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D.B

D.B
« Miroirs Obscurs : Les Cauchemars de Mister Fringgle » plonge le lecteur dans un monde obscur et mystérieux où les frontières entre la réalité et le cauchemar se brouillent. Une figure imposante et sinistre, Mister Fringgle, raconte des histoires terrifiantes qui s’immiscent dans l’âme de son auditoire. Alors qu’une nuit s’étend, huit individus se retrouvent mystérieusement rassemblés, captivés par l’attrait macabre des récits de Fringgle. Les contes révèlent les périls insidieux du monde moderne – l’addiction aux jeux vidéo, l’homophobie, le harcèlement, la violence conjugale, l’addiction aux réseaux sociaux, le racisme et les courses illégales. Mais ces histoires ne sont pas de simples divertissements nocturnes – elles représentent le miroir de l’âme des auditeurs, reflétant des fautes impardonnables qui exigent un choix de conscience. Au centre de ces révélations se trouve Jonathan, un tétraplégique impuissant à l’origine de la libération d’un coupable, James. Cette nuit n’est que le début d’un voyage dans les profondeurs de l’horreur et du subconscient, laissant le lecteur en attente de possibles futures nuits effrayantes.
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Défi
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Voici le poème original D'Arthur Rimbaud :

C'est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Voici, ma version
( avec humilité devant un tel texte de ce grand personnage)

La ville, calme, mime le silence d'une rivière
Au coin de la rue, des mendiants en haillons,
Les lumières des néons se montrent si fières,
Des dorures brillent, reflétant leurs rayons,
Et dans le parc ombragé, la lune apparaît sans austérité, nue.
L'homme, avec son journal, rêve d'un ciel si bleu,
La cigarette à ses lèvres, évoque un passé où il voyait la nue,
Les oiseaux chantent, et soudain, il pleut,
Il rit à chaque ligne, chaque souvenir, comme
Il repense à son enfance, à ses douces années en somme.somme.
Dans ce monde bruyant, seul, il ressent le froid,
Son parfum, celui du papier, titille sa narine,
Et d'une main, il touche doucement sa poitrine,
Il lit chaque mot, chaque ligne, si droit.
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Défi
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 La pluie froide et incessante martelait les toits de Paris, rendant un vibrant hommage à l’atmosphère sombre et mélancolique de la ville. Les rues pavées de Montmartre, autrefois témoins d’amoureux enlacés et d’artistes en quête d’inspiration, étaient maintenant transformées en rivières sombres et scintillantes. Les lumières jaunâtres des réverbères, ternies par l’humidité ambiante, faisaient danser les ombres des arbres dépouillés et des cheminées en brique, créant un tableau lugubre digne d’une toile impressionniste, qui aurait fait frissonner même le plus courageux des passants. Une silhouette encapuchonnée, émergeant du brouillard qui s’élevait des pavés, s’arrêta pour contempler un vieil immeuble, dont les tuiles rouges étaient maintenant teintées de gris. Son souffle, rapide et saccadé, créait un fin nuage de brume qui se mélangeait à l’air glacial, lui donnant une aura presque surnaturelle. Depuis le cœur de cette ombre mystérieuse, deux yeux, brillant d’une lueur obsessionnelle, scrutèrent avec avidité une fenêtre particulière, éclairée d’une douce lumière ambrée, derrière laquelle une femme, plongée dans un livre, semblait étrangère à la menace extérieure. Il l’avait suivie discrètement pendant des semaines, dissimulé derrière des journaux, des manteaux épais ou même des façades. Il connaissait le timbre de sa voix, douce, mais affirmée – le parfum envoûtant qu’elle portait –, et il aimait cette manie qu’elle avait d’enrouler une mèche rebelle de ses longs cheveux noirs autour de son doigt lorsqu’elle se trouvait dans l’embarras, ou qu’elle était nerveuse. Il se délectait de chaque petit détail qu’il découvrait sur elle, anticipant le plaisir du dénouement autant que l’acte final. Ce soir, après que les dernières gouttes se soient écoulées des gouttières et que la femme eut éteint sa lumière, plongeant sa chambre dans une douce obscurité, il fit preuve d’une audace inouïe en s’approchant de sa porte d’entrée en bois ancien. Sur le paillasson, usé par le temps et les pas des visiteurs, il déposa délicatement une carte postale à l’apparence innocente, sur laquelle on pouvait voir une représentation grise et pluvieuse de la Tour Eiffel. Cependant, ce qui glacerait le sang de n’importe quel observateur n’était pas l’image elle-même, mais plutôt le dessin qu’il avait soigneusement tracé au dos : un visage souriant, presque enfantin, si ce n’était pour la couleur écarlate, presque sanglante, du feutre qu’il avait utilisé. Et en lettres tremblantes, comme tracées par une main fébrile, le message glacial : « Tu es la prochaine. »
 Dissimulant sa satisfaction sous son capuchon, il s’éloigna à pas feutrés, s’enfonçant dans la pénombre des ruelles tortueuses, un sourire malsain étirant ses lèvres fines.
 — Tiens, c’est étrange, cette silhouette…, murmura une vieille femme, se tenant à l’entrée d’une boulangerie, un panier à la main, observant le manège de l’homme encapuchonné.
 — Chut ! Madeleine, n’attire pas son attention, répondit son ami, Henri, en la tirant légèrement par le bras. Regarde plutôt de l’autre côté.
 Madeleine ne put s’empêcher de jeter un coup d’œil à l’homme.
 — Tu penses qu’il est dangereux ?
 Henri haussa les épaules.
 — Dans cette ville, on ne sait jamais. Mais il a quelque chose de… louche, non ?
 La vieille femme hocha la tête, les yeux fixés sur la carte postale que l’homme venait de déposer.
 — Je me demande ce qui est écrit dessus…
 Lorsque l’homme s’éloigna, Henri tenta une approche furtive, espérant lire le contenu de la carte. Il revint quelques secondes plus tard, le visage blême.
 — Madeleine, il faut prévenir la police. Tout de suite.
 — Pourquoi ? Qu’est-ce que tu as vu ? demanda-t-elle, une pointe d’anxiété dans la voix.
 Henri avala sa salive.
 — Rien de bon. Rien de bon du tout.
 Dans l’obscurité de la Ville Lumière, le jeu venait de commencer, et l’inconnu était prêt à le mener jusqu’à son paroxysme.
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D.B


Prologue
 Je suis souvent restée à l’écart, observant les gens autour de moi. Aimer, souffrir, rire, pleurer – le spectre des émotions humaines m’a toujours fascinée. À une époque où tout le monde semble porter un masque, j’ai souvent ressenti le besoin de chercher une âme qui serait aussi transparente et vraie que la mienne. Chaque jour, j’ai attendu que ce cœur, libre et indompté, croise mon chemin. Parce que, tout comme le cœur, je ne connais pas non plus de limites.
J’ai grandi dans une petite ville, où chaque pas que vous faites est observé et chaque mot que vous dites est évalué. Être différent n’était pas une option. Mais j’ai toujours su que j’étais différente. Non pas à cause de la façon dont je m’habille ou des choses que je fais, mais à cause de la façon dont je ressens. Et un jour, au parc, cette différence m’a menée vers elle.
Mon nom est Alexa, et voici l’histoire de comment mon cœur a trouvé sa liberté, sa raison d’être, et surtout, comment il a trouvé un autre cœur qui bat au même rythme que le mien. Plongez dans un voyage qui transcende la norme, où l’amour n’est pas lié par des constructions sociétales, mais est pur, féroce et dévorant.

Chapitre 1
L’Inconnue du parc
 Le parc de la ville était mon refuge. Un endroit où je pouvais échapper aux regards et aux murmures des autres. Entourée d’arbres imposants, je me sentais souvent seule, perdue dans mes pensées. Mais ce jour-là, quelque chose était différent.
À quelques mètres de moi, sous le grand chêne, une silhouette s’était installée. Elle était complètement absorbée par son livre, ne remarquant ni le vent doux qui agitait les pages ni les enfants qui jouaient à proximité. Ses cheveux étaient d’une couleur singulière – tantôt d’un bleu profond, tantôt d’un violet lumineux, selon la façon dont le soleil les touchait. Chaque mouvement qu’elle faisait semblait être en parfaite harmonie avec la nature qui l’entourait.
Mon cœur a commencé à battre plus vite, chaque pulsation me rappelant à quel point je me sentais vivante. Quelque chose en elle m’appelait. Une force que je n’avais jamais ressentie auparavant.
Incapable de résister à l’envie de m’approcher, j’ai lentement marché vers elle. À mesure que je m’approchais, j’ai pu déchiffrer les mots qu’elle lisait à voix basse. C’était un poème sur l’acceptation de soi, sur la liberté d’être qui l’on est.
 — Un choix audacieux de lecture, ai-je dit, espérant engager la conversation.
Elle leva les yeux vers moi, ses iris d’un bleu transparent semblant plonger au plus profond de mon âme.
 — Certains poèmes parlent directement à notre cœur, n’est-ce pas ? a-t-elle répondu avec un sourire timide.
Nos regards se sont rencontrés, et pendant un instant, le monde autour de nous a disparu. Il y avait une sorte de magie entre nous, une connexion qui transcende les mots.
 — Je m’appelle Alexa, dis-je, en tendant la main.
Elle hésita un instant avant de la prendre.
 — Moi c’est Sky, murmura-t-elle, sa voix douce comme une mélodie.
Nous avons continué à discuter, partageant des histoires, des rires et des moments de silence. Et tandis que le soleil commençait à se coucher, teintant le ciel de nuances d’or et de pourpre, je réalisais que ma vie venait de prendre un tournant inattendu.
Peut-être que l’univers avait un plan pour moi après tout. Peut-être que la solitude n’était qu’un passage nécessaire pour me conduire vers cette rencontre. Une rencontre qui allait bouleverser ma vie à jamais.

Chapitre 2
Premiers échanges
 Les jours qui suivirent cette rencontre inattendue étaient pleins de hâte. Chaque matin, je me levais avec une impatience croissante, attendant avec enthousiasme nos rencontres quotidiennes sous le grand chêne. Sky était devenue une partie intégrante de mes journées. L’angoisse et la solitude qui autrefois emplissaient mes heures avaient laissé place à l’excitation et à la curiosité.
Ce jour-là, je l’ai trouvée assise à notre endroit habituel, un nouveau livre à la main. Les rayons du soleil jouaient à travers les feuilles, illuminant sa silhouette, lui donnant une aura presque surnaturelle. Je me suis approchée lentement, mon cœur battant à tout rompre.
 — Salut, tu lis quoi ? ai-je demandé, tentant de contenir mon excitation.
Sky leva les yeux, un sourire jouant sur ses lèvres.
 — Un peu de fiction pour changer, dit-elle en montrant la couverture.
Ses yeux, qui semblaient toujours cacher un océan de secrets, étincelaient de malice.
Nous avons commencé à parler de livres, puis de films, puis de musique, et avant que nous nous en rendions compte, des heures s’étaient écoulées. Sky avait cette capacité incroyable de rendre chaque conversation fascinante. Elle parlait de son enfance, des défis qu’elle avait dû relever, des moments où elle avait été incomprise et jugée pour qui elle était vraiment. Chaque mot, chaque histoire, me rappelait combien notre monde pouvait être cruel et dans le refus d’acceptation.
Mais il y avait aussi de la joie dans ses récits. Des moments d’acceptation, de compréhension, d’amour. Des moments qui m’ont fait espérer un monde meilleur pour des gens comme Sky.
Nos conversations étaient un mélange de rires, de confidences et parfois de larmes. Nous avions formé un lien si fort, si rapidement, que c’en était presque irréel. Chaque jour, je découvrais une nouvelle facette de Sky, et chaque jour, mon admiration pour elle grandissait.
Alors que la nuit commençait à tomber, Sky a pris une profonde inspiration.
 — Alexa, a-t-elle commencé, il y a quelque chose que je dois te dire.
J’ai hoché la tête, prête à l’écouter. J’ignorais alors à quel point ses prochains mots allaient changer ma perception du monde, me conduisant sur un chemin que je n’aurais jamais imaginé.

Chapitre 3
La confession
 Nous nous étions retrouvées dans un petit café tranquille, à l’écart de l’agitation de la ville. Les lumières tamisées créaient une atmosphère intimiste, idéale pour les confidences. La douce mélodie d’un vieux jazz résonnait en fond sonore. Sky semblait nerveuse, jouant machinalement avec la chaînette de sa tasse de thé.
Après quelques minutes de silence, Sky prit une grande inspiration.
 — Alexa, commença-t-elle, il y a quelque chose que je veux que tu saches. Quelque chose de fondamental à mon sujet.
Je hoche la tête, cherchant à la rassurer.
 — Quoi que tu aies à dire, sache que ça ne changera rien entre nous.
Elle esquissa un léger sourire avant de poursuivre :
 — Je suis genderfluid.
J’étais silencieuse. Non pas par jugement ou rejet, mais par méconnaissance. Je n’avais jamais rencontré quelqu’un comme elle. Du moins, pas que je sache.
 — Tu sais ce que cela signifie ? demanda Sky, en scrutant mon visage à la recherche de la moindre réaction.
J’ai réfléchi un instant avant de répondre.
 — Cela signifie que certains jours tu te sens plus homme, d’autres plus femme, et parfois ni l’un ni l’autre, c’est bien ça ?
Sky sembla soulagée que je comprenne, du moins en partie.
 — Oui, c’est une partie de ce que je ressens. C’est comme si mon genre était fluide, changeant, évoluant en fonction de mon humeur, de mon environnement, de tellement de facteurs.
Je réfléchissais à ses mots, essayant d’imaginer à quel point cela devait être à la fois libérateur et compliqué dans une société aux attentes si rigides.
 — Comment tu… gères tout ça ? demandai-je doucement, mon désir de comprendre l’emportant sur ma timidité.
Sky sourit, appréciant mon effort.
 — Certains jours sont plus difficiles que d’autres. Mais c’est qui je suis. Et même si le monde extérieur ne comprend pas toujours, j’ai appris à m’accepter et à m’aimer moi-même.
Nous avons continué à discuter pendant des heures, Sky partageant ses expériences, ses défis, ses victoires. C’était comme si nous avions ouvert une nouvelle porte, non seulement dans notre amitié, mais dans ma perception du monde.
En partant, je me suis sentie émue par la force de Sky, par sa vulnérabilité, par sa sincérité. Si je croyais auparavant comprendre ce qu’était l’amour, ce soir-là, j’ai réalisé qu’il n’y avait pas de limites à ce sentiment. Qu’il dépassait les genres, les attentes, les préjugés ! Et que chaque personne méritait de vivre sa vérité, librement et passionnément.


