Chapitre 17 Shelby

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J'arrive au mille neuf cent vingt et un- I- trente-cinq Waco, Texas soixante-seize mille sept cent six, devant le bâtiment « Bonnie's avocats ». Je me gare sur le parking puis pénètre dans le hall. Il y a sur la droite, accroché au mur, toute une série de plaques avec le nom des avocats présents dans ce bâtiment. Celui qui m'intéresse est Maître Maurisson.

Je me dirige ensuite vers l'accueil, c'est un comptoir en L, coin à droite, en noyer. Trois liserés design à l'aspect inox, ornent le devant. Derrière se tient une femme d'un certain âge, peut-être cinquante-cinq ans. Elle a les cheveux grisonnants, coiffés en chignon. Des lunettes rondes sur son nez légèrement pointu, des lèvres fines et des yeux bleus enfoncés. Pas très grande, un mètre soixante pour cinquante-cinq kilos, pas grosse mais d'une morphologie assez large.

— Bonjour Madame, je suis Mademoiselle Envasé Shelby, j'ai rendez-vous avec Maître Maurisson.

Je n'ai pas pu garder le nom Adams, rien ne l'indiquait sur mes papiers. Tant qu'on ne me demandait pas ma carte d'identité, je pouvais tricher mais là, impossible. Je ne sais même pas si j'ai déjà dit à Sandie comment je m'appelais d'ailleurs ? Il faudrait que je lui pose la question.

— Oh bonjour Mademoiselle Envasé, je vais prévenir Maître Maurisson de votre arrivée. Je me présente Cathy Sanders. Je suis la secrétaire de ce cabinet. Si vous avez la moindre question sur son fonctionnement, je suis là pour vous aider. Les dossiers n'ont plus de secret pour moi, me dit-elle dans un sourire des plus amical.

Au moins ma première impression est bonne. L'accueil est fort sympathique. Pourvu que Maître Maurisson le soit tout aussi.

— Il arrive pour vous accueillir dans deux petites minutes. Il finit un entretien téléphonique. Voulez-vous boire quelque chose en attendant, un café... un thé ?

— Non merci Madame Sanders, c'est très aimable.

— Appelez-moi Cathy s'il vous plaît, les madames me donnent encore plus les cheveux blancs, si vous voyez ce que je veux dire, continue t'elle en me faisant un clin d'œil.

— Je n'y manquerai pas Cathy, moi c'est Shelby.

— Alors enchantée, Shelby.

Je m'assieds sur une chaise confortable dans le hall et en profite pour le détailler. Les murs sont lambrissés en bois blanc, donnant ce côté chaleureux. Des rangées de spots sur câbles en fer noir, éclairent des toiles de peintres décorant les murs. Un rectangle de lumière éclaire le centre du hall. Sur le comptoir de Madame Sanders se tient une lampe de bureau avec son pied en laiton. Le diffuseur en verre est de forme ovale et de couleur vert, il diffuse une lumière importante, il peut être positionné vers le bas mais aussi pivoter pour cibler un endroit précis. Le tout est très harmonieux, pensé-je.

La porte d'un bureau s'ouvre, je vois un monsieur sortir, il est habillé d'un pantalon à pinces noir et d'une chemise à manches longues blanche, complétée d'une cravate noire. Il a un visage plutôt rond avec une moustache et une barbe grise. Son front est légèrement dégarni et les cheveux sur ses tempes sont assez courts. Ce qui détonne, c'est cette petite queue de cheval de quelques centimètres, attachée au bas de sa nuque et retenue par un petit élastique noir. Original.

— Bonjour Mademoiselle Envasé, je vous en prie, veuillez me suivre dans mon bureau.

— Bonjour Maître Maurisson.

Je me lève donc, lisse ma robe, pour retirer les plis s'étant formés lorsque j'étais assise, et le suis jusqu'à son bureau.

— Assoyez-vous, je vous en prie.

— Merci Maître.

