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La naissance de la pire des légendes.
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Quand on déprime en se disant qu'on a touché le fond le destin vient parfois vous apporter une pelle
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Défi
Le sang goutte doucement de sa lame et abondamment de la gorge de sa victime. Il a attaqué de front sans laisser le temps de comprendre à celui qui agonise à présent à ses pieds. Sous sa courte barbe blanche souillée de rouge il le voit esquisser un sourire moqueur alors que son regard se fait vitreux et qu'il cesse de respirer. Aussitôt son dernier souffle rendu le grand miroir présent dans la chambre s'illumine, laissant apparaître à sa surface une version dix ans plus jeune de l'homme qui vient de mourir. À la grande surprise de son assassin, celle-ci semble s'adresser directement à lui. - Bon, commençons tout de suite par le cliché : si tu me vois ainsi c'est que je suis mort et que tu es très probablement celui ou celle qui m'a tué. Partant de ce postulat laisse-moi te dire une chose : "Va te faire foutre !", sauf si tu m'as euthanasié mais me connaissant ça m'étonnerait. Je ne sais pas comment j'ai fini, ce qui est assez frustrant, mais ça le serait encore plus de laisser l'oeuvre de ma vie tomber dans l'oubli. Alors sois gentil, assieds-toi et ouvre grand tes oreilles ça va pas être triste. Après un court instant de pause que, contrairement à ce qui avait été prévu, l'assass
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Défi
Deux hommes progressent sur cette route terne et obscure, lentement, silencieusement, presque religieusement. - Je suis un tueur, dit l'un d'eux pour briser ce silence qu'ils n'ont que trop supporté. - Pourquoi ? s'enquiert le second. - Pourquoi veux-tu cette réponse ? - Lorsque nous verrons le bout de ce chemin je doute de pouvoir l'entendre, je préfère que tu illumines tout de suite mes doutes. - Pourquoi penses-tu ne pouvoir entendre mes mots d'ici le terme de notre périble ? - Je discerne peu de choses, l'obscurité se joue de mes vieux yeux, toutefois je comprends que cette route mène à une fin bien méritée pour l'homme que je suis. - Et quel genre d'homme es-tu ? demande le tueur les yeux tournés vers son interlocuteur. - Tu ne réponds guère aux questions pour un homme qui pose presque les mêmes, souligne le vieil homme, une esquisse de sourire sur les lèvres. - Privilège de la jeunesse que de vouloir les réponses de ceux qui les ont précédés. Ils ont eu le temps d'y réfléchir et de les trouver. - Un point pour toi jeune insolent. Le silence revient, ils s'y retrouvent enveloppés, noyés. Le plus jeune le brise une seconde fois. - Tu comptes me donner une réponse ? - Je doute q
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Défi
PROFESSIONNALISME
Qu’est-ce qu’un professionnel ?
Certains diraient que c’est celui qui fait son travail proprement sans bavure, d’autres que c’est celui qui ne laisse aucune trace, d’autres encore que c’est celui qui exécute son contrat quoi qu’il arrive et quoi qu’il puisse lui en coûter. Personnellement je pense qu’un professionnel c’est peu de tout ça. Un professionnel c’est quelqu’un qui fait ce pourquoi on le paye sans poser de questions et qui survit pour recommencer. Être un tueur professionnel est un travail qui rapporte mais c’est également un travail extrêmement dangereux si on ne fait pas très, mais alors très, attention. Le service de sécurité employé par la cible, les forces de l’ordre, les services secrets, les associés, amis ou membres de la famille de la cible et même le commanditaire de l’exécution, ça fait beaucoup de personnes pouvant souhaiter la mort du professionnel engagé pour accomplir l‘assassinat.
