Chapitre 7

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~ Point de vue John ~

Je ne veux pas chercher à comprendre pour l'instant mais qu'est-ce qu'il a voulu dire par là ? J'attends que le commissaire divisionnaire sorte des bureaux pour me faufiler jusqu'au bureau de Nicole.

À peine entré dans son bureau, je ferme la porte à clef et baisse les stores.

— Alors ? Qu'est-ce qu'il voulait ? me demande-t-elle.

— Est-ce que j'ai droit à une récompense après une punition ?

Je la vois sourire, elle sait où je veux en venir.

— Désolé, mais là ça s'annule.

Je la regarde avec un air désespéré.

— Non, je rigole.

Ah voilà qui est mieux. Je le savais ... elle ne peut pas me résister.

— Il voulait savoir si j'avais pris une décision.

— Tu lui as répondu quoi ?

— Je lui ai dit que je voulais le poste de Commissaire, lui répondis-je, en mettant mes mains sur son ventre.

— Si c'est sans aucun regret, tant mieux.

— Dis, tu crois qu'ils ressentent les choses ?

— Le gynéco dit que oui.

— Donc, si tu es contente ils le sont, si tu es contrariée ils le sont aussi ?

— Tout à fait.

— Et si ... on faisait en sorte ... que tu restes joyeuse ... un peu plus longtemps, dis-je, en alternant paroles et baisers dans le cou.

— Je suis tout ouïe.

Au moment où je l'embrasse, elle sourit mais cela ne me dérange pas le moins du monde.

Une heure plus tard, nous remontons les stores et déverrouillons la porte.

— Je crois que tu avais raison. Tu devrais dormir plus souvent sur le canapé, me dit-elle.

~ Point de vue Nicole ~

Je souris pendant qu'il m'embrasse. J'ouvre la porte et il retourne à son bureau alors que je vais au bureau de l'accueil pour combler le vide.

Une femme brune entre dans le commissariat et je la reconnais aussitôt. J'espère que le seigneur me fait une blague ...

— Je peux vous aider ? lui demandais-je, en la voyant chercher quelqu'un du regard.

— Je ne pense pas, non.

— Alors, je vais vous demander de bien vouloir quitter ce lieu.

— De quoi je me mêle ? Je ne vous ai rien demandé.

Elle veut se la jouer comme ça avec moi ? Elle va être servie.

— Moi oui, alors soit vous répondez à ma question, soit vous partez.

Elle se tourne vers moi et je la regarde bien droit dans les yeux. Si elle continue à me regarder comme ça, je la tue dans deux minutes.

— Je pense que si vous êtes à l'accueil, c'est que vous êtes une pauvre quiche sans cervelle, me lance-t-elle.

Je dois la tuer maintenant avec présence de témoins ou j'attends encore un peu ?

— Je vous demande pardon ? questionnais-je, en sortant de derrière le comptoir.

— Vous arrivez encore à marcher ou il faut que vous rouliez ?

Je crois que je vais opter pour la première solution. Tant pis, je finirais ma grossesse en prison.

— Bon, soit vous me dîtes ce que vous cherchez, soit je vous mets mon poing dans la figure, lui répondis-je.

— Le Commandant Matthews, vous connaissez, ou c'est trop vous demander ?

— Qu'est-ce que vous lui voulez ?

— Si jamais on vous demande ... vous direz que vous ne savez pas, me répond-t-elle avec le sourire.

Je sens la colère continuer à monter en moi. Je pense qu'elle ne sait pas qui je suis.

— Au fond et dernière porte à droite.

Elle part immédiatement vers le bureau de John sans même me remercier. S'il ne la renvoie pas chez elle, c'est moi qui m'en charge.

~ Point de vue John ~

Je suis en train de me prendre la tête avec un dossier, ça fait plaisir ... Jamais rangé au bon endroit quand on en a besoin.

— Salut beau gosse, dit une voix féminine.

Je me retourne surpris car ce n'est pas la voix de Nicole. En voyant la personne qui se tient à l'entrée de mon bureau je reste figé sur place.

— Qu'est-ce que tu fais là ? lui demandais-je, surpris.

— Bonjour, à toi aussi.

Je ne sais pas ce qu'elle est venue faire ici mais si c'est pour créer des embrouilles, elle est mal tombée.

— Qu'est-ce que tu veux, Wendy ?

— Dis, vous êtes tous comme ça dans ce service ou quoi ?

Voyant que je ne réponds pas, elle enchaîne.