Le fauteuil est confortable avec son assise et son dossier en cuir, le rembourrage est très moelleux. Lorsqu'on est assis, limite on n'a pas envie de repartir, ou alors avec ! Rhoo... j'imagine déjà le client sortant voûté, le derrière encore enfoncé dans son fauteuil, le tenant par les accoudoirs et se dirigeant vers la sortie en faisant un signe de tête pour dire au revoir.

— Mademoiselle Envasé ?

Oh mince ! Je crois que je me suis égarée dans mes pensées.

— Excusez-moi, Maître, je suis un peu intimidée.

— Oh mais ne le soyez pas, je m'en voudrais de vous mettre mal à l'aise. Alors qu'est-ce qui vous a décidé à poser vos valises à Waco. Je vois que vous avez eu une très bonne appréciation de vos anciens maîtres de stage, que vous avez passé haut la main, l'examen du barreau ! Je n'avais pas eu un aussi bon dossier de candidature depuis bien longtemps, je vous le promets, donc ne soyez nullement stressée, dit-il en feuilletant les documents que je lui ai remis lors de mon entrée dans son bureau.

— Merci Maître.

— Arrêtons avec tous ses maîtres, inutile de vous faire patienter plus longtemps de tout façon, ce rendez-vous pour moi n'est qu'une formalité. A la lecture de votre curriculum vitae et après avoir pris quelques informations, je peux d'ores et déjà vous dire que nous sommes amenés à travailler ensemble, enfin si vous souhaitez intégrer mon cabinet ? Je vois que nous sommes d'accord d'après votre hochement de tête, donc mon prénom est Charles, si vous permettez que je vous appelle Shelby, bien entendu ?

— Oui bien sûr ! Merci de me donner ma chance. En fait, je suis arrivée à Waco car j'ai une amie qui est venue vivre ici. Lorsque j'ai découvert la région, j'en suis tombée amoureuse.

Comment lui dire que deux petites jumelles m'ont fait craquer et que je ne pouvais pas les voir grandir loin de moi. En plus, il y a un certain Bruton que j'aimerais dompter... dompter... humm... à la cravache... lui m'obéissant au doigt et à l'œil... me suppliant de le lécher et de...

— Mademoiselle Envasé ? Shelby ?

— Pardon... Charles... j'ai tellement de questions sur le fonctionnement de votre cabinet que je ne sais par où commencer ?

— Si on commençait par faire le tour des bureaux de vos futurs collègues ? me dit il

— Oui... oui... très bonne idée.

J'espère que lorsque je vais relever le derrière de ma chaise, je ne vais pas avoir une flaque humide aux fesses, car pour le coup, mon imagination m'a chauffé... oups... c'est mes cuisses qui collent au cuir en me relevant... ouf... j'ai cru défaillir... il n'aurait plus manqué que ma mouille colle au cuir et que je me retrouve le siège accroché au derrière...

— Vous me suivez ?

— Oui... bien entendu... mais je me demandais si je pouvais laisser ma sacoche ici ou peut-être à l'accueil ?

Menteuse.

— Vous vous posez beaucoup trop de questions, même si justement c'est un plus dans notre métier, s'interroger. Prenez votre sacoche car je vais commencer par vous montrer votre bureau.

— Ah euh... d'accord.

Nous nous dirigeons donc vers une porte en bois clair avec un vitrage en son centre. Il ouvre la porte, il me laisse pénétrer en premier.

Je rentre dans une pièce baignée de lumière grâce à sa grande baie vitrée. Un store californien tamisant y est installé, dans les tons beige clair. Mon bureau se trouve à gauche en entrant dans la pièce, il est blanc en forme de U, fait dans des lignes courbes très modernes. De nombreux rangements main gauche formés de cinq tiroirs et de deux étagères ; main droite, il y a deux tiroirs. Un fauteuil ergonomique blanc épousant le forme du dos m'a été octroyé, il a les accoudoirs en métal. Deux meubles avec étagères se trouvent contre le mur derrière celui-ci. Dans les tons blancs également. Punaise, y'a pas intérêt de laisser une tasse de café sur le bureau, si je ne veux pas avoir une trace marron, venant entacher ce blanc immaculé. On se croirait arriver au paradis... enfin... je n'ai jamais eu l'occasion de visiter le paradis... mais non... que je suis bête... ce n'est pas une question d'occasion... Y'a vraiment pas besoin d'aller visiter le paradis... car qui dit paradis... ben... on va dire que cela voudrait dire... que...

