18 juillet 2026, 11h30, Océan Atlantique
Cela fait une journée déjà que je suis rentrée mais je n'avais pas trouvé le temps de conter mes aventures. Les voici !
*
Près des côtes de l'Ecosse, tout est beaucoup moins coloré : les coraux ont des couleurs plus mornes, et les poissons ressemblent davantage à des poissons des rivières. Mais j'ai aimé quand même. Je nageais, virevoltais entre les êtres vivants quand soudain je les ai aperçus... Des phoques ! Les yeux écarquillés, je les ai observés. Des phoques en Ecosse ! Je croyais qu'ils ne vivaient que dans les pôles ! En plus ils étaient blancs. Normalement, ces créatures ne sont-elles pas grises ? Leurs yeux rieurs semblaient m'inviter à les rejoindre. Alors, je me suis approchée, et l'un d'eux m'a permi de m'accrocher à son dos. Je m'y suis agrippée, et nous sommes partis en exploration dans les fonds marins. Leurs mouvements de nageoire étaient fluides et beaux à regarder.
A un moment, nous sommes remontés vers la surface. Nous avons émergé, et c'est à ce moment-là que je me suis rendue compte que les phoques étaient en réalité des jeunes femmes. Les plus belles que j'aie jamais vu. Leurs longs cheveux noirs flottaient autour d'elles, et leurs grands yeux gris me fixaient. Leurs bouches esquissaient un doux sourire. Elles portaient un manteau ample et si blanc qu'il semblait phosphorescent. La plus belle des jeunes femmes s'est avancé vers moi.
Bonjour, petite humaine, m'a-t-elle dit de sa voix chantante. Tu dois te demander sur quelles créatures étranges tu peux bien être tombée. Sache que nous sommes des Selkies, des êtres magiques capables de nous transformer en phoque. Nous n'avons pas besoin de respirer, ce qui nous facilite beaucoup la vie. Nous aimons beaucoup les humains, contrairement à d'autres êtres magiques.
- Comme... Les Sirènes, par exemple ?
- Oui, les Sirènes n'aiment pas les humains. Elles vivent à l'écart de tout, pour protéger leur peuple, et se croient supérieures à tous les autres êtres magiques.
- Est-ce... Pourriez-vous... Me faire visiter l'endroit où vous vivez ? Je cherche des êtres magiques comme vous provenant de légendes... Si vous acceptez, je vous promet de ne parler à personne de vous. De toute façon, qui me croirait ?
Les Selkies m'ont adressé un sourire radieux. Nous avons plongé. L'un des phoques, qui était plus majestueux que les autres, devait être la Selkie qui m'avait parlé. Il m'a permi encore une fois de m'accrocher à son dos. De la cité sous-marine, je ne savais rien. Je n'avais aucune idée de ce qui m'attendais.
Quand nous sommes arrivés, je suis restée figée tellement j'étais stupéfiée par tant de beauté.
Devant moi se tenait un corail géant, d'au moins vingt ou trente mètres de hauteur. A chacune de ses branches était suspendue plusieurs maisons, chacune faite également en corail. Sur les maisons, il y avait des sculptures représentant des scènes de légende dont le sujet était les Selkies. Cela avait dû demander un énorme travail d'artiste. N'importe quel être humain normal n'aurait pas été capable de faire ça. Ce devait être un travail magique. A l'intérieur des maisons flottaient des méduses lumineuses en guise d'éclairage.
Tout à coup, j'ai eu du mal à respirer. Mes bouteilles d'oxygène ! Nous avions passé presque deux heures sous l'eau sans que je m'en rende compte. J'ai fait des grands gestes en direction des Selkies, qui se tournèrent vers moi. Je leur ai désigné ma bouche, mes poumons, et enfin mes bouteilles d'oxygène. Comprenant soudain, l'un des phoques s'est approché de moi pour que je m'agrippe à son dos. Nous sommes remontés vers la surface, et en quelques minutes, l'avons atteinte. J'ai avalé de grandes goulées d'air, heureuse de m'en être sortie.
J'ai proposé aux Selkies qui m'avaient suivie de m'attendre le temps que je retourne à L'Intrépide, remplisse mes bouteilles d'oxygène et revienne pour que je puisse visiter la ville suspendue au corail géant plus attentivement. Elles ont accepté, alors je me suis dépêchée de faire ce que j'avais à faire.
Puis, nous avons replongé. Quelques instants plus tard, nous étions arrivées à la ville. J'ai pu de nouveau admirer ce chef-d'oeuvre, et j'ai regretté de ne pas avoir d'appareil photographie. Mais je savais que prendre une photographie ne serait pas bien, car elle pouvait tomber entre les mains de n'importe qui, et je préférais ne pas trahir la confiance des Selkies.