Tueur professionnel c’est un métier dangereux, ingrat et difficile mais qui paye suffisamment pour que ceux qui choisissent cette voix continuent de bosser. Enfin continuent… Jusqu’au jour où ils évaluent mal les risques et y laissent leur peau. Ça va faire près de sept ans que je tue et je n’ai encore jamais entendu parler d’un professionnel qui a pu profiter de tout le fric qu’il avait gagné après avoir décidé de se ranger. Ce boulot offre une retraite confortable mais bien peu en profite, je sais de quoi je parle : j’ai personnellement exécuté un couple d’assassins qui avaient décidé de partir en lune de miel après cinq ans à deux consacrés au meurtre. Je les ai laissés profiter de leur nuit de noces, puis je les ai abattus tous les deux à bout portant dans leur sommeil, d’abord le mari puis sa femme. Je suis un salopard mais parfois je me surprends à faire preuve de considération, lorsque ma cible est un couple je leur laisse toujours une nuit ensemble avant d’agir. Il m’arrive aussi d’attendre quelques jours pour que ma cible puisse célébrer son anniversaire, ou les fêtes de Noël. Je ne sais pas trop pourquoi, mais je trouve ces petits détails importants. Tout aussi important, je n’utilise jamais de poisons ou d’explosifs, ce sont des méthodes que je juge odieuses et risquées. J’utilise principalement des armes à feux et en de très rares occasions des lames ou des fléchettes. Mon arme de prédilection restera toujours le fusil de précision, particulièrement les Dragounov. Je ne suis pas un tireur du niveau de Häyhä, Sidorenko ou Zaïtsev, mais je suis suffisamment doué pour que mes cibles ne se relèvent pas quand je prends mon temps. Et puis il faut bien admettre que j’adore cette sensation de contrôler la vie de quelqu’un qui ne sait même pas qu’il y a quelqu’un aux commandes. Si seulement je pouvais en parler à ma psy...
Ma montre laisse s’échapper un bip, j’ouvre les yeux et quitte mon fauteuil, l’heure a sonné il faut que je me mette en position.
Je parcours rapidement la distance qui sépare le fauteuil dans lequel j’attendais de mon poste de tir où m’attends mon fusil, un Dragounov. Je m’allonge sur le sol et prends mon arme en main, en faisant attention à ne pas le déplacer : ça m’a pris une heure pour le positionner de façon optimale.
Je colle mon œil à la lunette de visée et observe la salle de réunion située dans le bâtiment d'en face. Une pièce terne sans vie et sans décoration, sans même une plante verte ou une mauvaise peinture. A croire que cette pièce a été agencée spécifiquement pour les exécutions de contrat. A bien y réfléchir, considérant la raison de ma présence et au vu des individus qui vont arriver sous peu, en fait, ça ne m'étonnerait pas.
Ils arrivent une minute après mon installation : cinq hommes comme prévus. Je les identifie tous immédiatement.
Le premier s'appelle Jeremy Biret : second président directeur général de Biret Industries, le plus gros fournisseur d'armement lourd de toute l'Europe, possédant également des filiales dans de très nombreux domaines : de l'automobilisme à la pharmaceutique. L'homme en lui-même est un soixantenaire bien conservé au crâne recouvert d'implants capillaires et au costume hors de prix. Selon les rumeurs il ne recule devant rien pour accroître son marché : escroquerie, chantage, espionnage, meurtre... Tout est bon tant que cela lui est profitable.
Vient ensuite Nicolas Biret : le fils de l'actuel P.D.G, un jeune blanc-bec ressemblant à la caricature du gosse de riche arrogant qu'il est. Malgré ses défauts qui sont légion le jeune Biret est au moins aussi rusé que son père et n'a pas attendu d'empoigner les rênes de l'entreprise familiale pour se créer une sécurité financière. Il a épousé la fille du président d'une très importante compagnie d'assurance anglaise, président qui est mort dans un accident de voiture en rentrant de la cérémonie de mariage. Quant à sa femme, elle est morte lors du voyage de noces, apparemment dans un incident impliquant des alligators. Il y a des gens qui manquent de chance dans la vie, et le jeune Biret n'en fais pas partie, cette « double tragédie » lui a fait gagner une vraie fortune qui lui permet de mener la grande vie sans dépendre de l‘argent paternel.