— Tu m'avais dit que je pouvais passer quand j'aurais fini ma mission. Alors me voilà, en chair et en os, dit-elle, avec un sourire.

Nous y voilà, je le sentais arriver.

— Ça ne va pas être possible.

— Pourquoi ? demande-t-elle, en s'asseyant sur une des chaises.

— C'est comme ça.

— Pourquoi ça ?

Je lâche mes dossiers sur mon bureau et lui réponds.

— Parce que ce qu'on a fait tous les deux, c'était une erreur. Une énorme, même. On en a déjà parlé.

— Ce n'est pas ce que tu disais à l'époque.

— J'étais dans une mauvaise passe à cette époque mais ça s'est très bien arrangé. Alors tu peux repartir d'où tu viens.

Autant être cache avec elle.

— Ah, elle t'a largué quand tu es revenu au pays ? dit-elle, ironiquement.

— On va se marier et je vais devenir papa.

— Si tu veux mon avis, tu fais une grosse erreur ... Tu es fait pour être sur le terrain pas pour changer des couches.

— Faut croire que non. La vie que je me suis construite me plaît beaucoup.

Ce que je lui dis semble la faire taire mais quelques secondes après apparaît un rictus.

— À part ça, tu ne connaîtrais pas un hôtel pas trop cher dans le coin ?

Je fronce les sourcils. Qu'est-ce qu'elle est en train de manigancer encore ?

— Tu veux habiter ici ?

— J'y réfléchis, répond Wendy.

— Tu sais, tu es à Marseille ici, donc les hôtels pas chers, tu ne trouveras pas.

— Et chez toi ?

Je me mets à rire. Elle ne manque pas de culot. Chez moi ? Carrément ?

— A moins que ça dérange ta femme de voir débarquer la maîtresse de son mari ?

— Tu rêves toute éveillée là.

— Pourquoi ? Tu ne lui as rien dit ? Demande-t-elle, avec un regard vicieux.

— Elle est parfaitement au courant. C'est pour ça que je te préviens, Wendy. Ne t'initie pas dans mon couple, sinon tu pourrais le regretter.

— Oh, tu ne devrais pas t'en faire pour moi. Bon, tu finis à quelle heure ? insiste-t-elle.

— Je crois que tu n'as pas compris en fait. Tu me lâches, tu m'oublies et tu vas te trouver une chambre ailleurs.

— A tout à l'heure, alors, dit-elle.

Elle se lève et sort du bureau en marchant le plus fièrement possible. Je vois Nicole au loin qui attend qu'elle soit partie pour me rejoindre dans mon bureau.

— Qu'est-ce qu'elle te voulait ? me demande-t-elle.

— Elle souhaitait qu'on reprenne là, où on s'était arrêté.

— Elle ne manque pas de culot, celle-là.

— Bien évidemment, je lui ai dit non.

— Encore heureux pour toi, lui dis-je, en le regardant de la tête au pied.

Génial, Wendy a dû bien l'énerver. Je vais en avoir pour la soirée.

— C'est ce soir que tu as rendez-vous avec Pierre ? demandais-je.

— Oui. Je ne vais pas tarder à y aller d'ailleurs.

— Tu veux que je t'attende ?

— Je demanderai à Pierre de me ramener.

— Bon bah, alors je vais aller faire des courses. Tu veux manger quelque chose en particulier ?

— Prends ce qu'il te plaît mais on partage la note en deux cette fois.

— Comme tu veux. A tout à l'heure, lui dis-je.

J'enfile ma veste et pars en l'embrassant.

~ Point de vue Nicole ~

Je regarde John partir et je vais à la salle de sport rejoindre Pierre. Je ne sais pas ce que cette gonzesse prépare mais je l'attends.

— Bonsoir.

— Tu as pu te libérer, finalement ? me demande-t-il.

— Je pensais avoir plus de boulot que prévu mais ça allait, en fait.

— Tant mieux.

— Dis-moi, tu pourrais me ramener après la séance ? John est rentré et je ne voudrais pas le faire revenir.

— C'est faisable.

— Merci.

Je m'assois au centre de la pièce en tailleur et commence les exercices de relaxation, de souplesse et de respiration pendant qu'il finit avec son élève.

C'est compliqué pour moi de rester toute une heure sans bouger, sans parler mais j'y arrive. Je n'ai même pas entendu Pierre s'installer face à moi, dans la même position.

— Tes séances me font du bien, dis-je.