Chapitre 4
Naissance de sentiments
 La ville grouillait de vie ce soir-là. Les rues étaient animées, les gens riaient et les lumières scintillaient de mille feux. Sky et moi avions décidé de faire une balade nocturne. Nous marchions côte à côte, profitant du doux vent qui soufflait, apportant le parfum des roses du parc voisin.
Lorsque nous sommes arrivées à la fontaine, un musicien de rue jouait une mélodie mélancolique à la guitare. C’était doux, presque hypnotisant. Sans vraiment réfléchir, j’ai tendu la main vers Sky, l’invitant à danser. Elle a hésité un instant, puis a accepté, plaçant délicatement sa main dans la mienne.
Le monde autour de nous semblait s’estomper. Nos corps se déplaçaient en harmonie, chaque pas, chaque mouvement s’accordant parfaitement à la mélodie. Et alors que nos mains se sont effleurées, nos doigts se sont enlacés naturellement, créant un lien que je n’avais jamais ressenti auparavant.
Le regard de Sky s’est fixé sur le mien, ses yeux bleu brillant d’une émotion indéfinissable. Dans cet instant, le temps semblait s’être arrêté. Toutes deux, nous avons compris. Ce qui avait commencé comme une simple amitié s’était transformé, évolué en quelque chose de bien plus profond et complexe.
La musique a pris fin, mais nous sommes restées là, immobiles, à nous regarder. J’ai senti mon cœur battre à un rythme effréné.
 — Sky…, ai-je commencé, cherchant les mots pour exprimer ce tourbillon d’émotions.
Elle a souri doucement, plaçant un doigt sur mes lèvres.
 — Je sais, Alexa. Moi aussi, je le sens.
Nous avons quitté la fontaine, marchant main dans la main. Les lumières de la ville semblaient plus brillantes, le monde plus vivant. Avec Sky à mes côtés, j’ai senti pour la première fois que j’étais vraiment chez moi. Mais en même temps, une inquiétude sourde a commencé à s’insinuer en moi. Comment le monde réagirait-il à notre histoire naissante ? Étions-nous prêtes à affronter les jugements, les préjugés, la réalité torturée des êtres concernés à travers le regard des autres ?
Mais pour l’instant, ces pensées se sont estompées face à la chaleur du moment présent, de la main de Sky dans la mienne et de la promesse d’un avenir à découvrir ensemble.

Chapitre 5
Le monde extérieur
 La ville qui autrefois nous semblait brillante et chaleureuse prenait désormais un aspect plus froid, plus distant. C’était étrange comment une simple émotion pouvait transformer notre perception du monde. Nous marchions souvent main dans la main, mais le regard des autres avait changé. Les murmures furtifs, les regards insistants et parfois accusateurs nous entouraient, formant un mur invisible qui tentait de nous séparer.
Un jour, alors que Sky et moi déambulions dans le marché, une voix forte et autoritaire nous interpella :
 — Eh, vous deux ! C’est quoi cette mascarade ?
Je me suis retournée pour voir un homme d’une cinquantaine d’années nous fixant avec un regard dur et méprisant. À ses côtés, quelques avaliseurs hochèrent la tête, les bras croisés.
Sky serra ma main un peu plus fort, comme pour me rassurer.
 — On n’a pas à se justifier, murmura-t-elle.
Mais je ne pouvais pas laisser passer cela. Respirant profondément, je répondis :
 — L’amour, monsieur. C’est simplement de l’amour. Pourquoi est-ce si difficile à comprendre ?
Il ricana :
 — C’est ça l’amour pour vous ? Ce n’est pas naturel. Vous devriez avoir honte !
Sky, d’ordinaire si calme et mesurée, sembla à bout. Ses yeux lançaient des éclairs.
 — Qui êtes-vous pour juger de ce qui est naturel ou non ? L’amour n’a pas de forme définie. Et nous n’avons certainement pas besoin de votre approbation pour vivre nos vies.
Un murmure parcourut la foule qui s’était formée autour de nous. Quelques personnes semblaient d’accord avec l’homme, tandis que d’autres nous lançaient des regards compatissants.
Une vieille femme se fraya un chemin à travers la foule et prit la main de Sky.
 — Ne laissez personne vous dire comment aimer, ma chérie, dit-elle doucement. Le cœur sait ce qu’il veut.
Avec cette déclaration, elle nous fit un clin d’œil et s’éloigna. La foule commença à se disperser lentement, chacun reprenant ses activités.
Nous nous sommes assises sur un banc à proximité, les émotions tourbillonnant en nous. C’était la première fois que nous étions confrontées si ouvertement à la dure réalité de la société. Mais malgré la douleur, il y avait aussi une détermination. Nous étions décidées à être les actrices du changement, à être celles qui braveraient les normes pour une cause plus grande : l’amour.

Chapitre 6
Le refuge
 Le monde extérieur pouvait être brutal, mais dès que la porte de l’appartement de Sky se refermait derrière nous, nous étions transportées dans un tout autre univers. C’était notre sanctuaire, notre refuge. Chaque coin de cette demeure racontait une histoire, chaque objet témoignait de nos souvenirs partagés.
Sky avait aménagé l’appartement avec soin, mélangeant des tons doux de bleu et de gris. Le salon, avec ses grandes fenêtres, laissait entrer une lumière naturelle qui baignait la pièce. Sur le rebord de la fenêtre, plusieurs plantes, comme le pothos et le monstera, étiraient leurs feuilles vers le soleil. C’était là, entouré de verdure, que nous passions la plupart de nos moments. Écouter de la musique, lire des livres, discuter pendant des heures.
Le soir venu, les lampes diffusaient une lumière douce, tamisée, et la pièce se transformait. Avec une playlist de morceaux hindis en fond, nous nous blottissions sur le canapé, nos doigts entrelacés, les yeux plongés dans les yeux de l’autre, partageant nos peurs, nos espoirs, nos rêves.
 — Tu sais, murmura Sky un soir alors que la pluie tambourinait doucement contre les vitres, même si le monde extérieur est impitoyable, j’ai trouvé la paix ici avec toi. C’est comme si rien d’autre n’existait.
Je souris, m’approchant pour déposer un baiser sur son front.
 — Moi aussi, Sky. Chez toi, j’ai trouvé plus qu’un abri, j’ai trouvé un chez-moi.
Chaque soir, nous nous endormions l’une contre l’autre, trouvant du réconfort dans la présence de l’autre, sachant que peu importe la tempête à l’extérieur, nous avions notre havre de paix.
Mais alors que les jours passaient, une réalité s’imposait : notre refuge était aussi une bulle. Une bulle qui nous protégeait, certes, mais qui nous isolait aussi du monde réel. Et bien que nous sachions que tôt ou tard nous devrions faire face à la réalité, pour le moment, nous nous accrochions à ce sentiment de sécurité, cherchant du réconfort dans l’étreinte de l’autre, espérant que l’amour serait suffisant pour surmonter les épreuves à venir.

Chapitre 7
La séparation
Un matin, le soleil se leva timidement, caressant les murs de l’appartement de Sky, mais elle n’était plus là. J’avais l’habitude de me réveiller à ses côtés, nos corps enlacés, mais ce matin-là, je ne ressentis que le froid des draps à côté de moi.
Inquiète, je me précipitai dans le salon, espérant la voir là, peut-être plongée dans un livre ou préparant le petit-déjeuner. Mais l’appartement était silencieux, trop silencieux.
Sur la table basse se trouvait une lettre à mon nom. Mon cœur battait à tout rompre alors que j’ouvrais la missive.

 « Mon cher amour,
chaque moment avec toi a été un trésor, mais le poids des regards, les murmures derrière notre dos, les jugements… Ils sont devenus trop lourds à porter. J’ai senti que je perdais moi-même dans cette bataille constante pour notre amour.
Je sais que c’est égoïste, mais j’ai besoin de trouver un endroit où je peux respirer, être moi-même sans peur ou honte. Je ne veux pas que tu portes ce fardeau.
Je suis désolée. Sache que mon amour pour toi est éternel, même si je ne suis plus à tes côtés.
Avec tout mon amour,
Sky »

 Les mots se brouillèrent alors que les larmes emplissaient mes yeux. Comment avait-elle pu partir sans un mot, sans un dernier adieu ? La douleur était insupportable, chaque recoin de l’appartement me rappelant notre amour, nos moments partagés. Sans elle, tout semblait vide et sans signification.
Je passais des jours à errer sans but, espérant secrètement la croiser au coin d’une rue ou dans un café. Les amis et la famille tentaient de me soutenir, mais rien ne pouvait combler le vide qu’elle avait laissé derrière elle.
Un soir, assise sur le rebord de la fenêtre, je regardai la ville qui s’étendait devant moi, ses lumières brillantes comme autant d’étoiles. Et j’ai pris une décision. Je ne pouvais pas rester enfermée dans cette douleur, je devais trouver un moyen de guérir, de me retrouver.
Avec une détermination nouvelle, je décidai de me lancer dans un voyage, un voyage pour me retrouver et peut-être, un jour, retrouver Sky.

Chapitre 8
La lettre
 Les journées étaient devenues un flot continu de tâches mécaniques. Me lever, manger, travailler, dormir. L’absence de Sky avait laissé une empreinte indélébile dans chaque recoin de ma vie. J’avais essayé de me distraire, de remplir ce vide par diverses activités, mais tout me ramenait à elle.
Puis, un jour de pluie, alors que les gouttes tambourinaient contre les carreaux, le facteur glissa une enveloppe sous ma porte. Elle était ornée d’un timbre étranger et l’écriture manuscrite m’était familière. Mon cœur battit plus fort. C’était la sienne.
Avec précaution, je décachetai l’enveloppe, chaque mot pesant comme une tonne :

 « Mon amour,
Je sais que ma disparition a dû te briser le cœur, et je m’en veux chaque jour pour la douleur que je t’ai infligée. Mais je devais partir pour me retrouver, loin des contraintes, loin des regards.
Loin des jugements, j’ai rencontré des âmes qui, comme moi, cherchaient à être simplement elles-mêmes. J’ai appris à embrasser qui je suis vraiment, sans honte, sans peur.
Je t’aime, plus que les mots ne peuvent l’exprimer, et je ne voulais pas que tu souffres à cause de moi. Je devais trouver qui je suis, pour que, si un jour nos chemins se croisent à nouveau, je puisse t’aimer pleinement, sans réserve.
Je ne sais pas si nous nous reverrons, mais sache que, où que je sois, mon cœur bat toujours pour toi.
Toujours à toi,
Sky »

 Les mots de Sky, bien qu’empreints d’amour, étaient comme un poignard enfoncé dans une plaie déjà béante. Mais à travers la douleur, il y avait une lueur d’espoir, une compréhension. Je réalisais que son combat était aussi le mien. Elle avait dû s’éloigner pour mieux se retrouver, pour mieux nous retrouver.
La lettre, posée sur la table, me rappelait que, malgré la distance, notre amour subsistait. Cette lettre était le commencement d’un chemin vers l’acceptation, vers une guérison, vers un avenir possible où nos cœurs pourraient battre à l’unisson, libres de tout jugement.

Chapitre 9
La renaissance
 Le temps avait une drôle de manière de sculpter les âmes. Les jours se transformèrent en mois, puis en années. La douleur de l’absence de Sky ne diminuait pas, mais elle trouva sa place, devenant un rappel constant de l’importance de vivre et d’aimer librement.
L’indifférence et l’ignorance me consumaient, mais j’avais trouvé une nouvelle mission. La lettre de Sky était devenue ma boussole, me guidant vers un objectif plus grand que moi-même. J’ai rejoint des groupes de soutien, participé à des manifestations, donné des conférences, tout pour sensibiliser et éduquer le monde sur les enjeux LGBTQIA+. Chaque action, chaque parole prononcée, était pour elle, pour moi, pour nous, et pour tous ceux qui, comme Sky, avaient dû se cacher et s’enfuir.
Un soir, après une conférence particulièrement émotionnelle, une jeune femme s’approcha de moi. Ses yeux étaient rougis par les larmes, mais elle dégageait une force incroyable.
 — Merci, dit-elle doucement, c’était mon frère que vous avez évoqué ce soir. Il n’est plus là, mais grâce à des personnes comme vous, son combat continue.
Ces moments étaient la raison pour laquelle je me battais. Pour que plus personne n’ait à souffrir du rejet ou de l’incompréhension.
Avec le temps, j’avais fondé une organisation à but non lucratif qui aidait les jeunes LGBTQIA+ à trouver un logement, à recevoir des conseils et à se sentir aimés et acceptés. L’endroit était orné de photos, d’histoires, et au centre, trônait la lettre de Sky, encadrée, rappelant à chacun pourquoi nous faisions ce que nous faisions.
La bataille pour les droits et l’acceptation était loin d’être terminée, mais chaque pas en avant était une victoire. Et dans chaque victoire, je sentais la présence de Sky, me poussant, m’inspirant. Pour elle. Pour moi. Pour nous.