— Shelby ? Votre bureau vous plaît-il ?

— Oh oui oui, je suis subjuguée par sa beauté, je ne m'attendais pas à un aussi grand et beau bureau !

— Tous mes collaborateurs doivent se sentir bien dans leur bureau, c'est une chose à laquelle je tiens. Un avocat bien dans son « antre » fera un travail à la hauteur de celui-ci, me sourit-il. Et puis, les clients doivent se sentir à l'aise, vous ne croyez pas.

— Si si bien sûr.

Nous continuons notre visite à travers les autres bureaux. Ils ont exactement la même disposition, même les bureaux sont pareils, seule la couleur change. Cela va de la couleur chêne clair, au noyer et au noir. Pour tous les goûts en fait. A priori, le mien était le dernier à ne pas être occupé donc je suppose que les autres ont choisi leur couleur et que le blanc les a fait fuir. Moi, il me repose. Ben oui... repos éternel quoi... enfin... au vu de ma spécialisation, je ne suis pas sûre que ce soit le repos qui m'attende. Les affaires familiales, ce n’est pas du chamallow.

Il me présente à mes collègues. Il y a Myriam, une métisse, les cheveux très longs et ondulés ; les yeux verts en amande ; le nez fin et les lèvres pulpeuses. Elle doit faire la même taille que moi un mètre soixante-dix pour soixante kilos, elle a vingt-sept ans. Elle porte un tailleur pantalon, pêche. La veste est fermée par un gros bouton de la même couleur, le décolleté est profond et laisse voir un caraco crème. Elle me jauge de la tête aux pieds, je ne sais pas pourquoi mais j'ai l'impression qu'elle n'est pas super ravie de ma présence.

Dans le bureau juste à côté du sien, mon second collègue est Marlo, un mètre quatre-vingt, soixante-huit, il a vingt-neuf ans. Pantalon noir épousant parfaitement son corps, veste noire sur chemise blanche. Blond, cheveux courts sur le côté et en brosse sur le dessus. Les yeux bleus qui vous transpercent. Des lèvres qu'on a envie de suçoter... Hummm... oh punaise... Shelby reste zen bon sang... t'es complètement en manque purée ! Il serait peut-être temps de remonter à cheval... découvrir si le sexe est si bon que ce qu'on dit... sans contrainte, rien que du désir... hummm... flute... le mec est en train de me tendre la main et moi je le déguste des yeux.

— Marlo, me dit-il avec un sourire en coin.

— Oh pardon, Shelby ! dis-je confuse en serrant sa main, enchantée de faire ta connaissance.

— Moi de même, très très enchanté de faire ta connaissance, me répond t-il en me tenant la main plus longtemps que nécessaire.

Ce qui... et bien... me met très mal à l'aise, contrairement à ce qu'on pourrait croire. Ma libido vient de se faire la malle, remplacée par une boule d'angoisse venue se loger dans ma gorge. Ce regard que je trouvais charmant me fait soudain froid dans le dos, je retire donc ma main doucement mais fermement.

— Voici mon fils, me précise Charles.

Manquait plus que ça.

— Ah... euh... d'accord... je vois que le fils a suivi les traces de son père, dis-je en un sourire un peu trop crispé.

Ce dernier continue de me dévisager avec un rictus en coin. Nous ressortons, à mon grand soulagement de son bureau et nous finissons par Peter. Un mètre soixante-quinze, quatre-vingt kilos. Il a cinquante-deux ans. Cheveux courts bruns, des lunettes avec le contour fin, en fer noir. Il a un très joli sourire, très avenant. On se sent en confiance dès qu'on le rencontre.

