Prologue - Partie 1
Sous une nuit amenant les trois lunes, des jumeaux naquirent, naissant alors sous leurs formes bestiales. La première, sortie à l'aube, une louvette aux poils gris clairs. Le second louveteau ne sortit qu'une fois le crépuscule arrivé, sous les lueurs des bougies on pouvait voir son pelage, plus sombre que celui de son aînée. Un violent vent passa sous la porte de bois, éteignant ainsi toutes les bougies présentes, laissant les trois individus dans une obscurité totale. À l'exception des deux paires d’yeux des nouveaux nés, d’un bleu éclatant fixant leur mère. Après quelques minutes à les admirer, la mère souffla un coup, avant de s'essuyer le visage et de prononcer des mots. Des mots que seule elle-même connaissait. L'obscurité, maintenant totale, les laissa dans un silence absolu, avant qu’elle ne rallume toutes les bougies d'un simple geste. Ainsi continua la nuit de cette nouvelle mère, à s'occuper de ses petits.
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Passèrent alors deux années sans que ces derniers n’eurent de comportements inhabituels. Ils avaient assez grandi pour parler couramment avec leur mère, et s'intéressaient à tout ce qu'ils voyaient.
Capy demanda très rapidement à apprendre à lire et à écrire. Sa sœur, quant à elle, se concentra sur sa maîtrise des transformations mais finit par imiter son frère l'année qui suivit.
Les années se poursuivirent les unes après les autres. De plus en plus laissés seuls au fil de ces dernières, les jumeaux avaient vite appris à survivre par eux-mêmes. Âgés d’à peine six ans, ils avaient déjà assimilé l’art de la chasse et, perdus au milieu de cette terre, savaient qu’il était tout aussi important de ne rien gaspiller. Ils avaient appris à connaître les zones d’activités et les habitudes de leurs proies, mettant leur patience et leur réflexion à rude épreuve. Forgeant ainsi des chasseurs d’exceptions. Leur rapide développement ne les empêchait pas de jouer comme les autres enfants de leur âge.
Ils avaient bien entendu des passions. Ennebelle avait appris en secret à concevoir des potions à force d’observer sa mère, tandis que Capy passait son temps à étudier plus globalement l’ensemble des éléments qui l’entouraient, du simple sens du vent, aux réactions de ses congénères. Il avait cependant un certain talent pour analyser son environnement, et apprenait vite et avec précision les techniques qu’on lui montrait.
Un jour, leur mère découvrit une des potions quelque peu irrégulières de sa fille et gronda ses enfants. Après tout, le matériel alchimique restait dangereux. Elle en conclut qu’il était officiellement temps d’apprendre à sa fille les bases de l’alchimie, et qu’elle devrait aussi stimuler l’instinct de survie de Capy.
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En voulant s'entraîner seul, Capy se permit de prendre un des couteaux de sa mère. Le cadre de la porte à peine passé, il sentit un projectile foncer dans sa direction, qu’il esquiva non sans difficulté. Il ne reprit ses esprits que quelques instants après, comprenant ce qu’il venait d’arriver. La menace qui s'était abattue sur lui venait de lui immiscer une peur. Une peur qui ne fut qu’accentuée à la vue du morceau de couteau brisé.
« Mon couteau ! s’exclama-t-elle. Tu aurais pu y faire attention ! »
S’affaissant contre le mur, il vit la lame qui l’avait manqué. Il ne put que mirer les agissements de sa mère qui se rapprochait.
« Tu me le prends sans permission. Te rends-tu seulement compte du danger… ? »
S'apercevant de la déconcertation de son fils, la mère se calma, désemparée.
« Si tu tiens réellement à t’entraîner, laisse-moi au moins te montrer les démarches à suivre…
Toi qui me chaparde mes affaires. Ta sœur qui concocte des fioles explosives…
Vous voulez m’achever..? désespéra-t-elle.
— Ça explose enfin !? s'étonna l’enfant.
— Parce que tu le savais !? Ce n’est pas si étonnant après tout… ».
Après de nombreuses explications, la famille avait intensifié leurs entraînements, ils étaient bien plus fréquents aussi. Un jour cependant, leur maître ne vint pas aux rendez-vous.
Leur mère avait disparu.
Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis le départ de la mère. Les petits avaient cherché un large périmètre de ce qu'ils connaissaient, mais n'avaient rien trouvé. Cela ne leur laissa plus qu'une dernière piste, la cité. La cité dont elle ne parlait que rarement. Elle les avait enfin invités à se joindre à elle récemment. Ils devaient s'y rendre. C'était leur dernier espoir.