Le troisième à entrer est William Lark : si les Biret ne sont que des hommes d'affaires dépourvus du moindre scrupule et tuant avec une certaine facilité, Lark lui est un authentique criminel, un trafiquant de classe international recherché dans plusieurs pays, fournissant tout ce que les gens sont prêts à acheter aux quatre coins du monde : drogues, diamants, humains, organes et bien sûr, armes. C'est le principal convoyeur de Biret Industries, son formidable réseau s'assurant que leurs engins de mort arrivent à la tonne dans des pays où il n'est pas bien vu de vendre de l'équipement lourd à tous les camps. Contrairement aux deux autres Lark est un homme de terrain qui n'hésite pas une seconde à se salir les mains, enfin, quand il sait qu'il ne risque pas d'y laisser sa peau. C'est sûrement pour toutes ces raisons qu'il est un associé et un ami proche du père Biret. Les infos que j’ai sur Willie n’indiquent pas de quel pays il vient, apparemment c’est quelque chose qu’il n’aime pas que les autres sachent, mais il y a un je-ne-sais-quoi dans son allure qui me dit qu’il vient de Floride ou de Russie. Et puis après tout je m’en fous.
Le quatrième est le plus dangereux de l’ensemble : Karl Wiegler. Un assassin professionnel, un expert dans l’art de donner la mort made in Germany. À la base c’était un « simple » tueur à gages qui a reçu pour consigne de liquider Biret senior peu après qu’il ait pris la tête de la compagnie, mais un gros chèque l’a convaincu de faire disparaître ses employeurs à la place. Je suis sûr qu’il y a beaucoup de ses confrères qui ont critiqué ce flagrant manque de conscience professionnelle, personnellement je comprends qu’un assassin cherche à avoir toujours plus et ce choix lui a plutôt réussi. Par la suite il a bossé comme tueur personnel de la famille Biret pendant des années avant de se calmer : rattrapé par l’âge il s’est mis à fournir des assassins à ceux qui payent, tout en devenant un associé officiel des Biret, ainsi qu’une sorte de garde du corps pour les cas extrêmes. Un tueur professionnel qui se transforme en boite d’intérim, lorsque j’ai appris ça j’en ai hurlé de rire. Mais après tout, c’est toujours mieux que de se faire descendre parce qu’on est plus assez en forme, je crois qu‘il a choppé une sorte de cancer des os, c‘est moche mais toujours moins vicelard que la cécité. Si un jour cette tuile m’arrive je pense que je me ferais sauter la cervelle, je pourrais pas vivre aveugle : non seulement je pourrais plus me servir des mes flingues mais en plus je devrais vivre en assisté la quasi-totalité du temps et ça, je pourrais jamais l’accepter. J’ai déjà assez de problème à gêrer.
Je me demande ce que ces quatre types choisiraient de faire s’ils devenaient subitement aveugles : Jeremy Biret, je suis sûr que ça changerait rien, à son âge et avec son pognon il tiendrait le choc peinard ; son fils ça serait sans doute plus dur, c’est difficile de frimer dans une jaguar quand on ne peut même pas toucher au volant, malgré son fric il est trop jeune et il a trop d’égo pour supporter un tel handicap, mais ça m’étonnerait aussi qu’il ait les tripes de se suicider, à mon avis il deviendrait une larve ; Lark, c’est sûr qu’il le supporterait pas, c’est un voyageur il a vu des endroits magnifiques et il voudra les revoir et en découvrir d’autres, lui je suis prêt à parier que s’il devient aveugle il fera le même choix que moi ; Wiegler lui c’est sûr qu’il continuera à vivre malgré la cécité, il est solide, la seule chose dont il a besoin pour vivre c’est d’avoir le contrôle et il n’a pas besoin de ses yeux pour contrôler son existence, c’est d’autant plus vrai maintenant qu’il délègue.
Le dernier arrivant est l’intrus, sûrement le type le plus intéressant du groupe : quelqu’un de bien. Un profiler se demanderait tout de suite ce qu’il fait là et la question serait légitime. Il s’agit de Vincent Malgor : une sorte d’activiste internationale qui a commencé à se faire connaître en critiquant ouvertement ceux que tout le monde applaudit en cachette. J’ai énormément d’infos sur lui, il n’a que deux défauts : il est né dans une famille de riches industriels, ce qui lui a apporté une présence au niveau médiatique mais aussi une suspicion d’hypocrisie plutôt malvenue, et surtout il parle beaucoup trop fort, dans tout les sens du terme. Il n’a pas encore trente ans et il a déjà suffisamment d’ennemis pour s’occuper pendant tout le reste de sa vie.