— Bienvenue chez nous Shelby, me dit-il.

— Merci de votre accueil, réponds-je.

— Un peu de nouveauté nous fera du bien. Un regard nouveau sur les dossiers. Partager nos impressions lors de nos réunions. Tout cela sera excellent surtout que, d'après ce que nous a laissé entendre Charles, tu es sortie première de ta promo, comme il dit « une pépite », me fait il avec un clin d'œil.

Ok, je comprends maintenant le regard de ma collègue, elle n'a pas dû apprécier de passer au second plan.

— Dans chaque bureau, il y a une porte au fond, qui donne accès aux bureaux des autres. On peut passer comme cela de l’un à l'autre sans repasser devant l'accueil, bien pratique pour éviter la clientèle parfois.

— D'accord, je vois... c'est... parfait.

Je suis en train de me dire « heureusement que mon bureau est juste à côté de cette Myriam et pas à côté de son fils », brrr... j'en ai des frissons dans le dos.

— Bien, si nous repassions dans mon bureau pour finaliser votre embauche, et nous mettre d'accord sur le salaire que je vous propose, en espérant que celui-ci soit à la hauteur de vos espérances.

Il est vrai que nous n'avons pas discuté de cela, venant à la base pour un rendez-vous, ne pensant nullement que le premier serait le bon. Je me suis quand même un peu renseignée, je sais qu'en débutant je peux toucher entre neuf et dix mille dollars par mois. Donc, s'il croit que ma jeunesse veut dire se faire avoir... il va pleurer... enfin pleurer... peut-être pas... je suis trop sensible, il risquerait de m'avoir...

— Est-ce que ce montant vous satisfait Shelby ?

Mince... je n'ai pas écouté ça craint...

— Vous espériez peut-être plus ? J'avais pensé que quinze mille dollars par mois au départ, serait convenable, mais si vous espériez autre chose, on peut en discuter, je ne suis nullement ferm...

QUOI ? QUINZE MILLE DOLLARS !

— Non ! non ! Excusez-moi, je ne m'attendais tout simplement pas à un tel montant au départ...

Ce n’est pas vrai, j’suis vraiment trop nulle ! Pourquoi je dis ça ! il va baisser, c’est sûr !

— Croyez-moi, je suis sûr que vous les valez largement. Ce n'est que le salaire de base dans mon cabinet. Chaque année, il est revalorisé de cinq pour atteindre son montant final de vingt-deux mille dollars environ, au bout de huit ans d'ancienneté. Ensuite, je fonctionne par prime, lorsque les affaires sont juteuses, me fait-il dans un clin d'œil. Voilà, je crois que je vous ai tout dit. Qu'en pensez-vous ?

Youpi... ai-je envie de dire mais à la place.

— Je signe où ? dis-je en riant.

— Cathy va vous préparer votre contrat, il sera prêt à être signé dès demain. Les horaires de travail sont de neuf heures à douze heures et de quatorze heures à dix-huit heures. Bien entendu, on sait que parfois, il est difficile de respecter ses horaires, suivant le travail que l'on fait. Chaque heure supplémentaire est convertie en réduction du temps de travail, j'espère que cela vous convient également.

— Oui... oui bien entendu... il est parfois intéressant de se reposer suite à de gros dossiers, je suppose.

— C'est tout à fait exact. Pour ma part, je suis souvent en déplacement sur Los Angeles, où j'ai un bureau là-bas également, mais mon fils à l'habitude, il gère très bien l'étude pendant mon absence. Donc, si vous avez le moindre problème pendant cette période-là, n'hésitez pas à aller le déranger. Bien entendu, ma porte est toujours ouverte quand je suis présent, à la moindre interrogation ou pour un conseil, frappez ! finit-il.

— Merci Maître... pardon, Charles, merci.

— Ne me remerciez pas, je suis sûr que nous allons faire du très bon travail ensemble.

— Est-ce que vous voulez que je commence à étudier un dossier, pendant que je suis là ?

