Chapitre 16 Shelby
Et voilà, il me plante là comme une imbécile ! Seule au milieu de la cuisine ! Quatre à un ! tu vas voir Bruton, je n'ai pas dit mon dernier mot. Tu vas regretter de m'avoir pris pour une casse-noisettes car pour le coup, je vais l'être. Un parfait petit écureuil, soit en sûr.
J'avale une deuxième tasse de thé. J'ai rendez-vous en début d'après-midi dans un cabinet d'avocats, qui traite des affaires familiales à Waco. Je dois encore prendre ma douche, m'habiller et rassembler tous les documents, qu'ils m'ont demandés dont mon examen du barreau.
Je monte dans l'appartement que l'on m'a attribué et ferme à clef derrière moi. Il fait quatre-vingt mètres carrés.
Comme c'est un ancien entrepôt réaménagé, il y a tout un pan de mur en vitres, qui illumine le logement dès que l'on entre. Trois parties de verre coulissent pour donner sur un petit balcon avec vue sur le lac de Waco. Ce dernier est commun à tous les appartements se trouvant sur cette façade, et est en acier galvanisé. Des dalles en teck ont été posées au sol.
L'appartement comprend une cuisine ouverte. Les portes des placards sont rouges et les caissons sont gris ; les plans de travail sont en bois clair. Il y a un îlot central avec placards, côté cuisine ; des chaises hautes, dans les tons gris, sont disposées autour, côté salle à manger.
La table de la salle à manger est en bois clair, massive avec des bancs, très original. On se croirait dans une ferme. Il y a un canapé deux places dans la partie salon et un fauteuil sur son côté droit. Une petite table de salon vitrée dont l'armature est en fer noir, trône au milieu d'un tapis crème, bien épais. Sur le mur en face du canapé de couleur blanc cassé, est accroché une télévision.
De chaque côté du mur, il y a deux portes. Celle de gauche mène à une grande chambre avec dressing. En entrant dans la chambre, sur la gauche, on peut voir une grande fenêtre tout en long, éclairer l'espace. Le mur de la tête de lit est de couleur bleu canard. Mon lit est king-size avec un entourage en bois clair. Les tables de nuit comprennent deux tiroirs, un en bois clair, l'autre reprend la couleur du mur de la tête de lit. Le dressing se trouve sur la droite du lit, derrière un petit mur en brique rouge, il est en forme de U, il est composé de penderies, d'étagères pour les vêtements mais aussi de tiroirs pour les chaussures, le tout dans les tons blancs et bois. Une porte dans le fond, au milieu de toutes ces étagères, ouvre sur la salle d'eau, mais son accès peut aussi se faire par le salon, en prenant la porte située du côté droit de la télé.
La salle d'eau à une douche à l'italienne faite de carrelage dans les tons gris, une paroi de verre la sépare d'un meuble vasque suspendu. Celui-ci est en bois blanc avec trois tiroirs ; un miroir rectangulaire avec éclairage intégré est positionné juste au-dessus.
En revenant dans la pièce principale, il y a deux autres portes situées de chaque côté de la cuisine. Donc, derrière le mur de cette dernière, il y a deux pièces. La première porte à droite mène à une plus petite chambre qui pourra me servir de bureau, la deuxième située à gauche dessert un toilette avec lave-mains.
Ce logement est tout simplement magnifique. Je sors sur le balcon cinq minutes, juste pour apprécier le calme de cet endroit et la vue apaisante. Chaque balcon possède un petit portillon délimitant l'espace de chacun, mais permettant également de passer d'un appartement à l'autre, au cas où... au cas où quoi d'ailleurs ? Comment se fait-il qu'il n'y ait qu'un balcon commun ? Ont-ils prévu de venir mater derrière les fenêtres, les gens qui s'envoyaient en l'air ?... C'est vrai que lorsqu'il n'y a rien d'intéressant sur le petit écran, autant se mater un bon « film » de cul... ce qui me fait sourire, m'imaginant regarder ce bon vieux Léo se faire une branlette en pensant à moi... à moi... non mais tu délires ? Qu'est-ce qu'il m'arrive ? Il me tape sur les nerfs et en plus je ne suis pas son genre ! Donc, exit !
En plus, sa chambre doit certainement se trouver au premier étage, vu qu'il est dans cette famille depuis des décennies. Donc, pour le mâter, il faudrait que je descende en rappel jusqu'au premier. Et si je me loupe ?... que je dérape ?... je risque de prendre de l'élan... et si la fenêtre de sa chambre est ouverte, d'atterrir dans son lit... ou mieux encore... si elle est fermée, je risque de me retrouver écrasée comme un insecte contre le carreau, le nez et la bouche aplatit... Quelle image il aurait de moi... oulala... le délire que je me tape ! Bon... Stop... je ne veux plus penser à cet enfoiré qui me traite de casse-noisettes...
Je respire à pleins poumons l'air extérieur me remplissant de ses odeurs d'été. Je sens l'herbe fraîchement coupée et rien que cela me donne la patate.
