Chapitre 10. Découvertes et passage.
Ma mère sort la première et se retrouve nez à nez avec le maître. Un grand étonnement se lit sur son visage. Elle se retourne vers moi puis vers lui. Son étonnement passe à la colère.
— Mais tu es sérieux là ? Qu'es-ce que tu fais là ? Tu viens la chercher c'est ça ? Je t'interdis de la toucher !
_ Tu n'y peux rien ma chère. Ma... Pardon, ta fille est désormais liée à moi. Tu sais, quand on est enfermé il peut se passer bien des choses. Même si tu m'interdis maintenant de l'approcher, je ne t'écouterais pas pour autant. Elle est libre de faire ce qu'elle veut. Ici c'est moi le maître mais c'est elle l'Elue donc tu ne peux rien contre elle. C'est bien parce qu'elle a insisté pour venir te chercher que je te laisse partir avec elle. Vu l'accueil chaleureux que tu m'as si gentiment offert, je t'aurais probablement laissée enfermée. D'ailleurs moi aussi, je suis content de te revoir Essindra. Je ne savais pas où tu te cachais. Tu as une collègue très sympathique. Si jamais tu la revois un jour, remercie là de ma part.
_ Espèce de monstre, que lui as-tu fait ?
_ Hahahahah !!
C'est un rire grave, fort. Il ne lui répond pas, ses yeux ont quitté ma mère pour se poser sur moi. Lorsqu'il reprend la parole c'est à moi qu'il s'adresse même si ils ont rebasculé sur ma mère.
— Sélène, vu ta tête par rapport aux paroles de ta maman et vu le caractère de celle-ci, elle n'a rien dû te dire. Hmm... Ça me fait penser que je ne me suis pas présenté. Je m'appe...
_ NON ! Tais-toi ! Je ne veux pas que tu prononces ton nom !
Ma mère à les larmes au bord des yeux mais c'est de la colère. Je crois que j'ai compris qui il est. Je veux l'entendre le dire. J'ai peur, cependant. Je tremble, je commence à avoir une crampe à l'estomac. Je l'incite à poursuive.
— Comment t'appelles-tu ?
Il esquisse un sourire qui est destiné à ma mère, qui se retourne et me regarde, horrifiée. Avant qu'il ne réponde elle ajoute :
— Tu, tu es sure que tu veux le savoir ?
_ Oui.
_ Très bien reprend-t-il, je me nomme Monsieur Carlson.
Bon, je suis rassurée, ce n'est pas mon père, nous n'avons pas le même nom de famille. Remarque, j'ai celui de ma mère ; Miller. Mais il ne m'a pas donné son prénom. Je hausse les épaules, comme si je m'en fichais. Il est vraiment temps de partir. Je prends la main de ma mère et la traine vers l'ascenseur. Heureusement, personne ne l'a pris pendant ce temps. Nous rentrons dedans, en nous serrant un peu car il est trop petit pour supporter cinq personnes. Je suis serrée entre ma mère et lui. Son odeur est étrange, à la fois douce et légèrement âpre. Nous descendons au deuxième étage et nous suivons le chemin que j'avais emprunté à l'aller. Carlson nous guide jusqu'a son bureau, toujours ouvert et toujours rempli de gens. Je distingue, parmi cette masse de corps serrés, la silhouette de David. Il m'a aussi vue et me fait coucou de la main, je lui réponds. Il se détourne pour parler avec un garçon à côté de lui. L'Ancien vient nous rejoindre, il me dit que je dois être la dernière personne à rentrer dans le Portail de Sang car Monsieur Carlson passe en premier et si je passe après lui, le Portail se refermera et il disparaîtra. Je me faufile entre les gens pour pouvoir chercher mon ami. Il me présente le jeune homme avec qui il discutait, Eric. Ce dernier est impressionné que je sois l'Elue. David n'en revient pas non plus. Il fait un geste étrange, il me fait un câlin et dépose un baiser sur ma joue. Je le regarde avec de grands yeux et me sens rougir. L'Ancien invite Carlson à passer en premier. Il met un pied dans le Portail, respire un bon coup et disparaît. Tous les gens dans la pièce hurlent de joie. L'Ancien invite chacun à passer un par un. Je m'écarte de David et le pousse pour le faire passer devant tout le monde.
— A tout-a l'heure, lui soufflé-je à l'oreille.
_ Ouais, affirme t-il en rougissant.
Il part. Les uns après les autres ils sont envoyés de l'autre côté. Pendant ce temps Eric me dit qu'il est capable de manipuler le métal avec des aimants et de le plier. J'ai décidé que son surnom serait Magnéto. Bientôt, il ne reste plus que l'Ancien, Sonia et moi. Le bureau me paraît plus grand. Il me dit que je dois passer après lui et demande à Sonia de sortit et verrouiller le bureau à jamais. Silencieusement elle obéit. Je la remercie pour ce qu'elle a fait pour moi. Elle me fait un sourire triste, me dit adieu et bon courage pour la suite. Quand je me retourne, l'Ancien est déjà parti. Je passe une main, je ne sens rien, ni vent ni mur. Je passe alors mon pied et c'est le même résultat, pas de sol, rien, du vide, le néant, mais pour autant je ne tombe pas. Grande inspiration, un, deux, trois, hop. J'ouvre mes yeux que j'avais fermés par peur. Je sursaute en voyant David et Eric devant moi.
— Bouh ! me fait-il avec un train de retard.
Nous explosons tous de rire. Tellement que j'en ai mal au ventre, je ne savais pas que je pouvais rire autant. Raven vient vers nous, se demandant ce qu'il se passe, et je la présente à mes amis. Elle est gentille, eux drôles et tout aussi sympathiques, le courant passe très bien entre eux. Profitant qu'ils fassent connaissance, j'examine les lieux. C'est assez sombre mais au dessus de nous il y a une plaque qui diffuse la lumière de dehors. C'est pourquoi je n'avais pas remarqué la faible luminosité des alentours. Nous sommes sur une grande plaque de béton, entre deux fossés remplis de déchets et d'eau sale. Une femme s'approche de moi, elle s'appelle Lilianna, elle me dit de toujours avoir confiance en moi et de toujours croire l'Ancien. Elle s'en va en courant et je n'ai pas le temps de réagir. J'attrape David par le coude afin qu'il puisse m'aider à comprendre ces étranges paroles. Mais il se dégage de mon emprise, se dirige vers l'un des fossés, se plie en deux en se tenant le ventre. Trois spasmes le parcourent avant qu'il ne vomisse bruyamment. Un silence se fait soudain et tout le monde se tourne vers lui. Son père, l'Ancien et moi accourons vers lui.
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