Au-delà
Au-delà de mes frontières, le vent se lève.
C'est l'inconnu, le flou. Cette barrière qui me protège m'est essentielle. Elle me fait respirer sans craindre ces Autres. Tout devient alors calme et serein. Tout est silencieux dans cet espace confiné ainsi créé par mes soins. Comme un besoin, un instinct de survie. Ils ne peuvent plus m'atteindre, ni me faire de mal. Ils peuvent s'étreindre de leur côté, se juger, se dévorer, s'entretuer, s'inventer jusqu'à leur fin. Tout cela ne m'atteint pas.
Au-delà de mes frontières, le vent se lève.
Mon esprit vagabonde parfois sur ces limites, les survole, les épie. Je les plains de ne trouver aucune paix. Aucune intégrité. Aucune décence. Mais je les soupçonne de n'en chercher aucune. Ils n'ont pas encore compris qu'elles ne viendront pas à eux sans effort ni remise en question. Comprendront-ils un jour ce conditionnement qui les formate et les pousse à leur perte ?
Au-delà de mes frontières, le vent se lève.
Il éclate soudain ma bulle, mon sas, mon répit. Il m'emporte avec Eux, me défait, me torpille. Je me débats dans cette multitude anonymée où tout doit être uniforme, conforme, consensuel, tiède. Jusqu'où irons-nous dans cette démesure ? Jusqu'où allons-nous nous acharner ? Qui allons-nous prendre pour un esprit marginal, ou trop aventureux car trop personnel et singulier ? Pourquoi voudrait-il penser par lui-même ? Pourquoi faudrait-il penser par nous-mêmes ?
Au-delà de nos frontières, de quoi sommes-nous capables ?
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