Chapitre 11
En cette soirée, la taverne du requin brun était aussi enjouée qu’à son habitude. La musique résonnait de chants des marins. La plupart venaient se détendre après une journée entière de travail au port. Les senteurs d’alcools et de poissons parsemaient le lieu alors que les lanternes de l’espace mouvaient les ombres des quelques personnes qui dansaient au milieu du bar. Jack attendait Sir Pinkman accompagné de Robert, son ami barman et Susan Moody.
-Voici pour vous, M’sieur, Dame, dit le barman en leur apportant trois boissons alcoolisés. Deux bières pour messieurs et du rhum pour madame.
Puis, celui-ci retourna à son comptoir avec un sourire forcé.
-Quel endroit pourri, rouspéta Robert. Ça ne vaut pas mon bar. Ya pas à dire, les marins sont vraiment grossiers en décoration.
Jack n’écoutait qu’à peine son ami, dévisageant Susan alors qu’elle buvait rapidement son verre au liquide brun.
-Tu l’as trouvé où cette femme pirate ? demanda Jack en se tournant vers son ami barman.
-C’est une longue histoire, disons qu’elle m’a aidé récemment à me sortir du pétrin.
-Pour la remercier, tu l’héberges.
-C’est provisoire, rétorqua la jeune femme.
- En attendant elle m’aide bien au bar. Tu sais, depuis le départ de Katie, j’ai un peu du mal à faire tourner la boutique en plus de mes deux garçons.
-On dirait que tu as trouvé ton bonheur.
-Faudra bien que je finisse par embaucher un gars du coin un de ces jours.
-N’empêche que je ne t’ai jamais à Saltship auparavant, Susan Moody, questionnait Jack avec un regard qui le caractérisait que trop bien.
-Qu’est-ce que tu insinues, demanda la jeune brune, le ton grave.
-Ecoutez en parlera de ça plus tard si ça vous dérange pas, calma Robert. Le poisson arrive.
Les battants du bar tanguèrent alors que Sir Pinkman, vêtu d’un costume propre, comme habituellement, cherchait le détective du regard.
Dans la nuée des tenues sales et bariolées, le représentant dépeignait avec son air d’homme d’affaires de l’Ouest de Saltship. Goldhand finit par lui faire un signe de la main pour l’invité à leur table. Pinkman s’installa rapidement sous les regards méprisants des marins du bar.
-Quel endroit irrespirable. Je ne comprendrais jamais Donovan !
-Bonsoir Sir, commença Jack. Je vous présente Robert Rashford et Susan Moody, ils vont nous aider pour ce soir.
-Fort bien. Je suis tout à fait prêt pour aider Monsieur Newton à atteindre la mairie.
Sous la demande de l’homme, les quatre individus quittèrent leur table avant de laisser quelques pièces au barman. Jack Goldhand décida alors d’emmener Sir Pinkman à l’endroit où il avait découvert le corps de Lucie Sullyvan. En effet, c’était selon lui un endroit clé de l’enquête.
Après quelques minutes de marches, Jack stoppa la marche de nos amis.
L’air était glacial et aucun bruit ne régnait à l’orée du port de l’Est. Seul, Le doux son de l’eau animait la nuit de Saltship. L’endroit se tenait près des évacuations d’eau de la ville mais aussi du quartier pourpre. En effet, c’était un embranchement entre le port de l’Est mais aussi le port abandonné de l’Est.
Jack et les autres se postèrent alors derrière des caisses de chargement pour les bateaux du port. Ainsi, le détective put exposer son plan.
-Monsieur Pinkman, vous allez vous diriger vers le milieu de cette place et si possible vous approcher le plus possible des évacuations d’eau et du fleuve de la vapeur bleu. Faites mine d’attendre quelqu’un ou installer vous sur un rebord pour écrire quelques notes. Dès lors que nous verrons du mouvement, nous nous ruerons sur votre assaillant.
Sous la demi-approbation de l’homme en costume, tout le monde se mise en place.
Plus d’une demi-heure passa, mais aucune personne n’en voulait à la vie de Sir Pinkman. Celui-ci écrivait sur un livre brun, lançant des regards craintifs autour de lui.
-J’espère que ton tueur va arriver avant demain matin. J’ai pas toute la nuit, expliqua Robert.
-Je te promets qu’on partira avant le lever du jour, d’accord ? dit Jack.
-Y a intérêt, ouais. Qui va s’occuper de mes gosses, et du bar, et qui va payer le ministère de Saltship ?
Alors que les deux hommes se chamaillèrent sous le regard de Susan, quelques mouvements se distinguaient près des évacuations d’eau de la ville. Des tintements métalliques résonnèrent au travers des conduits ce qui alerta Jack à sortir son arme. Ses deux acolytes sortirent de même, un harpon pour Robert et une arbalète mécanique pour Susan. Sir Pinkman avait entendu lui aussi le vacarme mais, il tenta de ne pas y faire attention, griffonnant frénétiquement sur son bloc-notes.