— Tant mieux, si ça t'aide.

— C'est bizarre mais ça me fait plus d'effets positifs que les cours à l'hôpital.

— Tu te sens toujours plus à l'aise avec quelqu'un que tu connais. Le médecin t'a arrêtée quand ?

— Ce mercredi.

— Ça fait combien de mois, là ?

— Cinquième mois.

— Déjà ?

— A peine tu veux dire. Je ne peux plus rien faire comme avant. Je me sens lourde, grosse, moche.

— Arrête. La grossesse te va super bien.

— C'est vrai ?

— Oui.

— Je trouve que je ressemble à un éléphant.

— Diane aussi se comparait à ce genre d'animal pendant ses grossesses mais je ne comprends pas pourquoi.

— J'ai pris dix kilos depuis le début de la grossesse.

— Ça se voit même pas, dit-il.

Je récupère mes affaires et nous partons. Durant tout le trajet, il ne cesse de me donner des conseils de relaxation. Pierre c'est quelqu'un à qui je peux vraiment faire confiance.

— Te voilà arrivée à bon port.

— Un énorme merci.

— Et, tu n'oublies pas. Si tu as besoin de quelque chose, n'importe quoi, tu m'appelles.

— Y a pas de souci, merci.

— Et passe le bonjour à John.

— Ça sera fait.

Je ferme la portière et entre dans l'immeuble. Je monte les escaliers un par un, puis arrive enfin à destination.

Je m'arrête un moment pour reprendre mon souffle car on dirait que j'ai couru le marathon. Une fois que j'ai repris mon souffle, j'ouvre la porte et entre enfin chez moi.

A peine entrée, j'entends de l'eau couler dans la salle de bain. J'entre dans la salle de bain.

— Dis, t'aurais pu m'attendre avant de prendre toute l'eau chaude, dis-je.

Je tire le rideau de douche pensant que c'était John et reste stupéfaite.

— Qu'est-ce que vous faites là ? demandais-je à Wendy.

— Et vous ? Rétorque-t-elle.

Toujours sans gêne celle-là. Elle est à poil dans ma douche, chez moi et elle ose me demander ce que je fous chez moi ?

— Moi ? Je suis chez moi. Et vous ?

— Je prends une douche.

Je prends l'arme qui est cachée derrière le meuble et la pointe sur elle.

— Sortez de là.

— Je n'ai pas terminé.

— Je n'en ai rien à faire. Vous sortez de là, tout de suite.

Elle sort de la baignoire et s'enroule d'une serviette. Ouais je sais, je suis trop gentille. Je devrais la laisser à poil.

— Passez devant, lançais-je.

Elle passe devant moi, en me regardant dans les yeux, l'air hautain. Elle passe par la chambre et s'arrête à la salle à manger.

— Et maintenant ? demande-t-elle, ironiquement.

— On attend qu'il revienne des courses et on va discuter.

— Donc, il avait raison. Vous savez.

Une grosse demi-heure passe avant que John ne pousse la porte d'entrée.

Lorsqu'il se retourne, il reste cloué au sol, avec ses paquets à la main.

— Qu'est-ce que tu fais là, Wendy ? Comment es-tu entrée ? interroge John, ne comprenant pas.

— Bah tu m'as dit que je pouvais venir ... et j'ai trouvé la clef sous le paillasson.

Je regarde John, le regard noir.

— T'as pas entendu ce que je t'ai dit ? Je t'ai demandé de me laisser tranquille et d'aller voir ailleurs si j'y étais.

— J'avais entendu. C'est pour ça que j'ai cherché ton adresse et que je t'ai trouvé. dit-elle en souriant.

John me regarde et parle en langage de signe.

— Elle n'est là que pour une nuit, demain elle s'en va, signe-t-il.

Bah voyons ...

Wendy a pris son air suffisant, avec son regard de vicieuse. Elle a gagné, elle le sait.

Je me lève de la chaise, baisse mon arme et va dans la chambre, énervée.

John pose les sacs de courses et me rejoint aussitôt.

— Les hôtels sont faits pour quoi ? Tu comptais me le dire quand, que tu voulais inviter ta copine à la maison ? dis-je avec colère.

— Déjà, ce n'est pas ma copine et ...

— Non, pardon, c'est ta maîtresse.

— Chérie ...

— Oh non, il n'y a pas de chérie qui tienne. Soit elle dégage de chez moi, soit c'est moi qui la fous dehors.

Je m'attends à ce qu'il me réponde mais aucun son ne sort de sa bouche.