— Non Shelby, pas tant que le contrat n'est pas signé, on ne sait jamais... toujours rester sur ses gardes.

— D'accord, alors je vous dis à demain neuf heures ?

— Oui à demain neuf heures, me confirme t'il.

Je sors de son bureau, le sourire aux lèvres, il est déjà midi et j'ai l'estomac dans les talons.

— Alors ? me dit Marlo, en sortant de son bureau en même temps que Myriam et Peter, tu restes parmi nous ?

— Euh... oui... je reste !

— Parfait ! me dit-il, on sort pour déjeuner, tu veux te joindre à nous ?

— Euh... je t'ai dit qu'aujourd'hui Peter et moi avions rendez-vous au sud de Waco, au tribunal, donc on part de suite, dit Myriam.

— Ah oui ! C'est vrai, enchaîne Marlo avec un rictus, se frappant le front de sa main. J'avais complètement oublié.

— Ouais... comme par hasard, répond t'elle,

Et elle part vers la sortie, Peter sur ses traces. Purée... je ne la sens pas, celle-là, surtout avec le regard noir qu'elle m'a lancé.

— En fait, je crois que je vais rentrer, dis-je.

— Ah non ! Pas question ! Tu vas venir manger avec moi, me dit-il en me prenant par les épaules.

Geste qui me met très mal à l'aise, je me dégage gentiment, reprenant mes distances. Il ne s'en offusque pas et m'ouvre la marche.

— Allez suis moi ! Je serais ton chauffeur !

— Je préfère prendre mon véhicule, comme ça je repartirai directement du restaurant.

— Ok, comme tu veux. On va aller au Sudden Death Club's, tu verras on y mange super bien là-bas, le spectacle est sympa également.

Oh punaise ! C'est le club de Ghost ça ? J'ai dû y mettre une fois les pieds, je ne sais pas si c'est une bonne idée... en même temps... je me sentirais plus en sécurité entre ces murs... parfait... que souhaiter de mieux... J'angoissais de passer un moment avec lui donc... là... plus de problème !

Nous nous dirigeons vers nos véhicules respectifs. Inutile de vous dire qu'il a la dernière BMW, le coupé qui plus est... il fallait bien qu'il se la pète jusqu'au bout. Une fois installée derrière le volant, je mets le moteur en route puis le suis à travers les rues de Waco. Nous arrivons enfin sur le parking du Club. Je vois que la Harley-Davidson de Léo est présente. Mince... manquait plus que lui... nom d’un petit caniche... de queue dans l’fumier ... Oh non ! pourquoi toujours le ramener à cette expression de pacotille...

— Shelby ? Tu viens ? m'interpelle Marlo.

Je m'aperçois que je suis restée focus devant la Harley.

— Oui... oui j'arrive.

— Ne me dit pas que tu es le genre de nana à baver devant un bikers et sa bécane ?

— Pff... non !

Carrément oui ! Mais ça, il ne le saura pas.

Nous entrons dans le club. A cette heure-ci, c'est Sergio derrière le bar, le compagnon enfin officiel d'Anton. Pendant mon absence de ces deux derniers mois, il a fini par faire son coming out, au grand soulagement de tous les membres, qui n'étaient pas dupes de leur manège. Donc, c'est un Sergio avec un grand sourire qui m'accueille.

— Bonjour ma belle ! Tu ne nous présentes pas ? me dit-il en regardant Marlo.

— Ben mec, tu m’reconnais pas ? Je viens souvent ici pour déjeuner, dit un Marlo piqué dans son amour propre.

— Excusez-moi, il y a tellement de monde que je ne retiens pas tous les visages, ne m'en veuillez pas.

Au moins, Sergio continue de le vouvoyer, c'est parfait !

— Moi je ne t'ai pas marqué, mais par contre Shelby oui, dit-il.

Je fais les gros yeux à Sergio pour lui faire comprendre de ne pas trop en dire. Et je crois qu'il a compris au vu de ses propos suivants.

