Scène 34

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Grace à la recommandation de l’ancienne Capitaine des Éclairs, Kale, Nours et Kisanna n’eurent aucune difficulté à intégrer une nouvelle compagnie. Ils en avaient choisi une spécialisée dans l’escorte de convois. Leur nouveau chef était un homme sérieux, précis, l’oreille droite manquante.

— Mieux vaut l’oreille que la gorge ! disait-il aux recrues imprudentes.

Le printemps passa, puis l’été, au rythme lent des bœufs qui tiraient les lourds chariots de marchandises. Nours transpirait fortement, chassant une mouche qui lui tournait autour impunément. Le colosse pesta et Kisanna lança un clin d’œil, souriante, à un coéquipier qui se bidonnait.

— Je peux faire fuir les crapules rien qu’en passant le doigt sur le fil de ma hache, maugréa le géant roux, mais ces maudits insectes ignore tout respect !

Kale s’étouffait silencieusement de rire sur sa monture, et Nours lui darda un œil noir. Il chassa d’un nouveau geste la mouche… qui s’en alla droit dans la gorge du bel homme aux longs cheveux noirs. Ce fut au tour de Nours de s’esclaffer devant la toux spasmodique et le dégoût de Kale.

— Gaffe, les gars ! Surveillez les bois, là-bas ! les rabroua le chef.

L’automne vint et avec lui son cortège de feuilles fauves et ses pluies abondantes. Kale grommela : il en avait marre des grands espaces et souhaitait retrouver la ville et ses auberges accueillantes et surtout, sèches.

— Allez, Kale, notre contrat est presque terminé, remarqua Kisanna. Tiens le coup encore un peu.

Le jeune homme la contempla sans mot dire, admirant une fois encore sa peau claire et ses cheveux qu’elle gardait plus longs que lui. Il l’aidait souvent à en prendre soin, et ne se lassait jamais de brosser cette douce clarté, avant de les natter avec la dextérité d’une longue pratique.

Dès que leur contrat fut terminé, ils choisirent une compagnie dédiée à l’escorte de personnes et au maintien de l’ordre, œuvrant en ville : Kale se frotta les mains. Nours avec son imposante carrure fut employé à la garde, Kisanna à l’escorte de dames, et Kale à celle de commerçants,dans leur boutique et les jours de marché.

Des femmes tentaient bien de l’employer, mais le chef de leur nouvelle compagnie savait ce qu’il en était : leur attrait pour son sourire volontiers séducteur risquait surtout d’attirer les foudres de leur mari : autant éviter les problèmes. Hélas, Kisanna eut aussi son lot d’ennuis, avec des maris peu portés sur la fidélité… Leur chef se prit la tête entre les mains. Tout compte fait, il l’affecterait au marché, il y aurait moins de soucis en public.

Kale grinça des dents : une fois de plus, un quelconque badaud tentait d’engager la conversation avec Kisanna. Celle-ci l’ignora tant qu’elle le put, mais il commit l’erreur de poser la main sur son épaule et de la secouer. Un mouvement du bras, un pas de côté, et la blonde envoya l’importun. Quand il se releva, crachant des insultes, se fut pour se trouver nez-à-nez avec la dague affûtée que la jeune femme lui pointait dessus.

Kisanna soupira, rengainant sa dague. Tôt ou tard, le mot passerait et on cesserait de l’ennuyer. Elle contrôla du regard un groupe de femmes qui bavardaient un peu plus loin : inévitablement, elles se pâmaient devant Kale… C’était lassant. Elle tourna la tête et constata que son ami leur renvoyait un charmant sourire, qui les fit pouffer, se poussant du coude. L’une des femmes fit un signe discret, et Kale hocha brièvement la tête, sou sourire s’élargissant.

Et allez donc, encore une nouvelle amante… présuma Kisanna. C’est déprimant.

Écœurée, elle détourna son attention vers d’autres personnes, ignorant le nœud qui lui serrait la poitrine. Ils étaient amis et coéquipiers. Rien de plus.

L’hiver se termina, et le printemps revint. Kale ne pouvait plus marcher dans les rues sans qu’une femme ou l’autre le salue amicalement : ça en devenait gênant…

— Et si nous devenions des indépendants ? suggéra Nours, ce soir-là, tandis qu’ils buvaient tranquillement une chope, malgré le visage rembruni de Kale. Se passant la main dans ses cheveux fraîchement taillés en brosse, le colosse poursuivit :

— Nous aurions le choix total de nos missions !

Kisanna hocha la tête en signe d’acquiescement, et Kale lui tapa sur l’épaule :

— Bonne idée, mon vieux ! On fait comme ça !

Ainsi fut fait. Après démissionné de la compagnie, le trio se rendit à l’antenne locale de la Guilde des Mercenaires et procédèrent au changement de leur statut.

Petit à petit, ils se firent un nom en tant qu’indépendants polyvalents.

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