Ne voulant pas perdre plus de temps, ils se mirent à préparer le traîneau dont ils se servaient pour la chasse. Une fois remplis de vivres, d'outils, et d'affaires en tous genres dont ils ne voulaient pas se séparer, ils prirent la direction approximative que les cartes qu'ils possédaient indiquaient.
Les premiers jours se passèrent sans grande difficulté. Le temps était calme, ils se relayaient chacun leur tour pour tirer le traîneau. Le peu de gens qu'ils voyaient ne les avaient pas aperçus, mais toute chose a une fin. Une fin qui fut marquée par un groupe de brigands les ayant vus. Suite à cela, les jeunes loups-garous avaient pris la fuite et se contentaient, pour le moment, de prouver leur aisance sur ce terrain. Les jumeaux n'avaient cependant pas prévu la fatigue qu'ils avaient accumulée depuis le début de leur voyage. N'ayant comme seul choix de ralentir, leurs poursuivants allaient les rattraper d'un moment à l'autre.
Les malandrins se rapprochant de plus en plus d'eux, l'aînée prit l'initiative.
« Tu veux t'en charger ?
— Si possible non.
— Bien. Commence à détacher une partie de la corde. Tu vas servir d'appât. Emmêle-les comme tu peux et on les fera tomber. Je m'occupe de ceux trop distants. »
Le cadet acquiesça sans tarder, puis les jumeaux firent leur préparatifs durant le peu de temps qu'il leur restait. Capy s'était occupé de dénouer la corde du côté gauche qui servait à tirer le traîneau, la laissant reliée au flanc droit de ce dernier. Ennebelle quant à elle, avait enfilé une sacoche, un carquois, et son arc. Elle s'était ensuite faufilée derrière une légère butte de poudreuse, laissant son frère seul sur ce qui allait devenir leur champ de bataille.
Un silence pesant s’installa sur la plaine. Laissant entendre les respirations haletantes des assaillants, au total de sept, s’approchant peu à peu du traineau. Un claquement sec retentit dans l’air, suivi d’un frottement au sol. Le louveteau qui maintenait la corde dans sa gueule courait en direction de ses adversaires autour desquels il fit des zigzag, les entremêlant les uns aux autres. Coupé net dans sa course par un coup de pied qui l’envoya valser près du traîneau, il en profita pour faire un nœud bâclé au ski de ce dernier. Trois masses assombrirent l’enfant plein de neige. Ils riaient à gorge déployée, appelant leurs camarades. Mais aucune réponse ne leur revenait. Se retournant chacun leur tour, ils cherchaient du regard leurs alliés. Ils avaient disparu.
Du verre éclata. Capy poussa le traîneau dans la légère pente et sa cargaison le fit glisser, emportant les assaillants, alors tirés par l’engin. Un des malandrins sortit un mousquet et tira sur l’enfant. Un second éclatement de verre retentit, laissant apparaître un voile de fumée noire dans l’air. Traversant le voile en un instant, la balle rasa l’épaule du garçon. Des flèches furent décochées de derrière lui. Sa sœur venait d’abattre le groupe s’étant emmêlé. D’un air calme, elle lui fit signe de garder le silence, laissant entendre les gémissements du dernier survivant. Elle décocha une dernière flèche dans sa gorge. Le calme était revenu.
« Tu pourras parler d’ici quelques minutes je pense. Je n’étais pas sûre de l’effet mais ça fonctionne correctement visiblement… »
Essayant de se remémorer les événements petit à petit, il regarda sa sœur reprendre les flèches dans les corps inanimés.
« Viens on va récupérer leur affaires, on pourra les revendre ! »
Exécutant maintenant leurs tâches dans un calme total, Ennebelle expliqua les événements à son frère. Ils décidèrent de faire un large feu afin de faire disparaître les corps.
« J’ai beau essayer de comprendre, je n’y arrive pas. Tu m’as jeté une concoction totalement bancale dont tu n’étais pas sûre du résultat ?
— Tu as tout compris ! s'exclama-t-elle avec assurance.
— J’aurai pu mourir ?
— Mourir ? Je ne pense pas…
— Tu ne penses pas ? insista-t-il.
— Tu es toujours vivant et entier ! grogna-t-elle
— La prochaine fois, pense à me prévenir au moins ! »
Sa sœur savait pertinemment qu’il avait raison. C’était risqué ! Malgré la réussite flagrante qu’ils ont obtenue. La suite de leur soirée ne fut que victuailles suivie d’un repos bien mérité. La chaleur du feu tenu toute la nuit. Les jumeaux reprirent leur route à l’aube. Un quotidien rythmé par les efforts physiques et le calme de la plaine enneigée, aucun problème ne s’était représenté à eux.