— OK, ça va. J'ai compris, dis-je.

— Tu as compris quoi ? demande-t-il.

Je me redresse et le regarde.

— Tu veux vraiment que je te réponde ? Tu couches avec elle en Irak ou je ne sais où, elle se ramène à la maison comme une fleur, sachant très bien que tu n'es pas tout seul à vivre dans cet appartement, toi tu trouves rien à redire et tu l'autorises à passer la nuit ici. Tu trouves que ça sonne toujours bien là ? Moi non. lançais-je, très énervée.

— Nicole, c'est juste pour une nuit et elle va dormir sur le canapé, alors pourquoi tu t'énerves comme ça ?

— Tu ne te rends même pas compte du mal que tu me fais.

— Quel mal ? C'est elle qui s'est incrustée, se défend-t-il.

— Et tu trouves ça normal, peut-être ? Mon corps est en train de changer et je vois très bien ce que tu veux dire, en lui donnant l'opportunité de passer la nuit chez nous.

— Je ne comprends pas.

— Je me sens grosse, moche, je ressemble à un éléphant et tu me mets ta maîtresse sous le nez. A ton avis, je dois le prendre comment ? Certainement pas avec le sourire.

Il vient de comprendre son erreur vu sa tête.

— C'est toi qui te vois comme ça. Je n'ai jamais fait de sous-entendus ou d'autres choses, dit-il.

— Et ta pouf dans mon séjour avec ma serviette de bain. Tu le vois le sous-entendu ? Suffit de la Ton physique de bombe, tu le récupéreras après l'accouchement. T'es en train de jouer le plus beau regarder.

—rôle de ta vie et ça, elle ne le fera jamais aussi bien que toi. Alors peu importe le nombre de kilos que tu prends, tes sautes d'humeur, tes goûts alimentaires du moment ... c'est toi que j'ai choisie pour le meilleur et le pire ... si tu t'es sentie vexée, rabaissée, je suis désolé. Ce n'est pas ce que je voulais.

Il me serre dans ses bras pour me réconforter.

— Je pense que tu as besoin de te reposer, loin de la ville. Demain, on s'occupe de déménager ce qui reste, comme ça tu pourras être au calme, me dit-il.

— Tu me promets que demain elle s'en va ? lui demandais-je, en le regardant.

— Oui, je te le jure et après on n'entendra plus jamais parler d'elle.

Il m'embrasse et me serre dans ses bras.

— Et pour me faire pardonner, on commencera à chercher des prénoms pour les jumeaux ce soir. Ça te va ?

— Pourquoi pas, répondis-je.

— Mais d'abord, on va faire le repas.

Il ouvre la porte et m'invite à passer la première. Il me pousse jusqu' à la cuisine après qu'il soit allé chercher ses sacs.

Wendy part finir sa douche pendant que l'on commence à préparer le repas.

Une heure après, le repas finit de cuire et la table est mise. Durant tout le repas, l'atmosphère est particulièrement froide. Personne ne parle à personne. Wendy ne cesse de me regarder avec son air hautain. J'ai hâte de pouvoir lui mettre mon poing dans la figure à celle-là. Elle le mérite tellement et à vrai dire, ça me ferait tellement de bien.

Quand vient le dessert, je sens que les jumeaux se sont réveillés et donnent des coups. Ils sont très actifs.

— Ça va ? me demande John.

— Ils se sont réveillés.

Après un moment de silence, John reprend.

— Qu'est-ce que c'était que ça ? demande-t-il, en pointant son index vers mon ventre.

— C'est ta fille qui fait des siennes.

Il s'approche de mon ventre et le caresse. Comme par magie, elle s'arrête de gigoter.

— Tu as raison, c'est bien la mienne. Elle écoute ce que je lui dis, me dit-il.

J'esquisse un sourire et mange mes poires au chocolat. Wendy n'a pas arrêté de nous regarder avec son air hautain durant tout le repas.

Elle nous aide à débarrasser mais il lui est apparemment impossible de faire la vaisselle.

— On peut faire le point des préparatifs ? me demande-t-il.

— Je vais sortir les papiers.

Je sors de la cuisine et vais chercher le classeur des préparatifs.

— C'est la tenue que les filles vont porter ? questionne-t-il.

— Oui.

— Elle est magnifique ... et la tienne, elle est comment ?

— ... tu ne m'auras pas comme ça. Tu la verras en même temps que les autres.

