Je lui disais « vas-y, fais moi marrer! ». Et puis j’attendais qu’elle dise un truc, un mot, une blague, qui à coup sur me ferait partir en éclats.
Se « marrer » pour moi, c’était le mot qui signifiait le maximum du rire.
Quand je riais aux larmes, quand le rire était sonore comme une clochette, quand je ne pouvais plus le contrôler, c’était ça, que voulait dire dans mon esprit d’enfant, le terme « marrer ».
Je dois avouer qu'elle n'y arrivait pas trop mal.
Ma sœur, bien qu’étant mon tortionnaire officiel et à temps plein à cette époque, était également une complice, dont j’étais le public, officiel et à temps plein.
Bon sang, qu’est ce que j’ai aimé me « marrer »
Des fous rires d’enfant, pour un rien, pour une grimace, en passant par ceux qui sont un peu plus nerveux, devant une classe en présentant un exposé, où chaque mot chaque intonation sont perçus par le cerveau comme la meilleure des blagues jamais entendue.
Et puis viennent ceux du lycée, où soumis à une nervosité et une dose d’hormones insoutenables, on devient tout bonnement insupportables aux yeux et surtout aux oreilles de tout être vivant se trouvant à moins de 800m à la ronde. Les nerfs nous lâchaient et nous nous agitions en hurlant, gloussant, tels des troupeaux de dindons affolés.
je crois que nous avons hurlé de rire pour ne pas hurler de douleur.
Ce qui me semblait être un masque enfantin porté naïvement à l’époque s’oppose à moi aujourd’hui, de plein fouet dans la gueule je dois l’admettre, plus de 20 ans plus tard, comme ce que c’était en réalité : la pure et simple preuve d’une force inouïe.
Force dont nous avons tant douté.
Aujourd’hui, quand les nerfs lâchent, on se jette sur une clope, un xanax ou un verre. Parfois même les trois
Cela fait bien longtemps que je n’ai pas ri.