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Un bâtiment se dessina à l’horizon. Plus ils s’en rapprochaient, plus ils distinguaient cet imposant mur de glace qu’ils n’avaient connu qu’à travers les livres de contes que leur mère leur lisait. Émerveillés par leur découverte, ils cherchaient l’unique porte d’entrée avec excitation. Ils étaient enfin arrivés.
Une grande porte se dressait maintenant devant eux. Avec elle, se trouvait un homme-lézard, il était avachi dos à la porte. Capy prit les devants malgré l’hésitation et questionna poliment l’homme-lézard.
« Bonjour monsieur, nous aimerions accéder à la cité, pourriez-vous nous ouvrir la porte ? »
Le reptile n’avait même pas daigné regarder ses interlocuteurs. Il continuait de mirer l’horizon, ce qui eut la faculté d’énerver Ennebelle, qui commença à l’injurier.
« Laisse tomber, répondit son frère. Il ne bouge même pas, tu t’envenimes seule. »
Capy se crispa violemment en virevoltant à sa gauche. Il n’avait même pas ressenti la présence d’un quatrième individu qui s’était approché jusqu’à eux. Il semblait être un homme massif sous sa cape et portait un imposant sac sur son dos.
« Excusez-moi les enfants, pourriez-vous vous décaler du passage. »
Sa voix grave déstabilisa la petite, qui tressaillit en reculant. Après s’être rapproché de la porte, il fixa quelques secondes l’écriteau au-dessus de cette dernière et prononça un mot : « Kelios ». Le garde poussa alors la porte avant de la refermer après le passage du vagabond, empêchant les jumeaux d'entrer. La jeune fille s’intrigua du mot.
« Il vient de dire Kelios ? Qu’est-ce que c’est ?
— C’est une race modifiée… »
Le reptile qui n’avait jusque là pas pris le temps de regarder les jeunes, se mit à regarder du coin de l'œil le petit, ce que Capy remarqua à l’instant.
« Des loups-garous. Nous sommes des loups-garous. »
L’homme-lézard lança un léger rictus vers eux avant d’ouvrir les portes à nouveau. Il les ouvrit en grand et les aida à passer la marche d’entrée. Une fois le traîneau à l’intérieur avec ses propriétaires, il dit à Capy de mieux se renseigner, puis referma la porte sans tarder.
Capy et sa sœur étaient maintenant à l’intérieur de la cité, qui débuta avec un simple couloir, menant à une sortie à droite dont émanait peu de bruit. Tous les murs du couloir étaient décorés d'ornements représentant des races. Au fond de ce corridor, un blason, sûrement celui d’une famille. Devant ce dernier était placée une large marmite à moitié remplie de pièces d’or. Capy y jeta aussi une pièce et pria en souhaitant que la chance leur soit favorable. Ils prirent une pause et se fixèrent des règles afin qu’ils ne se perdent pas l’un l’autre et que personne ne les vole.
« Je m’occupe d’interagir avec les étrangers. »
Ennebelle voulut s'exclamer.
« Ce n’est pas une question, la coupa-t-il froidement.
— D'accord… Toujours un de nous deux qui reste à côté du traîneau ?
— Bonne idée. Regardons autour de nous aussi, ça nous évitera d’être surpris.
— Pense à cartographier aussi, demanda-t-elle poliment.
— Je vais rester sur le traîneau à analyser l’environnement tandis que tu vas pousser. Qu’en dis-tu ?
— On devrait aussi interroger des gens à propos de notre mère…
— Alors allons-y. »
Les enfants réarrangèrent leurs bagages. Capy aida sa sœur à passer le virage en angle droit puis monta sur le traîneau et s'installa correctement. Il sortit un carnet et nota les éléments qui lui paraissaient pertinents.
« Tu me préviens si on risque de heurter quelque chose ! Je n’y vois rien avec tant de chargement.
— Contente-toi de glisser doucement et aie confiance. Je te demanderai de t'arrêter si besoin. »
L’allée dans laquelle déambulaient d’innombrables passants était remplie de colporteurs en tout genre. Une sorte de jour perpétuel était présent sous la lueur des nombreuses lumières éparses. On ne pouvait savoir s’il faisait nuit ou non. Capy, qui notait la localisation des divers marchands, ne savait où donner de la tête. Les jumeaux durent s’arrêter plusieurs fois sur le côté des chemins afin d’admirer les nombreux étals se dévoilant à leurs yeux ébaubis. Les chemins qu’ils empruntaient semblaient interminables. Lorsqu’ils atteignaient le mur de la cité, signant la fin d’un de ces longs couloirs, on pouvait en voir de nombreux autres.