Il sourit pendant que je sors une autre photo.

— Pour le costume des garçons, je voyais une chemise avec une couleur blanc cassé. Mais si tu veux une autre couleur, tu le dis, lui dis-je.

Il la regarde bien attentivement pendant quelques minutes.

— J'aime bien celle-là, avec la rose rouge.

— Je peux jeter les autres, alors ? demandais-je.

— Oui, tu peux. Et pour le repas, je pensais qu'on pouvait faire un buffet avec de la cuisine internationale.

— Je suis sûr qu'on trouvera un terrain d'entente. me dit-il, en m'embrassant.

— Vous êtes pathétiques, lance Wendy avec sa douce voix.

— On ne vous a rien demandé, lui dis-je.

— Je dis juste ce que j'en pense.

— Mais on ne vous a pas demandé de penser, lui dis-je en souriant.

— Wendy, s'il te plaît, intervient John.

Il la regarde puis reprend notre conversation.

— Et pour le reste ?

— Ce n'est pas pressé.

— Tant mieux parce que j'ai réussi à trouver un livre avec une liste de prénoms. On a plus qu'à choisir, me dit John.

— Tu l'as trouvée où ?

— Bah en fait, c'est ton frère qui me l'a passé. Je n'ai pas vraiment de mérite.

— On a qu'à faire une liste chacun et quand on a fini, on met en commun. Les prénoms qui reviennent sur les deux listes sont validés.

— On peut faire comme ça, me dit-il.

— Tu commences.

Il prend un stylo et une feuille de papier puis commence à regarder le livre et à écrire.

Pendant presque une demi-heure, je le regarde feuilleter le livre et écrire puis il arrive à la fin et me passe le livre ainsi qu'une feuille de papier avec le stylo.

— A ton tour, me dit-il.

J'ouvre le livre et commence à regarder. C'est vrai qu'il y a de très jolis prénoms, autant du côté des filles que du côté des garçons. C'est assez difficile de choisir car il faut des prénoms qui vont bien et qui nous plaisent à tous les deux.

Je mets autant de temps que John pour écrire les prénoms sur la feuille. Je la lui donne et il la regarde.

— Franchement, je pensais qu'on aurait plus de mal que ça, dit-il.

— Ah bon ?

— Il y a trois prénoms en commun que ce soit fille ou garçon.

— Il reste lesquels ? lui demandais-je.

— Côté fille, nous avons Agathe, Charlotte, Léa et côté garçon, nous avons Lucas, Sacha, Valentin.

— On va encore galérer pour se mettre d'accord, dis-je.

— Faut juste qu'on pèse le pour et le contre, c'est tout.

— C'est ce que je dis mais il nous reste encore quatre mois, de toute façon, dis-je, en me levant.

— Où tu vas ?

— Je vais me coucher sinon je vais encore m'endormir sur la table.

Je vais dans la chambre et prends une couverture pour Wendy. Je la lui pose sur la table basse et elle ne me remercie pas.

John range les papiers, remet le classeur à sa place et referme le livre.

Il remet les chaises à leur place, me rejoint dans la chambre. Il se met en pyjama et monte dans le lit en remontant les couvertures.

Je me blottis contre lui et il met sa main sur mon ventre.

— Je te jure que si elle n'est pas plus coopérative, je la descends.

— Arrête avec ça, me répond-t-il.

— Pourquoi ?

— Elle est dans le salon et toi, ici.

— Il ne manquerait plus qu'elle soit à ma place, dis-je.

— Tu veux me rendre un service ?

— Vas-y.

— Arrête de te comparer à elle et avec ta jalousie. Après tout ce qu'on a traversé depuis dix-sept ans, on est encore là, tous les deux. Ce qui s'est passé entre elle et moi, c'était une erreur, alors que toi et moi, c'est plus qu'une évidence. On est fait pour vivre ensemble, pour construire quelque chose. C'est d'ailleurs ce qu'on s'efforce à faire depuis qu'on s'est rencontré. Alors passe à autre chose.

— D'accord. Je vais essayer de faire un effort, lui dis-je.

~ Point de vue Wendy ~

Je pense que je n'aurai pas dû me glisser derrière la porte. Il m'avait promis tant bien de choses et voilà qu'il fait machine arrière ... Ma mère m'avait prévenue ... Préférer les actes aux paroles ... Il va me le payer.

~ Point de vue Nicole ~

— Bon alors, on prend quoi comme décision ? Lequel on choisit ? me demande John.