Il n’a pas encore attaqué le dossier Biret et Cie, pas encore à son niveau, trop gros poisson, il devait attendre d’avoir une plus grande influence dans le monde. Je me demande s’il se rend compte à quel point les personnes qui l’entourent sont dangereuses. Sûrement pas sinon il ne serait pas là, ou alors il est incroyablement stupide. Il doit penser que ce sont juste des hommes d’affaires pas très nets exploitant leurs employés et faisant en sorte de s’enrichir de plus en plus. Aucune chance qu’il se doute que les quatre individus qu’il a face à lui ont déjà tous tué quelqu’un, et à plusieurs reprises.
C’est facile de savoir de quoi ils vont parler : les plus riches vont féliciter le jeune Malgor pour ses récentes actions, puis ils vont subtilement glisser dans la conversation les dangers de ses prises de positions, l’importance de bien choisir amis et ennemis et lui faire comprendre qu’il est important d’avoir des alliés influents. Après je ne suis pas sûr du niveau de subtilité de la conversation : ça peut aller de la douce tentative de corruption à la menace pure et simple d’une élimination méthodique de lui et de l’ensemble ses proches. Je pense que ça dépendra essentiellement de l’humeur de Biret senior étant donné que c’est lui le chef du quatuor.
Dans tous les cas, si Malgor est fidèle à sa réputation il y a fort à parier que le vieux va essuyer un solide refus, chose qu’il n’apprécie pas particulièrement et, quand on a son fric et son pouvoir, ça se comprend. À une époque quand quelqu’un qui n’était pas membre du « clan Biret » rejetait une offre du patriarche ça se traduisait généralement par une exécution à bout portant de l’allemand de service, maintenant ils sont plus civilisés, le cœur du patriarche n’est plus tout jeune et Wiegler a les os fragiles, du coup ils délèguent. Dans les faits ça ne change rien : un refus entraîne toujours une élimination sommaire mais ils doivent apprécier l’idée que l’insolent ne puisse même pas voir la mort arriver.
La discussion commence et je vise la tête de Malgor, ses cheveux sont trop brillants pour que ce soit naturel il doit y mettre du gel ou quelque chose dans ce genre là. Bon sang, comme je déteste attendre avec mon fusil en main ! J’ai toujours peur d’attraper une crampe ou de me crisper au mauvais moment. Que cette discussion est longue ! Ils ne pourraient pas abréger les quatre comiques ? Lui dire directement ce qu’ils attendent de lui et avoir l’air faussement déçu quand il les enverrait sur les roses ? J’ai l’index qui me démange, je veux tirer !
L’expression sur le visage de Vince passe du sourire sobre au froncement de sourcils discret : ça se précise ! Il commence à percevoir les insinuations douteuses de ses hôtes et s’en vexe intérieurement. Le vieux continue de parler, l’ami des alligators a un sourire narquois, l’américano-russe sort une cigarette et le conseiller pôle-emploi semble rechercher d’éventuelles tâches sur la baie vitrée. On y est presque, trois personnes sur cinq sont déjà sûrs de ce qui va bientôt se passer dans cette pièce.
Je recentre mon viseur sur Malgor, je reconnais son expression : c’est celle de l’idéaliste qui n’admet pas que l’on doute de ses convictions, il est officiellement outré par les propositions qu’il a entendu. Il n’y a aucune trace de peur sur son visage ni de surprise : il n’y a pas eu de menaces, le patriarche était de bonne humeur. Pas de chance ça ne va rien changer à la suite.
Dans un coin de ma lunette j’aperçois William Lark allumer la cigarette qu’il a sorti, c’est le signal que j’attendais. Wiegler a été clair : si Lark allume une cigarette j’abats Malgor d’une balle dans la tempe, Jeremy Biret n’offre jamais de deuxième chance. Je pose mon doigt sur la détente et inspire doucement, au bout du compte je pense qu’on pourrait dire que je suis un professionnel.
Mais « on » se tromperait lourdement.
Je fais glisser mon viseur et presse la détente : Jeremy Biret bascule en arrière sur sa chaise alors qu’un trou apparaît sur son front.