Arrêtés au milieu de cette contre-allée, Capy fouillait ses notes lorsqu’il entendit le ventre gargouillant de sa sœur. Ils se regardèrent et conclurent qu’ils avaient assez visité et qu’il était tant de manger. Se concentrant alors sur les alentours, une odeur sortait du lot. Elle provenait d’un comptoir qui était placé sur une mezzanine, au-dessus d’une échoppe. Ses tabourets étaient à la limite de la chute. Les jumeaux se rapprochaient petit à petit, laissant leur traîneau au plus près de leur objectif. Ils montèrent ensuite l’échelle menant au comptoir et s’assirent avec difficulté.
« C’est quand même surprenant ces échoppes sur plusieurs étages branlants.
— Et pourtant elles sont stables ! » gloussa l’inconnue à laquelle ils faisaient maintenant face.
Ennebelle sortit trois pièces, qu’elle posa sur le comptoir, avant de demander ce qu’ils pouvaient en avoir. La cheffe les prit, en vérifia l’authenticité et regarda la jeune fille sans dire un mot. Elle servit aux enfants un plat fraîchement préparé, qu’elle dispersa dans trois assiettes, avant de s’asseoir avec eux. Elle chuchota quelques mots.
« Vous avez son odeur vous savez…
— Excusez-nous, de qui parlez-vous ? questionna le cadet.
— Oh ! Vous n’êtes donc pas d’ici ! Une sorcière connue d’Haruna a disparu pour de bon… Mais passons ! Tout ça m’attriste… »
Capy ressortit son carnet afin d’y noter des informations.
« Je peux vous demander qui vous êtes ? Comment est la vie ici ?
— À propos de moi, gardons le mystère… Quant à la vie ici… J’y trouve mon compte. Haruna est loin d’être un paradis mais on s’habitue vite. Et la cité est plutôt bien gérée, même si ça ne se remarque pas vraiment. On en a rarement, mais il y a déjà eu des discours des dirigeants !
— La cité est donc contrôlée… s'interrogea l’enfant.
— N’as-tu pas vu le blason à l’entrée ?
— Si. J’y ai même déposé une pièce. »
La femme sembla soulagée puis se reprit subitement.
« Une seule pièce ?
— C’est ça. Pourquoi demander ? »
La jeune femme se pencha afin d’arriver à portée de Capy et chuchota :
« Si vous avez des ennuis, ce qui serait très probable, pense à donner deux autres pièces pour ta sœur. Pense aussi à proclamer ton droit de tractation. »
Ne sachant quoi répondre à ces déclarations, il lança un regard à sa sœur qui s’était endormie après avoir fini son assiette. Après demande, ils restèrent au comptoir et Capy put admirer le calme que prenait la cité à cette heure. Il reprit cependant son carnet et s’y plongea afin d’analyser ce qu’il avait pu y écrire durant cette longue journée.
La cheffe tapota l’épaule d’Ennebelle qui était sur le point de tomber de son tabouret. Cette dernière se réveilla sans difficulté, mais à peine avait-elle rouvert les yeux qu’elle vit un écureuil gris fouillant leur traîneau. Elle s’empressa de courir vers lui en sautant de l’étage et l’interpella.
Suite à son exposition, le rongeur détala avec ce qu’il put prendre. Capy, affolé par la situation, courut après sa sœur qui poursuivait leur voleur. Les deux loups s’étant transformés sur le chemin, glissèrent dans les virages. Ennebelle put rattraper leur fugitif sur la longue ligne droite qu’était l’allée. Lui sautant dessus à la première occasion, ils firent des roulés-boulés et percutèrent les vases d’un marchand. Capy s’étant arrêté, il avait devant lui une espèce de violente querelle. Désemparé, il ne fit que regarder la scène tout en jetant de multiples coups d'œil vers l’étal fracassé. L'enfant fut plaqué au mur et sortit de sa rêverie. Il en fut de même pour ses deux compagnons d'infortune. Tous les trois se firent fouiller.
« Pas d’armes sur lui.
— Sur elle non plus.
— Lui, il a une belle dague maudite ! s’exclama une panthère noire.
— Il nous l’a volée ! pesta Ennebelle encore plaquée.
— Mais c’est toi qui a détruit tous les biens de ces gens. » rétorqua sèchement la panthère en pointant du doigt l’étal rempli de vases brisés.
