Chapitre Un
“Non Ganimard ! N’insistez pas ! Vous devenez ridicule !”
Calmement, profondément, le commissaire Ganimard respirait. Il ne voulait pas crier, il ne voulait pas perdre son sang-froid mais que le préfet de police pouvait lui porter sur les nerfs.
“Monsieur, je me permets tout de même d’insister…
- NON ! Vous n’irez pas et c’est un ordre !
- Le prince Sernine est là-bas, monsieur. Il est…
- Vous et votre prince Sernine ! N’insistez pas Ganimard.”
Ganimard se tut, vaincu, mais son adjoint le plus proche, le lieutenant Leïla El Kalai s’approcha et asséna au préfet :
“Nous avons des soupçons, monsieur le préfet. Le prince Sernine a toujours été vu dans les lieux où un crime d’Arsène Lupin a été commis et…”
Mauvaise idée !
En voulant défendre son patron, le lieutenant El Kalai avait envenimé les choses. Le préfet de police se mit à hurler :
“ET VOILÀ LA RAISON DE TOUT CE CIRQUE ! Lupin, encore et toujours Lupin ! Que Ganimard en fasse une idée fixe, je comprends mais que vous, El Kalai, un lieutenant avec la tête sur les épaules, me parliez de cette chimère me surprend.
- Monsieur, Lupin n’est pas une chimère !, opposa froidement Ganimard.
- Mais oui, mais oui. Et vous allez encore me dire que l’Aiguille d’Etretat est creuse et cache un trésor ! Si la police n’avait pas autant mérité de vous, Ganimard, je vous mettrais en retraite dès aujourd’hui.”
Le commissaire baissa la tête et le lieutenant El Kalai portait une expression outragée.
“En tout cas, je ne vais pas accorder à un policier français le droit d’aller se pavaner en plein salon de l’automobile à Genève. Comment j’expliquerais cela en hauts lieux moi ? Allez, partez tous les deux !”
Un salut rapide et les deux policiers parisiens se retrouvèrent dans les couloirs de la Préfecture de police.
“C’est gentil, lieutenant, de me défendre, fit Ganimard, sombre.
- Je ne suis pas gentille, commissaire. J’ai lu vos dossiers et je sais que vous n’êtes pas un affabulateur. Si le préfet ne le voit pas, c’est dommage.
- Le préfet ne voit que ce qui l’arrange et le fait est que depuis des années je traque ce maudit Lupin et le rate lamentablement.”
Une main apaisante sur son épaule et Ganimard regarda son lieutenant. La femme ne souriait pas, El Kalai était un policier dur et sévère.
“On l’aura, commissaire, et vous pourrez le jeter aux pieds du préfet.”
Ganimard se redressa et acquiesça en silence.
Mais dans le bureau du commissaire, posée bien en évidence sur son bureau, à côté d’une tasse de café encore chaude et d’un joli éclair au chocolat se trouvait une enveloppe.
Lorsque Ganimard, inquiet, l’ouvrit, il ne put retenir un cri de rage.
C’était une carte de Lupin...accompagnée de deux billets d’entrée pour le salon international de l’automobile de Genève.
Il y avait aussi une lettre que Ganimard lut en serrant les mâchoires avant de la donner à El Kalai.
“ Par la présente, j’informe la police française
de ma présence officieuse au salon international
de l’automobile de Genève.
Je sais que tu aimes aussi les grosses voitures, hein Ganimard ?
Je t’y attends avec impatience.
Emmène ton lieutenant, cela me ferait plaisir de faire sa connaissance.
Ton,
Arsène Lupin”
Il va sans dire qu’après cela, le préfet accorda le droit de partir en voyage en Suisse à ses deux officiers de police…
Annotations