Soudain, deux lueurs dorées transperçèrent les filaments d’eau. Une premier tentacule sortit pour s’accrocher sur la paroi métallique des tuyaux. Puis, une deuxième, une troisième et une quatrième avant qu’une tête gigantesque n'apparraisse, jugeant de ses yeux ocre l’homme en costume, assis sur le rebord du fleuve.
Les trois amis s'approchèrent doucement du pauvre Pinkman qui appelait à l’aide Jack et ses deux compères. Le crâne de la bête était caché dans la pénombre mais, il était possible d’observer son gigantisme ainsi que sa forme ovale. La bestiole recrachée des nuages de fumées comme si celle-ci elle fumait une pipe gigantesque. Robert et Susan n’en croyait pas leurs yeux alors que Jack reconnaissait son assaillant dans le port abandonné. Il se demanda comment la créature avait réchappé à leur dernier combat.
-C’est cette créature qui m’a attaqué dans le port ! cria Jack à ses amis.
-Nom d’une mouette ivre, comment on va abattre ce monstre, dit Robert.
Susan soupira avant de sortir quelques bombes artisanales. Avant même que la créature gigantesque ne puisse entourée de ses pattes Sir Pinkman, la femme aux cheveux noirs avait lancé quelques-unes de ses créations. Elles explosèrent dans un vacarme assourdissant et firent valser la pieuvre sur ses appuis. L’immense animal marin détourna son attention de Pinkman pour se diriger vers ses assaillants.
-Bravo madame Moody ! On n’est pas dans la vapeur maintenant ! Ricana Robert.
De ses nombreux tentacules, la chose glissa contre le sol pavé vers nos amis. Jack Goldhand tira de plus belle sur la bestiole rampante alors que Susan Moody utilisait son arbalète mécanique pour viser les yeux de la bête. Robert, quant à lui, accourra sur l’animal marin armé de son harpon. D’un coup inopportun de patte, la créature envoya le barman au loin chuté contre un mur de briques. Jack esquiva tant bien que mal les assauts de l’animal. Un tentacule crochu le loupa de peu, le détective sorta son couteau avant de le planter dans la patte. Il sentit son arme s’accrocher entre deux plaques qui semblaient métallique. La bête bougea son extrémité mais, le détective resta accroché à celle-ci.
Il vola entre les tentacules grinçants de l’animal, espérant que son ami Susan ne lui tirait pas dessus. La femme en tunique noir profita de ce moment d’étonnement de la part de l’animal pour viser avec prudence les yeux de la bête marine. Elle encocha une flèche argentée avant de retenir sa respiration puis elle décocha le projectile qui se logea dans l’un des deux yeux de l’animal. L’œil touché perda de sa lueur jaune avant de tomber face contre le sol en pierre. Jack put enfin extirper son poignard. Il aperçut l’énorme pieuvre au sol, sans aucun mouvement. Il s’approcha du crâne de la bête et vit quelque chose d’étrange.
En effet, au travers des deux grands yeux de l’animal, Jack vit un homme qui se tordait de douleur. Soudain, la tête de la pieuvre s’ouvrit en deux pour présenter un homme, une flèche argentée logé dans la poitrine. Jack n’y comprit rien alors que l’homme n’émettait plus aucun son. Sans avoir besoin de lui poser de question, Jack reconnu le sceau pourpre du cartel de la pieuvre rouge sur ses habits. Le détective chuta entre les tentacules de la pieuvre qui n’étaient autre qu’une machine formée de plaque de métal brun.
Goldhand sembla perdu dans son analyse alors que Susan aidait notre ami Robert à se relever de sa chute. Sir Pinkman, caché derrière quelques caisses, rejoignit les trois personnes après s’être assuré que la créature ne bougeait plus. Le politique ôta la crasse qui s’était incrusté sur son costume chic.
-Vous êtes de fiers guerriers, mes amis ! Mais, qu’est ce que tous cela veut dire ?
-Une pieuvre géante pour tuer des partisans de Sir Thaddeus Newton, commença Jack. Tout cela orchestré par le cartel. Qu’est-ce que j’ai loupé. C’est donc le cartel qui a tenté de me tuer avec cette machine.
Goldhand s’approcha alors du visage de l’homme dans le cockpit qui était déjà mort, baignant dans son propre sang. Jack tenta de trouver sur l’homme des traces.
Après quelques instants, le détective finit par se relever, les mains tâchées de rouge. Il inspecta son revolver doré, le rechargea avant de se diriger, déterminé vers le quartier pourpre.
-Il va encore faire une bêtise, expliqua Robert, du sang sur le crâne.
- On ne devrait pas l’arrêter ? demanda Susan.
- Personne ne peut l’arrêter quand ça se mêle au cartel de la pieuvre rouge.
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