Au-delà de la souffrance qu’éprouvait la petite reine, l’abattement que son cœur subissait était certainement pire. Cela alourdissait tous ses membres et bridait ses sens, la laissant dans des sortes de limbes tandis qu'elle était bercée par le trot des chevaux.

Le voyage de retour avait été rude pour les deux femmes. Les soldats étaient vulgaires, osaient des remarques terriblement déplacées qui faisaient rougir de hontes les deux reines... Parfois même décidaient quelques caresses. Mais il suffit à Fyo de déclarer qu'elle était toujours la sœur du roi pour calmer les plus téméraires d'entre eux.

Dès le lendemain, le château qu'avait toujours connu Quashirell se dressa devant l'équipée. Ils finirent leur voyage en un généreux galop qui manqua de faire tomber Quashirell plus d'une fois. Douloureusement maintenu par ses liens, elle ne pouvait rien faire d'autre que de grimacer et de presser d'avantage ses cuisses autour de l'animal.

Sans leur donner le temps de respirer. Elles furent littéralement balancées aux pieds du prince Shitrim, ce dernier feint de les ignorer pendant quelques minutes, terminant de dicter un courrier à l'un des scribes présents.

- Ho, vous êtes piles à l'heure mes demoiselles ! Lança l'homme qui ne semblait absolument pas contrarié par le contretemps que lui avait fait subite les deux rebelles.

- Père ! Laissez-moi voir Phoelyx, laissez-moi voir le roi ! Supplia la petite reine, essayant de rendre sa voix la plus assurée possible.

- Ho, mais je ne pense pas qu'il désir voir la seule personne refusant de lui offrir la totalité de son droit. Celle qui lui a volé la moitié de ses pouvoirs et qui l'empêche de se présenter fièrement à son peuple. Cette sœur qui le prive de sa gloire. Qui ne le place qu'au titre de « demi-roi ». J'espère que tu es satisfaite, Fyo ! Siffla Shitrim qui s'était approché de sa fille.

Quashirell était estomaquée de ne voir aucune lueur de compassion ou de doute dans les yeux de son frère. Ce frère qui l'avait pourtant si souvent soutenue, tenue dans ses bras, rassurée pour tout et n'importe quoi. Quand était-il devenu son ennemie ? Il ne pouvait pas l'avoir toujours été, quelque chose avait dû le changer à un moment où un autre.

- Ce n’est que trahison ! Déclara finalement l'ancienne reine en se redressant avec peine de sa position à demi-allongée. Tu n'as aucunement le droit de te tenir assit ici ! Ton fils, le Roi, est déjà en âge de régner ! Tu n'as pas à prendre sa place, tu n'as pas le droit de régner en son nom ! Et vous tous !!! TOUS !!! Vous tous qui regardez faire sans rien dire ! Vous participez à cette trahison ! Aucun de vous n'est plus digne de ce palais, de ce royaume ! Finit par hurler Quashirell qu'une voix tantôt assurée tantôt tremblante sous le coup de ce trop-plein d'émotion.

Elle aurait sûrement continué de hurler au traître si la morsure d'un fouet ne l'avait pas fait se mordre la langue. Elle n'avait pas vu venir le coup et attendit le second en serrant les dents. La douleur était chaude et glacée à la fois.

Au bout de quatre coups, Quashirell s’évanouit sous la douleur. Lorsqu'elle se réveilla, elle gémit sous le mal que lui apportait son dos et la position inconfortable dans laquelle elle se trouvait. Assise contre le mur, ses blessures étaient en contact avec la pierre humide, ses bras étaient scellés sur ce même mur, scellés par de menotte bien verrouillée. Fyo se trouvaient en face, dans la même position, le visage tuméfié, le menton en sang à cause d’une lèvre plusieurs fois fendue. Avait-elle essayé de s'échapper de nouveau où avait-elle tenue tête à son père en prenant sa défense ? Quashirell aurait bien demandé mais elle se sentait trop faible pour parler, et puis Fyo aurait sûrement trop mal pour répondre à ses questions. Alors, elle se laissa retomber dans le sommeil comateux pour oublier un peu la douleur.