Je recharge en un instant, vise tout aussi rapidement et tire une seconde fois : ma balle atteint Wiegler à la tempe alors que sa main droite se trouve dans sa veste, sans doute à la recherche de son arme.
Je recharge encore et tire une troisième fois : le veuf va retrouver sa femme avec le visage en morceaux, je l’ai touché entre les deux yeux, juste à la racine du nez.
Alors que je vise pour mon quatrième tir, dans ma lunette, je croise le regard de Willie en train de se lever. Good Bye Tovarich. Je presse à nouveau la détente : le globe-trotter tombe à la renverse avec une balle dans l’œil.
PUTAIN QUE C'ETAIT BON !
Je suis loin d’être un professionnel, moi, je suis juste un taré de fils de riche qui prend son pied en butant des salopards.
Vinnie est tétanisé sur sa chaise, des éclaboussures de sang sur le visage, il ne remue même pas un cil. Il ne s’attendait pas plus à ça que les quatre autres et lui n’a aucune expérience dans le domaine. Il bougera pas avant au moins une demi-heure tellement il est choqué par ce qu’il vient de se passer et, considérant l’insonorisation de la salle, j’ai largement le temps de m’en aller.
J’abaisse mon fusil, me redresse et m’étire avec un grognement. Peu importe combien de temps je reste allongé à viser, c’est toujours trop long.
Je remballe mes affaires sans me presser, le temps que les flics arrivent je serais en route pour l’aéroport. Je boucle ma valoche et jette un dernier coup d’œil au bâtiment d’en face, je crois que Vince a changé de position mais je suis pas sûr avec la distance. Il est vraiment trop sensible, quatre macchabées c’est quand même pas la mort.
Bon sang frangin, si tu savais à quel point t’es passé prêt de claquer ! Si Wiegler avait su qui se cachait derrière mon pseudo un vrai pro t’aurait régler ton compte. Et honnêtement, si t’avais été de la même trempe que moi ou papa, ou même si t’avais accepté l’offre du père Biret je t’aurais flingué en même temps qu’eux. T’as de la chance : je flingue jamais des gars bien quand je peux flinguer des enfoirés dans la même série, j’ai horreur des mélanges.
Je quitte la chambre en vérifiant que j’ai rien oublié : j’ai horreur de perdre des affaires, après on se moque de moi en me traitant de distrait.
Mon téléphone sonne, qu’est-ce que c’est encore ? Oh non, pas lui !
Si je refuse l’appel il va insister pendant des heures, il est lourd !
- Arrête de m’appeler à chaque fois ! T’es chiant de toujours me considérer comme un gosse !
Zut, je l’ai énervé, il hausse pas la voix mais je le sens. Il va encore me faire un sermon.
- Désolé papa, c’était grossier. Je sais que tu t’inquiètes pour moi et pour Vincent, mais tout va bien, il a juste gagné quelques cheveux blancs. On sera tout les deux là pour l’anniversaire d‘Alex, t‘en fais pas.
C’est quand même pas passé loin mais je vais pas lui dire ça. Pendant un très court instant j’ai pensé que Vinnie allait peut-être accepter l’offre qu’on lui faisait.
C’est pas vrai, il a encore des choses à dire ! Après le sermon familial, le discours professionnel.
- J’ai pas envie de parts de Biret Industries. Rachète tout si tu veux mais pas besoin de m’en filer. Il faut que je te laisse, embrasse maman pour moi.
Ce coup-ci je raccroche, un père aussi envahissant c’est vraiment pas un cadeau.
- Un jour je te ferais la peau vieux salopard.
Pourquoi j’ai dit ça ? Je sais pas pourquoi je pense ça. Je sais vraiment pas pourquoi.
Malgré son côté surprotecteur par moments c’est plutôt un bon père : il m’a bien éduqué, moi et mes frangins. Il en a favorisé aucun et c’est bien occupé de nous avec maman, il a toujours fait en sorte que ses affaires pas très nettes n’aient pas de mauvaises influences sur notre enfance, il a accepté mon coming-out sans même lever un sourcil et il m’a même offert mes premiers flingues et une entrée dans le milieu quand il a compris que pour moi tuer était à la fois un plaisir et un besoin. « Autant joindre l’agréable à l’utile » qu’il a dit en me filant mon premier dossier d’exécution.