Chapitre 10
Les retrouvailles
 Les feuilles du parc commençaient à rougir, annonçant l’arrivée de l’automne. L’endroit était calme, l’air frais, et la douce mélodie des oiseaux accompagnait le clapotis de l’eau de la fontaine.
Assise sur le banc où tout avait commencé, mon regard errait sans but, perdu dans les souvenirs. Lorsque soudain, une silhouette familière attira mon attention. Mon cœur bondit dans ma poitrine, mes mains se crispèrent sur le banc. C’était Sky. Ses cheveux toujours changeant de couleur au gré de la lumière, flottaient librement derrière elle. Sa démarche était assurée, mais ses yeux révélaient une profondeur nouvelle.
Je me levai, faisant quelques pas incertains vers elle. Elle me vit et s’arrêta, nos regards se verrouillant. Tout semblait s’être arrêté autour de nous. Il y avait tant de choses non dites, tant d’émotions dans cet échange silencieux.
Elle brisa le silence, la première, une lueur d’amusement dans ses yeux.
 — Alors, c’est ici que tu traînes toujours ?
Un sourire naquit sur mes lèvres.
 — Certains endroits ont le don de ne jamais changer.
Elle s’approcha, l’espace entre nous se réduisant jusqu’à ce que nos fronts se touchent. Elle ferma les yeux, prenant une profonde inspiration.
 — Je suis prête, murmura-t-elle, sa voix remplie d’émotions.
 — Prête pour quoi ? demandais-je, une pointe d’hésitation dans la voix.
Elle sourit, caressant doucement ma joue.
 — Pour nous. Pour tout. J’ai voyagé, cherché, et trouvé qui je suis vraiment. Mais il manquait toujours quelque chose… toi.
Des larmes se formèrent aux coins de mes yeux. Tout le poids des années sans elle, toute la douleur, tout l’espoir et toute l’attente se déversèrent en un flot d’émotions.
Elle m’attira dans une étreinte, son cœur battant fort contre le mien. L’odeur familière de sa peau, la chaleur de son étreinte, tout m’était revenu comme si ces années de séparation n’avaient été qu’une pause.
Nous nous sommes retrouvées, deux âmes, jadis perdues, maintenant réunies et prêtes à affronter ensemble tout ce que l’avenir nous réservait.



"Avec toute mon admiration et mon soutien pour chacun d’entre vous. Que ce texte serve de rappel de la beauté, de la force et de la résilience que vous portez en vous. Chaque couleur de l’arc-en-ciel que vous représentez illumine le monde et rappelle à tous que l’amour est universel, transcendant et sans limites. Continuez à briller, à aimer, à être vous-même, et à lutter pour un monde où chaque lettre de LGBTQIA+ est célébrée et honorée. À tous ceux qui ont déjà marché fièrement, à ceux qui trouvent encore leur chemin, et à ceux qui soutiennent cette magnifique tapisserie d’identités : ce texte est pour vous."
D.B.
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Défi
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D. B. Le Mélodrame des Broyeuses de Secrets
Éditions du Griffon Imaginaire
Résumé : Quand Micheline, passionnée de broyeurs à papier, décide de déménager à Moufleville pour fuir sa vie ennuyeuse, elle ne s’attendait pas à ce que sa nouvelle demeure soit hantée par l’esprit d’un ancien agent de maintenance de broyeur. Plongez dans cette aventure sans relief, où le suspense se mesure à la capacité de la machine à broyer.
« Un roman qui ne déchire pas vraiment, mais qui broie... littéralement ! »
À propos de l’auteur : D.B., après avoir tenté une carrière de dompteur de puces, a trouvé sa vraie vocation : écrire des romans qui donnent envie de les broyer. Il vit actuellement au sommet du Mont-Plat, avec son chat qui pense être une licorne.
Critiques : « Un tour de force d’ennui. » - La Revue des Livres Oubliés
« Un chef-d’œuvre, à condition de ne pas le lire. » - Le Magazine du Non-Intérêt
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 — Mes chers compatriotes... Françaises et Français ; citoyens de notre grand pays : l’avenir de la France, dans le contexte tumultueux et historique actuel, semble être à la croisée des chemins. Les enjeux auxquels elle fait face sont nombreux et complexes, englobant des défis sociaux, économiques, environnementaux, ainsi que des questions relatives à son identité et à sa place dans le monde. La progression de la France dans les années à venir dépendra largement de la capacité de ses dirigeants et de sa population à surmonter ces défis et à s’adapter à un monde en mutation rapide. Les progrès technologiques, les changements climatiques, les mouvements migratoires et les tensions géopolitiques sont autant de facteurs qui auront un impact profond sur l’avenir du pays. Le risque de régression existe également, notamment si les problèmes sociaux tels que les inégalités, le chômage et l’exclusion ne sont pas abordés de manière efficace. Le danger est que ces problèmes exacerbent les tensions existantes et entraînent un repli sur soi et une montée de l’extrémisme et du populisme. Cependant, il est important de ne pas perdre de vue les points forts et les atouts de la France. Son riche patrimoine culturel, son système éducatif, son savoir-faire industriel et sa position géographique stratégique en font un pays avec un potentiel énorme. De plus, la France a toujours su, au cours de son histoire, se réinventer et s’adapter aux nouvelles réalités du monde. L’avenir de la France sera donc ce que ses citoyens et ses dirigeants en feront. Il appartient à chacun de prendre part au débat public, de s’impliquer dans la vie civique et de contribuer à façonner un futur qui est en accord avec les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité qui sont au cœur de l’identité française. Vive la France ; vive la république.
Au revoir…
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D.B


« La liberté, c’est choisir ses chaînes. »
De Jean-Jacques Rousseau


 Dans les rues baignées par une lumière spectrale émanant des réverbères chancelants, Thomas avançait, solitaire avec ses pensées. Chaque pas résonnant sur le pavé semblait converser avec le murmure de son esprit.
 — Encore une soirée où je me tape la discute avec mon meilleur ennemi : moi-même, marmonna Thomas. Tout seul, comme un grand à jouer au boss de ma petite vie !
 La fraîcheur d’une nuit d’automne enveloppait la ville, endormie dans un silence presque irréel. L’air portait une odeur humide, mélange de feuilles mortes et de bitume, qui lui rappelait les automnes de son enfance. Ça a l’air que le monde a appuyé sur le bouton pause, juste pour me faire plaisir, pensait Thomas avec un sourire amer. Comme si j’étais le dernier mec sur Terre.
 Un chien errant s’approcha, hésitant. Thomas s’arrêta, tendit la main, mais l’animal, après un regard scrutateur, s’éloigna.
 — Ah, même le clébard nocturne me lâche, ruminait Thomas avec un demi-sourire. C’est dire si je suis populaire !
 Cette interaction brève, mais significative lui fit prendre conscience de sa propre réserve, de sa distance involontaire avec le monde autour de lui.
 Liberté ou planque ? se demandait-il souvent.
 — Je joue au chat et à la souris avec moi-même, c’est ça le truc.
 Thomas convoitait cette indépendance sans limites, sans faux espoirs.
 — Mais ça me coûte combien, cette petite escapade ? grommelait-il dans sa barbe.
 Un souvenir s’invita dans ses pensées, un éclat de rire partagé avec ses amis autour d’une table bondée. Il avait troqué ces moments de bonheur simple contre un isolement qu’il avait cru être la liberté.
 Il songeait aux mots de Charles Bukowski, cet auteur qu’il admirait, qui parlait de la fine frontière entre liberté et solitude. Bukowski, le vieux briscard, il a dû connaître ce trou noir, non ? gambergeait Thomas. Il trouvait un certain réconfort dans ces écrits, se voyant comme un loup solitaire dans un monde bondé, mais vide.
 Pourtant, déambulant seul cette nuit-là, il se tritura la cervelle : Je suis vraiment un mec libre, ou juste un paumé en solo ? Les rues désertes semblaient refléter son âme. J’ai l’impression d’écouter l’écho de mon propre bazar mental, se disait-il. Pour cette liberté, il avait tout sacrifié — famille, amis, amours.
 — J’ai peut-être laissé filer des pépites, non ? réfléchissait-il. Je me suis dit, couper les ponts, ça, c’est la vraie liberté.
 Mais maintenant, dans ce silence nocturne, il doutait. Cet exil, c’est le tarif de ma liberté ou juste la preuve que j’ai les jetons ? se demandait-il.
 Le rire d’un groupe quittant un bar lui parvenait, lointain, mais clair.
 — Ce genre de « barre », c’était mon truc, à une époque, se rappelait-il, le cœur serré.
 Autrefois, ce bruit l’aurait agacé dans sa quête de solitude. Maintenant, il sonnait doux, presque enviable. Le rire, c’est un peu la « zik » de la vie, non ? songeait-il. Il revoyait les bons moments avec ses potes, des soirées à refaire le monde, à se marrer, à se serrer les coudes.
 — C’était des boulets ou des perles, ces liens ?
 Assis sur un banc, il contemplait le ciel étoilé. J’ai zappé combien d’étoiles, à trop fixer mes godasses ? se demandait-il. Sa quête de liberté l’avait mené à un carrefour de la vie. Il avait trouvé la liberté, mais elle avait un goût amer d’abandon. Peut-être que le vieux Bukowski tapait dans le mille. Liberté et solitude, c’est comme un duo de choc, songeait-il. Peut-être que la liberté et la solitude étaient les deux côtés d’une même médaille, complexes et indissociables.
 Dans cet instant de lucidité, Thomas comprit que la liberté n’était pas l’absence de liens, mais le pouvoir de les choisir.
 — C’est pas de virer les attaches, mais de décider lesquelles garder, pigeait-il. Choisir, c’est ça vivre à fond.
 La vraie liberté ne résidait pas dans le fait de se couper du monde, mais de s’y engager pleinement, à sa manière. Revigoré par cette pensée, il se leva, un demi-sourire aux lèvres.
 — C’est l’heure de remettre les pendules à l’heure de ma liberté, se jurait-il.
 Il n’était jamais trop tard pour trouver un équilibre, pour nouer de nouveaux liens tout en gardant son indépendance.
 La nuit ne représentait plus la solitude, mais un éventail de possibilités. La nuit, ma pote, ma source d’inspi, rêvassait-il.
 Thomas, fort d’une différente compréhension de la liberté, reprenait sa marche, prêt à embrasser la complexité de la vie, dans toute sa beauté mélancolique.
 — La liberté, c’est peut-être juste de kiffer la vie à pleines dents, marmonnait-il, s’évanouissant dans les ombres de la nuit.


 Fin… ?
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D.B


 En cette époque singulièrement banale, où le vent murmurait ses confidences aux brins d'herbes fatigués et les lumières scintillaient doucement comme un millier de lucioles bourrées dans une ville dont l'existence même était un mystère absolu, Gustave, dont la barbe inexplicablement teintée de bleu, se demandait pourquoi il portait encore ces chaussettes dépareillées lorsqu'il est tombé nez à nez avec un escargot philosophique.
( En espérant avoir atteint les standards du Bulwer-Lytton Fiction Contest ! )
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D.B


 Dans la pénombre argentée de la lune, les pavés anciens de la ville se paraient d’ombres mouvantes, tel un tableau vivant d’une époque révolue.
 Il y a bien longtemps que je n’avais vu pareil clair de lune, songea Alessandra, la mélancolie teintant brièvement sa détermination.
 Dans l’étroitesse d’une ruelle, deux silhouettes se faisaient face, leurs épées étincelant sous les caresses de la lumière lunaire. Alessandra, épéiste de renom, célèbre pour son agilité et sa grâce dans l’art du combat, se tenait prête face à Rorik, mercenaire redouté pour sa brutalité et son impitoyabilité. En cet instant, les rêves d’illustre gloire de la jeune femme se heurtaient à la froide et implacable réalité de l’acier.
 Leur duel débuta par un claquement métallique, les lames s’entrechoquant dans un écho qui se répercutait sur les murs de pierre. Alessandra, dans un mouvement d’une fluidité presque surnaturelle, esquiva de justesse un assaut féroce de Rorik, dont l’épée siffla près de son oreille.
 Un souffle de plus et ma destinée aurait emprunté une route bien différente, pensa-t-elle, l’adrénaline pulsant dans ses veines.
 Elle riposta avec une cascade de coups, chacun d’eux chorégraphié avec une précision mortelle. Ses attaques visaient les failles dans la défense de Rorik, mais celui-ci, avec une robustesse surprenante, repoussait chaque offensive, ses muscles ondulant sous la tension du combat.
 Dans un instant de ruse, Rorik feignit une attaque, obligeant Alessandra à se décaler.
 Elle est… époustouflante ! s’émerveilla Rorik en son for intérieur, tout en ne laissant rien paraître.
 Profitant de cet instant, il lança une estocade rapide, mais Alessandra, dans une anticipation presque divinatoire, recula d’un pas, frôlant de peu la lame mortelle. Elle contre-attaqua immédiatement, visant l’épaule du mercenaire. Toutefois, leurs épées s’immobilisèrent dans un verrouillage d’acier, l’un contre l’autre.
 Leurs regards se croisèrent, un éclat de détermination ardente dans chacun de leurs yeux.
 Je ne peux pas perdre, pas maintenant, pensait Alessandra, tandis que Rorik évaluait avec une pointe d’admiration combien de temps il pouvait encore résister à un tel rythme.
 Puis, dans un élan de force, Alessandra repoussa Rorik, mettant de la distance entre eux. Son souffle rapide et son cœur battant la chamade contrastaient avec son expression de concentration absolue, prête à en découdre à nouveau.
 Rorik, légèrement haletant, mais toujours aussi menaçant, lança une nouvelle offensive. Leurs lames se heurtèrent dans un ballet frénétique, chaque combattant mettant en œuvre son habileté et son expérience pour prendre l’avantage. Le fracas de l’acier contre l’acier résonnait dans la ruelle, témoignant de leur lutte acharnée.
 Finalement, dans un mouvement audacieux, Alessandra parvint à désarmer Rorik. Son épée tomba au sol dans un bruit sourd, laissant le mercenaire sans défense. Pointant son épée vers la gorge de Rorik, le souffle d’Alessandra formait un nuage dans l’air frais de la nuit.
 La victoire, enfin, pensa-t-elle, tout en ressentant un pincement de regret à l’idée de conclure ce duel.
 Rorik, les mains levées en signe de reddition et un sourire contrit aux lèvres, concéda :
 — Bien joué, Alessandra, dit-il, une humilité à contrecœur dans la voix.
 Elle a gagné, mais le combat était digne, réfléchit-il, son ego ébranlé, mais son admiration pour son adversaire grandi.
 Alessandra abaissa son épée, offrant un hochement de tête respectueux.
 — Tu te bats bien, Rorik. Peut-être la prochaine fois.
 Mais qu’en sera-t-il ? se demanda-t-elle, intriguée par la nature de leur future confrontation.
 La tension se dissipa, laissant place à une trêve tacite sous le regard bienveillant de la lune. Reprenant leur souffle, les deux guerriers se préparaient intérieurement pour un prochain affrontement, qui s’annonçait tout aussi épique.
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D.B


