Les fous
LE FOU NOIR
Tac et toc dans les couloirs tout blancs, en diagonale c'est évident.
Toc et tac du talon droit sur le carrelage minable et froid…
« Ta gueule ! Tu t'en fous comment je vais, je parle pas aux hommes morts ! »
Un pas comme si, un pas comme ça, le long des lignes on n'me voit pas… Céline assise, vidée de tout, son âme est grise, brisée, à bout…
En diagonale du monde, les hommes morts s'y risquent pas.
Tac, tac et toc, toc…
Voilà l'grand Crick, le Grand zombie :
« Il faut prendre vos médicaments, monsieur Bourriche ! Sinon nous serons contraints de vous retenir au D7 et vous ne disposerez plus d'aucune liberté.
— Ici aussi je suis pas libre Grand Zombi… Mais ch'uis en oblique comment qu'tu fais pour me voir ? J'en veux pas de tes cachets, ils tuent les âmes. z'avez qu'à m'y fiche au D7, tu peux y croire je changerai pas
— Monsieur Bourriche on n'est jamais libre. Mais c'est vous-même la prison de votre âme. Le poison de votre esprit vous brûle et les cachets éteindront ce feu. N'avez-vous pas envie de vous sentir comme tous, comme moi ?
— Tictoctoc, vieux dément, c'est qu'ty y crois… T'es rien, ni personne… pourtant tu me proposes d'être comme toi ? Tu es fou Toc toqué, le sablier du temps nous dévore tous. Moi je m'en fous, j'en rigole, je ne sens rien et je n'ai rien à perdre. Et toi ? T'as des cachets contre ça ? »
LE FOU BLANC
« Approchez, approchez ! Écoutez la prophétie...
Oui, madame, oui ! Ne riez pas tout de suite, parce que vous êtes morte madame, déjà et ce corps qui s'agite et la colère qui marque vos traits sont eux aussi dissous dans le temps. Nous nous présentons à l'éternité les mains couvertes de merde et de sang. Chacun d'entre nous a une excuse, une explication qui le dédouane. N'est-ce pas madame ? Quelle est votre excuse pour ce cabas plein à craquer, ce cabas en plastique ? Et vos belles chaussures de cuir ? Pourquoi restez-vous ici, pourquoi n'êtes-vous pas aux frontières des guerres et des maltraitances ? Pourquoi ne tenez-vous nul fouet ? Quel est votre excuse pour laisser faire la violence si près de vous ? Madame ne partez pas ! Regardez vos mains… Voilà, ainsi va le monde ! Mais je vous dis la vérité, et il semble que personne ne veuille plus l'entendre. Rien ne résistera à nos comportements de sauterelles, le monde est perdu, nous l'avons dévoré… Oui, monsieur, oui, bien sûr que je vais faire quelque chose. Je vais contacter le ciel et lui demander grâce pour vous. »
Céline assise, vidée de tout, son âme est grise, brisée, à bout…
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