Chapitre 7 : Se relever
À trente-cinq ans, Luc n’avait pas les qualités d’un athlète exceptionnel. Il ne les avait, d’ailleurs, jamais eues, le sport ne l’avait jamais intéressé. Il avait suivi les cours d’éducation physique, à l’école, mais ça s’était arrêté là. Il n’avait pas eu de père, et sa mère avait eu d’autres priorités. Son cursus scolaire avait été une ligne droite sans accident, jusqu’à un doctorat en mathématiques, et dorénavant, il dispensait des cours à l’université, ce qui l’occupait une douzaine d’heures par semaine, et proposait diverses formules de formation pour les professionnels utilisant toujours des logiciels informatiques de plus en plus spécialisés. L’un de ses atouts majeurs était sa faculté de comprendre plus rapidement que la moyenne des gens les problèmes qu’on lui posait et les explications qu’on lui donnait. Ainsi, il lui suffisait de suivre une conférence ou de lire une série d’articles spécialisés pour maîtriser les tenants et les aboutissants d’un sujet, quel qu’il fût, bien que n’en ayant jamais entendu parlé auparavant.
Luc avait compris depuis longtemps que sa mère et celui qui n’était pas son père, en tant qu’équipiers de l’ombre de Roger, exerçaient une activité pouvant comporter quelques risques, même élevés. Ainsi, lorsque Marie lui avait annoncé le décès d’Élisabeth et de Bruno, au cours de l’attaque menée l'été dernier par Nathalie, même si la douleur l’avait presque étouffé, il n’avait pas été surpris.
— Merci, Marie. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, faites-moi signe, avait-il proposé, paradoxalement, alors que Marie n’avait même pas eu le temps de lui faire elle-même cette offre.
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Roger avait amené Luc au centre de contrôle et lui montrait les travaux de remise en état. Le bâtiment commençait à retrouver sa forme originale, les intérieurs étaient en cours de réaménagement. Tout le système informatique, cependant devait être remis à neuf, de façon à être de nouveau à la pointe de la technique et d’avoir, autant que possible, toujours une longueur d’avance sur la concurrence.
— On dirait que tu parles d’une entreprise manufacturière ordinaire, se moqua gentiment Luc.
La fourniture d’un matériel de pointe était parfaitement de son ressort, la mise au point d’une architecture informatique sûre et performante, au sens où c’était entendu entre les deux hommes, ne l’était pas moins, en revanche, tout cela prendrait du temps, il fallait en tenir compte.
Un accord de partenariat avec Luc en free-lance fut rapidement trouvé, après quoi Roger emmena Luc dans le quartier des cellules.
— Tu sais, Nathalie a été une amie de tes parents, expliqua Roger, mais elle a fondu un câble, à cause d’Hector. Elle n’en voulait qu’à lui, mais il y a eu des dommages collatéraux. Certains plus graves que d’autres, ajouta-t-il en montrant ses béquilles résultant de ses blessures qu’il qualifiait de bénignes, en comparaison de ce qu’avaient subi ses deux employés.
Dans le fond de sa cellule, Nathalie, était assise sur le sol, entourant ses genoux dans ses bras, fixant le mur d’en face, sans bouger alors que le verrou de la porte claqua. Une larme coula sur sa joue droite lorsqu’elle vit le visage de Luc dans l’entrebâillement de la porte.
— Roger m’a expliqué ce qui s’est passé, toute l’histoire. Je ne comprends pas, tout le monde t’aimait, ici. Mes parents t’aimaient.
— Je suis désolée, Luc, s’il y avait…
— Rien, coupa Luc, il n’y a rien que tu puisses faire pour te rattraper. Je ne reverrai plus ma mère, je ne reverrai plus Bruno. Mon fils ne reverra plus jamais ses grands parents. Par ta faute.
Luc quitta la cellule, laissant Nathalie pleurer toutes les larmes de son corps. À chaque minute qui passait, elle prenait un peu plus conscience de la tragédie qu’elle avait orchestrée, et ça lui déchirait le cœur.
Au moment où Luc allait quitter la base, il se tourna une dernière fois vers Roger.
— Vous n’allez quand même pas la garder ici ? Ce n’est pas une prison, ici. Elle doit être, je ne sais pas, placée devant la justice, non ?
— Elle était blessée, on l’a soignée, mais c’est prévu, pour demain, à la première heure, répondit Roger.
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