Avant-propos
 Imaginez, mes chers amis auteurs, que nous prenions la quintessence de la tirade du nez de Cyrano, ce monument de Rostand, et que nous la plongions dans le bain bouillonnant de notre époque. J’ai tenté le défi en y mêlant une certaine malice et une vivacité qui devrait séduire. En le parcourant, on traverse un Paris relooké, où le passé et le présent se marient dans un décor à la fois familier et surprenant. C’est un peu comme si nous avions décidé de donner une seconde jeunesse à Cyrano, le propulsant dans un monde où les cafés littéraires sont les nouveaux théâtres de nos joutes verbales.
 Ce que j’ai tenté de réaliser en particulier, c’est à tisser ensemble l’humour, un brin de satire et une dose généreuse de poésie. C’est mon hommage propre à l’esprit de Rostand, bien sûr, mais avec un twist, une fraîcheur qui devrait en faire quelque chose de simple et d’original (à vous de voir). Il est question ici d’exploration, pas seulement géographique, mais de l’âme humaine et de ses infinies possibilités. Chaque mot, chaque échange entre les protagonistes nous rappelle que derrière les apparences, il y a un monde d’idées et de sentiments à découvrir.
 Ce que le texte nous dit (ou du moins, ce que j’ai essayé de dire), c’est que chaque interaction, aussi fugace ou légère qu’elle puisse paraître, est une porte ouverte sur de nouveaux mondes. Notre café littéraire devient alors une métaphore de la vie elle-même, où chaque personnage, avec son propre « nez » — cette singularité qui le rend unique —, nous exhorte à parcourir d’autres horizons de pensée et de relation humaine.
 En somme, ce que je vous offre, c’est une invitation au voyage, un billet pour explorer non seulement le monde qui nous entoure, mais également les continents cachés en nous et chez les autres. Et c’est là, je crois, le plus beau voyage sur lequel un écrivain puisse embarquer ses lecteurs.



« Le monde est un livre, et ceux qui ne voyagent pas n’en lisent qu’une page. »
De Saint Augustin



 Dans le Paris qui ne dort jamais, niché entre une crêperie hipster, où les pancakes se disputent en originalité, et une boutique de tatouage végan, promettant des encres aussi durables qu’éthiques, brillait un café littéraire. Si bien branché qu’il frôlait le cliché, ce havre pour esprits libres paraissait défier les lois de la mode et de la gravité intellectuelle. Imaginez un endroit où les murs, tellement couverts de livres que même les punaises de lit semblent porter des lunettes, murmurent des histoires de siècles passés.
 Au cœur de cette caverne d’Ali Baba pour intellectuels trônait une table ronde sous un dôme de verre, conçu pour les amoureux de la lune et les critiques du Wi-Fi moderne. C’était là qu’Arthur, l’autoproclamé Socrate du duo (mais avec une coupe de cheveux digne d’un ange rock’n’roll), peaufinait son art de la conversation. Avant de lancer, il polissait ses lunettes, comme s’il se préparait pour un duel de mots.
 — Eh, ton pif, c’est pas un peu comme la Tour Eiffel au milieu de ta tronche ? Genre le gouvernail qui te fait naviguer à travers les conneries, aussi agile qu’un dauphin sous acide ?
 Léon, dont le surnom de « Robin des Bois de la répartie » n’était pas usurpé, répondit avec un sourire capable de faire fondre le cœur le plus gelé :
 — Hey, mec, ton pif, c’est quoi l’idée ? Un phare pour les paumés dans le brouillard du quotidien ou juste une rébellion contre la gravité ?
 Leur échange attira l’attention d’un écologiste, dont la passion pour le papier recyclé n’avait d’égal que son amour pour la nature. Il s’immisça dans la conversation avec la douceur d’une feuille portée par le vent :
 — Les gars, vous croyez pas que ce tarin pourrait être une réserve naturelle ? Un refuge pour des idées menacées d’extinction, une oasis de diversité dans le désert de la pensée unique ?
 La serveuse, slalomant entre les tables avec une agilité rappelant celle d’un chat sur un clavier, lança avec malice :
 — Et si on brevetait ce pif ? Genre, une antenne à inspiration, captant les ondes des muses… L’accessoire ultime pour briller en société !
 Son commentaire déclencha un ouragan de rires et de claquements de doigts approbatifs, témoignant de l’esprit communautaire singulier du lieu.
 Un chef étoilé, dont la curiosité avait été piquée par ce tumulte, s’approcha, une assiette de truffes à la main, comme s’il détenait un secret millénaire :
 — Quel flair pour la gastronomie ! Ce pif, c’est un détecteur de bon goût ? Capable de distinguer le sublime du médiocre, de la truffe noire au safran d’exception ?
 Dans un coin, une dame, drapée dans des châles évoquant un tableau de Klimt, murmura avec une voix teintée de mystère :
 — N’est-ce pas un peu comme un portail vers l’au-delà, ce nez ? Une ligne directe pour que les anges partagent avec nous leurs visions célestes ?
 L’athlète du groupe, toujours prêt à relever un défi, sauta sur l’occasion pour participer :
 — Et en sport, ça donne quoi ? Ce pif, c’est pas le spoiler avant d’une Formule 1 ? Ça doit aider à fendre l’air en sprint, non ?
 Une rêveuse, les yeux pétillants d’inspiration (ou peut-être simplement du reflet de son écran), ajouta doucement :
 — Ce nez, c’est le phare dans la tempête de nos désirs, non ? Guidant les cœurs égarés vers la tranquillité de ton âme…
 Un écrivain, s’arrachant à sa transe créative, conclut :
 — Imaginez les histoires que ce nez pourrait raconter. Un coffre au trésor de légendes oubliées, soufflant la vie dans les voiles des poètes.
 Et Arthur, en bon capitaine de leur navire imaginaire, finalisa avec un clin d’œil :
 — Et mon pif à moi, même s’il casse pas trois pattes à un canard, n’est-ce pas le gouvernail de ma curiosité, poussant mon esprit avide vers les territoires inexplorés du savoir et de l’absurde, toujours en quête, toujours plus audacieux ?
 Les rires, les acclamations, et une vague de chaleur humaine submergèrent le café. Cette soirée, bien plus qu’une joute verbale, avait tissé des liens d’amitié indéfectibles, rappelant à chacun que sous la même constellation de cafés parisiens, chaque être cache en lui un univers intérieur, infini et étoilé, prêt à être étudié avec humour et un nez pour l’aventure.
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D.B


Chapitre 1 Le mystère de la chaussette solitaire
 Les pavés mouillés de Grenelleville brillaient sous les lueurs jaunâtres des réverbères, évoquant les ruelles de Montmartre à la tombée de la nuit. Ce mardi-là, la brume enveloppait la ville fictive, ajoutant une aura mystique à ses rues déjà si sinueuses. Ah, Grenelleville ! Une invention de mon esprit, née de la fusion entre un Paris rétro et le brouillard épais des romans noirs.
 Assis dans mon petit salon au mobilier d’époque, j’étais absorbé par le doux crépitement de mon tourne-disque, évoquant le jazz des années 20, quand un café encore tiède répandait son arôme dans la pièce. Mes pensées divaguaient, flirtant entre des souvenirs et des complots imaginaires, quand soudain, la sonnette retentit, tranchante comme une note discordante.
 Je me dirigeai vers la porte, m’attendant à voir une de ces silhouettes familières du quartier. Mais à ma grande surprise, le palier était désert. Par contre, une chaussette, solitaire et un peu usée, gisait sur mon paillasson. Elle ne m’était pas totalement inconnue. En effet, ses rayures caractéristiques m’évoquaient celles de M. Dubois, ce voisin aux allures de détective raté, qui avait soudainement disparu, laissant derrière lui un silence pesant et des questions sans réponses.

Chapitre 2 Le rendez-vous du Café des Oiseaux Morts
 La chaussette semblait banale à première vue, mais en la retournant, je découvris une note pliée avec soin. Sur le papier jauni, une écriture cursive et légèrement tremblante :
 « Rendez-vous au café des Oiseaux Morts à minuit ».
 Mon rire résonna dans le silence de mon appartement. Ce genre de dramaturgie avait tout du style de Dubois, un mélange d’humour noir et de théâtralité.
 Le café des Oiseaux Morts, situé à deux rues de mon appartement, était une vieille institution de Grenelleville. Son nom étrange et macabre était le résultat d’une histoire loufoque impliquant le propriétaire d’origine, une collection d’oiseaux empaillés et une rupture amoureuse. Un endroit où les habitants venaient pour le calme, l’ambiance tamisée et le goût inimitable de son café. Mais à minuit ? C’était inhabituel, même pour Dubois.
 Je décidai de jouer le jeu. Enfilant mon imperméable et mon chapeau, je me dirigeai vers le café, laissant derrière moi la chaussette et ses mystères. La nuit était fraîche, le ciel étoilé, et les lumières de Grenelleville se reflétaient sur les pavés humides. J’arrivai devant le café, dont l’enseigne pendante grinçait doucement sous la brise. Une douce musique de jazz s’échappait par les interstices de la porte. Je poussai cette dernière avec une certaine appréhension, me préparant à plonger dans l’univers sombre et humoristique de M. Dubois.

Chapitre 3 L’étrange émissaire du Café des Oiseaux Morts
 Minuit pile. Le tic-tac de l’horloge murale résonnait dans le café désert. L’unique source de lumière, une ampoule pendante à l’abat-jour craquelé, lançait des ombres dansantes qui accentuaient l’aspect éthéré du lieu. Les tables en bois, usées par le temps, et les chaises désordonnées donnaient l’impression d’un lieu figé dans un autre âge. Au mur, des photographies en noir et blanc de Grenelleville ancienne rappelaient des jours meilleurs.
 Le bar, lui, brillait d’une propreté impeccable, ses bouteilles alignées comme des soldats en parade, prêtes à servir. Mais l’endroit était étonnamment vide, à l’exception d’un objet insolite : un chat empaillé, installé sur le comptoir. Ses yeux de verre scintillaient à la lumière, lui donnant un air à la fois mystérieux et comique. Autour de son cou, une étiquette avec un message :
 « Aide-moi ».
 La simplicité de ces deux mots, contrastant avec la scène burlesque, faisait frissonner ma colonne vertébrale.
M. Dubois aimait les énigmes et les mises en scène, c’était certain, mais quelque chose dans cette demande me semblait sincère, presque désespéré. Je m’approchai du chat, l’examinant à la recherche d’un indice supplémentaire. Tout à coup, un rire étouffé attira mon attention. Tournant les yeux, je vis le reflet d’une silhouette dans le miroir derrière le bar. L’instant d’après… plus rien.
 - Très drôle, Dubois,  murmurais-je, tout en cherchant un indice, une explication à cette mise en scène pour le moins inattendue.
 Mais j’étais loin de m’imaginer ce qui m’attendait dans l’obscurité de Grenelleville cette nuit-là.

Chapitre 4 Les Confidences de Madame Lavande
 Au fond du café, à l’écart des tables, une porte entrouverte laissait s’échapper des effluves sucrés. Intrigué, je m’approchai et découvris une petite cuisine. Derrière le comptoir, une vieille femme aux cheveux blancs comme la neige, noués en un chignon strict, s’affairait à préparer ce qui semblait être une tarte à la myrtille. Sa robe à fleurs, un peu démodée, lui donnait un air d’antan. Elle releva le nez, ses yeux bleus pétillants me fixant avec curiosité. C’était Madame Lavande, la propriétaire des lieux.
 - Je peux vous aider, jeune homme ? demanda-t-elle, la voix rauque, évoquant des années de cigarettes et d’histoires racontées au coin du feu.
Je lui expliquai ma rencontre avec le chat empaillé et le message énigmatique. Elle soupira profondément, son regard s’assombrissant.
 - M. Dubois… Oh, ce pauvre homme a eu son lot d’ennuis récemment, commença-t-elle. Surtout depuis qu’il a croisé la route de ce M. Noire. 
 Madame Lavande m’expliqua alors que M. Noire était un étrange personnage de Grenelleville. Sous ses airs de gentleman, il était un taxidermiste amateur, obsédé par son art. Son appartement, selon les rumeurs, était rempli d’animaux empaillés dans des poses grotesques, souvent récupérés illégalement.
 - Et pourquoi Dubois se serait-il mêlé à ce type ? demandai-je, intrigué.
 Madame Lavande baissa la voix comme pour partager un secret.
 - M. Dubois avait un chat, vous voyez, un vrai trésor pour lui. Un jour, le chat a disparu. Quelques jours plus tard, M. Noire a présenté à la ville une nouvelle pièce : un chat, étonnamment similaire à celui de Dubois. Vous comprenez le dilemme… 
 Les pièces du puzzle commençaient à se mettre en place. Mais une chose était certaine : la nuit était loin d’être terminée, et je devais en savoir plus sur ce M. Noire.