Capy se souvint des paroles de la restauratrice, et avec tout le courage qu’il put avoir, tendit deux pièces à portée de la panthère qui maintenait sa sœur.
« Je demande une tractation ! Je…
— Qui t’as appris ça petit ?
Capy fut coupé par un renard qui le regarda fixement de biais. Il souriait.
« Tu empestes son odeur… se questionna rapidement l’excentrique goupil. Ils sont intéressants... Je les garde ! Vous autres, occupez-vous du rongeur.
— Bien M. Max-Ja…
— Oui oui, faites donc ! Vous faites peur aux enfants » les coupa-t-il.
Les panthères acquiescèrent en s’en allant avec l’écureuil. Le renard tendit la lame volée à Ennebelle, qui la reprit violemment.
« Arrête de t’inquiéter ! Je ne vais rien te faire ! »
Il tenait de belles paroles, mais le sourire qu’il tenait en permanence inquiétait les jumeaux.
« Tu as combien de pièces sur toi petit ?
— Une quinzaine… hésita Capy en touchant la poche qui les contenait.
— Va donc dédommager ce pauvre vendeur. Il n’attend que ça.
Le petit alla vers le colporteur en lui tendant un amas de pièces dans le creux de ses mains. Ce dernier accepta en lui rendant un sourire reconnaissant. Capy tourna la tête, vit le renard partir suivi de sa sœur et les rattrapa en courant.
Les jumeaux furent amenés vers un bâtiment, le premier qu’ils voyaient depuis leur entrée dans la cité. À l’intérieur, quelques tables étaient éparpillées çà et là. Elles étaient occupées par de multiples groupes. La majorité étaient rassemblés par race.
La bête les invita à s'installer au comptoir au fond de la salle. Le vacarme était tel qu’on ne pouvait comprendre les conversations des autres tables. Leur hôte leur servit à boire.
« Au fait ! On m’appelle Kuad’s » rigola-t-il.
Ce dernier avait l’air pris dans l’euphorie de la salle. Il dansait une chope à la main. Tournant sur lui-même, il éclata d’un rire singulier mais sincère. Puis il s’exclama soudainement :
« BIENVENUE À LA CITÉ DES EMMERDES LES JEUNES ! »
Deux ours polaires, assis à une table dans un des coins non loin du comptoir, le fusillèrent du regard. Un regard meurtrier, qui fut intensifié par l'empoignement de sa choppe par l'un d'eux. Sous la pression, Kuad’s se rectifia calmement.
« À la cité des ennuis…
— Kuad’s ! Joins les à nous plutôt que de leur faire peur ! fit amicalement l’ourse.
— Matania… répondit-il nerveusement. Vous vous présentez vous-même ou je…
— Laisse nous faire. Gère tes clients. »
Le second ours fit un geste pour dire aux enfants d’approcher.
« Vous allez nous tuer ? s’inquiéta Ennebelle.
— Bien sûr que non ! Qu’a-t-il encore pu dire à notre sujet..? s’interrogea l’ourse.
— Il n’avait encore rien dit, mais le voir effrayé pour la première fois, ça fait peur. On comprend bien votre dominance ici. Vous devez être important.
— Vous êtes décidément bien les enfants de cette sorcière… Elle ne perdra pas sa réputation, fit l’ours.
— Excusez-moi, qui est donc cette sorcière dont on serait les enfants ?
— Faisons simple. Écoutons ce que les gens en savent, rétorqua-t-il. »
L’ours se déplaça jusqu’au comptoir et tenta d’interrompre le brouhaha par des signes. Tous s’étaient arrêtés, à l’exception d’une table. L’ours s’irrita et prit la chope d’un lézard, assis à une table adjacente, souffla et l’envoya sur l’homme qui ne s'arrêtait pas de parler. Ce dernier, touché à la tête, fut projeté dans le mur par la force du projectile. Un silence glacial se créa, à l’exception de Kuad’s qui se lamentait de la dégradation de ses biens.
« Maintenant que vous m’écoutez, parlons. Les jeunes là-bas cherchent Dame Legendz.
— La sorcière est morte ! débuta un humain.
— Elle nous a abandonnés ! hua un nain ivre. »
La plupart des personnes présentes répétèrent les mêmes choses. Capy et Ennebelle furent choqués. Leur mère était morte. Et tous la connaissaient. Qui était-elle réellement ? Qu’avaient-ils manqué pour en découvrir autant après sa disparition ? Après tant de questions sur leur seule famille, Capy fut pris de vertiges. Sa vision se noircit. Il tomba au sol, inconscient.
NDA : Prononciation
Kuad’s - kouadz
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