Mine de rien, en y réfléchissant, s’il avait pas fait de moi un tueur à gages, qu’est-ce qui ce serait passé ? J’aurais peut-être continué à égorger des dealers et à poignarder des proxénètes jusqu’à ce que je finisse par tomber sur un trop gros groupe et qu’on me retrouve mort dans le caniveau. Le scoop dans les journaux le lendemain ! « Le cadet de la famille Malgor retrouvé mort dans une ruelle. » Ma mère en aurait fait une attaque. Bon dieu, si j’avais été responsable de la mort de maman je crois que je me le serais jamais pardonné.
Malgré ça, ça fait des années que je me dis qu’un jour je vais le flinguer : c’est un salopard fini, une ordure au moins du même niveau que le vieux Jeremy et en plus il a transformé un de ses gosses en tueur international.
Je sais que je prendrai aucun plaisir à le tuer mais je sais aussi que si je le fais pas j’aurais un sentiment de « pas-fini ». Boucler la boucle, parfois ça me parait évident et parfois je ne me comprends pas. Encore un truc dont je ne peux pas parler avec ma psy...
J’atteins le parvis de l’hôtel, le ciel est bleu, le soleil brille, la journée n’est pas encore fini, mais perso moi j’ai fini. Je dois rentrer chez moi et il faut aussi que je trouve un cadeau pour l’anniversaire d’Alex. Qu’est-ce qui pourrait bien lui faire plaisir ?
Je m’éloigne de l’hôtel tout en y pensant, jamais prendre un taxi juste à côté d’un lieu de planque ou d’exécution, vieux conseil que m’avait donné Wiegler : les chauffeurs de taxi ont parfois une mémoire étonnante.
J’attends dix minutes de marche avant de chercher un taxi. Ah ! Au moins j’ai pas à attendre longtemps : en voila un qui m’a repéré avec mon barda.
J’enfourne tout dans le coffre de la voiture avant même que le type qui est au volant ne soit sorti pour me donner un coup de main. Merci mais j’ai pas encore besoin d’aide pour ce genre de choses.
Je referme le coffre et prends un moment pour profiter de tout ce qui m’entoure : la grande rue, les bâtiments, les petites ruelles, les pigeons et les passants. J’aime bien ce sentiment que j’ai une fois que j’ai fini tout ce que j’avais à faire, juste avant de rentrer. Un sentiment de plénitude qui me ferait presque oublier toutes mes questions vis-à-vis de la famille.
Attends. Qu’est-ce que je viens de voir là ?
- Lancez le compteur je reviens. J’ai oublié de régler un petit détail.
Je m’éloigne du taxi et avance vers la ruelle et le type en blouson rouge informe qui y est planté. Le mec me voit m’approcher avec une démarche qu’il connaît : celle du client qui a reconnu un vendeur. Un léger sourire se dessine sur ses lèvres alors qu’il recule dans la semi-obscurité, hors de vue des curieux.
Je ne peux pas m’empêcher de sourire alors que, dans la poche de mon manteau, ma main entre en contact avec le manche de mon couteau. Revenir aux fondamentaux, ça permet de se calmer l’esprit. Je devrais arrêter de me prendre la tête avec de la philosophie à la con. Je devrais juste me concentrer sur quelque chose de simple, me concentrer sur ce que je suis.
Un taré de fils de riche qui prend son pied en butant des salopards.