Chapitre 5 Les confessions d’une baignoire
 En poussant la porte de mon appartement, une sensation étrange m’envahit. Les lumières étaient éteintes, pourtant quelque chose me disait que je n’étais pas seul. Une lumière blafarde émanant de la salle de bains attira mon attention. M’approchant lentement, je perçus des bruits sourds, comme le frémissement d’une personne terrifiée.
 Avec une prudence exagérée, digne d’un acteur de théâtre, je poussai la porte. Le spectacle qui s’offrit à moi était tout sauf celui auquel je m’attendais. Là, dans ma baignoire, gisait M. Dubois, avec les cheveux en bataille, les vêtements trempés et le regard affolé. Il tremblait, agrippé au rideau de douche orné de petits canards jaunes, rendant la scène presque comique.
 - M. Dubois ! » m’écriai-je, à moitié soulagé, à moitié consterné. Que faites-vous dans ma baignoire ?! 
 - Chut ! me fit-il d’un geste fébrile, plaçant un doigt sur ses lèvres desséchées. Ils me cherchent… M. Noire et ses sbires. Votre appartement était le seul endroit où je pensais être en sécurité. 
 Un rire nerveux m’échappa.
 - Vous vous êtes réfugié dans ma salle de bains ? Vous auriez pu au moins choisir un endroit plus confortable ! 
 Ignorant ma remarque, Dubois reprit d’une voix haletante :
 - Il est après moi, à cause du chat. Je ne peux plus vivre comme ça. Il me faut votre aide. 
 Le sérieux de la situation me rattrapa rapidement. Je tendis une main secourable à Dubois, l’aidant à sortir de sa cachette humide. La nuit était encore jeune, et la traque ne faisait que commencer.

Chapitre 6 Dette, cire et tricot
 Dans le doux éclat de mon lampadaire d’époque, qui diffusait une lumière tamisée sur mon vieux canapé, Dubois commença son récit. Il prit le temps de s’installer confortablement, remettant en place l’un de mes coussins dépareillés. Puis, il inspira profondément, comme s’il s’apprêtait à plonger dans les profondeurs de ses souvenirs.
 - Vous savez, commença-t-il en jouant nerveusement avec l’ourlet de sa chemise, Grenelleville n’est pas aussi paisible qu’elle le paraît. C’est un endroit où les vieilles rancunes et les dettes cachées peuvent vous rattraper à tout moment. 
Il se racla la gorge avant de continuer.
 - J’ai fait l’erreur de m’adonner à des jeux de cartes, en pensant pouvoir m’en sortir. Mais j’ai perdu, encore et encore, jusqu’à accumuler une dette colossale. 
 - Et c’est là que M. Noire entre en jeu ? l’interrogeai-je, établissant rapidement le lien.
Dubois hocha la tête.
 - Exactement. M. Noire est bien plus qu’un simple taxidermiste amateur. C’est un homme vindicatif et rancunier. Lorsqu’il a découvert que je ne pouvais pas le rembourser, il m’a proposé un marché macabre : soit je le rembourse d’une manière ou d’une autre, soit je deviens sa prochaine œuvre d’art... en cire. 
 Je frissonnai à cette révélation, non sans remarquer le côté théâtral et exagéré de la menace.
 - Mais, la chaussette ? demandai-je, intrigué.
 Dubois eut un petit rire gêné.
 - Ah, la chaussette ! C’est une vieille plaisanterie entre nous. C’est notre façon de communiquer, de se lancer des défis. Mais cette fois, je l’ai utilisée comme un appel à l’aide, espérant que quelqu’un comprendrait. Et vous l’avez fait. 
 Le poids de la situation m’apparut soudain clairement, tout en gardant une pointe d’absurdité.
 - Bon, et maintenant ? demandai-je, résolu à aider mon voisin malgré les circonstances rocambolesques.
 Dubois esquissa un sourire malicieux.
 - Maintenant, mon cher ami, il est temps d’élaborer un plan. 

Chapitre 7 L’épreuve du tricot
 L’atelier de M. Noire était situé dans l’un des quartiers les plus anciens de Grenelleville, une zone labyrinthique où les ruelles s’entrelaçaient comme un écheveau de laine déroulé. L’enseigne – à peine visible sous les couches de saleté – proclamait :
 « Noire : Taxidermie & Curiosités ».
 Poussant la porte grinçante, une odeur de vieux cuir et de produits chimiques me saisit. Des spécimens empaillés de toutes tailles me fixaient de leurs yeux de verre, offrant une vision à la fois fascinante et terrifiante.
 Au fond de l’atelier, derrière un imposant bureau en acajou, trônait M. Noire. Vêtu d’une vieille veste élimée et d’un nœud papillon défraîchi, il me lança un regard à la fois curieux et méfiant.
 - Que voulez-vous ? demanda-t-il d’une voix rauque.
 Avec un sourire malicieux, je répondis :
 - Vous savez, M. Noire, je suis ici pour une chaussette. Une simple chaussette qui, je crois, appartient à mon voisin. 
 Il éclata de rire, un rire profond et tonitruant qui résonnait dans l’obscurité du lieu.
 - Ah ! Dubois et sa fichue chaussette ! Vous savez, ce n’est pas la première fois qu’il la perd. Mais cette fois-ci, c’était la goutte d’eau. Une chaussette, c’est sacré ! 
 Notre échange se transforma en une joute verbale pleine d’esprit et de reparties cinglantes, où l’humour noir se mêlait à la gravité de la situation. Puis, soudain, l’atmosphère changea.
 M. Noire se leva lentement, se rapprochant de moi jusqu’à ce que nos visages soient presque collés l’un à l’autre.
 - Vous savez, tout ceci aurait pu être évité si Dubois avait simplement pris soin de sa chaussette. Tout ce que je veux, c’est qu’elle me soit rendue. 
 Stupéfié par cette révélation inattendue, je sortis la chaussette de ma poche et la lui tendis. M. Noire la saisit avec précaution, comme s’il tenait un trésor inestimable.
 - Voilà qui règle la dette de Dubois, déclarai-je, soulagé.
 M. Noire hocha la tête, un sourire satisfait se dessinant sur son visage émacié.
 - C’est tout ce que je voulais, murmura-t-il en caressant la chaussette.
Et moi, je ne pus m’empêcher de rire face à l’absurdité délicieuse de la situation.

Chapitre 8 Au fil du tricot, les mystères s’entrelacent
 L’effervescence de Grenelleville était palpable ce jour-là, les rues bourdonnantes de commérages, les boulangeries exhalant l’arôme du pain chaud, et le marché local vibrant sous le poids des affaires quotidiennes. Mais pour Dubois et moi, le monde semblait se réduire à cette chaussette égarée.
 - Comment une chaussette peut-elle simplement disparaître de la sorte ? se lamentait Dubois, ajustant son chapeau à bords larges qui avait connu des jours meilleurs.
 Nous avons d’abord cherché chez Mademoiselle Cerise, la couturière du coin, réputée pour avoir un œil aiguisé pour les textiles perdus. Ses yeux pétillants cachés derrière de grosses lunettes rondes, elle éclata de rire à notre demande.
 - Une chaussette ? Oh, mon cher, vous devriez peut-être essayer la laverie de Mme Pivoine. Elle a une façon étrange de perdre une chaussette de chaque paire ! 
 En route vers la laverie, nous avons été distraits par une procession inattendue : une parade de chaussettes orphelines, orchestrée par un groupe d’enfants, comme un clin d’œil moqueur à notre quête.
 - Regardez ! s’exclama l’un d’eux en agitant une chaussette qui ressemblait étrangement à celle que nous recherchions.
 Mais à notre approche, il s’élança, nous entraînant dans une course-poursuite effrénée à travers ruelles et impasses, notre dignité mise à rude épreuve.
 Au terme de cette folle escapade, nous nous retrouvâmes, essoufflés, face à la grande horloge de Grenelleville, sous le regard amusé de la statue de son fondateur, le Duc de Grenelle. Dubois, avec une pointe d’humour noir, murmura :
 - Peut-être que le vieux Duc a volé notre chaussette pour combler le vide de sa statue éternellement chaussée d’une seule chaussure. 
 Finalement, après maintes péripéties dignes d’un vaudeville, c’est chez M. Pinceau, le peintre excentrique, que nous retrouvâmes la chaussette. Elle servait de guêtre à un mannequin qu’il préparait pour sa prochaine exposition intitulée
 « L’âme solitaire du textile ».
 Avec un soupir de soulagement, et une pointe d’humour qui ne nous quittait jamais, nous avons repris possession de la fameuse chaussette, rendant justice à cette aventure tricotée de fils inattendus au cœur de Grenelleville.

Chapitre 9 Mystère au fond d’une gueule de chat
 La nuit tombait sur Grenelleville, enveloppant ses rues pavées d’un voile d’obscurité que seuls quelques réverbères venaient percer. Le vent faisait danser les rideaux de mon salon, créant des ombres étranges sur les murs. Au milieu de cette atmosphère, le chat empaillé semblait presque vivant, ses yeux en verre scintillant à la lueur des chandelles.
 Dubois, avec un air de dégoût mêlé de curiosité, s’approcha de la créature.
 - Vous savez, dit-il, en caressant du bout des doigts la fourrure rigide de l’animal, c’est étrange, mais je crois que ce chat me regarde vraiment. 
 Je roulais des yeux, amusé par l’hyperbole de Dubois.
 - Et que veut-il te dire, selon toi ? répondis-je avec un ton moqueur.
 Dubois resta silencieux un moment, son regard fixé sur la bouche entrouverte du chat. Puis, avec une lueur d’inspiration, il inséra délicatement deux doigts à l’intérieur.
 - Voilà notre trésor ! s’exclama-t-il en retirant la chaussette manquante.
 La scène aurait pu être tirée d’un tableau surréaliste : deux adultes, dans un salon feutré, éclairé à la chandelle, tenant une chaussette volée extraite de la gueule d’un chat empaillé.
 - Pourquoi diable M. Noire cacherait-il la chaussette ici ? murmurai-je, perplexe.
 Dubois haussa les épaules, un sourire espiègle aux lèvres.
 - Peut-être voulait-il simplement que nous fassions connaissance avec son chat. Après tout, Grenelleville n’est-elle pas une ville où tout est possible ? 
 Je ris de bon cœur, rendant à l’affaire sa dimension comique. Après tout, qui aurait pu imaginer une énigme centrée autour d’une chaussette et d’un chat empaillé ? Seulement à Grenelleville, sans aucun doute.

Chapitre 10 Valse à la lueur des néons
 La ville de Grenelleville, avec ses secrets et ses personnages hauts en couleur, avait cette capacité unique à transformer les événements les plus ordinaires en aventures extraordinaires. Et alors que les lueurs crépusculaires disparaissaient à l’horizon, une autre histoire, tout aussi curieuse, prenait fin.
 M. Noire, homme autrefois imposant et mystérieux, semblait s’être réduit à une ombre. Sous les réverbères de la vieille ville, je le vis un soir, une valise à la main, empruntant le chemin de la gare. Les échos de ses pas semblaient marquer le rythme d’une valse mélancolique, une danse avec sa propre solitude.
 Quant à Dubois, une once de joie retrouvée scintillait dans ses yeux. Dans un élan de célébration, nous nous retrouvâmes au café des Oiseaux Morts. Les lumières tamisées du lieu, mélangées au doux parfum de l’absinthe, créaient une atmosphère d’euphorie contenue. Et sous l’impulsion de Dubois, je me retrouvai à danser sur le comptoir, sous le regard amusé des habitués, éclatant de rire.
 Chaque pas, chaque mouvement, était une affirmation de la victoire de l’absurde sur le quotidien, de la comédie sur la tragédie. Et alors que la musique s’estompait et que la danse s’achevait, je réalisai combien Grenelleville était une ville où chaque histoire, aussi folle soit-elle, méritait d’être racontée.
 Fin… Ou peut-être juste le début d’une autre aventure.
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Défi
D.B