— Que voulez-vous, une belle femme ne passe jamais inaperçue.

— Ah là, mon pote tu as raison, lui répond t'il en me remettant le bras sur les épaules.

Geste qui commence à me taper sur le système nerveux mais que faire, c'est le fils du patron et purée ! la place est le rêve de toute jeune avocate débutante dans le milieu, alors ce n'est pas un geste aussi anodin, qui va me faire perdre mes moyens non ? Et puis, quand je me serais bien implantée... enfin implantée... pas au sens... enfin vous voyez... je voulais dire implantée au sein du cabinet... pff... je recommence à me parler toute seule. Bref, Sergio nous désigne une table pour que nous puissions nous y installer pour manger. Je n'ai pas vu la queue de Léo... OHHH... la queue ! N'importe quoi bordel ! je n'ai pas vu la tête de Léo ! Le phacochère, le Bruton quoi !

— Merci Sergio, dis-je.

— De rien ma belle, Amélia va venir prendre votre commande. En attendant, vous pouvez toujours profiter du spectacle, me fait-il avec un clin d'œil.

— Pas de soucis, fait Marlo c'est toujours un plaisir pour les yeux.

Nom d’une pipe, que je ne le sens pas celui-ci, mais va bien falloir faire avec.

Il s'est glissé sur la banquette à côté de moi, plutôt que de s'asseoir en face de moi et pose sa main sur ma cuisse... grrr...

— Voudrais-tu boire quelque chose Shelby ?

— A une condition, souris-je crispée.

— Ah oui laquelle ?

— Que tu retires ta main là où tu l'as posée. Je ne pense pas t'avoir donné l'autorisation d'être aussi collé-serré. Je n'ai pas encore signé le contrat de travail, je crois que je vais peut-être y réfléchir à deux fois, en prenant bien entendu le temps d'expliquer mon choix à ton père, je ne voudrais pas lui faire de la peine... n'est-ce pas ? terminé-je.

Nom d’une pipe, le bluff a marché, non seulement il a retiré sa main fissa, mais son visage est passé pâle.

— Oh, excuse-moi, je pensais... enfin tu vois...

— Euh non pas vraiment ?

— Que je ne te laissais pas indifférent.

— Je ne te connais pas ou très peu, je n'ai pas l'habitude des rapprochements aussi rapides...

— ...la menteuse n'est pas loin, dit une voix grave non loin de mon oreille.

Oh bon sang ! l’abruti !

— Léo ! Qu'est-ce que tu fais là ? Et de quoi je me mêle ? Je parlais à Marlo pas à toi à ce que je sache !

— Oui mais quand j'entends des conneries aussi grosses que cela, je ne peux laisser ce pauvre homme dans l'ignorance, me sourit-il.

Je me retourne vers Marlo qui affiche un sourire diabolique puis vers Léo, je crois que je n'ai plus de mot, j'ai la bouche ouverte et les larmes me montent aux yeux... je le bouscule... me lève et fuis vers les toilettes, en disant à Marlo de m'excuser, que je reviens de suite.

Je rentre comme une balle dans les toilettes et m'appuie sur les lavabos. Il ne sait pas ce qu'il a déclenché cet andouille ! Marlo n'est pas un mec avec lequel on peut déconner sur ces choses-là ! Je le sens... c'est au fond de mes tripes... cette peur qui refait surface au bout de tant d'années... ce flash- back, le soir de mes seize ans. Je vois des petites étoiles scintiller devant moi, cette sueur froide me dévaler le dos, ses tremblements me saisir et puis... plus rien... le noir.

— Eh... gamine ! Qu'est-ce qu’il se passe ?

J'ouvre les yeux et rencontre ceux turquoise, de Léo. Je me redresse comme assise sur une ressort et m'éloigne de ses bras. Ce n'est pas le moment pour les plaisanteries... je ne me suis pas rendue compte de mon étourdissement, ni de l'entrée dans les toilettes de Léo.

— Depuis combien de temps suis-je là ? lui demandé-je.

