La vie expliquée aux nulles filles

Vous voulez que je vous explique la vie, moi ? Il y a pourtant plus simple et plus direct. Il suffit d'éconduire un prétendant pour avoir un diagnostic immédiat et personnalisé de "qu'est-ce qui ne va pas chez vous" et du "pourquoi jamais aucun mec n'acceptera d'être avec une merde pareille.". Néanmoins, pour celles (et éventuellement ceux) d'entre vous qui ne peuvent s'offrir le détour par la parole amère sage d'un homme vexé, je veux bien me fendre d'un résumé.

D'abord, faut arrêter de croire aux contes de fées. Toi, tu imagines que tu peux choisir, faire comme tu en as envie ? La réalité va vite te rattraper, ma cocotte. Non, mais… t'as vu ta gueule ? Le mec était d'accord pour te faire une fleur, et toi, tu t'es montée le chou. T'as les chevilles qui ont gonflé. D'ailleurs, tu fais de la rétention d'eau. Va te faire soigner. Tu viens de louper une occasion unique. Dans le futur, elle ferait bien de mettre de l'eau dans son vin, la petite dame.

J'interromps ce résumé sur le sens de la vie pour préciser que j'adoooore quand on m'appelle "ma cocotte" ou "ma petite dame", ça rajoute une touche de mépris charme ; c'est délicieux. Mais je m'égare. Il est temps de reprendre le sujet qui vous intéresse, soit, le discours de l'expert qui, faute d'avoir réussi à vous sauter séduire, fait contre mauvaise fortune bon cœur et vous offre son précieux temps et ses conseils pleins d'aigreur de sagesse dans le but de vous faire changer d'avis généreux de vous aiguiller dans votre développement personnel.

Quoique… en réalité, je ne sais pas si c'est une bonne idée que je vous raconte, car après toutes ces années, je n'ai visiblement toujours rien compris. De toute évidence, mon hobby, c'est de répéter inlassablement le même karma merdique. Tel un hamster dans sa roue, je passe de "fille géniale" à "espèce de connasse à peine potable, éventuellement baisable, mais alors dans le noir" en un simple coup de patte non.

La vérité, c'est que les hommes me proposent leur corps par charité. Ils cherchent simplement à m'honorer. Et voilà comment ils sont remerciés. Moi, je vous le dis : la bonté les perdra tous, à commencer par le corps de mon bon Lorenzo dont – c'est un euphémisme - les femmes abusent à longueur de temps. On me dit que le monde part en couille. Bah oui, mais il faut arrêter de faire des B.A. tout le temps aussi ! Et puis, franchement, les mecs, qu'est-ce que vous faites dehors, seuls, la nuit ? Il serait plus prudent de rester chez vous. Vous ne pouvez pas toujours compter sur la bêtise des moches pour retenir vos élans de bienveillance désintéressée !

Comme j'ai une tête de linotte, il y a un décompte que ces âmes secourables tiennent à me rappeler : c'est la fin de mes haricots. À chaque fois, je rate ma dernière chance. Même eux, ils venaient à reculons, comme on s'approche d'un gobelet humide sur un trottoir pour y jeter une piécette. L'inconscience – quoi d'autre ? - m'a retenue de les rattraper. Ça fait plus de trente ans que c'est la fin, mais je vais leur laisser ça : il y en aura bien un, un jour, qui aura raison.

Dans un huis clos où trois personnes se font le miroir l'un de l'autre, Sartre écrit "l'enfer, c'est les autres". J'ajouterai : "surtout quand on n'obéit pas". Des vendeuses de prêt-à-porter aux mecs, tous les miroirs sont capables de se muer en filtres insta "star de cinéma" ou "clodo". Pour avoir droit au premier filtre, c'est simple : soyez dociles. Si vous tenez à n'en faire qu'à votre tête, alors ne vous étonnez pas de ne pas faire l'unanimité.

Ah, mais pardon, à force de digressions, j'ai largement dépassé le temps imparti pour ce défi. Revenons à nos moutons : seuls les êtres dotés d'une intelligence exceptionnelle peuvent comprendre et apprécier ce texte. Grâce à vos commentaires, on pourra enfin trier les torchons et les serviettes. Il était temps.