Confessions

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Arrivant dans son bureau, Marie-Chantal voit Lance déjà affairé. Cependant, une chose étrange attire son attention.

  • Dis-moi, c’est bien la même veste et la même chemise que celles que tu portais hier ?
  • Oui, effectivement, rien de t’échappe, œil de lynx.
  • OK, alors il vaut mieux aller te changer. Vous n’avez pas été assez discrets, avec la petite de l’accueil, en partant hier soir. Ça va jaser, sinon. J’en connais qui ne vont pas se gêner. Viens avec moi.

L’assistante l’emmène alors dans un couloir, sors une clef de sa veste et ouvre une porte non identifiée. Fermant rapidement la porte, ils se retrouvent seuls dans une grande garde-robe, des rangées de vêtements en tous genres alignés sur des portants le long des murs, allant du costume au smoking, aussi bien du tailleur à la robe de soirée.

  • Où sommes nous ? Demande Lance.
  • C’est ici que nous avons, en cas de besoin, pour la Direction, quand ils ont un repas de dernière minute avec un gros client, un dîner d’affaire, une réception officielle, … A part les assistantes et les membres de la direction, personnes de connaît cet endroit. Nous allons te trouver une tenue adéquat à ta taille.

Elle commence alors à parcourir les rayonnages, regardant les tenues.

  • Tiens, un costume sombre et une chemise blanche, qui devraient être à ta taille. Vas-y, change toi.
  • Mais il n’y a pas de vestiaire.
  • Allez, ne fait pas le pudique avec moi, nous n’avons pas le temps, les collègues vont arriver je te dis.

Marie-Chantal commence alors à déboutonner la chemise de Lance, qui pendant ce temps enlève son pantalon. Il se retrouve en boxer devant la jeune femme, qui soudain le détail.

  • Et bien, la petite a dû bien se faire plaisir, hier soir. Par contre, je n’ai pas de sous-vêtements ici, donc tu vas devoir garder ton machin avec ces tâches de sperme dessus, petit vicieux.

Lance se met à rougir, tandis qu’elle lui tend le pantalon, puis la chemise. Ajustant son col, elle en profite pour respirer son odeur corporelle, et lui glisse à l’oreille.

  • Dommage, nous sommes collègues, c’est une limite que je ne souhaite pas franchir avec toi, j’espère que tu le comprends.

Une fois Lance rhabillé, ils ouvrent la porte discrètement pour sortir dans le couloir. Au moment de verrouiller la porte, Jean-Eudes apparaît soudainement.

  • Bonjour les amoureux. Vous avez passé un bon moment ? Marie, nous déjeunons toujours ensemble, ce midi ?
  • Non, je dois déjeuner avec Lance, tu te souviens, je lui ai promis hier.
  • Décidément, elles n’en ont toutes que pour toi. Mathilde, Marie, … et bientôt Estelle ?
  • De quoi parles-tu ?
  • Rien, je me comprends, répond Jean-Eudes, en partant, grommelant.

Marie-Chantal et Lance se retrouvent interloqués, et regagnent leur bureau. L’assistante semble mal à l’aise. En passant devant la machine à café, le détective lui propose de prendre une boisson chaude, pour qu’elle se remette de cette altercation.

  • Dis-moi, vous êtes ensembles, Jean-Eudes et toi ?
  • Hein ? Jamais de la vie ! Répond-elle, en s’étouffant. Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
  • Et bien, sa remarque, assez acerbe. Et d’autres petites choses.
  • Lesquelles, par exemple ?
  • Comment dire … vos temps en tête à tête lors de la pause déjeuner ? Vous non plus n’êtes pas discrets, il semble.

La jeune femme le regarde, incrédule, ne sachant pas comment réagir. Cette remarque a été dite sans arrière pensée, elle le sent bien, cependant elle se sent blessée par ces questions.