— Quelques minutes, je dirais, je t'ai suivie dès que tu as quitté la salle, ta pâleur m'a surpris me dit-il, qu'est-ce qu’il se passe avec ce type ? Qui est-ce ?

— Ça ! Ça ne te regarde pas, lui dis-je en passant en vitesse à côté de lui, quittant les toilettes.

Bon sang de bonsoir... qu’est-ce que je peux être bête !

Je me dirige vers ma table, le menu du jour vient d'être servi, le midi c'est un plat unique. Marlo a dû passer la commande et demander à ce qu'on soit servi, vu qu’il doit reprendre le taf à quatorze heures.

— Eh, je me demandais bien ce que tu faisais ? Tu connais ce type ?

— Juste un abruti sans importance qui n'a pas aimé que je le repousse... un mec quoi !

Quelle mauvaise foi... mais que répondre d'autre, il fallait que je tue dans l'œuf tout espoir qu'il avait de profiter, de ce qu'avait laissé entendre Léo. D'ailleurs en parlant de ce dernier, il vient de s'installer au bar et me regarde dans les jeux de miroirs. S'il croit que je ne le vois pas.

— Bien, nous pouvons manger, je meure de faim, je suppose que tu as du travail après donc, ne perdons plus de temps.

— Tu ne veux pas boire une bière ?

— Non merci, je ne bois pas lorsque je prends le volant ensuite, réponds-je

— Soit, alors à la tienne, me dit-il en levant sa bouteille.

Lui n'en a rien à foutre de prendre la volant alcoolisé, même si ce n'est pas une bière qui va faire tourner l'alcootest.

Nous finissons notre repas, en parlant surtout du cabinet et des affaires à traiter. J'apprends ainsi que je vais avoir un dossier assez chaud, sur un couple dont la femme est battue. Elle désire se séparer pour de bon de ce boulet. D'après ce que je comprends, il est déjà en préventive pour l'avoir envoyé à l'hôpital. Ce monsieur a déjà pris un avocat pour le défendre, et la pauvre femme est venue au Bonnie's avocats, pour trouver de l'aide. Et cela pas plus tard qu'hier donc, à moi le dossier... chaud... chaud... en même temps, je ne me serais pas vu défendre le mari.

Après notre repas qui a remis les pendules à l'heure avec Marlo, puisqu'il n'a plus jamais fait de gestes déplacés, je regagne mon véhicule et rentre au QG. Je retrouve Sandie qui a dû m'entendre arriver avec mon Ford et qui trépigne d'impatience.

— Alors ? me dit-elle existée, ce rendez-vous, c'était comment ?

— Je suis prise ! crié-je en lui sautant dans les bras.

Je ne vais pas revenir sur les différents évènements de la matinée. Je préfère garder ça pour moi et j'espère que Léo sera en faire de même.

— Et devine ? Je vais toucher quinze mille dollars par mois !

— Quoi ? Quinze mille dollars ?

— Oui ! Quinze mille dollars ! Et attends, dans huit ans, si tout va bien, je serais à vingt-deux mille dollars ! Après c'est sous forme de prime ! c'est génial non !

— Oh purée, il faut qu'on fête ça ! Dommage Nikita n'est pas là, elle travaille au garage et ne rentre pas à midi. Mais... ce n’est pas grave... on en aura plus pour nous, rit elle.

— Et les jumelles ? Tu ne peux pas être bourrée !

— Moi non, mais toi...

Et elle part dans un éclat de rire en allant récupérer une bouteille de whisky dans le bar du salon.

— T'as raison... avant que les choses sérieuses ne commencent, je vais me mettre la tête à l'ENVERS ! crié-je.

Sauf que je ne pensais pas si bien dire en me réveillant le lendemain à six heures, la tête en vrac, sans savoir comment j'avais atterri dans mon lit ? Sandie, il va falloir qu'on ait une petite explication. Qui m'a mise dans mon lit ? Qui m'a déshabillée ? DÉSHABILLÉE ! QUOI ? Je suis en soutif et string !

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