— T'es la nouvelle ? me dit un voix sur la gauche.
Purée, pour la tranquillité on repassera... on ne peut pas être peinard cinq minutes ! Je tourne la tête et découvre une brebis, enfin ce que je suppose être une brebis, au vu de sa tenue aguichante. Je crois qu'il y en a une vingtaine en tout au QG. Je ne les ai pas toutes rencontrées et celle-ci en fait partie. Elle est grande, je dirais un mètre quatre-vingt pour soixante-cinq kilos. Elle a les cheveux longs bruns, coiffés en un chignon haut avec quelques mèches, lâchées autour de son visage. Les yeux légèrement bridés et marron foncé. Elle a le visage en forme de poire, c'est à dire fin vers le bas et un peu plus large vers le front. Un petit nez rond, légèrement retroussé appelé « nez en trompette », et des lèvres en forme de cœur. Elle est juste magnifique. Elle porte une petite robe noire près du corps avec un décolleté arrivant bien en dessous du sternum. Sa poitrine est généreuse mais pas trop. Quatre-vingt-quinze C peut-être. Elle est juchée sur des talons aiguilles noir, ses jambes portent des bas, je vois le haut en dentelle juste au ras de la micro robe. Elle me regarde de la tête aux pieds, devant juger que je fais pâle figure avec mes un mètre soixante-dix, mes soixante kilos et mes cheveux courts, blonds. Certes, on a le même nez et la couleur de nos yeux est la même. Quoique les miens sont moins foncés, ils ont, lorsque je suis de très trrrrrrrrééééééés bonne humeur, de petits éclats verts. Mais lorsque je vois une telle bombe à côté, qui a priori, n'est pas dans ses quartiers, je me demande si c'est vraiment une brebis.
— Oui je suis nouvelle et toi ? Tu es ? réponds-je
— Grâce (se prononce Grèce) ! me dit-elle
— Oui mais encore ? Tu es la régulière d'un des motards c'est cela ?
Je crois que je dois avoir une tête de clown car je la fais rire.
— Pas du tout ! Du moins pas encore mais bientôt, me fait-elle avec un clin d'œil. Je compte bien me faire passer la bague au doigt, je n'en suis pas loin, ça fait quelques semaines que je le travaille au corps et je sens qu'il craque...
Eh bien, grand bien lui fasse. Les mecs sont si prévisibles, leur faire perdre la raison n'est qu'un jeu d'enfant, quand on leur met sous le nez ce genre de brebis... Ça écarte les cuisses d'un simple claquement de doigt. Alors qu'ils pensent qu'elles leur mangent dans la main, c'est eux qui finissent à quatre pattes, la langue pendante et la queue entre les jambes... je vois l'image devant mes yeux, j'ai l'impression de mâter un film BDSM avec le mec et la boule en caoutchouc dans la bouche.
— Qu'est-ce qui te fait rire ? me dit elle
Mince je crois que mon imagination a débordé sur mon visage.
— Oh rien, j'imaginais simplement ton mec à quatre pattes, un bâillon et une boule noire coincée dans la bouche ; en string cuir noir avec des pinces aux tétons, m'esclaffé-je, presque pliée en deux.
La franchise faisant partie de ma personnalité... parfois... c'est comme les mensonges quoi.
— Ah je vois, me dit-elle pas du tout choquée par mes propos. Je suis désolée de te décevoir, ce n'est pas le cas. C'est vrai qu'il aime le sexe un peu hot, mais ce n'est jamais lui le « clébard », si tu vois ce que je veux dire.
— Oh je vois très bien, reprends-je morte de rire, mais peut-être qu'après le mariage ça deviendra un vrai toutou qui sait ?
Cette conversation m'éclate complètement et me détend, je pense que je vais être au top pour mon rendez-vous de cet aprèm... ou pas...
— Léo n'est pas comme ça ! Il est sauvage et difficile à dompter, c'est ça que j'aime chez lui ! Sa fougue ! Il ne vous laisse jamais sur le carreau, il fait en sorte de...
— STOP ! c'est bon, je crois que j'en ai assez entendu, en plus je suis pressée, j'ai un rendez-vous à Waco... donc... ben ... bonne ... bourre ?
Et je rentre comme une balle dans ma chambre.
Bonne bourre ? Vraiment ? Je n’ai pas trouvé autre chose à dire que ça ? Bonne bourre ! Pourquoi pas « éclatez-vous bien les lèvres du cul » pendant qu'on y est ! Purée l’enfoiré ! Tu m'étonnes que je ne l'intéresse pas ! Bonjour la plante verte ! Et qui plus est... il dort juste à côté de ma chambre ! Il n'y a qu'un mur de pacotille qui nous sépare ! Manquait plus que ça... je veux bien que les murs soient épais mais rien que de la voir elle !... Et puis ces images qui défilent dans ma tête, inversant les rôles du scénario que je m'étais imaginée. Moi à quatre pattes, un bâillon dans la bouche, les fesses à l'air... humm... oui je le sens, là...
