Journal d'un monde qui s'accroche comme il peut
de Miguel Lopez
Nous voici au bord de la falaise. Un pas de plus et c'est la chute. Et dans notre dos, le vent qui pousse.
Si je filais la métaphore, j'adopterais les accents épiques d'un Victor Hugo sans talent mais les besoins de clarté l'emportent dorénavant sur les effets de style et les simples slogans. Le vent dans notre dos, c'est les médias complices, les prétendus journalistes recyclés chroniqueurs-propagandistes qui illustrent l'étouffement à venir que pratiquera l'extrême-droite à l'encontre des oppositions, des dissidences, des révolutionnaires, des réformistes ou des rêveurs. Et je ne parle pas de leur véritable projet politique mais des moyens que l'extrême-droite a toujours su déployer pour se maintenir au pouvoir, du nazisme allemand à l'ultra-droite des Orban ou Meloni, en passant par les fascistes de Mussolini, les phalanges de Franco ou la terreur de Pinochet.
L'avenir paraît sombre et poisseux, un avenir de violence sociale, de violence tout court, et de haine qui s'exprime au quotidien, sur tous les tons, à l'encontre des plus petits, des plus faibles, des opprimés, ceux que l'Etat de droit a vocation à défendre, les gueules d'Arabe, les tronches de Roms, les « pas d'ici », les migrants, les faciès, les métèques, dont je suis et me revendique sans honte, sans fierté, mais la peur au ventre.
L'avenir s'annonce impitoyable à l'égard des femmes, que le FN/RN prétend défendre en souriant face caméra mais en omettant de voter pour la défense de l'IVG, ou pour une meilleure égalité des droits entre les hommes et les femmes, ou encore pour une égalité des salaires au-delà des genres. L'avenir bousculera également les homosexuel.le.s, les trans, toute la communauté LGBTQUIA+. Il y aura des razzias, des passages à tabac, puis des camps, des convois et tout ce qui s'en suit. Je le sais, vous le savez, nous le savons tous. Cette histoire a déjà été racontée par d'autres, les parents de nos parents, dans ce même pays où les descendants de Pétain, de l'OAS colonialiste fondèrent justement le Front National, certes rebaptisé, ripoliné mais toujours raciste, antisémite, homophobe, violent, haineux et criminel.
Ils commenceront par se couler dans les institutions, dans ce monstre froid qu'est l'Etat – pour reprendre le mot de Weber – en useront comme d'une marionnette vidée de sa substance par l'actuel irresponsable qui, paraît-il, nous dirige, et détruiront les liens sociaux. Ils commenceront par les plus petits, les associations de quartier, les gamins des cités, les femmes voilées. Il y a du pogrom dans l'air, c'est moi qui vous le dis, et le fond de l'air est frais. Ils briseront les verrous institutionnels, casseront le peu qui reste à casser et nous aurons bientôt des morts, victimes de milices, de skins, de flics. Les figures médiatiques, devenues des symboles de la liberté d'expression, seront les premières visées. Je pense notamment à Guillaume Meurice, Aymeric Lompret, aux chefs des partis de gauches, à Hadama Traoré et à n'importe quelle personnalité racisée (et moi non plus je n'aime pas ce mot), il suffit de voir ce qu'a subi récemment Najat Vallaud-Belkacem pour s'en convaincre.
L'extrême-droite au pouvoir, je crois que la plupart d'entre nous a oublié précisément ce que cela veut dire : leur parole n'explique rien, ne décrit rien, ne montre rien. Leurs mots ne disent rien, n'expriment rien, ils sont là pour cacher, voiler, enfumer. Ne croyez rien de ce qu'ils disent. Leur projet n'a rien de démocratique. Ce n'est pas un partage ou la construction du lien. L'extrême-droite au pouvoir, c'est une botte qui t'écrase la gueule jusqu'à ce qu'il ne reste rien de toi. Quels que soient leurs mots, quelles que soient leurs étranges promesses, nous constatons toutes et tous qu'elles se contredisent, s'annulent ou se ridiculisent. Nous savons pourtant qu'ils haïssent avec la pugnacité d'une puce de lit, qu'ils ne reculent devant rien, qu'ils musellent et taisent, qu'ils brisent, détruisent et matraquent. L'extrême-droite au pouvoir, c'est la victoire d'une irrationalité dérangeante et dérangée. Il n'y aura plus de réchauffement climatique, il n'y aura plus de racisme, il n'y aura plus de violences policières parce que l'on nous intimera l'ordre d'y croire, parce que lorsque nous tâcherons d'élever la voix pour dire le contraire, on nous frappera à mort, on nous coupera la langue et les mains, et l'affaire sera classée sans suite et le responsable de notre mort ou de notre mutilation bénéficiera d'un non-lieu ou d'indulgence pour légitime défense. Vous croyez que j'exagère ? Regardez ce qui s'est passé sous Macron et multipliez-moi ça par dix, par vingt, par mille.
Que pouvons-nous attendre de l'irrationnel s'il s'empare des manettes ? Tout. N'importe quoi. Ils n'auront de limites que celles que leur accorde la constitution et ils veulent l'amender, la modifier, la détruire. C'est dans l'ADN du RN/FN. Parti fondé par d'anciens Waffen SS, d'anciens collabos, d'anciens de l'OAS. Leur président historique, Jean-Marie Le Pen, a lui-même torturé pendant la guerre d'Algérie et n'était jamais à court de provocations antisémites pour lesquelles il a été condamné à plusieurs reprises. Sa fille, Marine, fut sa directrice de campagne avant de devenir la présidente du parti et l'on connaît ses accointances avec l'extrême-droite européenne, avec des groupuscules, connus pour leurs violences urbaines, le GUD en premier chef. La filiation est directe, limpide, sans ambiguïté : un parti raciste, regorgeant d'admirateurs d'Hitler, de négationnistes, d'homophobes, d'antisémites, d'ennemis de l'intelligence et de la culture, les véritables pourfendeurs de la beauté, de l'espoir et de la joie de vivre.
L'avenir pourtant n'est pas écrit. Rien n'advient à l'avance et peu importent les sondages, les augures et les prédictions émises par les nouveaux flicaillons du système médiatique que nous héritons de Bolloré. Ils veulent détruire en nous l'humanité et l'aspiration à un monde meilleur mais nous sommes tous vivants. Un même sang rouge coule dans nos veines et nous aimons rire, danser, lire ou jouer. Nous aimons nous rassembler, échanger, travailler ensemble. Nous sommes le véritable tissu social de ce pays : des mélanges de mélanges qui se mélangeront encore demain. Nous avons maintenant besoin de réapprendre à vivre avec le sourire, avec l'envie de lever les yeux vers le ciel pour y voir autre chose que la tempête qui s'annonce ou le soleil de plomb qui signifie la mort de la planète. Nous avons besoin de vivre ensemble pour mieux évoluer chacun, apprendre les uns des autres et élever nos enfants dans l'amour et le respect plutôt que dans le rejet, l'ignorance, la barbarie.
Nous sommes censés vivre. Non plus survivre. Nous sommes censés tendre la main et non lever le bras droit.
Pas une voix pour le RN.
Votez Front Populaire, votez Ensemble-Renaissance, votez Horizon, votez même LR tant que Ciotti n'est pas dans la balance, mais refusez l'extrême-droite.
Dans dix, vingt ans, nos enfants nous jugeront avec le mépris de la jeunesse qui sait et qui a tout compris. Nous leur devons la beauté et l'espoir et l'Histoire nous juge déjà.
Fuerza. No pasaran. Résistance.
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