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Ils abandonnèrent le robot sur place. Collés au train par les drones, ils remontèrent le labyrinthe des rues abandonnées au pas de course, transpirant sous leurs combinaisons peu adaptées à ce genre d’effort. Après dix minutes de course épuisante, ils débouchèrent sur un espace ouvert aux proportions impressionnantes.
En son centre, une fontaine circulaire grondait. Haute comme six hommes, elle crachait en direction des cieux un puissant geyser d’eau cristalline. Des perles de pluie réfractaient la lumière de l’étoile couchante, projetant des arcs-en-ciel imparfaits auxquels la couleur verte manquait à l’appel. Les arcs irisés se croisaient à l’infini, esquissaient un dôme partiel, une voûte céleste échafaudée de couleurs miroitantes.
Le symbole rouge clignotant avait cessé de se déplacer.
Leur champ de vision, entravé par le monument, ne leur permettait pas d’avoir un visuel.
Hêcate fut le premier à s’avancer, contournant la fontaine avec une lenteur calculée.
Son cœur tambourinait à lui rompre les tympans.
Le lieutenant Miles et ses hommes le suivaient à distance rapprochée, la main posée sur la crosse de leur arme rangée à la ceinture.
Hêcate s’arrêta brusquement.
À dix pas de lui, un être misérable se tenait assis, adossé au pied de la structure, le visage caché entre deux mains velues munies de quatre doigts trop frêles et trop longs. Accoutré d’un semblant de toge violette en loque, tachée de poussière bleutée qui ne laissait presque rien entrevoir de sa morphologie, il restait là, prostré, sans défense. Ses pieds nus, écorchés à vif, couverts de plaies et de croûtes bleu nuit, laissaient deviner un pelage uni à poil court, terni.
L’être ne parut pas s'apercevoir de leur présence.
Hêcate fit un geste de la main à l’attention de ses compagnons, leur intimant de ne plus bouger et de garder le silence. Il ordonna aux drones de garder leur distance.
Hêcate s’écarta du monument, se déplaça à pas chassés, tout doucement, afin de faire face à l’être démuni, avec l’espoir peu probable de ne pas l’effrayer.
L’être, prostré, ne réagit pas. Hêcate activa le haut-parleur intégré à sa tenue.
— Bonjour ! s’essaya-t-il, d’une voix tremblante qu’il voulait la plus cordiale possible.
La créature se recroquevilla un peu plus sur elle-même.
— Bonjour, insista-t-il. Je suis Hêcate Fleap, de la planète Terre.
L’être poussa un sifflement plaintif. Ses mains tremblèrent légèrement, puis glissèrent, jusqu’à dévoiler deux yeux immenses, deux billes cobalt exempt de pupille. Son visage — ou sa gueule, Hêcate ne put décider — de forme oblongue, sans nez ni oreilles, était fendu d’une petite bouche dénuée de lèvres. Une fourrure rase, entre le rose et le gris, le recouvrait totalement. Il se dégageait de la créature une douceur rassurante, mais son regard d’une profondeur abyssale, dans lequel Hêcate aurait voulu se noyer, ne laissait aucun doute sur la douleur et la peine qui l’habitait.
— Je suis Hêcate Fleap, de la planète Terre, répéta-t-il en se touchant le torse.
Il se trouva ridicule. Comment établir un semblant de communication attifé de cette combinaison de protection lui camouflant le visage ?
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