 Dans le monde étrange et mystérieux que nous habitons, un homme se démarquait parmi la multitude – un homme du nom d’Allan. Avec sa prestance irrésistible et son sourire ensorcelant, il incarnait à la perfection l’adage séculaire « L’habit ne fait pas le moine ». Toutefois, sous ce vernis brillant de sophistication se cachait une âme noircie, un démon vêtu de la peau d’un ange.
 Derrière les portes closes de sa demeure somptueuse, à l’abri des regards curieux du monde, il se transformait en un tyran impitoyable. Le silence lourd de la maison était fréquemment déchiré par les éclats de sa voix furieuse, comme le tonnerre qui gronde dans un ciel obscurci. Sa violence était un marteau implacable, pilonnant sans relâche l’esprit et le corps de sa femme, la forgeant en un outil docile à sa volonté tyrannique.
 Sa femme, une silhouette brisée, hantait les couloirs de la maison comme un fantôme. Elle avait tenté de s’évader, de rompre ses chaînes invisibles, mais Allan la ramenait toujours au foyer, comme un chasseur rusé qui attire sa proie avec des appâts doux et prometteurs. Ses paroles demeuraient des murmures de vent, apaisantes et légères, mais elles camouflaient la cruelle vérité de ses intentions. Chaque engagement restait aussi éphémère qu’une feuille emportée par le vent, chaque acte de bonté n’était qu’un masque pour dissimuler sa vraie nature. Au lieu de changer, sa fureur s’enflammait, sa brutalité se nourrissant de sa domination, comme un incendie qui dévore tout sur son passage.
 Mais l’avenir, ce maître implacable du destin, avait prévu des événements qui allaient ébranler les fondations mêmes de son existence dépravée… Des événements qui menaceraient de tout révéler, de tout détruire. La fin approchait, sonnant le glas de sa tyrannie, et la question restait : Allan survivrait-il à la tempête qui s’annonçait ? Ou serait-il englouti par les vagues tumultueuses du changement ? Seul le temps, ce juge impartial, serait en mesure de dévoiler la vérité. Et tandis que l’horloge de la maison égrenait les secondes, la tension montait, créant une atmosphère d’anticipation insoutenable. Il y avait dans l’air un goût de danger, un parfum de peur et d’espoir mêlés, tandis que le prochain acte de cette tragédie macabre se préparait à être joué.
*
 Avec un poids lourd dans ses yeux sombres et une tension électrique dans ses épaules robustes, Allan traversa le seuil de leur demeure opulente, chaque fibre de son être paraissant incarner une tempête grondante, prête à éclater. Il revêtait l’aura d’un prédateur rentrant au bercail, menaçant et imposant.
 La jeune épouse d’Allan, Mandy, sentit immédiatement l’onde de terreur qui émanait de lui, une pression atmosphérique qui semblait annoncer l’orage violent à venir. Un frisson d’angoisse lui parcourut l’échine, mais elle refoula son sentiment d’effroi, tentant de maintenir une apparence de normalité. Elle accourut pour lui enlever son manteau pesant, puis son arme, un révolver noir qui dégageait une promesse mortelle.
 Ce soir-là, elle s’attarda un instant sur l’arme glacée, ses doigts fins tremblant légèrement sous son poids. Elle ne pouvait s’empêcher de se demander si une telle menace létale avait sa place dans leur sanctuaire domestique. Mais aucune parole ne franchit ses lèvres gercées, la peur de déchaîner la fureur d’Allan pesait plus lourd que son inquiétude.
 Allan lui adressa un sourire, un croissant de dents blanches sous des lèvres qui ressemblaient à une cicatrice rougeâtre. Mais derrière ce sourire affable se cachait une lueur sinistre, un reflet sombre qui laissait Mandy perplexe, une mise en garde silencieuse.
 Secouant la tête pour disperser ces pensées tourmentantes, elle étendit la nappe sur la table avec une attention obsessive, chaque geste précis et mesuré. Elle disposait les couverts en argent avec une minutie maniaque, une symétrie presque malsaine qui trahissait son besoin de contrôle sur ce petit fragment de leur vie.
 Retournant à la cuisine, Mandy récupéra le gigot qu’elle avait préparé avec une tendresse presque maternelle, une recette spéciale pour satisfaire les goûts exigeants d’Allan. Chaque bouchée devait être un délice pour lui et chaque saveur, une caresse pour son palais capricieux. Car si elle ne parvenait pas à répondre à ses attentes, elle savait qu’elle serait contrainte d’affronter des conséquences déplaisantes, son mari étant un maître intransigeant du châtiment.
 Au fur et à mesure que la soirée s’installait, le poids de l’incertitude se faisait sentir, une menace qui planait dans l’air, ajoutant à l’atmosphère déjà chargée de tension. Le moindre bruit, le moindre geste semblaient prêts à déclencher l’inévitable tempête, faisant de chaque instant une lutte pour garder l’équilibre sur la corde raide de leur vie tumultueuse.
*
 Alors qu’elle déposait le plat principal sur la table, l’arôme enivrant de la viande rôtie imprégnait l’atmosphère d’une invitation gastronomique à la fois alléchante et inquiétante. L’espace était plongé dans une obscurité presque totale, seulement éclairé par la lumière crépusculaire d’une unique ampoule qui pendait au plafond. Chaque recoin de la maison portait le stigmate d’une organisation obsessionnelle, chaque objet minutieusement disposé, chaque linge plié avec une précision mécanique. Et dans ce silence austère, la maison elle-même semblait prendre la forme d’une extension de l’âme d’Allan : froide, calculatrice et impitoyable.
 Quand Mandy revint de la cuisine, l’odeur de la viande en train de rôtir toujours accrochée à sa robe, elle remarqua immédiatement le comportement d’Allan. Son regard était fixé sur la fourchette, ses yeux la scrutant avec une intensité troublante. Un frisson parcourut son échine tandis qu’elle discernait les prémices d’une colère effrayante dans l’attitude de son mari. La violence qui bouillonnait sous sa surface polie n’était pas nouvelle pour elle – c’était une force qu’Allan libérait, s’abandonnant à sa sauvagerie innée, asseyant sa domination par la terreur.
 Soudain, un sourire énigmatique se dessina sur son visage. Il n’y avait aucune chaleur dans ce sourire, seulement un reflet de la cruauté qui se cachait derrière. Mandy sentit son cœur battre la chamade, le sang fouettant dans ses tempes comme le tambour d’un guerrier avant la bataille.
 — Qu’est-ce que c’est que ça ? demanda-t-il sur un ton qui tranchait l’air, son regard toujours fixé sur la fourchette.
 Une minuscule marque de doigts tachait l’acier inoxydable. Il y eut un moment de silence, un moment suspendu dans le temps, avant qu’Allan ne frappe violemment la table de son poing, faisant frémir les couverts et les verres.
 — De la vaisselle souillée ! s’écria-t-il, les mots jaillissant de sa bouche comme un jet de vapeur brûlante, son visage virant au rouge de la colère.
 La peur faisait trembler Mandy alors qu’elle baissait les yeux, les paupières papillonnant sur des larmes naissantes. Elle savait ce qui allait suivre, la terrible danse de maltraitance et de terreur qui rythmait leur vie conjugale. La crainte envahissait son esprit, chaque fibre de son corps anticipant la douleur à venir.
 Allan se leva de table, les paroles méprisantes s’échappant de ses lèvres comme une avalanche de haine. Chaque mot était un coup de poing dans l’estomac de Mandy, chaque accusation, une lame tranchante qui lui déchirait l’âme. Elle sentait sa propre colère grandir, un raz-de-marée noir et tumultueux qui menaçait de tout emporter sur son passage.
 En se redressant, Allan se mit à tourner autour d’elle comme un requin qui flaire le sang. Ses hurlements retentissaient dans la pièce, sa rage devenait de plus en plus intense, réduisant le courage de Mandy en miettes. Chaque geste intimidant, chaque levée de main faisait monter en elle un sentiment de terreur insupportable. Chaque pas qu’il effectuait vers elle était un pas de plus vers l’inévitable. Elle savait qu’elle ne pouvait pas échapper à la tempête qui s’abattait sur elle.
 Et alors que la violence d’Allan s’intensifiait, la sonnerie stridente de son smartphone l’interrompit. Un appel de ses amis l’invitant à boire un verre. Il s’arrêta, laissant Mandy prostrée, sanglotante et suppliante. Allan rangea son téléphone, saisit sa veste et sortit en claquant la porte.
 Après son départ, Mandy resta là, en larmes, son corps meurtri et sa dignité bafouée. Elle savait qu’elle devait partir, qu’elle devait trouver le courage de fuir cet enfer. Mais pour l’instant, tout ce qu’elle pouvait faire était de survivre, de prendre chaque jour comme il venait, et d’endurer le joug de cet homme violent et cruel.
*
 Au bar, Allan s’enivrait de l’âpre breuvage de la camaraderie toxique. Les heures défilaient, implacables, chaque tic-tac de l’horloge se transformant lors d’une gorgée supplémentaire, de chaque bière, versée et à demi-remplie. Une autre épine sur la couronne de ses péchés. L’ambiance s’en trouvait épaisse, étranglée par la fumée des cigarettes et la lourdeur des conversations noyées dans l’alcool. Autour de lui, les rires sardoniques de ses acolytes résonnaient, tels des échos d’un jugement préfiguré.
*
 Au sortir du bar, Allan errait dans la ville endormie, sa fureur silencieuse montant comme une tempête à l’intérieur de lui. Son pas chancelant faisait écho à la sinuosité de ses pensées, son esprit embrumé par l’ivresse et l’obsession dominatrice. Les sons de la noirceur se fondaient en une symphonie macabre, tandis qu’il s’engageait dans le dédale des ruelles sombres. Il traversait une Venise nocturne et désolée, où les chats miaulaient comme des sirènes et les sans-abri regardaient avec des yeux voilés par la défaite.
 Puis, un vacarme sourd troubla le silence de nuit. Un souffle fantomatique sur la nuque d’Allan, faisant se dresser les poils sur ses bras. Il tourna la tête, mais les ténèbres restaient muettes, se moquant de lui avec leurs ombres insaisissables. Le bruit se répéta, se rapprochant cette fois, comme si une créature invisible avançait vers lui. Un murmure indistinct s’éleva, un chuchotement porté par le vent nocturne. Les mots se formaient et se dissipaient, tels des spectres, effrayant Allan jusqu’au plus profond de son être.
 Enfin, il arriva chez lui, sa silhouette se dessinant sur la façade de sa maison. Il ouvrit la porte avec hâte, se jetant à l’intérieur comme s’il cherchait refuge dans les bras de sa propre brutalité. Mais l’obscurité de son sanctuaire semblait différente, plus menaçante, comme si la maison elle-même avait absorbé l’aura sinistre de l’extérieur. Allan se déplaçait avec une nervosité fébrile, son regard vacillant entre les coins sombres de sa demeure. Ses propres ombres semblaient se moquer de lui, prenant des aspects effrayants pour le tourmenter.
 Tout en essayant de se calmer, Allan ouvrit la porte du réfrigérateur. La lumière aveuglante sembla chasser les ombres, mais une forme indistincte apparut derrière la porte. Allan sursauta, mais en se retournant, il ne trouva rien. Tout paraissait en ordre : chaque objet à sa place, chaque surface impeccablement propre, comme si Mandy avait lavé ses péchés avec son travail méticuleux.
 L’ascension de l’escalier devint un calvaire pour Allan. Chaque pas était un effort titanesque, chaque marche une montagne qu’il devait gravir. Enfin, il atteignit la chambre, où Mandy dormait paisiblement. Allan l’observa un instant, sa colère se métamorphosant en un désir malsain. Sans un mot, il se glissa dans le lit et prit possession de Mandy. Pour lui, c’était un acte de domination, une autre victoire dans son règne tyrannique.
 Cependant, Mandy était loin d’être paisible. Ses yeux demeuraient grands ouverts, ses larmes silencieuses se mêlant à la sueur froide qui perçait sa peau. Dehors, le vent hurlait une litanie funèbre, un présage de ce qui allait suivre. Car dans l’obscurité, une nouvelle épouvante se préparait, une angoisse qui ne connaissait pas la peur d’Allan, une terreur qui allait bientôt frapper à sa porte.
*
 Au lever du jour suivant, Mandy ouvrit ses yeux azur, tâtonnant encore dans la pénombre qui voilait la chambre à l’aube naissante. Les restes de la nuit dernière, parsemés de cauchemars et de souvenirs cruels, laissaient des traces tangibles sur son corps, qui lui semblaient plus une carcasse endolorie qu’un organisme vivant. C’était comme si chaque mouvement, chaque palpitation, n’était qu’une répétition de la souffrance qu’Allan lui avait infligée.
 Doucement, elle se retourna dans le lit, un sentiment de soulagement et d’appréhension se disputant sa tranquillité lorsqu’elle réalisa qu’Allan avait quitté la pièce. Lentement, presque mécaniquement, elle s’extrayait de l’étreinte du lit, chaque mouvement réveillant des douleurs lancinantes qui parcouraient son corps meurtri.
 Avec une haleine profonde, elle se redressa, émettant un soupir presque audible en posant une main protectrice sur son ventre proéminent. En elle, une petite vie innocente bourgeonnait, une petite fille qui, malgré sa non-connaissance du monde extérieur, était déjà témoin de sa mère en détresse. Chaque battement de cœur de la petite créature semblait un signal d’espoir, une promesse silencieuse de bonheur à venir, si seulement elle pouvait échapper à ce cauchemar.
 — Encore deux petits mois, ma douce… et tu seras avec moi, murmura-t-elle tendrement à l’intention de l’innocence à naître.
 Un sourire triste s’est esquissé sur son visage émacié, comme si ces quelques mots lui avaient offert une brève évasion de la dure réalité.
 Avec une prudence exagérée, comme si elle craignait de déclencher un piège à chaque pas, Mandy quitta la chambre. La maison semblait une forteresse abandonnée, un théâtre après la représentation : vide et silencieux, ses recoins sombres dissimulant des secrets dont seuls les murs étaient témoins.
 Elle aperçut alors l’objet de son désir – la chaîne stéréo. C’était un sanctuaire d’Allan, un sanctuaire interdit où elle ne devait jamais mettre les pieds. Mais aujourd’hui, avec Allan absent, elle se sentait attirée par l’appareil comme un papillon vers la lumière.
 Elle glissa ses doigts sur les boutons de l’amplificateur avec une délicatesse presque révérencieuse, son regard émerveillé s’attardant sur la collection de vinyles rangée méticuleusement dans l’armoire adjacente. Ses doigts, tremblants d’excitation et de peur, arpentèrent les albums, sélectionnant avec soin un vinyle dont la pochette lui apparaissait familière : Respect – The Very Best of Aretha Franklin.