Quoi ? Je le sens ! mais t'es complètement nymphomane* ma pauvre fille, ce n’est pas toi qui va être prise en levrette mais ELLE ! Au... bon sang de bonsoir ... de queue dans l’fumier. NON PAS DE QUEUE DANS L’FUMIER ! Mais qu'est ce qui me prend, nom d’un p’tit bonhomme ! A la douche... froide ! Vite !
Je saute dans ma douche à l'italienne et mets le jet sur froid comme prévu et... je hurle sous l'effet de surprise.
— Qu'est-ce qu’il se passe ici !
— AAAHHHHH ! crié-je
— OOOOOHHHH ! me répond t'il
Et oui, Léo vient de débouler dans MA salle de bains, alors que je suis à POILS !
Le réflexe est de me retourner vers le mur pour ne pas montrer mon côté féminin, car soyons clair, une paire de fesses tout le monde en a une non ?
— MAIS QU'EST CE QUE TU FOUS DANS MA SALLE D'EAU ! crié-je
— JE TE SIGNALE QUE TU AS HURLÉ ! me répond t'il sur le même ton.
— J'AI LE DROIT DE HURLER QUAND L'EAU EST GLACÉE ! Flute alors, dis-je en baissant le ton cette fois-ci.
— Parce qu'en plus, tu ne sais pas te servir d'un mitigeur !
Abruti ! pensé-je. Je tourne la tête vers lui et vois que MONSIEUR se rince l'œil.
— Non mais faut pas te gêner ! DÉGAGE DE LÁ !
— Je ne vois pas pourquoi je me gênerais, il ne fallait pas hurler !
— Oui... et bien... maintenant que tu as vu tu peux...
— ...Eh mon bébé ! qu'est-ce que tu fais ? dit Grâce en entrant elle aussi dans ma salle d'eau.
— Non mais c'est bon ! Vous ne voulez pas non plus que je vous fasse un défilé ! Emporte ta poupée et DÉGAGE ! Et puis d'abord comment êtes-vous rentrés ?... oh nom d’une pipe... le balcon !
— Pratique non ? me répond t'il.
— DÉGAGEZ DE MA CHAMBRE !
— Ok Ok ! pas de problème ! Mais la prochaine fois que tu cries, ne viens pas te plaindre, si je ne viens pas à ton secours alors que tu seras dans la panade, Gamine !
— ABRUTI !
Et il part...
— Mais quelle journée de chiotte ! gueulé-je en penchant la tête en arrière.
Je chope ma serviette de bains, m'enroule dedans puis sors de la salle d'eau, après avoir séché mes cheveux, m’être coiffée et maquillée. Je me dirige vers mon dressing pour choisir la tenue qui va bien pour mon rendez-vous. Tout compte fait, pratique la porte communicante entre ces deux pièces.
Nom d’une pipe, je suis remontée comme un coucou suisse ! Pourquoi suisse ? je n’en sais foutrement rien... pourquoi pas corse pendant que j'y suis... Ah bah non... pas corse... bah non... car c'est doucement le matin, pas trop vite le soir... A part si c'est un corse qui fait partie du front de libération... là... ce serait plus explosive... ou alors... et puis flute, je délire là ! Je vais finir par être à la bourre et pour le coup, c'est mon poste qui risque d'exploser en vol !
J'enfile une robe blazer courte blanche, près du corps, m'étant en valeur ma silhouette avec un décolleté qui montre ce qu'il faut mais sans plus. C'est pour ainsi dire, une veste longue à manches longues avec une coupe cintrée. Elle a un col à revers allongé, fermé par des boutons dorés. Sur le côté gauche, il y a deux pochettes à rabat et sur le côté droit une seule. C'est de la déco, inutile de vous dire qu'il n'y a pas de poche, juste les rabats... joie ? N'importe quoi. Bref, elle m'arrive bien au-dessus des genoux. Je chausse mes chaussures blanche à talons et je saisis un petit attaché-case noir, où je range tous les documents demandés. Je me regarde une dernière fois dans le miroir. Ma foi, je me trouve plutôt jolie.
Je descends les marches me menant au rez-de-chaussée, en prenant garde de ne pas me foutre la tronche en l'air. Deux étages en talons, ce n’est pas simple. Il est déjà l'heure de partir, je n'ai donc pas eu le temps de grignoter un morceau. Déjà ce matin Monsieur Bruton m'a coupé l’appétit, maintenant je suis tellement stressée par mon rendez-vous, que j'ai l'estomac au fond des godasses. Je rejoins mon Ford... et oui... toujours là ! C'est mon petit trésor.
Je rentre l'adresse du cabinet d'avocats dans le GPS de mon téléphone. Je vois que je suis à vingt minutes en voiture. Cool, ce ne sera pas trop loin.
Lexique :
*Nymphomane : Exagération du désir sexuel chez la femme atteinte de nymphomanie, sorte d'addiction au sexe.
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