FIN
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Lorsqu'il ouvrit la porte et vit ce qu'il y avait au sol, il sut tout de suite ce qui allait suivre. Il savait ce qu'il y avait dans cette petite boite en carton. Il fut néanmoins surpris de cette élégante marque de politesse, il s'était attendu à bien plus de formalisme voire de froideur et cette attention le toucha profondément. Il se mit à sourire et ramassa délicatement la boite en se retenant à grand peine de siffloter. Son colis dans les mains il retraversa son seuil, fermant la porte d'un mouvement de pied distrait, et alla s'installer sur son canapé. Il se rappela le jour où il l'avait acheté, c'était quand il avait reçu son premier salaire, il y a déjà si longtemps. À présent le cuir s'était usé, malgré les efforts d'entretien. Après chaque journée de travail il s'était installé dessus pour soulager son corps vieillissant de plus en plus vite et à présent était venue l'heure de la retraite tant espérée pendant toutes ces années. Il attrapa le coupe-papier reposant sur le bois aussi usé que le cuir et coupa le scotch d'un geste assuré puis reposa délicatement la lame à sa place. Puis il prit une lente et profonde inspiration, ferma les yeux et ouvrit la boite. Il ne vit rie
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Le maire pissait sur ces inspecteurs, une situation qui, à elle seule, était déjà navrante, déprimante et dommageable pour le concept de dignité humaine. Mais ce qui aggravait encore plus ce triste constat qui n'avait pourtant pas besoin de ça, c'est qu'il n'en était pas à son coup d'essai. Il s'agissait en effet de la douxième journée où d'honnêtes travailleurs gouvernementaux se faisaient agresser d'une façon particulièrement difficile à supporter d'un point de vue psychologique. Il y avait tant de choses que Thomas, le principal adjoint du maire, ne comprenait pas dans cette situation : Pourquoi tant d'inspecteurs venaient dans ce petit village de campagne ? Pourquoi le maire n'avait-il pas été arrêté ou au moins rappelé à l'ordre ? Pourquoi des inspecteurs continuaient de venir ? POURQUOI LE MAIRE PISSAIT SUR DES GENS DEPUIS SON BALCON ?! La première fois Thomas s'en souvenait comme si c'était hier : le maire était allé à une petite foire organisé par les éleveurs locaux et l'homme étant très apprécié il en était revenu ivre. Thomas l'avait laissé à son bureau pour aller ouvrir à la personne qui venait de sonner et il en avait profité pour se soulager au soleil... Thomas n'oubl
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Défi
Je déteste mon boulot, c'est un boulot merdique qui me bouffe la vie et la santé mentale. Il est dangereux et je cotoie des gens infects qui me donnent envie de me laver à l'acide, ou de LES laver à l'acide. Pourquoi je continue ? Parce que je ne suis pas prêt à faire face aux conséquences néfastes d'une démission. On me dit que je peux partir, sous conditions, si j'en ai envie mais je ne tiens pas à vérifier la sincérité de mes patrons, c'est un pari que je ne suis pas prêt à faire. Pour en revenir à mon boulot, il est relativement basique : je suis livreur-préparateur et là je termine une livraison. Une fois le fourgon garé je prends le temps d'avaler une gorgée de café de mon thermos et repense au jour où ma fille me l'a offert. L'objet en soi est basique et sans attrait mais le cadeau d'une fillette de cinq ans vaut plus que son poids en or. Le jour de mon anniversaire il y a quinze ans j'avais dû partir travailler avant l'aube et cette petite s'était débrouillée pour se réveiller avant moi afin de le remplir et de me l'offrir. Ce fut une belle journée peu importe à quel point elle fut aussi merdique que les autres. Fini la nostaglie il est temps de s'y remettre, je sors rapide
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Confortablement installé devant son ordinateur, il soupire et appelle son dernier contact, qui répond presque aussitôt. Comme à leur habitude il entame la conversation par un proverbe, ils ont toujours fait ainsi. - Mieux vaut rater sa chance que de ne pas l'avoir tentée. - Proverbe chinois, un peu casse-gueule mais pas dénué d'un certain bon sens, je m'en souviendrai. - Hé Jeff ? - Qu'est-ce qu'il y a ? - Tu t'es déjà demandé ce que tu ferais si c'était la fin du monde demain ? - Ouais. - Et du coup ? - Je suis arrivé à la conclusion que j'aimerais être prévenu un peu plus en avance : une journée c'est pas assez en ce qui me concerne. - Rah, mais c'est pas le jeu ça comme réponse. - La fin du monde ne correspond pas à ma définition d'un "jeu". T'as une idée du nombre de trucs que j'ai entamés sans prendre le temps de les finir ? Du nombre de personnes que j'aurais envie de voir pour boire un dernier coup ? Comme je disais j'ai pris le temps d'y penser et ça me ferait un sacré planning ! - À ce point ? - Et ouais, c'est pas parce que je suis toujours là et à l'écoute que je peux pas avoir une vie en parallèle, Jack. Je suis multi-tache, le fait de discuter avec toi ne m'empêche pas
