Un traître est tombé
Les devoirs de sa majesté avaient dû passer avant ses sentiments. C'était pourquoi, très tôt le matin, Quashirell avait maintenu sa séance de doléance. Il était toujours important pour elle de s'enquérir du mal-être ou des problèmes de son peuple. Pourtant, les mots compatissants lui manquaient et elle ne réussissait pas forcément à apaiser le cœur des visiteurs. Par chance, elle avait passé les deux tiers de sa journée. A part quelques imprévus, il n'y aurait plus personne qui réclamerait son jugement royal. Elle était rassurée, elle n'aurait donc plus à parler. Elle était soulagée. Mais cela, c'était bien avant que les deux grandes portes de la salle d'audience ne s'ouvrent en grand.
Quashirell avait été surprise et avait même sursauté sur son trône, ne s'attendant pas à une telle entrée. Elle était sur le point de sermonner ses gardes et leur manque de délicatesse, tout cela avant que Shitrim ne fasse sa fière apparition, le sourire victorieux sur ses lèvres.
- Voilà !!! Voilà le l’instigateur du meurtre de la princesse ! Tonna la voix du prince Shitrim dont le triomphe ne semblait pas avoir d'égale.
Les yeux de la reine s'écarquillèrent lorsqu'elle reconnut le corps qui se redressait de moitié devant elle.
- Guertrag... murmura-t-elle, incrédule.
Il est celui qui a payé un assassin pour tuer votre nièce, majesté ! Reprit Shitrim, son regard ne laissant aucune place à la clémence ou à la compréhension.
Complètement désemparée, Quashirell s'était levée de son trôné, et en avait descendu les marches pour se rapprocher de ce fameux Guertrag... L'un de ses plus proches conseillers, celui à l'apparence de vautour et aux yeux bleu clair et perçants. La reine ne réalisait pas qu'un homme d'aussi bon conseil avait pu la trahir.
- Guertrag... cela ne peut pas être vrai... Vous... Vous êtes victime d'une injustice ! Je vous en prie, défendez-vous, Guertrag ! Implora la souveraine dont la voix s'était faite tremblante sous ce nouveau choc qui la percutait de plein fouet.
A la demande de la reine, le visage de Guertrag, de coutume si fermé et impassible, se déforma en un rictus mauvais et coupable.
- Me défendre ? Vous voulez vraiment que je me défende, votre Majesté ?! Et bien je vais le faire dans ce cas. L'homme se redressa du haut de ses deux mètres voûtés, il semblait imposer sa volonté maintenant qu'il avait repris contenance. Je me défendrais donc d'avoir servi docilement une jeune reine imbécile avec des valeurs trop loin de la réalité, avec des désirs insatiable et trop enfantin pour gouverner ! Sachez que je suis fier d'avoir contribué à un avenir meilleur pour ce pays, il faut un véritable chef à sa tête et ce chef, ce ne sera plus vous ! Finit-il par gronder en pointant son doigt accusateur en direction de Quashirell.
- Il suffit ! Hurla Shitrim par-dessus, ordonnant le silence de la part de Guertrag en lui assenant un violent coup de pied derrière les genoux, le faisant tomber à terre
- Pourquoi me tairais-je ?! Sa majesté m'a demandé de parler ! Alors écoutez bien, ma reine … Sachez que plus personne dans ce château n'acceptera de se faire conduire par une enfant, par une femme dont les idées mènent le pays à sa perte !
L'accusa n'ajouta rien de plus, le pommeau de l'épée du prince venait de s'abattre sur son crâne, le plongeant dans l'inconscience.
- Navrée pour tout ce tapage, votre majesté. Je ne m'attendais pas à ce qu'il soit si agressif. Assura Shitrim qui d'un geste auprès des gades faisait évacuer le corps inerte.
Mais Quashirell resta un instant figé devant la scène, le regard dans le vide, comme si elle revivait cette scène encore et encore, les mots prononcés la blessant encore un peu plus.
Quand elle releva son regard couleur perle vers son frère, son visage offrait une expression de profonde tristesse.
- Je … te remercie, Prince Shitrim. Elle laissa un instant sa phrase en suspension, comme si elle cherchait les mots à offrir ensuite. Je te laisse la suite, je vais me reposer dans ma chambre. Finit-elle par annoncer.
Doucement, elle s'approcha de son frère et attrapa ses mains, les serras avec force comme pour lui confirmer qu'elle avait confiance en lui. Ce dernier embrassa avec délicatesses les doigts de sa sœur et la laissa quitter la pièce sous bonne garde. Reprenant le flambeau de la gestion du royaume pour laisser la reine reprendre ses esprits. Être trahi n'était jamais une chose facile à vivre.
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