Chapitre Treize
L'incendie était la peur suprême des métropoles.
Il suffisait de jouer là-dessus.
Cela suffit en effet.
On courut à l'autre bout de la ville, on monopolisa l'ensemble des services de sécurité. La catastrophe occupait la zone des entrepôts industriels au sud de la capitale.
A l'incendie s'ajouta la peur des explosions.
Des produits chimiques étaient entreposés non loin du brasier.
Il fallut aussi que la mairie monopolise l'ensemble des services de police de la ville. Pour surveiller les lieux, gérer la circulation et contenir la population.
Une silhouette, longiligne et élégante, déambulait parmi les cordons de police et les véhicules de pompiers. A ses côtés marchait un petit homme, inquiet et nerveux.
" Qu'est-ce qu'on fait ici ? Ton frère a dit que nous devions..."
Sherlock Holmes se pencha et examina le sol et les multiples traces de passage. John Watson leva les yeux au ciel. Là-bas, la police iranienne les regardait d'un air méfiant.
" Sherlock ! Tu m'écoutes ?, grogna John. On doit s'en aller. MAINTENANT !"
Mais le détective anglais se redressa en souriant largement.
" Ne me dis pas que tu as trouvé une piste dans ce marasme ?, fit John, incrédule.
- Lupin n'est pas difficile à saisir. Que veut-il ici ?
- Dénoncer un scandale ? Il nous a déjà fait le coup à Genève.
- Oui. De la poudre aux yeux ! Lupin n'est pas un voleur, mais un metteur en scène. Et je déteste être pris pour une marionnette.
- Quoi ?
- Je laisse son puits à Mycroft avec son scandale chinois. J'ai quelque chose à faire de plus important.
- Mais... Sherlock ?!"
Sherlock ne répondit pas, il s'en alla en marchant à grands pas. Il releva son col et John eut beaucoup de mal à le suivre.
Derrière eux, l'incendie illuminait la nuit de Téhéran. Un merveilleux ciel rouge et mortel, aux allures de fin du monde.
Irène Adler les attendait patiemment près du Hummer. Appuyée contre la carrosserie, Anthéa jouait une partie endiablée de Candy Crush. Les deux femmes ne levèrent même pas les yeux à leur arrivée.
John contempla avec stupeur l'AP de Mycroft Holmes.
" Vous êtes ici ?"
Anthéa sourit en indiquant l'intérieur de la voiture.
Là où un Mycroft Holmes, suprêmement agacé, s'impatientait.
" Les bijoux du Louvre ? Vraiment Sherlock ?
- Je ne suis pas à tes ordres, Mycroft, opposa sèchement Sherlock.
- Si Lupin avait vraiment voulu les bijoux de la Couronne de France, il les aurait dérobés à Paris, soupira Mycroft.
- Peut-être...est-ce trop difficile en France ?" tenta John.
Les deux frères Holmes lui offrirent le même regard gris acier, blasé et dédaigneux. John préféra s'intéresser à ses chaussures de marche.
" Bon, fait Sherlock. Si Lupin ne veut pas les bijoux, que veut-il ?
- A Genève, il a volé un moteur frauduleux, explique doctoralement Mycroft. Ce n'était que la partie officielle de l'affaire."
Sherlock ne put s'en empêcher, il exhiba son sourire pénible et agaçant.
" Ho ho. Qu'est-ce que Lupin a volé ?"
Mycroft Holmes tourna la tête vers la portière restée ouverte :
" Anthéa ! A la bank Markazi Iran !"
Sherlock posa sa main sur celle de son frère et murmura :
" Tu en es sûr ?
- Lupin a volé le téléphone portable de quelqu'un d'important à Genève.
- Le tien ?"
Mycroft faillit s'étouffer en entendant ces mots.
" Je t'en prie ! Non !
- J'ai bien réussi à voler ton ordinateur...
- Certes, rétorqua sèchement Mycroft. En empoisonnant toute la famille. Merci Sherlock."
Les deux frères entamèrent une dispute que John interrompit lorsqu'il n'en put plus.
" Stop les garçons ! Arsène Lupin a volé le portable de qui ?
- Du prince d'Iran, Abbas Pahlavi.
- Et ?
- Un vieil homme de plus de soixante dix ans. Agréable, j'ai beaucoup joué aux échecs avec lui en parlant de pétrole et d'émeraude.
- Mycroft, Mycroft, Mycroft... Quelle bêtise as-tu encore faite ?
- C'est l'ami du directeur de la bank Markazi Iran."
Sherlock siffla et John cherchait encore à comprendre.
" A la bank Markazi dans ce cas-là !"
Anthéa abaissa alors la vitre de séparation entre le conducteur et les passagers.
" Monsieur, il faut que vous entendiez ça !"
La radio grésilla et la fréquence de la police iranienne, automatiquement traduite cracha des bribes d'information.
" Appel à toutes les voitures ! Appel à toutes les voitures ! Intrusion au Louvre à Téhéran ! Appel à toutes les voitures ! Appel à...."
La vitre se referma et Sherlock applaudit.
" A la bank Markazi !"
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