Vous avez sans doute remarqué, que lorsque l'on souhaite très fort quelque chose, on finit toujours par être exaucé? Quoique, les événements ne s'organisent peut être pas tout à fait comme on l'aurait souhaité. Mais bon... C'est déjà bien de réussir à obtenir au moins une petite part du gâteau. Quant à moi, je m'étais mis en tête d'obtenir le gâteau tout entier, parce que j'en avais assez de travailler dans cette bijouterie de quartier, où rien ne se passait, alors que j'avais obtenu un super diplôme de maquilleuse, qui était censé me permettre de voyager dans le monde entier, et de gagner beaucoup d'argent. Pour tout vous dire, en cinq ans il n'y a même pas eu un cambriolage dans cette bijouterie. Et le dernier remonte à si loin, que l'ancienne propriétaire ne se rappelait même plus des circonstances de cette agression, qui avait pourtant fait la une du journal local. C'est fou comme la mémoIre peut nous jouer des tours quelquefois,...
Moi j'avais toujours eu une bonne mémoire, et j'étais loin d'imaginer que mon univers allait totalement basculer, simplement parce que j'avais peur de décider moi-même de ma vie, et passais mon temps à m'autosaboter, pour au bout du compte agir en fonction de ce que ma famille avait décidé pour moi. Agir est un bien grand mot, car Il faut reconnaître que lorsque vous ne faites pas ce qu'il faut pour changer votre vie, alors que vous souffrez déjà, vous êtes totalement dépendant, et risquez fort de rentrer dans une spirale infernale, et de souffrir toujours un petit peu plus, jusqu'à l'apothéose. Ensuite, vous aurez le choix entre devenir une vraie victime, ou bien ruer dans les brancards. En vérité, c'est ce que je pensais, avant ce fameux soir où j'ai compris qu'il existe aussi une troisième possibilité, celle de disparaître, d'être rayée de la carte à tout jamais,...
Ce matin là, je m'étais réveillée avec la rage au corps, et bien décidée à tout envoyer promener, et à prendre une sorte d'année sabbatique, et peu importe ce qui arrivera. J'avais envie de changer de famille, tellement la mienne n'était qu'une source d'ennuis, de changer de nom, de changer d'emploi, et surtout de changer de ville, voir même de pays. Après tout, je parlais cinq langues, dont trois couramment, j'avais plusieurs cordes à mon arc, et surtout je n'avais ni enfants, ni attache d'aucune sorte. C'était un de ces matins où vous sentez qu'il va vous arriver quelque chose de fort, et où vous n'osez pas trop respirer, de peur de briser le sortilège, l'un de ces moments où vous sentez que votre coeur est en joie, et que l'herbe est plus verte, que le soleil brille davantage, que le ciel est plus bleu... Bref un moment béni.
Cependant ma journée de travail s'était passée comme d'habitude, le temps s'était étiré à l'infini, et je m'étais ennuyée à mourir. C'était presque l'heure de la fermeture, et je commençais à désespérer de voir une bonne fée m'expédier à l'autre bout de la Terre, d'un coup de baguette magique, quand une femme qui semblait tout droit sortie d'un film d'espionnage est entrée dans la bijouterie. Elle avait des cheveux coupés très courts, un visage émacié, de grands yeux de biche, et elle portait un tout petit attaché-case, qui était relié à son poignet gauche par une chaîne en vermeil et un bracelet serti de pierres précieuses de différentes couleurs. J'ai pensé que le contenu de l'attaché-case avait certainement plus de valeur que le bracelet, que les pierres étaient certainement fausses, mais lorsqu'elle a ouvert la malette, je n'ai vu que trois passeports à l'intérieur. Elle a posé les passeports sur le comptoir, et est repartie sans même me dire au revoir.