— Aucune idée. On a qu'à tous les prendre.

— Impossible.

— Bah, pourquoi ?

— J'avais pensé à mettre le prénom de nos parents en second et en troisième.

— C'est une très bonne idée.

— J'aime bien Lucas. À vrai dire, je le préfère aux autres, suggère-t-il.

— C'est vrai, que Lucas Matthews, ça sonne bien

— On met quoi après ? Mark ou Matthias ?

— Ton père mérite d'avoir la seconde place. Ça sera Lucas Matthias Mark Matthews.

— Ça ne fait pas trop moche. Et pour la crevette ?

— Je ne sais pas trop, lui répondis-je, en baillant.

~ Point de vue John ~

— Faut qu'on pèse le pour et le contre parce que c'est quelque chose d'important. Il ne faut pas qu'elle soit complexée par son prénom et que ça sonne bien. Il ne faut pas qu'on soit lassé de dire son prénom à chaque fois qu'on l'appellera. Je pense que Charlotte, ce serait l'idéal. Tu en penses quoi ? demandais-je, après avoir réfléchi à haute voix.

Voyant qu'elle ne répond pas, je baisse la tête de quelques centimètres et vois qu'elle dort. Je l'embrasse sur le front et éteins la lumière.

Avant de m'endormir je repense à Wendy. J'en reviens pas de son comportement. Qu'elle revienne à Marseille elle fait ce qu'elle veut mais qu'elle s'incruste au commissariat puis chez nous non. Peut-être que j'aurai dû la mettre dehors aussitôt rentré ... j'espère qu'elle ne va pas mettre Nicole hors d'elle, je ne pourrais pas la retenir. Elle est encore plus dangereuse depuis qu'elle est enceinte.

Je ferme les yeux et m'endors presque aussitôt.

~ Point de vue Nicole ~

La nuit n'a jamais été aussi calme, les jumeaux ont enfin compris que la nuit sert à dormir et pas à faire la fête. Si Wendy ne s'était pas incrustée, j'aurai peut-être mieux dormi. Jamais je ne me suis réveillée avant que le réveil ne sonne, c'est une première. À vous dire vrai, ce n'est pas pour autant que je me lève. Je préfère attendre un peu et ne pas me retrouver nez à nez avec l'autre qui campe sur le canapé.

Je regarde John dormir pendant les dix dernières minutes que le réveil lui laisse.

Il commence à bouger quand le réveil sonne 06h00. Il le cherche à tâtons et l'éteint. Il ouvre les yeux et me trouve tout de suite du regard.

— Bien dormi ? lui demandais-je.

— Très bien. Ça m'étonne que tu sois déjà réveillée.

— Je n'ai pas très bien dormi. Tu as fait venir le camion à quelle heure ?

— 07h30. Ton père et ton frère veulent venir nous aider. Marie aurait bien voulu aussi, mais elle est de garde, me répond-t-il.

— Elle peut venir après, si elle veut.

— Elle viendra pointer son nez, ne t'inquiète pas pour elle, dit-il, en enlevant les draps.

Je me lève, prends la robe de chambre et la mets.

Il ouvre la porte tout doucement pour nous rendre à la cuisine.

Je prépare la cafetière pendant que John sort le pain de la panière, le pain de mie du placard, le beurre du frigo et le couteau du tiroir. Je prends les quelques bols qui restent dans le placard et les pose sur la table de la cuisine.

J'aide John à faire les tartines pendant que le café finit de couler.

— Tu me disais quoi hier avant que je m'endorme ? lui demandais-je.

— Je parlais de la petite puce. Je crois que Charlotte, ça ne serait pas mal.

— Je crois aussi. Finalement, tu t'en es bien tiré.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Bah, tu m'as dit que tu voulais participer à la grossesse, alors je me suis dit que trouver les prénoms de tes enfants, ce serait une bonne chose.

— T'aurais pu le formuler oralement.

— Tu étais tellement content que je ne voulais pas gâcher ton plaisir.

À cet instant, Wendy entre dans la cuisine en t-shirt en guise de pyjama.

— Non, mais je n'y crois pas, dis-je à voix basse.

— Euh Wendy, il n'y a rien qui te dérange ? demande John.

— Non.

— Vous ne sentez pas comme un courant d'air au niveau de la ceinture ?

— Je ne montre pas mes fesses à tout le monde, moi, me répond-t-elle.

Voilà qu'elle ouvre les hostilités de bon matin ... je vais me la faire.