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Je n'attendais personne, comme chaque jour. Quand j'ai ouvert la porte, je n'étais même pas à me demander qui venait à une heure pareille : cela n'avait pas d'importance, rien n'en avait. Plus rien dans ma vie n'avait la moindre importance depuis vingt ans, depuis ce jour d'enfer où l'amour de ma vie m'avait été arrachée. J'ai jamais eu l'ambition d'être un grand homme ou même quelqu'un de bien, mais pour elle j'aurais défié les dieux. Quand je l'ai perdu j'ai perdu tout ce qui méritait mon attention et ma vie. Et pourtant quand j'ai ouvert la porte et que j'ai vu cette femme qui me fixait avec un regard plus froid que le mien face à un miroir, j'ai senti mon sang se mettre à bouillir : j'ai tout de suite compris qui elle était. On ne s'était jamais rencontré, ni même parlé, mais j'avais beaucoup entendu parler d'elle : Layla, celle qui avait tué ma femme. Celle qui avait condamné ma vie au néant. Je n'ai jamais été haineux ou vindicatif, sinon je pense que je l'aurais étranglée sur place,après tout à quoi bon ? Je sais que ma femme l'avait aimée, même si cela avait conduit à une monstrueuse trahison. Je donnerais tout pour changer le passé mais son avenir m'indiffère autant que le
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J'entre dans le bar, je ne connais pas cet endroit mais toi si, tu m'y as amené pour te sentir forte sur ton territoire mais je sais bien, et peut-être en vérité le sais-tu aussi, que c'est là que tu seras la plus vulnérable Je t'aperçois sitôt le seuil franchi, assise à une table en pleine conversation avec des amis à toi. Tu t'es faite belle ce soir : du rouge et du noir pour ta tenue, tes cheveux arrangés en queue de cheval et un maquillage minimaliste. Tout ce que j'aime et tu le sais parfaitement. Nos regards se croisent alors que je t'observe, une étincelle passe dans tes yeux et tes lèvres frémissent légèrement pour te retenir de sourire et rester impassible devant tes amis. Je prends un verre et m'approche de la table et tu fais semblant de me découvrir quand j'arrive à votre hauteur. Tu te lèves pour me saluer d'une chaste bise qui ne laisse rien transparaitre, après tout nous ne sommes que deux amis se retrouvant pas hasard dans le même bar. Tu me présentes : je connais déjà la première citée, tu m'en as parlée et nous nous sommes vaguement croisés à certaines occasions sans jamais vraiment discuter. Elle t'encourage à profiter au mieux de ta jeunesse et de tes soirées to
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Défi
Christopher avait toujours été considéré comme un homme serein, rien ne semblait jamais l'inquiéter. Certaines de ses connaissances disaient de lui qu'il faudrait une arme braquée sur lui pour l'émouvoir un tant soit peu. Quand toute cette drôle histoire serait fini il faudrait qu'il pense à nier cette supposition qu'il avait toujours trouvée absurde. - Vous ne voudriez pas qu'on aille se poser ailleurs pour discuter de nos problèmes ? Je connais une pizzeria du tonnerre à deux rues d'ici. À quelques mètres en face de lui, derrière une rangée d'hommes tenant fermement des armes automatiques, se tenait Gregory, un homme qui lui était reconnu par ses pairs comme quelqu'un de nerveux. - Chris, tes histoires de fric en ont emmerdé suffisament pour que tu te retrouves dans cette situation merdique. Alors sois gentil et épargne-nous au moins tes traits d'esprit. Un air de profonde confusion s'installa sur le visage de Christopher, alors il fit ce qu'il faisait toujours lorsqu'il avait besoin de réflechir : il prit sa flasque de whisky dans la poche de sa veste - très lentement et de la main gauche. - Je crois qu'il y a une légère confusion, dit-il en avalant lampée d'alcool, je ne suis p
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