 La mise en place du disque sur la platine devenait une opération subtile, presque rituelle, exécutée avec une attention extrême. Un frisson d’anticipation la parcourut lorsque le grésillement précurseur remplit la pièce, bientôt suivi par les premières notes de la chanson.
 Le son d’Aretha Franklin garnissant la maison s’en trouvait un phénomène presque magique. C’était comme si chaque mot, chaque note, demeurait un hymne à la liberté, une protestation silencieuse contre l’injustice qu’elle subissait. Malgré la douleur qui percolait dans chaque fibre de son être, Mandy se laissa emporter par la musique, son corps se dodelinant doucement au rythme de la chanson.
 Toutefois, le bonheur de Mandy fut de courte durée. Comme un spectre surgissant de l’ombre, Allan apparut soudainement, sa présence envahissant la pièce comme une ombre menaçante. Mandy se retourna brusquement – son cœur battant à tout rompre –, et se retrouva face à face avec son mari.
 La violence de la situation explosa comme une bombe à retardement. Allan, avec un rictus sauvage qui déformait son visage autrefois aimé, l’attrapa par les cheveux, les enroulant autour de sa main massive. Il la tira vers l’arrière avec une force brutale qui la fit chanceler, ses pieds luttant contre le plancher inégal. Les bras de Mandy s’élevèrent instinctivement, se positionnant comme des remparts dérisoires entre elle et l’assaut imminent. Cependant, aucun entraînement, aucune préparation mentale, ne pouvait l’apprêter à l’ouragan de violence qui allait se déclencher.
 Comme un animal sauvage, Allan se déchaîna sur elle, ses gifles sonnant dans l’air avec une cadence cauchemardesque. Chaque coup la faisait tournoyer, sa vision devenant un kaléidoscope de douleur et de peur. Et puis vint la ceinture. Dégainée avec une précision terrifiante, elle s’abattit sur sa peau, chaque claquement de cuir accompagné d’un grincement métallique, un écho sinistre à ses cris stridents. Les paroles de la chanson d’Aretha Franklin, une symphonie de force et d’émancipation, continuaient à résonner dans la maison, une parodie grotesque face à la réalité de la violence qui lui était infligée.
 La rage d’Allan grondait, un incendie furieux qui dévorait tout sens du contrôle et de la raison. Dans son esprit dérangé, Mandy lui était redevable, une marionnette destinée à servir ses caprices et ses pulsions destructrices. L’idée qu’elle ait osé déplacer sa précieuse chaîne stéréo était une trahison impardonnable. Sa frénésie, viscérale et inflexible, explosait en un torrent de violence, et Mandy se retrouvait prise dans le chaos sans abri.
 Malgré ses tentatives désespérées de protection, chaque claquement de ceinture devenait un couteau supplémentaire dans son âme déjà écorchée. Les larmes inondaient son visage meurtri, et son esprit vacillait dangereusement entre une douleur aiguë et une terreur glaciale pour le petit être innocent qu’elle portait en elle. Le frisson de sa peur se répercutait à travers son corps, tel un écho sourd à l’assaut incessant.
 Finalement, Allan se stoppa, épuisé de ses propres excès. Il jeta sa ceinture au sol avec un dédain cruel, son souffle haletant remplissant la pièce d’une brume sinistre. Son torse se soulevait et s’abaissait rapidement, une combustion intérieure alimentant la machine de guerre qu’il était devenu. Sans un mot, il tourna le dos à Mandy, la laissant seule au milieu des débris de leur vie commune.
 Mandy resta là, anéantie, se battant pour reprendre le contrôle de sa respiration saccadée. Ses pensées gravitaient en boucle autour d’une idée : l’évasion. Elle devait trouver le courage de fuir, de sortir de ce cauchemar. Pour l’instant, elle ne faisait que pleurer, sa chair lacérée par les assauts de son mari, tout cela à cause d’une simple chanson. Une chanson qui avait représenté autrefois le symbole de ses espoirs, mais qui l’avait finalement conduite à son naufrage.
 Allan, se complaisant dans sa colère assouvie, se replia dans une chaise et s’offrit une bière froide, ignorant presque totalement la femme brisée à ses pieds. L’odeur âcre de l’alcool envahissait l’air, se mêlant aux sanglots étouffés de Mandy. Mais soudainement, une douleur aiguë la transperça, telle une vague déferlante. Elle sentit le liquide chaud s’écouler entre ses jambes et réalisa avec horreur que quelque chose n’allait pas. Elle tendit une main faible vers Allan, implorant son aide. Mais son mari la regardait avec un air vide, comme s’il avait épuisé toute son énergie en infligeant la punition à sa femme.
 Et puis elle vit la tache de sang qui s’étendait entre ses jambes, une fleur pourpre se déployant sur le tissu pâle de sa robe. L’horreur l’envahit, la faisant crier d’effroi, une main portée à sa bouche pour étouffer le hurlement qui lui échappait.
 — Le bébé !
 Allan, sa stupeur dévoilant enfin la gravité de la situation, se précipita vers elle. Il la saisit brutalement, la soulevant comme un sac de pommes de terre, et la transporta jusqu’à la voiture. À l’intérieur du véhicule, Mandy était prise de convulsions, ses cris remplissant l’habitacle d’une symphonie terrifiante de douleur et de peur. Allan, inquiet de ce qu’elle pourrait révéler aux médecins, ne cessait de la presser de fabriquer un récit crédible. Ses menaces se faisaient plus instantes, ses mots venimeux s’infiltrant dans son esprit meurtri.
 — Tu es tombée dans les escaliers ! Tu entends ! Dis-leur que je t’ai touchée, et tu ne reverras jamais ta gamine !
*
 Une fois à l’hôpital, Allan poursuivit sa manœuvre de dissimulation. Il dépeignit une histoire plausible de sa femme ayant trébuché dans les escaliers, élaborant une histoire suffisamment convaincante pour éviter toute suspicion. Cependant, le médecin ne se laissa pas facilement berner. Les marques de brutalité sur le corps de Mandy étaient plus que de raison flagrantes pour être ignorées. Et lorsque Allan quitta prétentieusement la pièce pour aller voir son "enfant", le médecin passa à l’action. Il fit appel à la sécurité et aux services sociaux, alertant des sévices endurés par Mandy.
 Mais Allan, prédateur rusé, avait déjà envisagé cette possibilité. Il savait que les médecins pourraient imaginer à travers ses mensonges, repérer les stigmates de sa violence sur Mandy. C’est pourquoi il avait quitté l’hôpital en catastrophe, prenant la route du retour pour effacer toute trace de ses actes barbares. En tant qu’officier de police, il connaissait parfaitement les rouages du système et les subtilités de la loi. Pourtant, il ne pourrait échapper à la justice inéluctable qui le guettait. Le destin finirait par le rattraper, et Allan devrait répondre de ses actes. Un jour, les ombres viendraient réclamer leur dû.
*
 Vrombissant sur l’asphalte sombre, Allan arriva en trombe à sa résidence, une sombre forteresse d’isolement et de secrets. Il se précipita à l’intérieur, sa silhouette obscure se détachant contre les lumières mourantes de la demeure. Les ombres grimaçaient autour de lui, effrayées par la férocité de son entrée. L’odeur métallique du sang saturait l’air, une signature olfactive de la violence passée. Des éclaboussures écarlates souillaient le sol du salon, contrastant avec le blanc immaculé des carreaux de marbre dans la cuisine. Mais Allan semblait peu affecté par ces traces de son atrocité, son esprit était uniquement focalisé sur leur éradication.
 Cependant, alors qu’il avançait prudemment vers la cuisine, un spectacle d’horreur l’attendait. L’endroit était dévasté, comme si une tornade de violence avait déferlé dans la pièce, balayant tout sur son passage. La porte du réfrigérateur béait, révélant un capharnaüm de nourriture éparpillée sur le sol. Soudain, une assiette se détacha de la pile et vola vers lui, se brisant contre le mur à quelques centimètres de son visage. Allan évita de justesse le projectile, mais le pire restait à venir.
 Comme si un orchestre de l’horreur venait de donner le "la", la vaisselle prit vie, s’envolant vers lui, une pièce après l’autre. Des couverts, des couteaux, des fourchettes, chaque objet métallique tournoyait dans l’air, s’enfonçant dans les murs, créant une cage de terreur autour de lui. Il n’y avait pas de vent, pas de tremblement de terre, seulement une force invisible et maléfique qui se délectait de sa peur croissante. Allan se sentit perdu, chaque objet de la pièce semblant vouloir lui ôter la vie.
 Il recula, tentant désespérément d’échapper à l’étreinte invisible qui l’assaillait. Il trébucha sur un reste de porcelaine, mais réussit à se redresser, laissant derrière lui une traînée de vaisselle fracassée. Les ustensiles poursuivaient leur traque, en volant vers lui comme attirés par un aimant, et Allan réalisa qu’il se trouvait à la merci d’une puissance malveillante et insaisissable.
 Puis, subitement, tout se figea. Le silence retomba, plus assourdissant que le chaos qui l’avait précédé. Allan demeura là, à genoux sur le carrelage froid, entouré de décombres de porcelaine. Il se releva lentement, les jambes tremblantes, un maelström de confusion tournoyant dans son esprit. Il comprit alors que cette force inexplicable était liée à la souffrance qu’il infligeait à Mandy. Un esprit vengeur semblait s’être matérialisé, une entité qui ne lui accorderait aucun répit tant qu’il n’aurait pas payé pour ses crimes.
 Allan ne savait pas comment échapper à cette malédiction, mais une chose était claire : il ne pourrait plus jamais trouver refuge dans cette maison. Rassemblant les lambeaux de son courage, il s’empara de son arme de service qui gisait sur la table et s’enfuit de la maison, sans oser se retourner, sa maison autrefois paisible devenue un théâtre de l’horreur. Le grondement d’une colère surnaturelle retentit derrière lui, une promesse silencieuse de vengeance qui le poursuivrait jusqu’au bout du monde.
 Aussi choqué que s’il venait de subir le coup de poing dévastateur d’un poids lourd, Allan se jeta dans le siège conducteur de sa voiture, une bête d’acier aux lignes acérées et menaçantes, ses feux arrière rouges et sinistres scintillant dans l’obscurité. Son moteur, rugissant comme une créature sauvage à l’agonie, résonnait contre le silence pesant de la nuit. Il s’engouffra alors dans le dédale labyrinthique des routes rurales, qui semblaient s’étendre à l’infini dans un enchevêtrement cauchemardesque.
 Le ciel s’abattit alors sur lui dans un déluge brutal et sauvage. Les gouttes de pluie, grosses comme des perles, se fracassaient contre le pare-brise, transformant le monde extérieur en une peinture impressionniste en mouvement, ses couleurs et formes brouillées et distordues. Les essuie-glaces, se mouvant dans un ballet mécanique endiablé, peinaient à repousser la pluie qui fusait contre le pare-brise, créant un écran d’eau et de confusion. Allan était obligé d’éponger frénétiquement la condensation de l’intérieur du pare-brise avec sa main, un geste aussi futile que désespéré.
 Soudain, dans l’obscurité presque tangible, une silhouette mystérieuse émergea, telle une ombre glissante et insaisissable. Sa forme humanoïde, déformée par la pluie et la pénombre, donnait l’impression d’une apparition surnaturelle surgissant de nulle part. Allan, les yeux écarquillés d’horreur, écrasa les freins avec une force brutale, la voiture se cabrant comme un animal effrayé. Il dévia sur la droite dans un mouvement instinctif, frôlant un chêne centenaire de justesse. Là, au bord de la route, l’abîme l’observant de son vide intimidant, Allan sentit son souffle se suspendre.
 Son regard balaya le rétroviseur, ses yeux s’écarquillant davantage lorsqu’il aperçut la silhouette qui gisait sur la chaussée, aussi inerte qu’une poupée de chiffon. Ignorant la pluie qui s’abattait sur lui, il sortit de la voiture et s’approcha prudemment de la forme. Celle-ci se redressa alors, et Allan ne put retenir un cri muet d’effroi. Devant lui se tenait une silhouette vaguement humaine, vêtue d’une parka longue et sombre, sa capuche rabattue sur un visage que l’obscurité dissimulait.
 — Et toi, Allan, enfin au bout de ta route, gronda une voix qui semblait émaner de l’ombre, une voix rauque et sinistre qui lui glaça le sang.
 Allan, se sentant comme un cerf paralysé par les phares d’un véhicule en approche ne put que regarder, horrifié, la créature qui se tenait devant lui.
 Le monde se rétrécit alors autour de lui, chaque battement de son cœur, un martèlement lugubre dans ses oreilles. Il sentait le souffle putride de la créature lui emplir les narines, son corps rigide de terreur incapable de fuir. Un rictus cruel déformait le visage de l’ombre tandis qu’elle s’approchait de lui, la lueur d’une cruauté surnaturelle dansant dans ses yeux invisibles.
 — Il est temps de payer, Allan, prononça la voix dans un grondement, révélant un sourire aux dents acérées et sinistres.
 Allan pouvait à peine respirer, sa gorge nouée par la peur tandis qu’il se sentait devenir la proie de ce prédateur spectral. Des accusations se déversèrent alors sur lui, chaque mot portant un poids de culpabilité écrasant.
 — Tu as fait du mal à ta femme, Allan. Tu l’as brutalisée, humiliée. Tu as commis des actes irréparables. Tu peux essayer de fuir ta conscience, mais elle te rattrapera, tôt ou tard.
 Et puis, comme sorti d’un cauchemar suffocant, des phares percèrent l’obscurité et un klaxon retentit, éclatant dans la nuit comme une détonation. Allan, sa réalité se brisant en mille morceaux, esquiva de justesse un camion qui émergeait du noir, abandonnant derrière lui une traînée de boue et d’eau. L’eau de pluie, ruisselant sur son visage comme des larmes silencieuses, Allan s’affala sur le bitume froid et humide.
 Sa réalité vacillante l’engloutissait, l’entraînant dans un tourbillon d’incertitudes et de peurs irrationnelles. Mais il était déterminé à ne pas se laisser submerger. Il se releva, chaque muscle de son corps tremblant d’effort, et se tourna vers la forêt qui s’étendait devant lui. Sa destination lui apparaissait clairement à présent.
 — La Caroline du Nord… Je dois quitter cet état et me diriger vers la Caroline, puis le Tennessee, murmura Allan, sa voix chevrotante, mais inflexible.
 Il retourna à sa voiture, le grondement de son moteur brisant le silence de la nuit. Les phares perçaient les ténèbres, illuminant le chemin devant lui. Allan savait qu’il avait une longue route à parcourir, mais il partait paré à la braver. Il demeurait prêt à affronter ses démons, même s’ils apparaissaient plus terrifiants que tout ce qu’il avait jamais imaginé.