Ma main se serre automatiquement sur le couteau jusqu'à ce que John me dise de garder mon calme.

Je respire un bon coup et sors de la cuisine pour aller à la salle de bain.

~ Point de vue John ~

— J'aimerais que tu mettes un pantalon ou autre chose, lui dis-je.

— Ça ne te dérangeait pas, avant.

— Je crois qu'il faut qu'on discute.

Elle s'assoit sur un des tabourets et attend.

— Écoute moi bien, c'est la dernière fois que je vais te le répéter. Je me suis construit une vie ici, avec des personnes que j'aime beaucoup. Nicole m'a laissé l'opportunité de retourner sur le terrain mais j'ai refusé parce que je l'aime. Dans quatre mois, elle va donner naissance à mes enfants. Tu comprends ce que ça veut dire ? J'ai tourné la page. Nous deux, c'était une erreur qui m'a permis de comprendre que sans Nicole, je n'en serai pas là où j'en suis. Je lui dois énormément. Alors si tu veux que l'on reste en bon terme, tu as intérêt à la respecter. Sinon, c'est la dernière fois qu'on se voit, lui dis-je.

J'attends quelques secondes et sors à mon tour. Elle croit que je ne la vois pas sourire mais c'est mal me connaître.

~ Point de vue Nicole ~

Mes parents et mon frère sont arrivés à 07h00 pile. La mère de John nous attend à la villa.

— Comment tu vas mon poussin ? me demande mon père.

— C'est plutôt un dindonneau qu'un poussin, vu son état, lance Wendy.

— Le dindonneau vous emmerde Wendy, lui répondis-je.

— Et vous, vous êtes ? questionne David.

— La maîtresse, lui répond Wendy.

Sans attendre une seconde de plus, je me retourne vers elle et lui file mon poing dans la figure. Ah purée que ça fait du bien ... j'aurai dû faire ça depuis le début en fait au lieu de me retenir.

John a un rire nerveux.

— Ça te fait rire ? balance Wendy, visiblement énervée.

— Franchement ? Oui. Je t'avais prévenue. lui répond-t-il.

— Je peux ? questionnais-je.

— Fais-toi plaisir.

J'attrape Wendy par les cheveux et la fait sortir en quatrième vitesse en attrapant au passage ses affaires. Je jette tout dans le couloir et referme la porte. Ouais c'est pas cool de la laisser les fesses à l'air sur le palier mais je m'en contrefiche. Je souffle un bon coup et reviens dans la salle. Mon père et mon frère n'ont rien compris à voir leur tête.

— Ça va ? me demande mon père.

— Ça fait du bien. J'en rêve depuis hier, lui répondis-je.

— Vous prenez un café avant de commencer, j'espère ? propose John.

— Bien sûr, répond mon père.

Ils s'installent à table pendant que John fait couler la cafetière.

Lorsque 8h30 sonne, ma mère se lève de sa chaise.

— Bon ma chérie, je nous ai organisées une petite journée cocooning pendant que les hommes vont travailler.

— On va faire quoi ? Tu m'emmènes où ?

— Ce matin, on va se faire masser, chouchouter et tout ce que tu veux. Après, on se fait coiffer, manucurer et pédicure. Ça te va ?

Je ne me le fais pas dire deux fois, je prends mon manteau et l'enfile aussi vite que je peux. Les garçons rigolent.

— Ça fait longtemps qu'on ne s'est pas fait une journée comme celle-là, dis-je.

— Tu peux dire merci à mon futur gendre, c'est lui qui a eu l'idée.

— Merci mon chéri, lui dis-je avant de l'embrasser.

Ma mère met son manteau et nous sortons de l'appartement.

Nous montons dans la voiture, que mon père a garée juste devant les portes de l'immeuble.

Une journée comme celle-là, j'en rêve depuis tellement longtemps que je vais en profiter un maximum pour me détendre.

Ma mère se gare sur le côté et arrête le moteur.

— On y va.

— C'est ici ? lui demandais-je.

— Oui. Ça vient d'ouvrir mais les filles qui y travaillent sont très bien.

— Tu y es déjà allée ?

— La semaine dernière pour essayer et je me suis endormie sur la table de massage, me répond-t-elle en ouvrant la porte d'entrée.

Nous entrons sereinement dans le salon esthétique.

— Bonjour, j'ai réservé deux places au nom de Bernard.

— Venez avec moi, vous allez vous installer.

La masseuse nous amène aux cabines pour que nous puissions nous changer et nous préparer.