  • Non, nous ne sommes pas ensemble. C’est plus compliqué, et c’est compliqué à expliquer. Pas maintenant, s’il te plaît, pas ici. Pas comme ça.
  • Il faut que tu parles, si tu n’es pas consentante.
  • Parlons-en ce soir, tu veux bien ? Dîner chez moi, rôti de bœuf et purée de pomme de terres maison, ça te convient ?
  • D’accord, je te laisse tranquille pour le moment et nous en parlons ce soir.

§§§§§

La journée se déroule sans heurt. Jean-Eudes est parti chez un client pour la journée, ce qui se sent dans l’atmosphère du bureau, beaucoup plus sereine.

Au moment du déjeuner, Marie-Chantal et Lance descendent pour se rendre à la cafétéria. En passant à l’accueil, Mathilde les regarde passer, ne sachant pas comment réagir. Lance va alors la rejoindre, suivi de sa collègue, pour lui proposer de les accompagner, en toute camaraderie professionnelle.

Une fois à table, la conversation commence.

  • Mathilde, je me permets, il semble que des bruits de couloirs tournent sur le fait que nous soyons amants, toi et moi, dit Lance.
  • Hein ? S’exclame la jeune femme en s’étouffant, au point que certaines tournent vers elle.
  • Disons que vous êtes partis de l’accueil sans grande discrétion, hier soir. Répond Marie-Chantal. Et comme il est revenu dans la même tenue, il était facile de tirer une conclusion.
  • Ah. Oui, effectivement.
  • Mais je l’ai rattrapé au vol, et je l’ai aidé à se changer dans le vestiaire de la Direction. Et de ce que j’ai vu, il a tout pour être un bon amant. Glisse malicieusement l’assistance au creux de l’oreille de Mathilde qui s’empourpre.
  • Oui, effectivement, l’un des mieux dotés que j’ai connu. Il a tout pour plaire, mais ce n’était qu’une fois comme ça, pour … faire connaissance, rien de plus.

Et les deux femmes de continuer leur discussion, sans se préoccuper du premier intéressé.

  • Et vous deux, dans le vestiaire … ?
  • Pardon, répond à son tout Marie-Chantal, sa semoule sortant soudainement par son nez, d’étonnement
  • Et bien, … il n’y a pas de porte pour se changer, donc …
  • Non, j’ai juste admiré, je n’ai pas touché, même si c’était tentant. Mais c’est mon collègue direct, je n’ai pas le droit.
  • C’est vrai. Tu as raison. D’ailleurs, je peux te tutoyer ?
  • Au point où nous en sommes, oui, et appelle-moi Marie. Je n’aime pas mon prénom, il est trop BCBG.

La conversation va bon train, les deux femmes se racontant leurs potins, comme le feraient des copines de toujours. Quand soudain Lance perçoit une question mûrir dans son esprit.

  • Dites-moi, mesdames, vous qui avez eu fort à faire avec Jean-Eudes, si vous voyez ce que je veux dire, savez vous pourquoi il serait monté à l’étage où il y a le vestiaire ce matin ?
  • Non, absolument pas. Il n’a aucune raison, a priori d’y aller, répond Marie-Chantal.
  • Il y va une à deux fois par semaine pourtant, répond Mathilde. Peut-être pour y voir un membre de la Direction, c’est parfois le seul moment où nous pouvons les croiser tranquillement.
  • Étrange, parce que ce matin, il nous a surpris quand nous sortions de là, et a eu des mots plus qu’équivoques sur un moment intime que nous aurions eu.
  • Pourtant, il n’y a pas de membre de la Direction ce matin, à part Madame Cabreret. S’étonne Mathilde. Mais ce n’est pas la première fois que j’ai le sentiment qu’il a comme un sixième sens, une sorte de détecteur.
  • Raconte nous, demande Lance. Tu voulais justement m’en parler hier soir.
  • J’hésite, répond la jeune femme, en regardant Marie-Chantal
  • Vas-y. Dis. J’ai déjà eu la même impression. Il semble savoir des choses qu’il ne devrait pas être en mesure de connaître.
  • Oui, c’est exactement ça. Comme par exemple, plusieurs fois, il m’a surpris quand j’étais seule dans le bureau du Président, alors que je déposais un paquet qu’un coursier venait de déposer. Je me suis retournée, il se tenait derrière moi, cette lumière étrange dans son regarde, du prédateur qui va se jeter sur sa proie.
  • Oh. Oui, je ne le connais que trop bien, ce regards, marmonne l’assistante. Tu as su l’envoyer paître ?
  • Oui, j’ai eu cette chance. Mais pas toi, si j’ai bien observé.
  • Je ne peux pas en parler, pas ici. Une autre fois, peut-être.

