Un secret qui ne peut être révélé

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Le repas avait été très maigre. Pas parce que les vivres étaient rationnés ou manquaient à la table royale. Non. C'était pour accompagner les candidats dans leurs recherches de pureté. Aucun animal n'était mangé par la famille royale jusqu'à la nouvelle lune et cela pour que ces fameux candidats puissent faire preuve d'humilité, qu'ils expient de leurs pêchers encore peu nombreux jusqu'à cette fameuse élection. Les personnes autour de la table étaient encore attristées par la disparition de l'une des leurs. Aussi, personne ne parlait, personne n'en voyait l'utilité.


Le repas arrivait à sa fin, Quashirell terminait sa coupe de vin diluée d'eau lorsqu'un serviteur s'approcha d'elle, s'inclina plus bas que nécessaire avant de relever son regard apeuré en direction de sa souveraine. Cette dernière avait encore son visage dissimulé derrière une mousseline de deuil et ne sourit pas au jeune homme qui ne semblait pas à l'aise en sa compagnie. Elle lui fit cependant signe de s'approcher, seulement car ce denier semblait avoir une information à lui communiquer.


- Le geôlier m'a dit de vous dire que le prisonnier Eliam vous priait de lui accorder un entretien en privé... Chuchota le serviteur après un début bégayant et maladroit.


Derrière son voile, la reine avait froncé les sourcils. Il était courant que les condamnés requièrent sa présence, et toujours, Quashirell s'arrangeait pour refuser. Mais là, ce n'était pas n'importe quel prisonnier, c'était Eliam. Après un petit soupire triste, elle murmura quelques ordres à l'oreille de ce même serviteur qui hocha la tête avait de disparaître dans les cuisines, exhaussant les ordres de sa majesté.


Quand Quashirell reporta son attention sur la tablée, elle remarqua que tous les regards étaient, plus ou moins discrètement, posés sur elle.


- Un problème ? Questionna Shitrim tout en regardant une servante remplir sa propre coupe de vin après qu'il lui en ait donné implicitement l'ordre.


La reine affirma que non de façon légère, mais quitta tout de même la table sans terminer le pain qu'elle avait fait trancher. Elle était attendue et était curieuse de savoir ce que son précieux prisonnier voulait lui révéler qui fut si urgent.


•••

Quelques instants plus tard, la souveraine se trouvait devant une vieille porte, non loin des cachots. Cette pièce ne servait plus depuis des lustres, il s'agissait des « quartiers des prisonniers diplomatiques »... Il s’agissait d'une geôle mais qui ressemblait à une chambre standard. Cependant elle en différait de par son humidité ainsi que les barreaux aux fenêtres et à la porte.


Le geôlier lui ouvrit la porte avant de refermer doucement une fois que la jeune femme se soit glissée à l'intérieur de la cellule. Aussitôt, elle entendit la lourde clé crisser dans la serrure, elle était à son tour enfermée.


Eliam était déjà là. Enchaîné par les chevilles, ses poignets également liés par une chaîne qui avait déjà commencé à abîmer sa peau. L'homme devant elle dévorait le plateau de fromage qu'elle lui avait fait apporter pour qu'il puisse se restaurer lors de leur entretient. Après tout, rien n’interdisait à la reine de bien traiter ses prisonniers à perpétuité. De plus, Quashirell était heureuse de le voir avec autant d'appétit.


- Votre majesté ... S'étouffa à moitié le jeune homme qui peina à se lever pour saluer sa reine comme il se devait.


Rien que de voir l'effort d'Eliam pour simplement pencher son buste en avant ainsi que sa grimace de douleur suffirent à faire de la peine à la jeune femme. En attendant, le prisonnier avait terminé ce qu'il avait mis dans sa bouche et se tourna vers Quashirell. L'inquiétude de cette dernière ainsi que sa pitié se lisait sur son visage, surtout maintenant qu'elle avait retiré le tissu qui cachait sa tristesse.


- Navré de vous indisposer de la sorte, votre majesté... Mais il était de mon devoir de vous mettre en garde.

- En garde ? Interrompis aussitôt la demoiselle à la longue chevelure blanche.


Pas un seul instant elle n'eut pensé à mettre les paroles d'Eliam en doute. La souveraine avait confiance en lui, bien qu'elle ne puisse pas l'acquitter à cause de son geste agressif envers elle et son frère.


- Nous sommes cousin, madame... et n'oubliez pas que j'ai été l'élève de Lord Asmyr, le grand bibliothécaire. Même si je n'étais pas encore né lors de la précédente élection, je sais exactement ce qu'il s’est passé, comment et pourquoi, tout comme les élections précédentes. Je sais également que vous ignorez encore toute l'horreur de ce que provoque chez les autres l’élection de la lune et des astres. Commença le condamné avant de faire une pause. Pause qui fut malvenue du point de vue de Quashirell.


- Et bien ?! Dis-moi ! Eliam... Il faut que je sache ! Qu'est-ce que cette élection peut bien causer comme désastre ? S'impatienta la reine.


La jeune femme était inquiète, vraiment. Son cœur battait la chamade et se serrait à la fois, cela en devenait douloureux.


- J'ai promis à Lord Asmyr de ne rien révéler de ces travaux de recherche. Cependant, je peux vous conseiller une lecture qui raconterait mieux que quiconque ce que vous auriez toujours dû savoir, votre majesté. Vous comprendrez alors que personne n'est innocent. Ni le prince Shitrim, ni la princesse Amealys... Ni même vous... Ma reine... Le fait que nous ayons le sang du premier Varalÿn dans les veines fait de nous des coupables, des enfants de coupables, et des faiseurs de coupable une fois nos enfants nés... Je ne pensais pas que notre génération aurait encore à souffrir de tels ravages.


A la fin de son discours, la voix d'Eliam s’étrangla en un sanglot. Il devait encore repenser à sa promise perdue. Rien que d'imaginer sa peine faisant grandir celle de Quashirell. Eliam eu encore l'énergie de lui donner l'adresse du livre qu'elle devait rechercher ainsi que son nom : Les Mémoires de Guarynor II, tome III...


La souveraine ne s'attarda pas plus longtemps, espérant ne pas avoir attiré l'attention de sa famille sur elle avec son comportement étrange. Elle ne savait pas encore si elle aurait le courage de trouver cet ouvrage, même si au fond d'elle-même, quelque chose lui ordonnait de le faire et enfin de sortir de sa douce ignorance...

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