. Il n'y en a pas une pour rattraper l'autre.
Au lieu de lui répondre, je passe la sangle de mon instrument sur mes épaules et fait retentir un premier accord aussi sombre que ma colère. J'enchaîne les notes sans prêter attention à ses appels incessants.
— Très bien, vu que tu ne veux pas répondre, je vais faire un tour, me lance-t-elle en passant près de moi.
D'un pas décidé, elle part dans notre chambre. Lorsqu'elle en ressort, son sac à main se trouve sur son épaule. Elle m'ignore totalement en se dirigeant vers la porte d'entrée. La voir partir me blesse encore plus que ce putain de sentiment qui me ronge depuis qu'elle a prononcé ces mots que mon cœur rêve d'entendre. Je pose ma basse et me précipite vers elle avant qu'elle ne puisse faire un pas vers l'extérieur. D'une main sur son épaule, je l'empêche de franchir le seuil. Elle se tourne vers moi et plante ses yeux au fond des miens, les bras croisés sur la poitrine. Bien qu'elle semble furieuse, je parviens à déceler une certaine détresse au plus profond de son regard. Merde, j'ai peut-être été trop loin en l'ignorant de la sorte.
— Tu te rappelles de mon existence, Jayden Miller !
Je ravale ma fierté pour lui demander des explications sur ce qui m'a autant mis en rogne.
— C'était qui le gars que tu appelais ?
Son regard s'adoucit et un large sourire apparaît sur ses lèvres. D'un coup, sans que je sache pourquoi, toutes mes terminaisons nerveuses se détendent.
— Serais-tu jaloux ?
— Ouais, il y a de très forte chance.
Son sourire s'élargit encore plus et mon cœur fait des cabrioles dans ma poitrine. À cet instant, tout son être est en train de me hurler ces trois mots qui m'ont mis hors de moi.
— C'était Antonio. Tu n'as pas à être jaloux de lui, il est comme mon frère.
Elle pose ses lèvres toutes douces sur ma joue.
— Tu es trop mignon, mais la prochaine fois au lieu de m'ignorer, demande-moi.
Honteux, je baisse la tête avant de lui avouer d'une toute petite voix :
— J'ai cru que c'était Shawn et ça m'a rendu fou. Je n'ai pas compris ce qui m'arrivait, je n'arrivais plus à penser correctement.
— Tu es dingue ! me lance-t-elle, ahurie.
— Oui, de toi.
Son regard m'indique combien mes mots la touchent, avant qu'elle ne se jette sur moi pour venir m'embrasser à en perdre la raison.
Pour ne plus vivre ce genre de scène, qui a bien failli la faire partir, il va vraiment falloir que j'enfouisse au plus profond de mon subconscient les enseignement de mon père. Faute de quoi ils reviendront encore me bouffer. Si j'avais été un gars normal, je lui aurais sûrement posé la question dès la fin de son appel et je n'aurais eu, alors, aucune raison d'être jaloux.
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