Je suis dehors sur ma terrasse, le soleil tape avec un peu de fraîcheur. Les oiseaux chantent et donnent un semblant de printemps. Les lézards se faufilent. Je cherche une échappatoire et je veux rester dans ma bulle. Je me réfugie avec mes mots, oublier mes soucis qui entravent mon bien-être. certaines personnes ont mis des mots sur la véritable personnalité. Cela remet tout en question dans ma tête ou je prends conscience d'une vérité si évidente.
J'ai toujours cherché à être impeccable, sans l'ombre d'une faute sur moi, ni dans les écrits, ni dans mon comportement. J'accepte mal si l'une se glisse entre elle et moi. La perfection n'existe pas. J'ai eu un père si froid d'apparence, imperméable et si peu démonstratrif, il était toujours là pour me protéger, me défendre et me soutenir. Il a été présent dans ma vie et pourtant pendant les quinze premières années de ma vie, c'était un silence pesant. Je n'arrivais pas à communiquer avec lui. C'était pareil avec ses autres protégénitures. J'étais la dernière et j'ai gardé cette âme de petite fille qui regarde son père avec tendresse. Je sais qu'il m'aimait, mais je n'ai jamais dit " Je t'aime "et lui non plus. Cette pudeur entre nous est si paralysante que les mots ne sortent.
J'ai pris de toi avec un mélange de maman.
Tu nous a quitté par une belle journée de printemps comme celle-ci. Ta vie s'est terminée à l'hôpital paraplégique, je n'étais pas à tes côtés. Mais la veille, je t'ai vu et tu as tenu ma main. Je n'imaginais pas que je te voyais pour la dernière fois.
Une semaine plutôt, je j'entendais au téléphone et une heure après, tu partais à l'hôpital en urgence. Tu faisais un AVC, avec une hémorragie cérébrale.
Ta mort me laissa sans voix, je perdais mon protecteur. Tu ne m'as pas abandonné, tu étais présent même si je ne te voyais pas. Tu me donnais de la force pour tenir, tu comptais sur moi.
Je devais m'occuper de maman et je n'existais plus pour moi-même.
Ma vie n'a plus été la même, j'ai décidé de vivre que pour elle. Cela m'a demandé beaucoup de sacrifices qui finissent par m'étouffer. Une partie de moi est morte et une autre naquit. J'étais plus forte qu'avant, même si je connaissais des moments d'abattements. La lourde tâche qui tombait sur mes épaules, finalement me pèse un plus chaque jour. Depuis treize ans, je dois affronter un quotidien de frustrations.
J'ai faim de pâtisseries, de fruits de mer, de viandes rouges. Emprisonnée et reclus dans un destin que je ne présageais pas, je gâche mon existence dans mon dévouement pour elle. Je ne vis plus depuis le 20 mars 2006.