Alors, les Selkies ont enlevé leur manteau, redevenant humaines. Paniquée, j'ai pensé qu'elles allaient se noyer, avant de me souvenir qu'elles n'avaient pas besoin de respirer. Elles ont pris des coraux et des coquillages, s'en servant pour faire de la musique. Au début, je ne comprenais pas pourquoi j'entendais cette mélodie, car j'avais appris à l'école que le son ne voyage pas dans l'eau, puis j'ai pensé que ce devait être de la musique magique. Elles ont commencé à danser, enfin, c'était un mélange entre la danse et la nage. Tantôt elles nageaient la brasse, tantôt elles esquissaient des pas de danse sur le sol, avec leurs jambes gracieuses. Elle appelaient ça Fàilte Dannsa, une danse pour souhaiter la bienvenue. Je ne sais pas ce qu'il y avait dans cette musique, mais le rythme a fini par m'entraîner, et j'ai exécuté la chorégraphie, comme si je la connaissais depuis mon plus jeune âge.
Nous avons dansé comme ça pendant au moins une dizaine de minutes. C'était à la fois amusant et plaisant. Au bout d'un moment, j'ai quand même songé qu'il fallait que je rentre, car Max se réveillerais bientôt et s'inquiéterais quand il remarquerais que je n'étais pas là.
Les Selkies ont enfilé leur manteau en insistant pour m'accompagner au moins jusqu'à la surface. Je pouvais entendre leurs paroles car c'étaient des êtres magiques, mais moi, je ne pouvais pas leur parler. J'ai donc hoché la tête en signe d'approbation et nous nous sommes mises en route.
Nous étions à peine parties que quelque chose m'a attrapée par la taille et m'a tirée en arrière. J'ai baissé les yeux et ai remarqué qu'il s'agissait d'un tentacule géant rouge sang, dont les ventouses faisaient la taille de la paume de ma main. Horrifiée, je me suis débattue pour tenter de me libérer, mais le tentacule ne faisait que se resserrer autour de moi. Cédant à la panique, j'ai donné des coups de pieds dans tous les sens, comme si cela pouvait m'aider à me dégager.
J'ai aperçu les Selkies qui nageaient autour du tentacule, sans doute pour attirer l'attention du monstre qui me retenait captive et le faire lâcher prise. Je ne pouvais pas voir la chose terrifiante qui m'avait attrapée car elle était dans mon dos. Le monstre ne semblait pas prêter attention aux Selkies, comme si elles n'étaient que de vulgaires rochers. Alors, l'une d'elles est partie en direction de la ville sous-marine. Je me suis demandé pourquoi elle était partie dans cette direction, avant de redoubler d'efforts pour me libérer. Mais mes efforts étaient vains. Je me battais contre un monstre à la force au moins dix fois supérieur à la mienne.
J'étais proche de faire un infarctus. L'énergie m'abandonnait peu à peu, ne laissant que la fatigue. Juste au moment où j'en avais besoin !
C'est alors que la Selkie qui était partie est revenue. J'ai enfin compris ses intentions en apercevant le couteau qu'elle tenait fermement. Son manche était incrusté de coquillages et la lame extraordinairement fine et coupante était en pierre. Elle l'a brandi de ses deux mains et l'a abattu sur le tentacule qui m'enserrait. Le monstre, comprenant que l'un de ses membres était menacé, s'est mis en mouvement. J'étais ballotée dans tous les sens, proche de la nausée. Pourvu que la Selkie arrive vite à bout du tentacule ! Je ne pourrais pas tenir longtemps comme ça.
Soudain, la Selkie trancha complètement le membre du monstre en deux et j'ai senti que je coulais vers le fond, entraînnée par le poids du tentacule qui était toujours serré autour de moi. Les Selkies ont nagé vers moi et m'ont aidée à me dégager. J'ai juste eu le temps de voir une pieuvre géante rouge sang d'au moins dix mètres de hauteur, dont les yeux étaient impressionnants. Elle disparut dans l'obscurité des profondeurs. Nous sommes vites remontées à la surface et j'ai respiré à pleins poumons, heureuse d'avoir un air pur après avoir respiré l'oxygène des bouteilles.
Je me suis tournée vers les Selkies et leur ai demandé :
- Quest-ce que c'était que cette... chose ?
- Un Kraken, a répondu l'une des Selkies. Une pieuvre géante, si tu préfères. Les Kraken sont carnivores et vivent dans les abysses. Celui-là était particulièrement turbulent, alors nous l'avions attaché avec des algues enchantées... Mais apparemment, il a réussi à se libérer. Nous sommes navrées...
- Ne soyez pas désolées, ai-je dit dans un sourire. Toute cette histoire s'est bien finie, au bout du compte. J'espère... J'espère vraiment pouvoir vous revoir.
La plus belle de toutes les Selkies m'a souri, illuminant l'air autour d'elle.
- Tu seras toujours la bienvenue, me dit-elle.
- Merci. Dès que je reviendrais en Ecosse, je passerais vous dire bonjour.
Alors, elles m'ont adressé un signe de la main. Puis elles ont plongé, comme aspirées par les profondeurs de la mer.
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