§§§§§

Dans le courant d’après-midi, Estelle passe dans le bureau.

  • Marie-Chantal, j’ai vu vos proposition d’avions et d’hôtel. C’est parfait pour moi. Vous êtes un ange.
  • Merci Madame ; répond l’assistante, ravie du compliment.
  • Comme je sais que vous n’appréciez pas ce genre d’évènement, et que j’aurai tout de même besoin d’un assistant, que pensez-vous d’envoyer Lance à votre place ?
  • Je ne sais pas, vous pensez qu’il est prêt ?
  • Il le sera, il reste une semaine pour le mettre à niveau, mais d’après les premiers échos que j’ai, il semble très bien parti.
  • D’accord, je vais alors changer les noms sur les billets pour les lui attribuer.
  • Parfait, vous êtes géniale.

Une fois la Directrice partie, l’assistante regarde Lance attentivement.

  • OK. Nous avons une semaine pour te préparer à entrer dans le panier de crabes. Je pense que tu seras prêt, mais il nous reste beaucoup de travail avant.
  • Ah. C’est aussi dangereux que ça ?
  • Plus encore. J’y ai brûlé plus d’une plume.
  • Et Jean-Eudes sera présent ?
  • Oui, c’est une évidence. Il y est toujours. Quand il y a une occasion de se faire mousser ou de faire de la lèche, il ne traîne jamais très loin.
  • Et c’est comme ça que lui et toi, ça a commencé ?

Marie-Chantal regarde alors Lance intensément dans les yeux, pendant plusieurs minutes. Elle se lève alors, et ferme la porte du bureau. Puis, revenant s’asseoir, commence à lui parler.

  • Il n’y a pas de lui et moi. J’aime un autre homme, mais il a un moyen de pression contre moi, et il en use selon son bon vouloir.
  • Question stupide, pourquoi ne pas porter plainte ?
  • Parce que je n’ai aucune preuve, et même si je le fais, je perds mon travail. Mais, s’il te plaît, n’en parlons pas maintenant, attends ce soir, que nous soyons au calme.

§§§§§

En fin d’après-midi, Lance et Marie-Chantal repartent ensemble. Dans le métro bondé, les deux attendent, collés l’un contre l’autre dans la chaleur moite. Un changement de ligne et quelques arrêts plus tard, les voici de nouveau à l’air libre, toujours sans vraiment avoir prononcé un mot de plus que le nécessaire.

Parvenu devant un immeuble récent, ils montent par les escaliers, jusqu’à l’appartement de Marie-Chantal, qui ouvre la porte. Un intérieur simple, relativement spacieux, avec son salon, sa salle de bain avec baignoire, et sa chambre séparée. Un bureau occupe une partie du salon, aussi méticuleusement rangé que celui qu’elle a au travail. Quelques bibelots, des photos de famille, et ainsi que quelques unes d’afterworks. Lance y reconnaît quelques visages.

