Mercredi 2 juillet

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Kremer est dans le bureau de Munoz pour faire le point sur différents dossiers. Elle est toujours aussi surprise de ne trouver aucun objet personnel, pas même une photo, dans son bureau. Un réflexe de psychiatre, se dit-elle, avant de se reconcentrer sur la discussion.

— Passons maintenant au cas très spécial de nos mystérieux jumeaux. On peut dire qu'ils ont eu de la chance de s'en sortir avec des blessures aussi bénignes. Une semaine de surveillance, c'est amplement suffisant. Ils sont jeunes et en bonne condition physique. Je ne vois aucune raison de les garder plus longtemps. De mon point de vue, ils sont en condition de pouvoir sortir.

— Aucun d'eux n'a fait le moindre progrès depuis le jour de leur arrivée. Aucun souvenir, même le plus insignifiant. C'est plutôt inhabituel mais pas totalement exceptionnel. Nous ne savons toujours rien sur leurs identités ?

— Toujours rien du côté de la police. Cet inspecteur m'a encore appelé ce matin. Un vrai chien de chasse qui ne lâche pas sa proie, celui-là. Penses-tu qu'ils puissent quitter l'hôpital sans avoir retrouvé le moindre souvenir ?

— Il m'a également appelé, lui répond la psychiatre. Aucun proche identifié qui pourrait prendre soin d'eux. La police nous a donné une adresse sans pour autant être capable de nous dire lequel de deux y réside. Cela m'inquiète. On ne peut pas dire que nous ayons là les conditions idéales pour leurs guérisons. Personne autour d'eux qui pourrait les aider à se reconstruire, mais nous ne pouvons pas les garder indéfiniment ici.

— Le patient de la chambre 238 pourrait sortir dès demain. En ce qui me concerne bien entendu. L'avis de cet inspecteur n'a pas en entrer en ligne de compte. S'ils sont réellement inculpés de quelque chose, il nous l'aurait dit.

— Je pense qu'il est préférable qu'ils sortent ensemble. Se retrouver dans un milieu plus familier en même temps ne peut d'augmenter les chances qu'ils retrouvent leurs mémoires. Par un effet de stimulation.

— Dans ce cas, je propose que nous les gardions jusqu'à la fin de la semaine. Peut-être que d'ici là, au moins un des deux aura retrouvé quelques souvenirs.

— Je vais continuer à les suivre en consultation d'ici là. Je vais convenir d'un protocole avec eux le temps de trouver quelqu'un qui pourrait les prendre en charge. Je m'occupe de leur sortie.

— Parfait ! Faisons comme ça, lui répond le docteur Munoz en conclusion. Passons au cas de madame Silano.

— Inspecteur Morvan.

— Bonjour inspecteur, docteur Kremer de l'hôpital. Je vous appelle au sujet des frères Florent.

— Ont-ils retrouvé leurs mémoires ? Quelques souvenirs au moins ? interroge-t-il aussitôt.

— Hélas, pas encore. Toutefois, leur état de santé permet d'envisager leur sortie.

Inquiet à l'idée de leur liberté soudaine alors qu'il n'a toujours rien concernant leurs identités, Morvan reste silencieux.

— Inspecteur ! Vous êtes toujours là. Allô.

— Oui, oui, je vous entends. Vous êtes certaines qu'ils sont en état de sortir ?

— Vous êtes médecin ?

— Non, bien entendu. Je voulais dire par là que du fait qu'ils ne se souviennent de rien...

— Se retrouver dans un milieu familier ne pourra que faciliter le chemin vers la guérison.

— Très bien. Cette décision est de votre ressort. Quand vont-ils sortir de l'hôpital ?

— Ils sortiront ce samedi. Ensemble.

— Ensemble ! s'exclame Morvan.

— Le docteur Munoz et moi-même avons décidé que cela devrait les aider. L'épreuve sera plus facile à gérer pour eux, s'ils sont ensemble.

— Très bien, je vous remercie de m'avoir prévenu.

— En fait, je vous appelais pour vous demander un service. Je n'ai aucune obligation de vous prévenir de leur sortie. A moins que vous n'ayez un motif d'inculpation depuis notre dernière rencontre, bien entendu.

Faute de réponse, elle prend ce silence comme une confirmation et reprend.

— J'imagine que si cela était le cas, vous n'auriez pas attendu pour revenir. J'en déduis que, de votre côté, vous n'avez pas avancé sur leur identification.

— Je vous le confirme malheureusement. J'ai toutefois la conviction que...

— Voilà, le coupe-t-elle. Pourriez-vous faire en sorte que nous puissions récupérer des vêtements pour leur sortie. Ceux qu'ils portaient en arrivant ont bien entendu été détruits. D'après ce que vous avez dit, l'un d'eux habite à cette adresse. Comme ils ont la même corpulence, c'est le moyen le plus simple de leur fournir, à tous les deux, des vêtements convenables pour leurs sorties. Personne n'a ici l'autorité pour pénétrer dans leur appartement. J'imagine que de votre côté, cela ne pose pas de problème.

— C'est-à-dire qu'il faudrait normalement une décision judiciaire pour cela.

— Je ne vous parle pas d'une perquisition. Je ne sais pas à quel stade en est votre enquête, mais cela ne me semble pas constituer une infraction.

— Prenez-vous la police pour un service de livraison docteur ? Et d'ailleurs, les actions entreprises durant mon enquête ne vous concernent pas et ne peuvent être communiquées.

— J'imagine que vous vous y êtes déjà rendu pour votre enquête.

— C'est exact, mais...

Ne voulant pas entrer sur un terrain glissant, il préfère en rester là.

— Soit. Je peux vous rendre ce service. Je consens à laisser quelqu'un de vos services entrer sous ma surveillance, le temps de prendre les affaires nécessaires, mais je ne prends pas en charge les détails ni la livraison. Je vous remettrai par la même occasion une clé de l'appartement. Pourriez-vous demander à l'infirmière Aguettaz de se charger de cette tâche ? ajoute-t-il.

— Très bien, répond-elle après une petite hésitation. Je vois si elle travaille demain. Quelle heure vous conviendrait ?

— Disons après demain à 15h.

— C'est entendu. Dans tous les cas, quelqu'un sera à l'entrée de l'immeuble vendredi à 15h. L'adresse sur le dossier est 32 rue des chênes. Vous me confirmez que c'est correct ?

— C'est bien cela. Je vous laisse, une urgence. Bonne fin d'après-midi, conclut-il en raccrochant aussitôt.

Pas mécontent d'avoir une occasion d'examiner le comportement de l'infirmière dans l'appartement. Il a bien l'intention de capter la moindre de ses réactions et tenter de la confondre. Plus que jamais persuadé qu'elle sait quelque chose. J'en profiterai pour remettre discrètement le portefeuille où je l'ai trouvé. Il ne me sert à rien et je ne vois pas comment je pourrais justifier de sa possession auprès de Peltier.

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