– Tu es en retard ! Signala-t-elle en un reproche à peine voilé.

Marcus passa la tête par la fenêtre de son Acura NSX noire, retira ses lunettes de soleil et lui sourit.

– Je suis pile à l'heure.

Elle monta à l'arrière et commença à arranger ses cheveux décoiffés.

– Tu sais qu'en pleine nuit, les lunettes de soleil te donnent seulement l'air pédant ?

Marcus sourit en lui lançant un regard dans le rétroviseur.

– Je sais, mais étant donné que tu es mon unique cliente, il n'y a que toi que ça dérange...

Elle lui jeta un coup d’œil appuyé à travers la vitre avant de lui rendre son sourire moqueur. Les jambes repliées contre sa poitrine, les yeux rivés sur la ville plongée dans l'obscurité, elle se mit à regarder les lumières défiler comme des lucioles, dansant devant ses yeux fatigués. Un soupir s'accrocha à ses lèvres purpurines, mais elle n'eut pas le cœur à le laisser s'échapper.

– Enlève tes pieds, veux-tu, il s'agit de sièges en cuir, figure-toi !

Lentement, elle retira ses bottines et les jeta plus loin, sur le sol de la voiture. Elle entendit Marcus grommeler quelques paroles insaisissables mais, déjà, elle fermait les yeux, bercée par le ronronnement du moteur et l'agile conduite de son chauffeur.

Ce furent les bruits de pas dans la neige qui la réveillèrent. La voiture était à l'arrêt, et ce depuis un moment à en juger par le froid qui s'était installé. Elle frissonna, se leva, et se pencha vers le siège conducteur. Les clés étaient sur le contact. Bizarre. Elle se recula, attrapa les bottines qu'elle enfila à la hâte, et sortit. L'air froid mordit instantanément ses joues déjà rosées, et le vent balaya sa chevelure.

– Marcus, t'es parti pisser ?

Elle tourna sur elle-même. Visiblement, ils avaient quitté la ville, elle ne reconnaissait pas l'endroit. A l'orée d'une forêt, la voiture avait été laissée à l'abandon sur le bas côté. La lune filtrait à travers les nuages, apportant une vague lumière aux opaques ténèbres de la nuit ; les lueurs se répercutaient sur les cristaux de glace jonchant le sol, émettant aux alentours un curieux jeu d'éclats rayonnants. Pourtant, ce ne fut pas ce mélange saisissant qui attira son attention, mais le labyrinthe qui se dressait au centre du paysage. Avec une prudente lenteur, elle s'en approcha.

Une fine couche de neige en recouvrait les hautes haies, et quelques lanternes avaient été accrochées à des sapins entourant l'entrée. Chaleureux, l'endroit l'attirait. Doucement, elle s'en approcha, humant dans l'air comme une odeur de pain d'épice. Debout devant cette haute alcôve, la jeune femme se sentait minuscule. Levant la tête vers la cime des arbres qui encadraient le passage, elle ferma les yeux, étourdie. Un sourire fleurit sur ses lèvres et, déterminée, elle fit un pas en avant.

Alors qu'elle s'apprêtait à en franchir le seuil, un vent glacial vint balayer les flammes tremblotantes des lanternes qui s'éteignirent ; la lune en profita pour aller se cacher derrière d'épais nuages, plongeant les lieux dans la pénombre. Immobile, la jeune femme frissonna, tournant la tête à droite puis à gauche dans l'espoir d’apercevoir une lueur à l'horizon. Mais tout n'était que ténèbres.

Une main, soudain, s'abattit sur son épaule, la faisant sursauter. Prête à se défendre, elle esquissa un mouvement en direction de l'arme dissimulée dans la doublure de sa veste noire mais, déjà, on la projetait à terre, l'immobilisant fermement sur le sol. Surprise, elle laissa échapper un gémissement de douleur. Tout contre sa nuque, elle sentit alors le souffle chaud d'un homme qui se penchait à son oreille. Elle percevait, d'ici, les effluves de son haleine corsée.

Son cœur rugit contre sa poitrine.

« Alice... » l'entendit-elle susurrer d'une voix rauque. « Alice... »

A SUIVRE.