*
 Dans la noirceur du crépuscule, la silhouette d’Allan se détachait sur la toile de la nuit, qui avait déjà arboré ses nuances les plus sombres, ses ombres ténébreuses engloutissant le dernier espoir du jour. Il franchit la frontière invisible qui séparait la Virginie de la Caroline, harassé, le poids du voyage gravé de profonds cernes autour de ses yeux – témoins muets de son combat solitaire contre l’asphalte insatiable. Dans cette mer d’obscurité, un phare émergé de nulle part, un panneau lumineux semblait lui sourire avec la promesse d’un refuge pour son corps épuisé.
 Il atteignit enfin l’endroit destiné, un motel qui, malgré son aspect modeste, évoquait un sanctuaire inespéré. Un havre de paix surgissant de la morsure de la nuit. Ses yeux, aimantés par la lueur bleutée et rougeâtre de l’enseigne, s’accrochèrent aux lettres néon scintillantes – "The Last Chance Motel" – comme un cri insonore dans le néant de nuit. Détournant son regard, Allan mena son véhicule fatigué vers le parking, une étendue de gravier aussi déserte qu’un paysage lunaire.
 L’air nocturne restait lourd et humide, une moiteur insidieuse qui s’infiltrait dans chacune de ses fibres, faisant vibrer chaque cellule de son être. S’avançant d’un pas hésitant, Allan se dirigea vers l’accueil, où une femme d’âge vénérable tricotait, perdue dans son silence.
 Elle paraissait sortie d’une autre époque, son visage marqué par les stigmates de l’âge et de l’histoire. Ses traits avaient la délicatesse d’une apparition mystique, spectrale. Elle oscillait doucement dans un rocking-chair antique, son tricot harmonieux dictant le rythme de ses mouvements, comme une mélodie taciturne.
 — Je voudrais une chambre, déclara Allan, la lassitude pesant dans sa voix.
Il déposa un billet de cent dollars sur le comptoir, dont la surface dorée semblait attirer la lumière ambiante. La vieille femme, arrêtant le mouvement hypnotique de son tricot, leva lentement la tête et fixa Allan de son regard perçant.
 — Douche ou baignoire ? murmura-t-elle, sa voix ressemblant à un écho venu d’une éternité lointaine.
 Allan dressa la tête, acquiesçant presque par réflexe.
 — Peu importe… Une baignoire fera l’affaire, répliqua-t-il.
 — Avec ou sans climatisation ? poursuivit-elle, son visage de marbre demeurant impassible.
 L’interrogatoire inattendu fit froncer les sourcils à Allan, qui sentait monter en lui une vague d’irritation.
 — Avec…, répondit-il, une pointe d’exaspération perçant dans sa voix.
 La femme continua, imperturbable.
 — Avec ou sans chaînes numériques ?
 L’insistance de la vieille femme, sa voix glaciale, provoqua une bourrasque de colère chez Allan. Pourquoi ces détails insignifiants ? Pourquoi cet interrogatoire sans fin ? Il avait besoin de paix, d’un refuge dans le sommeil, loin des peurs et des menaces de la Virginie.
 — Vous savez quoi… Donnez-moi tout, finissons-en, déclara Allan, son ton trahissant une exaspération grandissante.
 Sans un mot, la vieille femme se retourna, saisit une clé sur un tableau poussiéreux et la déposa devant Allan.
 — La numéro six, au fond, à droite, dit-elle avant de revenir à son tricot, comme si la conversation n’avait jamais eu lieu.
 Allan s’empara de la clé et se dirigea vers sa chambre, laissant derrière lui l’accueil figé dans le temps et l’aura glaciale de la vieille femme. Il se demanda pourquoi ce motel portait ce nom inquiétant, "The Last Chance". Quelle était cette ultime chance qu’il était supposé saisir ?
 Allan secoua la tête, chassant ces pensées troublantes. Il repoussa les images d’une silhouette mystérieuse qui hantait la route, et se concentra sur sa chambre. La porte grinça en s’ouvrant, révélant une pièce spacieuse, plongée dans une pénombre douillette. Le mobilier, bien que daté, était soigneusement entretenu et les couleurs ternes ajoutaient au charme suranné de la pièce. Tout autour de lui, il pouvait sentir une présence, une histoire ancienne, mais toujours vivante. La chambre semblait respirer un passé oublié, un passé qui murmure des secrets dans le silence de la nuit. Allan se tenait là, aux portes de l’inconnu, ne se doutant pas encore des étranges événements qui l’attendaient dans "The Last Chance Motel".
*
 En fouillant les profondeurs du zapping, Allan était d’abord apaisé de constater que son histoire avec Mandy ne s’était pas transformée en un épisode sensationnel de nouvelle de la nuit. Il n’était pas le scandale du jour, ni même une note de bas de page dans le carnet sombre des faits divers. Un sourire ironique éclaira son visage. Il exhala un soupir de soulagement sarcastique. Puis, son regard s’inclina vers la salle de bain. Le miroir, couvert d’une fine brume, renvoyait l’image d’une femme. Elle portait une robe blanche translucide, ses cheveux noirs comme de l’encre tombaient en cascades sur ses épaules pâles. Elle semblait flotter en apesanteur, les pieds nus, légèrement au-dessus du sol, le visage pétrifié dans une expression dénuée de vie, d’émotions. Ses yeux vides, éteints, la rendaient encore plus inquiétante. Elle ressemblait à une marionnette dans les mains invisibles d’un manipulateur démentiel. Allan – le cœur battant à tout rompre – recula instinctivement, submergé par une vague glaciale de peur.
 — Qui es-tu ? demanda-t-il, la voix à peine audible.
 Mais l’apparition ne bougea pas, suspendue en l’air comme une image figée dans un rêve sinistre. Soudain, le téléviseur crépita, l’écran s’illuminant d’une lueur fantomatique. Les premières notes de l’hymne légendaire d’Aretha Franklin, « R.E.S.P.E.C.T », résonnèrent dans la chambre. À cet instant, la silhouette spectrale sembla prendre vie. Ses membres se mirent à se tordre et à se convulser dans une danse grotesque, son corps semblant déchiré par des spasmes surnaturels. Ses yeux vides se teintèrent d’un rouge sanglant, comme si une flamme infernale s’était allumée au plus profond de son âme. Allan était pétrifié, hypnotisé par ce spectacle macabre. Il se sentait comme un rat pris au piège dans un cauchemar qui refusait de le laisser se réveiller.
 Puis, aussi soudainement qu’elle avait commencé, la danse effroyable s’arrêta. La femme tourna lentement la tête vers Allan. Sa bouche, grande ouverte comme une blessure béante, laissa échapper une voix rauque, stridente :
 — Allan, tu vas payer pour tes fautes.
 Un éclair de réalisation traversa Allan. Les tortures qu’il avait infligées à Mandy, ses péchés passés, revenaient vers lui, comme un boomerang vengeur sorti des ténèbres. Son instinct lui criait de fuir, de courir loin de cette chambre devenue un mausolée hanté, mais ses jambes refusaient d’obéir. Il était immobilisé, comme un animal pris dans les phares d’une voiture. La femme flottante s’approcha de lui lentement. Allan recula jusqu’à ce que son dos heurte le mur. Il était piégé, sans échappatoire. Alors que son visage se déformait en une grimace de pure terreur, la femme continua à avancer, puis s’évapora dans l’air, laissant Allan, seul dans la chambre, secoué jusqu’à l’os. Il réalisa alors que la fuite n’était plus une option. Quelque chose, ou plutôt quelqu’un était après lui, et il allait devoir affronter ses peurs.
 Épuisé, mais résolu, Allan décida de quitter la sécurité relative de sa chambre pour explorer le motel, dans l’espoir de trouver des réponses à cet imbroglio cauchemardesque. Les couloirs obscurs et décrépis du motel apparaissaient déserts, l’éclairage vacillant des néons peinant à percer la noirceur étouffante. Le silence pesait lourdement sur lui, comme une chape de plomb. Arrivé devant une porte entrebâillée, il s’arrêta, intrigué par la faible clarté qui s’en échappait. Il s’approcha avec précaution – le cœur battant la chamade –, et jeta un coup d’œil à l’intérieur.
 Il vit un homme assis à une table, vêtu d’un costume sombre et austère, son visage pâle, éclairé par la lueur d’une unique lampe de chevet. L’homme leva les yeux vers Allan, révélant des globes oculaires injectés de sang, qui brillaient d’une lueur menaçante dans la pénombre de la pièce.
 — Bonsoir, Allan, murmura-t-il d’une voix caverneuse.
 Une onde de peur parcourut Allan. Comment cet homme connaissait-il son nom ? Qui était-il ? Comment était-il arrivé ici ?
 — Qui êtes-vous ? demanda-t-il, la voix tremblante.
 — Je suis le gardien des erreurs, répondit l’homme. Et toi, Allan, tu es ici pour une raison. Tu as de lourdes dettes karmiques à solder.
 Allan comprit le message. Cela avait quelque chose à voir avec Mandy, avec le tourment qu’il lui avait infligé. Il commença à reculer lentement, mais l’homme se leva, lui bloquant le passage.
 — Tu ne peux pas partir, Allan. Tu dois rester ici et affronter ta culpabilité.
 Une vague d’angoisse submergea Allan, l’envahissant de tous côtés comme une marée déchaînée. Il se mit à courir, dévalant les couloirs labyrinthiques du motel, poursuivi par le son sinistre des pas de l’homme. Mais alors qu’il atteignait la sortie, la femme apparut à nouveau devant lui, suspendue en l’air comme un spectre vengeur.
 — Il est temps de payer ta dette, Allan, gronda-t-elle d’une voix rauque.
 Allan se sentait pris au piège, entre le marteau et l’enclume. Il n’y avait nulle part où aller, nulle part où se cacher. Il réalisa qu’il allait devoir affronter ses peurs, affronter les démons qui rôdaient dans les coins les plus sombres de son âme. Il se retourna pour faire face à la femme et à l’homme, et poussa un cri de frayeur.
 — La… la Dame Blanche, bégaya Allan, la terreur le submergeant.
 Malgré son angoisse, Allan se rua vers eux, essayant désespérément de les frapper avec ses poings, mais ses coups passaient à travers eux comme s’ils étaient faits d’air. Ils ne bougeaient pas, comme s’ils étaient de simples spectateurs de sa peur et de son désarroi. La femme flottante continuait à le fixer de ses yeux vides et sans âme, tandis que l’homme le suivait du regard, un sourire cruel se dessinant sur ses lèvres.
 En désespoir de cause, Allan recula, cherchant désespérément une sortie. Mais chaque fois qu’il essayait de s’enfuir, il se retrouvait face à face avec la femme ou l’homme. Finalement, il trébucha et s’écroula au sol, se débattant pour essayer de s’éloigner d’eux. Mais il sentit une main froide se saisir de sa cheville, le clouant sur place. La femme flottante se pencha sur lui, ses cheveux noirs tombant sur son visage inexpressif. Elle ouvrit la bouche et une voix rauque et glaciale en sortit :
 — Tu vas payer pour tes péchés, Allan. Tu vas souffrir comme tu as fait souffrir Mandy.
 Une douleur aiguë perça le bras d’Allan, puis se propagea dans sa poitrine. Il avait l’impression de se noyer, de plonger dans un abîme de tourment et de terreur. Il essaya de se débattre, de se libérer de leur emprise, mais c’était comme lutter contre une tempête. Finalement, il sombra dans l’inconscience, laissant derrière lui les deux formes de spectres qui l’avaient condamné à une éternité de souffrance.
*
 Dès qu’il recouvra ses esprits, Allan s’est trouvé étendu sur l’épais tapis aux motifs répétitifs et décolorés de sa chambre du motel. Il était isolé, confronté à un profond scepticisme concernant la matérialité des incidents terrifiants qui venaient de se produire. Le souvenir d’un cauchemar pouvait-il hanter le monde réel avec une telle vérité frappante ? Ou avait-il vraiment été la cible de fantômes vengeurs, échappés d’un monde où ils étaient condamnés à errer ?
 Aucune réponse précise ne se profilait à l’horizon de ses interrogations, mais une douleur latente, pernicieuse comme une brume toxique, envahissait son bras. Remontant lentement la manche de sa chemise, il découvrait une marque écarlate sur sa peau, qui avait l’air d’être gravée par une main glaciale. Allan frissonna, un frisson répugnant se propageant dans son corps comme une traînée de poudre. En s’élevant avec une prudence calculée, il traversa la pièce pour se diriger vers la salle de bain, pour affronter son reflet dans le miroir.
S on teint présentait l’aspect cireux de la lune un soir nuageux, les cernes violets sous ses yeux trahissant une fatigue abyssale, presque tangible. Aspergeant son visage d’eau fraîche, il cherchait à rafraîchir son esprit et à bannir les apparitions cauchemardesques qui tourbillonnaient dans son imagination, un orage de terreur insoutenable. Il se sentait comme un fugitif dans son propre esprit, condamné à un destin funeste qui semblait inévitable.
 Peu de temps après, Allan se retrouva immergé dans l’océan apaisant de son bain, bercé par la chaleur réconfortante de l’eau et son toucher doux comme le velours sur sa peau. Il s’abandonnait à cet instant d’évasion, ses pensées planant vers des horizons plus calmes et paisibles. Cependant, ce sentiment de tranquillité fut brutalement interrompu par une brise glaçante qui traversa son corps, déclenchant une alarme dans son esprit. Allan sentit à nouveau la présence persistante d’une ombre malveillante qui semblait se rapprocher inexorablement.
 Il ouvrit les yeux et, envoûté par une terreur insoutenable, il vit la femme sans yeux flottant au-dessus de lui, un spectre macabre à la chevelure aussi noire que le jais. Sa chevelure d’ébène tombait en cascade sur les épaules d’Allan, et son visage blafard se tordait en une grimace digne des pires cauchemars.
 Allan se retrouva cloué au fond de son bain par une horreur paralysante, tandis que la Dame Blanche s’approchait de plus en plus, siphonnant la vitalité hors de lui par sa bouche béante et monstrueuse. Allan ressentit une douleur si intense qu’elle semblait traverser chaque fibre de son être, sa peau vieillissant à un rythme effrayant sous l’influence de la Dame Blanche. Sa respiration devint plus laborieuse, chaque souffle devenant un combat, alors que sa vie était peu à peu dérobée par cette force implacable.
 Et puis, tout à coup, tout s’arrêta. Les ombres se dissipèrent et la chambre du motel redevint vide, comme si elle avait été débarrassée de toute présence. Un silence de mort s’abattit sur la pièce, un silence aussi tranchant que le cristal. La porte de la salle de bain se referma avec une lenteur éternelle, suivie de celle de la chambre, emprisonnant Allan avec ses démons internes. L’extérieur du motel s’était métamorphosé en un marais de boue collante et gluante, enfermant la voiture d’Allan dans un étau mortel. Et puis, tout disparut… comme si rien n’avait jamais existé, pas même Allan.
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