  • Dis-moi, sur cette photo, qui est l’homme entre Estelle et toi ?
  • C’est Pierre, son mari. Un homme très gentil, charmant. Très protecteur aussi.
  • Tu le connais bien ?
  • Oui, autant qu’Estelle, depuis le temps. Ça doit faire peut-être dix ans ? Presque quinze, probablement.
  • Donc vous vous rencontrez en dehors du travail ?
  • Il arrive qu’il vienne aux soirées après le travail. Et aussi certaines réception officielles, où il est de bon ton que les managers d’un certain niveau viennent accompagnés de leurs conjointes. Et donc puisque sa femme est manager, il faut partie de toute la clique des femmes de manager, ce qui l’amuse beaucoup.
  • Effectivement, ça doit être étrange, non ?
  • Il se plaît bien, entouré de femmes. Il n’est pas coureur de jupon, mais elles sont tout de même toutes très à l’aise en sa présence. Il a le don de faire tomber les barrières.
  • Et avec Estelle, ça se passe bien, entre eux ?
  • C’est un peu compliqué. Quand ils sont ensemble, ils sont fusionnels. Tu les verrez, quand ils m’invitent pour le dimanche midi. Mais ils sont souvent en déplacement, l’un comme l’autre.
  • Tu vas souvent chez eux ?
  • Oui, souvent. Soit pour des repas ensemble, mais aussi parfois pour déposer des documents urgents, … J’ai même les clefs pour chez eux, ils me font confiance.

Marie-Chantal s’affaire en cuisine, préparant un rôti de bœuf et une purée de pommes de terre maison façon aligot. Pendant ce temps, Lance propose ses services pour dresser la table, permettant par la même occasion de glisser son nez un peu partout.

Une fois à table, chacun papote, la jeune femme racontant son enfance en province, comment elle est arrivée dans la capitale, et a gravi les échelons, suivant Estelle dans son ascension, jusqu’à son poste actuel, une position où la confiance est la plus importante.

  • Et donc, avec Jean-Eudes ? Tu devais tout me raconter.

Marie-Chantal s’arrête alors, lève la tête, semble réfléchir. Les minutes s’écoulent en silence, que Lance ne souhaite pas briser, attendant les confessions de sa collègue.

  • Viens. Prenons un verre de digestif, et allons dans le canapé, ça sera plus … simple.

Elle commence alors à préparer les verres, et tous deux s’installent de part et d’autre du canapé.

  • Lance, as-tu déjà été amoureux ?
  • Oui. Il y a longtemps.
  • Tu as déjà eu beaucoup de femmes, dans ton lit ?
  • Oui, pas mal. Je n’ai jamais fait de compte, et sans vouloir tenir un tableau de chasse, ni vouloir me vanter, je ne saurais pas les compter toutes.
  • Et combien ont vraiment compté pour toi ?
  • Seulement deux. Avoue-t-il, simplement.
  • Et avec combien as-tu vraiment vécu une histoire d’amour ?
  • Une seule.
  • Et pourquoi pas la deuxième ?
  • C’est compliqué.
  • C’est-à-dire ?
  • C’est à la fois la femme d’un très bon ami, et une très bonne amie elle-même.
  • Voilà. Nous y sommes. L’amour interdit.
  • Explique moi.
  • J’aime un homme, très fort, mais il est déjà pris.
  • Et quel est le rapport avec Jean-Eudes ? Il est célibataire que je sache.
  • Oui. Et ce n’est pas lui. Mais il sait. Et il me fait chanter.
  • Mais, tu n’as jamais rien fait, avec cet homme que tu aimes.
  • C’est là qu’est l’os, hélas. J’ai fauté avec cet homme, et Jean-Eudes, je ne sais pas comment, l’a appris. Il a des preuves, et s’en sert pour me faire chanter.
  • Et pourquoi ne pas en parler à cet homme ?
  • Parce que ça détruirait son couple, et leur carrière à tous les deux, lui et sa femme.
  • Je comprends. Et donc tu subis seule, depuis combien de temps ?
  • Depuis quelques semaines seulement. Et je ne sais pas comment m’en sortir. Dit-elle, en s’effondrant dans les bras de Lance, se mettant à pleurer toutes les larmes de son corps, déchargeant toute cette pression contenue en elle jusqu’à cet instant.
  • Qui est cet homme ? Tu peux me le dire, je garderai le secret.
  • Non, impossible, je dois garder ce secret. Il n’y a qu’une solution, c’est de s’occuper de l’autre, ce connard. Mais pas de lui. Je ne veux pas leur faire de mal. Promets moi que tu vas m’aider
  • Promis. Calme toi. Je vais gérer. Pendant ce temps, tu continues à vivre ta vie, comme d’habitude.

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