Le massage dure un peu plus d'une heure mais à notre plus grand regret toutes les bonnes choses ont une fin.

Je ne sais pas pourquoi mais je ne veux pas me lever de la table de massage.

— Est-ce que par hasard, vous auriez des massages avec des saveurs ? demandais-je.

— Oui. Nous avons fraise, vanille, chocolat ...

— Allons-y pour le chocolat. Je vous paierai en suppléments.

Elle va chercher la bouteille et commence le massage. C'est reparti pour une heure ... le rêve.

— Franchement, vous massez très bien. Je n'ai jamais été aussi détendue, lui dis-je.

— Merci pour le compliment. Vous accouchez bientôt ?

— Aux alentours de Février, si tout va bien.

— Pas avant ? questionne la masseuse.

— Oui. Il y en a deux.

— Excusez-moi.

— Ça ne fait rien.

Une demi-heure après, elle finit de me masser. Ma mère s'est endormie sur la table et je dois la réveiller afin de libérer la place pour les autres. Et c'est elle qui rigole quand je m'endors sur la table. Nous allons nous rhabiller et continuons avec la manucure et la pédicure pendant qu'on se fait poser un masque d'avocat sur le visage.

Cela fait longtemps que je n'ai pas connu la sensation de calme, de repos et ça fait tellement de bien que je n'ai pas vu la matinée passer.

— Tu veux aller manger où ? questionne ma mère.

— Où tu veux.

— Tu ne m'aides pas du tout.

— Bon, bah l'italien.

— Merci.

— C'est dans le contrat avec John que ce soit toi qui paye tout ?

— Oui. J'ai bien le droit de faire plaisir à ma fille, non ?

— Euh oui mais ....

— On arrête de parler d'argent et tu profites de ta journée.

— D'accord, d'accord.

Elle continue la route pendant au moins une dizaine de minutes puis se gare de nouveau.

Le repas dure en tout au moins deux bonnes heures. Les plats de ce restaurant sont succulents.

— Tu voudrais aller voir quel film ? demandais-je à ma mère.

— Celui que tu veux.

— C'est toi qui choisis cette fois.

Finalement, elle opte un film d'action. Je pense qu'elle a choisi ce genre de film plus pour me faire plaisir que pour elle parce qu'elle ne regarde pas ces films, d'habitude.

Le film dure au moins deux heures. Lorsque nous sortons de la salle de cinéma, il est déjà 17h30 et mon père l'a appelé au moins trois fois. Elle le rappelle.

— Vous étiez où ? Je t'ai appelée trois fois, dit mon père.

— On a eu envie d'aller voir un film, c'est pour ça que je n'ai pas décroché.

— Vous en avez encore pour longtemps ?

— Je ne sais pas. Vous, vous avez terminé ?

— Tout est rangé, à sa place.

— On arrive, alors.

Elle range son téléphone dans son sac à main.

— Ça t'a plu ? me demande ma mère.

— La journée ? Oui, c'était parfait. On devrait s'en faire plus souvent, lui répondis-je.

— Je suis ravie que ça t'ai plu.

Une bonne demi-heure plus tard, elle se gare devant notre nouveau chez nous. J'en reviens toujours pas qu'on est pu s'offrir une maison pareille.

— Je n'en reviens toujours pas. Tu crois qu'ils ont terminé de tout ranger ? lui demandais-je.

— Oui.

J'ouvre la porte d'entrée et entre.

Ils ont super bien bossé. Tout est propre, rangé. Et la toute première chose que je vois en entrant dans le salon, c'est le piano. Je ne vois rien d'autres autour de moi.

Je vais à côté de lui et pose ma main dessus. Je n'en reviens pas.

— Ce n'est pas celui qui était à la maison ? demandais-je.

— Si, c'est lui.

— Pourquoi ... est-ce que ... ?

— Avec ta mère, on a entendu dire que tu voulais reprendre, alors on s'est dit qu'il serait bien ici, m'informe mon père.

— Merci pour le cadeau.

— Joue nous un morceau, dit David.

— Je ne sais pas si je joue comme avant.

— C'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas, me dit John.

Je pose mon sac sur le sol et m'assois sur le banc. Je pose mes doigts sur les touches et à leur contact, je ferme mes yeux et commence à jouer.

John a raison, jouer du piano, c'est comme faire du vélo. Ça ne s'oublie pas.

Dès la première note, je sens la musique monter en moi. Je profite de cet instant magique.

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